La monobromation sélective des diphosphines

La monobromation sélective des diphosphines

Les iminophosphoranes s’illustrent surtout comme des ligands des métaux durs mais sont en général d’assez mauvais ligands des métaux riches. Or ce sont précisément ces derniers métaux qui sont les plus exploités et les plus efficaces dans certains processus catalytiques. C’est pourquoi, l’utilisation des iminophosphoranes pour ces catalyses nécessite de les incorporer dans des ligands multidentes avec d’autres groupements pour assister la coordination. Sachant que les phosphines sont de très bons ligands des métaux mous, l’association d’un donneur phosphine et d’un donneur plus dur comme les iminophosphoranes ouvre une classe de ligands ambiphiles qui sont à priori capables de coordiner à la fois des métaux durs et des métaux mous. D’autres ligands mixtes dur~mou tels que les imine~phosphine ont été étudiés de manière approfondie et ont prouvé indiscutablement leur intérêt en catalyse. 1,2L’exemple le plus frappant de ce succès est le ligand phosphine-oxazoline développé par Helmchen et Pfaltz qui a trouvé de nombreuses applications en catalyse énantiosélective. 3Plus précisément, ce ligand bidente incorporé dans un complexe de palladium donne d’excellentes régio et énantio sélectivités dans la réaction de substitution nucléophile allylique.

En ce qui concerne les ligands mixtes phosphine~iminophosphoranes, il existe peu d’exemples de tels ligands et encore moins sont exploités catalyse. En effet, une première synthèse exploitant la réaction d’aza-Mitsunobu a été décrite en 1982 par Bittner et al. Cette stratégie de synthèse de ligands mixtes dérivés de la diphosphine DPPM (bis(diphénylphosphino)méthane) présentait deux inconvénients majeurs, de faibles rendements et une limitation des schémas de substitutions de l’iminophosphorane aux groupements électroattracteurs : amide, sulfone, nitrile .

Une autre approche proposée par Cavell et ses collaborateurs repose sur la réaction de Staudinger et permet d’obtenir des mixtes P~N avec d’excellents rendements. Néanmoins, les azides exploitables pour introduire la fonctionnalité iminophosphorane sont limités .

Enfin, plus récemment Cadierno et ses collaborateurs ont exploré l’aptitude des complexes de ruthénium incorporant les mixtes phosphine~iminophosphoranes à catalyser la réaction de transfert d’hydrure sur les cétones.

A notre connaissance, aucune version chirale n’a été développée pour des mixtes phosphine~iminophosphorane probablement à cause de la méthologie de synthèse employée (réaction de Staudinger) pour fonctionnaliser les diphosphines. L’objectif de notre travail était par conséquent de construire des voies d’accès simples – cʹest-à-dire n’excédant pas deux ou trois étapes de synthèse – et souples pour nous permettre de modifier à façon les groupements portés par l’azote de la fonction iminophosphorane. La réaction de Kirsanov qui utilise des amines primaires pour introduire la fonction iminophosphorane semble être la méthode de choix pour répondre au cahier des charges établi précédemment.

Mise au point de la monobromation : le problème de la dismutation 

Ayant choisi d’exploiter la méthode de Kirsanov pour synthétiser les ligands P~N à partir d’une diphosphine symétrique, on comprend immédiatement que la première difficulté d’une telle approche sera de bromer sélectivement une seule des deux phosphines et d’éviter le mélange des produits de mono et de bis bromation. Ce problème a été résolu en opérant à basse température et en additionnant lentement le dibrome à une solution de la diphosphine dans le dichlorométhane. Le mélange réactionnel ne doit en aucun cas rester à basse température car le dibrome est très peu soluble dans le dichlorométhane à -78°C. Le retour progressif à température ambiante est indispensable pour assurer le succès de cette étape.

Du fait de sa sensibilité à l’hydrolyse, l’adduit monobromé I-1 n’est jamais isolé mais sa formation est contrôlé par RMN P. Il est caractérisé par un système AX à -22.8 ppm (2JPP= 84.0 Hz) et +58.5 ppm correspondant respectivement à la phosphine et au bromophosphonium. On constate que la méthode mise au point permet d’obtenir moins de 5% d’adduit bis bromé I-2 (δ 48 ppm en RMN P).

Dismutation

Ayant obtenu proprement l’adduit I-1, nous avons envisagé son piégeage par une amine primaire en vue d’obtenir les sels d’aminophosphonium correspondants. La réaction de I-1 avec différentes amines primaires en présence de triéthylamine pour piéger l’acide bromhydrique (libéré suite à la substitution nucléophile), ne donne pas le sel d’aminophosphonium escompté mais un mélange quasi équimolaire de DPPM de départ et d’adduit bis bromé I-2. Globalement tout se passe comme si le monobromé I-1 dismutait  . Quelles que soient la nature de l’amine primaire ou les conditions opératoires de dilution et de température, nous ne sommes pas parvenu à éviter le phénomène de dismutation.

Face à ce problème de dismutation, nous avons également fait varier la nature de l’amine tertiaire servant de piège à l’acide bromhydrique : pyridine, (2,2’)-bipyridine, triphénylamine, (N,N)- diméthylbenzylamine, diméthylaminopyridine, N-méthylimidazole, mais sans plus de succès. Sachant que les bromophosphoniums sont plus réactifs que leurs analogues chlorés, nous avons tenté de faire la chloration et non la bromation de la DPPM. Pour cela différents agents de chloration tels que PCl5, CCl4 ou C2Cl6 ont été employés, conduisant la plupart du temps à des mélanges de produits dont ceux issus de la rupture de la liaison P-C du pont méthylénique (Ph2PCl mis en évidence en RMN 31P à δ 82 ppm).

Une dernière alternative a consisté à utiliser l’amine primaire à la fois comme nucléophile et comme base (piège du HBr), ie à additionner deux équivalents d’amines à l’adduit bromé. Cette dernière approche a été la plus fructueuse puisque nous avons pu pour la première fois isoler et identifier des ligands mixtes phosphine~aminophosphonium dérivés de l’aniline et de la benzylamine.

Malheureusement, cette méthode n’a pas permis d’accéder aux dérivés aliphatiques ou chiraux puisque le phénomène de dismutation redevenait majoritaire dans ces cas là. La différence majeure entre les amines aromatiques (ou benzyliques) et les aliphatiques réside dans la précipitation du bromure d’ammonium résultant du piégeage de HBr, du milieu réactionnel. Or, la dismutation n’est observée que lorsque ce sel d’ammonium reste soluble dans le dichlorométhane. Nous avons donc supposé qu’il fallait un piège pour HBr dont le produit résultant précipiterait du milieu réactionnel pour s’affranchir de la dismutation de l’intermédiaire bromé. Parmi les différentes amines tertiaires testées auparavant, aucune n’a de sel d’ammonium insoluble au dichlorométhane. Nous avons trouvé que la diamine diazabicyclooctane (DABCO) doublement protonée donne un bis sel d’ammonium très peu soluble dans le dichlorométhane. Cette diamine additionnée en même temps que l’amine primaire, nous a permis d’isoler avec des rendements satisfaisants à bons les mixtes P~N y compris pour les versions aliphatiques et chirales. Ceci confirme que le sel d’ammonium, sous-produit de cette synthèse, est responsable de la dismutation de l’adduit monobromé.

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Table des matières

Introduction
I- Synthèse des iminophosphoranes
I-1- Méthode de Staudinger
I-2- Méthode de Kirsanov
I-3- Autres synthèses
II- Etude des propriétés des iminophosphoranes
II-1- Propriétés physiques et chimiques
II-2- Réactivité
II-3- Description électronique d’un iminophosphorane
III- Présentation des objectifs de ce travail de thèse
Bibliographie
Chapitre 1 : La monobromation sélective des diphosphines
I- Introduction
II- Mise au point de la monobromation : le problème de la dismutation
II-1- Dismutation
II-2- Bilan
II-3- Propriétés des sels phosphine~aminophosphoniums
II-4- Extension aux tridentes
III- Coordination : groupes 8, 9 et 10
III-1- Groupe 10
III-2- Groupe 9
III-3- Groupe 8 : Ruthénium
IV- Conclusion et perspectives
Bibliographie
Chapitre 2 : Fonctionnalisation d’iminophosphoranes Ph3P=NR par activation CH.
I- Activation par lithiation assistée par un iminophosphorane
I-1-Echec de la stratégie de monobromation sélective
I-2- Synthèse des mixtes P~N par métallation de l’imino-P,P,P-triphénylphosphorane (ou triphénylphosphinimine).
II- Activation CH intramoléculaire par addition oxydante
II-1- Fonctionnalisation d’un iminophosphorane dérivé de la 8-aminoquinoline
II-2- Coordination à l’iridium (+I)
III- Conclusion et perspectives
Bibliographie
Chapitre 3 : Utilisation des ligands mixtes phosphine~iminophosphorane en catalyse
I- Introduction
II- Couplage croisé de Suzuki-Miyaura
II-1- Principe général
II-2- Les ligands mixtes phosphine~iminophosphorane en couplage croisé
III- Transfert d’hydrure sur les cétones : isolation d’un intermédiaire Hydruro-amido de ruthénium
IV- Conclusion et perspectives
Bibliographie
Chapitre 4 : Etude de l’oxydation d’iminophosphoranes et de complexes à base d’iminophosphoranes
I- Introduction
II- Brefs rappels sur la RPE
II-1- Principe : 1-3
II-2- Mécanismes du couplage hyperfin
II-3- Le mot de la fin
III- Oxydation des ligands
III-1- Iminophosphorane : mise en évidence de la dimérisation par RPE
III-2- Bis iminophosphoranes
VI- Complexe de ruthénium incorporant un ligand mixte PN : Quantification des propriétés de donation des ligands iminophosphoranes sur les centres métalliques
VI-1- Synthèse et caractérisation du complexe de ruthénium
VI-2- Etude en RPE du produit d’oxydation
V- Conclusion et perspectives
Bibliographie
Conclusion 

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