La médiation musicale en psychomotricité

DÉFINITION DE L’OBJET MUSICAL

Dans ce mémoire, nous nous intéresserons à l’objet dans sa nature musicale. Que  peut bien recouvrir le concept d’objet ? Selon ses propriétés ou ses caractéristiques physiques peut-on le considérer comme vivant ? A-t-il, à ce titre, une valeur uniquement fonctionnelle ou utilitaire ? À partir de quels critères pourrions-nous qualifier cet objet de « musical » ? L’objet a une fonction relationnelle puisqu’il implique la sensorialité du sujet. Il n’est pas non plus à aborder seulement dans son aspect matériel et concret : il se pense, se rêve et génère de l’affect. Remarquons aussi que ce terme n’exclut pas les êtres vivants : en psychanalyse on évoque d’ailleurs la mère comme premier objet d’amour. À première vue, un objet musical aurait la particularité de produire des sons ou de la musique*. Qualifier quelque chose de musical est subjectif, et dépend des représentations de chacun. Pour A. ARBO, musicologue et maître de conférence à Strasbourg, la perception musicale est aspectuelle et dépend d’un système de relation avec la culture musicale et le symbolisme. J. M. CAGE par exemple, personnage fort de la musique contemporaine expérimentale, intègre naturellement à sa musique ce qui pourrait être perçu comme des « bruits ». Il place différents éléments sur les cordes du piano pour produire un son unique naissant de plusieurs composants et possédant ses propres caractéristiques. THE KIDOODLERS et G. BRYARS utilisent, eux, presque essentiellement des jouets pour créer leurs musiques. Même L. MOZART, père de W. A. MOZART, se prête à cet exercice dans La symphonie des jouets .

Du sonore au musical 

Définitions
L’objet sonore est un artefact qui n’est pas forcément créé dans le but de « faire de la musique ». Pourtant, il est possible de le détourner de sa fonction première et de l’utiliser comme objet musical.

Le sonore
L’objet, de par sa nature sonore, est source de nombreuses stimulations auditives et psychocorporelles. Selon A. DE BROCA, il va surtout activer l’hémisphère droit concernant la créativité, l’imaginaire, la sensibilité musicale, le rythme, la pensée intuitive, synthétique et visuo-spatiale et enfin l’association d’idées. Un objet sonore suscite aussi l’intérêt par son matériau de fabrication, sa texture, sa forme, sa couleur, son origine, son rapport au symbolisme et ses spécificités sensorimotrices. En psychomotricité, nous recherchons l’investissement psychocorporel de l’objet, d’où l’intérêt de travailler avec l’objet musical.

Le musical
Il me semble qu’un objet devient musical dès que la production sonore est réfléchie à moindre mesure, contrôlée et dirigée vers un but. L’intellectualisation de la musique, son analyse et sa composition stimuleront l’hémisphère gauche, pratique, relationnel, siège du langage verbal et de la pensée déductive et précise . Il existe ensuite différents niveaux de  maîtrise musicale.

La vibration sonore 

Toute production sonore est en réalité une vibration physique captée principalement par l’ouïe. La vibration sonore peut être ressentie dans tout le corps, au niveau extéroceptif (ouïe, cutané), viscéral et proprioceptif. Selon la théorie quantique des champs, le vide est en réalité plein de vibrations.

À bon entendeur
L’oreille* est un organe sensitif périphérique de l’audition, intervenant dans la réception d’informations vibratoires du corps propre* ou de l’environnement, et dans leur transduction en potentiels d’action dirigés jusqu’au cortex. Elle joue un rôle dans la régulation de l’équilibre tonicopostural et dans l’audition, puis après intégration centrale, dans la mémoire auditive, la boucle audiophonatoire et la stimulation proprioceptive à l’écoute de la voix des autres ou des instruments .

L’impact physiologique dans la thérapie
La vibration a de nombreuses qualités dans son utilisation psychomotrice. Elle ne stimule pas uniquement le sens auditif, elle offre une multitude de sensations très diverses comme la chaleur, le frais, les fourmillements, le creux, le plein . La vibration des percussions* instrumentales atteint la surface de la peau* et les organes internes . Lorsque nous émettons des sons vocaux, elle se déplace dans le corps par transmission osseuse et agit aussi sur les parties corporelles molles . Sous l’eau, le chant génère une vibration très  puissante, ressentie par les masses profondes du corps et fait résonner le squelette* et les organes .

Selon C. POTEL, les vibrations sonores, au cours de la relaxation, aident à la détente . Les éléments vibratoires calment l’enfant et l’équilibrent dans sa tonicité . Pour  A. D. FRÖHLICH, les perceptions vibratoires, somatiques et vestibulaires favorisent la communication des enfants polyhandicapés. On comprend leur intérêt dans la thérapie multisensorielle et le snoezelen.

La vibration entraine une mémoire du mouvement dans les membres. En créant des sensations vibratoires, un patient immobilisé peut récupérer 80% de ses facultés et conserver une image mentale du mouvement .  La vibration persiste dans le temps. Il est possible d’en ressentir les nuances, de la situer dans le corps, d’analyser sa provenance. Puisqu’elle stimule les sensorialités externes et internes, elle joue un rôle important dans la sensation d’un dedans et d’un dehors du corps.

LA MUSIQUE ENREGISTRÉE

L’objet musical peut être également un médiateur qui diffuse de la musique enregistrée. Grâce aux procédés électroniques d’aujourd’hui, il est possible d’écouter de la musique en tout temps et en tout lieu, via différents supports. Il est aussi d’usage d’intégrer la musique enregistrée dans les films, les jeux vidéo, les lieux publics. Le champ des possibles s’en élargit considérablement. Quelles sont les limites de l’enregistrement sonore ? Quel effet ce phénomène a-t-il au niveau psychomoteur et sur le plan de l’identité individuelle? La musique enregistrée, en psychomotricité, présente l’avantage de pouvoir être préparée à l’avance et ciblée, afin d’évoquer une ambiance particulière ou de créer un environnement sonore aléatoire. Elle stimule l’expressivité, les fonctions d’analyse spatiotemporelle et éveille la sensorimotricité. Décrivons quelques-uns des intérêts de la musique enregistrée en psychomotricité.

Les comptines
Selon A. PIJULET, l’écoute musicale est active (jeu, association de geste et caetera) et permet de travailler la différenciation des paramètres du son , pour développer les capacités d’écoute, d’attention, de concentration et de mémorisation. Les comptines, par exemple, étoffent les connaissances du schéma corporel* via des afférences sensitives, kinesthésiques et proprioceptives. La comptine pose la question du rythme, du son et du geste, dans une dimension culturelle propre. Elle a un vrai rôle dans l’intégration du groupe et dans la socialisation, favorisant l’attention réciproque . Elle agit au niveau des  coordinations globales et fines, de la régulation du tonus musculaire*, de l’acquisition des notions spatiales et rythmiques, mais aussi du langage verbal et de l’expression des émotions.

Le fœtus entend déjà à travers l’enveloppe amniotique des musiques écoutées par sa mère ou autres chansons enregistrées. Il s’imprègne de l’intonation et de sensations diverses (par la transmission osseuse du son par exemple) . À la naissance, ce répertoire  constitue une base intime de représentations ancrées dans la mémoire. Il peut être prudent de prêter attention à l’éthique des paroles des chansons utilisées, dans le but d’éviter les réactions affectivo-émotionnelles.

La musique électronique 

Depuis l’avancée des techniques électroniques, il est possible de transformer les modalités du son . Nous savons tous que le cri du dinosaure n’a jamais été enregistré,  pourtant les imitations et reproductions nous embarquent dans un imaginaire aux sonorités bouleversantes bien au-delà du réel. Le support technologique devient objet musical. Peu documentée en matière de musique électronique, je m’appuie sur mes propres expériences musicales. Il est vrai que cette modalité musicale a l’avantage, au même titre que le métronome, de maintenir un tempo* d’une extrême régularité et ne subissant pas l’erreur humaine. Ce style, souvent très répétitif, amène parfois dans des états similaires à la transe. Le volume sonore peut être monté à son paroxysme (ou diminué à l’extrême) grâce aux enceintes de haute technologie multipliables à l’infini, qui surpassent largement la capacité sonore d’un instrument traditionnel. Les vibrations créées par les basses, en concert par exemple, peuvent emplir la cage thoracique. Elles sont ressenties au plus profond de la chair, au niveau de la mâchoire, des poumons et des côtes, des viscères, du bassin, des jambes, des orteils, avec même une résonance extraordinaire qui parcourt le sol et les murs environnants. Si l’on retire tous les défauts de cet instrument, si l’on observe ses potentialités de manière globale dans une perspective de soin actuel et d’avenir, la musique électronique semble être un tremplin dans la sensorimotricité. Il y aurait de multiples manières d’approfondir son utilité. Dans les thérapies cognitivo-comportementales, la musique électronique peut reproduire le son d’un élément déclencheur d’angoisses. Pour la stimulation cognitive, il est possible de régler avec facilité les éléments nécessaires à un meilleur rétablissement des fonctions. Les sons holophoniques sont tout à fait stupéfiants et très ludiques. Ils donneraient la possibilité de travailler la sensorialité d’une façon innovante, en joignant les mouvements à l’afférence auditive et au  émotionnel. Il est possible de gérer chaque élément du son, donc de l’adapter à toutes les personnes de manière très personnelle, qu’importe l’âge, qu’importe la pathologie.

Le corps propre en tant qu’objet musical 

Le corps est le réceptacle de la relation au monde. Il évoque un ensemble, une unité, qui pour M. PETIT-GARNIER est aussi matérialité et individualité . Selon F. DOLTO, il est à  la fois notre centre de références expérimentées et notre centre de sécurité mémorisée et imaginée, hors de toute expérimentation . L’expérience corporelle entraine l’affinement de la  réceptivité, l’apprentissage à recevoir et ressentir. Développée, cette aptitude cérébrale de réception sensorielle suscite la concentration et la pensée focalisée sur les sens, la conscience du corps et l’efficacité dans l’action. Si l’objet musical impacte de manière non négligeable ce corps, qu’en est-il du corps agissant sur lui-même ?

Le corps fonctionnel
Le corps a cette faculté de pouvoir agir sur son environnement. Cet aspect fonctionnel concerne notamment la latéralité, l’action musculaire, l’organisation motrice et dépend de l’organisation neurofonctionnelle du système nerveux central. Pour S. BEKIER et M. GUINOT, les capacités fonctionnelles rendent possible la construction du moi : expression émotionnelle, sensorimotricité, perception et analyse .

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Table des matières

Introduction
PARTIE I : La médiation musicale en psychomotricité
I. Définition de l’objet musical
1. Du sonore au musical
2. La vibration sonore
3. La musique enregistrée
4. Les objets musicaux dits instruments de musique
5. Le corps propre en tant qu’objet musical
6. L’objet musical en psychomotricité
II. Musique et musicalité
1. La musique
2. La musicalité
III. Temporalité et jeu musical
1. La temporalité
2. Le temps
3. Le jeu musical contre la problématique de la perception temporelle
IV. L’importance du rythme
1. Rythme de relation
2. Le corps et ses règles
3. S’approprier son corps par les rythmes
V. De la perception à la représentation
1. La sensorialité
2. Du sensoriel au perceptif
3. De la représentation à la communication
4. Les instrument à percussion en psychomotricité
PARTIE II : La clinique
I. Le cabinet libéral
1. La salle d’attente
2. Le bureau
3. La salle de pratique
4. Le fonctionnement du cabinet
II. Le Trouble du Spectre Autistique
1. Définition
2. La sémiologie psychomotrice
3. L’évaluation psychomotrice
III. Léandre
1. Anamnèse
2. Le bilan
3. Le projet thérapeutique
4. Présentation de séances
5. Évolution et perspectives de prise en soin
IV. Tim
1. Anamnèse
2. Le bilan
3. Le projet thérapeutique
4. Présentation de séances
5. Évolution et perspectives de prise en soin
PARTIE III : Discussion. L’objet musical chez l’enfant avec TSA
I. Un outil d’évaluation
1. Le relationnel
2. Le traitement sensoriel
3. La fonction motrice
4. Les observations complémentaires
II. Un support d’individualité
1. Des histoires différentes
2. Le rapport à l’objet musical
3. Adapter l’environnement sonore
III. L’objet musical pour préparer au monde social
1. L’estime de soi
2. L’expression des émotions
Conclusion

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