La maturation de l’ARN pré-messager

La maturation de l’ARN pré-messager

La molécule d’ARN est d’abord synthétisée dans le noyau puis exportée dans le cytoplasme où elle sera dégradée après avoir servi de support à la fabrication d’une protéine fonctionnelle. La molécule passe par de nombreuses étapes essentielles qui permettent de l’acheminer jusqu’au lieu de sa traduction mais aussi de réguler son métabolisme (niveau de synthèse et de dégradation). L’ARN subit aussi diverses étapes de contrôle qualité pour s’assurer que seules les molécules capables de produire des protéines fonctionnelles seront traduites. La molécule d’ARN n’est jamais isolée mais toujours associée à de nombreuses protéines de liaisons à l’ARN (RNA binding protein en Anglais = RBP) qui interviennent à toutes les étapes de ces différents processus. Ces protéines servent à la fois d’éléments structurels et d’éléments de contrôle des étapes de son cycle de vie (synthèse, maturation, contrôles qualités, export nucléaire, stabilité, localisation, traduction). Les RBP forment avec l’ARN, mais aussi par des interactions avec des cofacteurs protéiques, des particules ribonucléoprotéiques (messenger ribonucleoprotein particules en Anglais = mRNP). Chaque ARN est ainsi lié par de nombreuses RBP et chaque RBP possède des centaines de milliers de cibles dans la cellule. La composition protéique des RNP évolue au cours des différentes étapes du cycle de vie de l’ARN et certaines RBP changent en fonction du processus alors que d’autres restent associées au cours de plusieurs étapes. Dans ce dernier cas elles peuvent coupler différents évènements en agissant directement sur une étape ou bien en recrutant des protéines nécessaires pour la suivante. Certaines RBP peuvent aussi intervenir dans des étapes non successives (Figure 2). Chez les eucaryotes supérieurs, dans le noyau l’étape de transcription par l’ARN polymérase II conduit à la formation d’une pré-molécule d’ARNm (pré-ARNm) qui subit une série maturations : ajout d’une coiffe dans la partie 5’, épissage de ses introns, ajout d’une queue poly(A) dans la partie 3’, puis est ensuite exportée dans le cytoplasme. Une vue simplifiée présente ces événements de maturation comme indépendants les uns des autres et séquentiels alors qu’ils ont lieu co-transcriptionellement quand la molécule d’ARN n’est pas complètement synthétisée, et sont interconnectés : chaque étape pouvant influencer l’autre. Les ARN messagers (ARNm) sont les molécules support de la vie mais les RBP sont indispensables pour leur permettre de mener à bien leurs fonctions.

Ajout de la coiffe à l’extrémité 5’ de l’ARNm

La première modification co-transcriptionelle que subissent les pré-ARNm est l’ajout d’un groupement chimique particulier : le 7-methylguanosine appelé coiffe et situé en amont du premier nucléotide. Cette coiffe est conservée de la levure jusqu’à l’homme et son ajout se fait dès la synthèse par l’ARN polymérase II (ARN pol II) des premiers nucléotides du préARNm, par des enzymes recrutées au niveau de son domaine C-terminal. Cette modification se produit lors de l’étape dite de pause qui correspond au moment où l’enzyme s’arrête au niveau de la chromatine et où la transcription stoppe. Chez les métazoaires la coiffe est ajoutée par l’action séquentielle de 3 enzymes au niveau du groupement hydroxyle 5’ du premier nucléotide, via une liaison triphosphate pour produire la molécule suivante : m7G(5′)ppp(5′)X où la lettre p représente un groupement phosphate et le X le premier nucléotide transcrit (Figure 3).La guanosine est ajoutée par les deux premières enzymes qui est ensuite methylée par la troisième. Ceci a lieu très tôt après l’initiation de la transcription alors que 20-30 nucléotides sont synthétisés et représente un point de contrôle qualité. Cette modification est essentielle pour la survie des cellules : elle est nécessaire pour la protection de l’ARN contre les exonucléases, l’épissage, la polyadénylation et l’export de la molécule d’ARN. Elle est enfin nécessaire pour le recrutement des ribosomes lors de l’étape de traduction. L’étape d’ajout de la coiffe est connectée avec les étapes de transcription et de polyadénylation. Dans le noyau, les deux sous-unités du complexe de liaison à la coiffe (CBC : Cap Binding Complex en Anglais) : CBP20 et CBP80 fixent le groupement 7- methylguasnosine directement après son ajout et après le premier cycle de traduction le complexe CBC est remplacé par le facteur d’initiation de la traduction eEIF4E (MüllerMcNicoll, Neugebauer, 2013 ; Proudfoot et al., 2002).

Epissage des ARNm 

L’étape d’épissage, assurée par un complexe appelé splicéosome, va enlever les séquences introniques des ARN codant des protéines ainsi que des longs ARN non codant (LncARN) (Lee, Rio, 2015a) et ne laisser que les exons qui vont être reliés entre eux pour former l’ARN messager mature. Ce très vaste complexe multimoléculaire est composé de 5 petites ribonucléoprotéines nucléaires enrichies en uridine, appelée UsnRNPs (Uridine-rich small nuclear RiboNucleoProtein) : U1, U2, U4, U5 et U6 et de plus de 150 facteurs d’épissages. Chaque snRNP (small nuclear RiboNucleoProtein) est un complexe composé d’un petit ARN appelé snRNA (small nuclear RiboNucleic Acid) d’environ 100 à 200 nucléotides, recouvert de protéines dont le nombre est variable. Il s’agit d’un complexe dynamique dont la composition évolue parallèlement à l’avancée de la réaction. Analysé à partir d’extraits cellulaires plus de 200 protéines sont associées au splicéosome humain à une ou plusieurs étapes et environ 140 protéines sont considérées comme faisant partie du cœur du complexe basé sur leur abondance (Hegele et al., 2012). L’ensemble de ces protéines est nécessaire pour le repliement du pré-ARN facilitant les 2 réactions de trans-esterification de la réaction d’épissage (Hoskins, Moore, 2012). Le processus d’épissage nécessite la reconnaissance de séquences consensus : Site Donneur (SD) ou site 5’ d’épissage (5’ splicing site en Anglais = 5’ss) correspondant à la jonction exon-intron, le Point de Branchement (BP) et le Site Accepteur (SA) ou site 3’ d’épissage (3’ splicing site en Anglais =3’ss) correspondant à la jonction intron-exon. Le BP est typiquement suivi d’une région riche en nucléotides purines (PPT pour PolyPyrimidine Tract) chez les eucaryotes supérieurs (Burge et al., 1998). Les séquences consensus des sites SA et SD sont faiblement conservées (Cartegni et al., 2002). Les seuls motifs invariables et retrouvés dans tous les introns sont les dinucléotides GU en 5’ de l’intron et AG en 3’ de ce dernier (Figure 4) (Will, Lührmann, 2011).

D’autres séquences impliquées dans la régulation de l’épissage sont retrouvées aussi bien dans les exons que dans les introns. Il peut s’agir de séquences stimulatrices ou inhibitrices de l’épissage. Ces séquences peuvent ainsi être séparées en 4 groupes : ESE pour Exonic Splicing Enhancer, ESS pour Exonic Splicing Silencer, ISE pour Intronic splicing Enhancer et ISS pour Intronic Splicing Silencer. Ces séquences impliquées dans le mécanisme d’épissage alternatif vont intervenir dans la régulation: soit en activant, soit en réprimant l’assemblage des éléments du splicéosome à des sites d’épissage adjacents. Les séquences ESE et ISE fixent ainsi des facteurs d’épissage protéiques riches en sérine/arginine (protéines SR) qui vont faciliter le recrutement de facteurs auxiliaires de l’épissage et vont majoritairement favoriser l’inclusion d’exons. Les séquences ESS et ISS vont quant à elles fixer des facteurs de répression de l’épissage de la famille des ribonucléoprotéines hétérogènes (heterogenous ribonucleoprotein = hnRNP) (Wang, Burge, 2008). Cependant il ne s’agit pas d’une règle générale et les protéines SR peuvent être impliquées dans la répression de l’épissage, et les protéines hnRNPs dans l’activation. Il semblerait que l’activation ou la répression de l’épissage soit dépendante de la position de fixation sur le pré-ARN plus que du facteur impliqué (Erkelenz et al., 2013). L’épissage du pré-ARN se déroule en deux étapes successives, impliquant chacune une réaction de trans-estérification. Dans la première réaction le groupe 2’OH du nucléotide adénosine présent au niveau du BP agit comme un nucléophile pour attaquer la liaison phosphodiester de la jonction exon/intron en 5’. Une trans-esterification conduit à une libération de l’exon 5’ et la formation d’une molécule d’ARN en forme de lariat correspondant à l’intron et l’exon situé en 3’. Dans la seconde réaction, le 3’OH situé au niveau de l’exon 5’ libre attaque la jonction intron/exon au niveau 3’ conduisant à la fusion des 2 séquences exoniques et la libération de l’intron (Proudfoot et al., 2002) (Figure 5) .

L’assemblage du splicéosome est ordonné : il se fait par étape pendant lesquelles différents complexes se forment sur le pré-ARN (Brow, 2002). Chez les mammifères, l’assemblage du complexe précoce du splicéosome (E) est initié par la reconnaissance par la snRNP U1 du site d’épissage en 5’ au niveau de l’intron. Le complexe A est formé par l’interaction de la snRNP U2 avec le point de branchement. L’addition du complexe composé des 3 snRNPs U4, U5, U6 donne lieu au complexe B qui est activé par la dissociation des snRNP U1 et U4 du splicéosome. Le cœur catalytique est formé au niveau du pré-ARN par les snRNP U2, U5, U6 (complexe C). Les deux étapes de la réaction d’épissage sont catalysées au niveau du complexe activé B et du complexe C. Finalement, le splicéosome se désassemble ce qui conduit à la libération de l’ARNm épissé et de l’intron (Hui, 2009) (Figure 6).

Le mécanisme décrit précédemment s’applique pour l’épissage constitutif mais aussi pour l’épissage alternatif. Le premier cas correspond à l’élimination systématique d’un intron et à la conservation d’un exon, tandis que dans le second cas un exon (ou une partie) est soit inclus soit exclus de l’ARN mature. Aujourd’hui, on estime que chez l’homme 95% des gènes subissent un épissage alternatif (Pan et al., 2008). Plusieurs évènements d’épissage alternatif existent (Figure 7). La régulation de l’épissage alternatif est dépendante du tissu ainsi que du stade de développement. Certains organes comme le cerveau, la rate, le pancréas ou encore le muscle subissent de très nombreux événements d’épissage alternatif (de la Grange et al., 2010). Il s’agit d’une source importante de diversité protéique.

A titre d’exemple, de nombreuses protéines du muscle présentent de nombreux variants d’épissage. C’est le cas des isoformes présentes dans les myofilaments qui sont differentiellement régulées en fonction du type de muscle, du type de fibre et aussi du stade de développement. Chaque isoforme possède une fonction propre pour la physiologie du muscle (Pistoni et al., 2010).

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Table des matières

Introduction
1. La maturation de l’ARN pré-messager
1.1. Ajout de la coiffe à l’extrémité 5’ de l’ARNm
1.2. Epissage des ARNm
1.3. Polyadénylation de l’extrémité 3’ des ARNm
2. La protéine « Poly (A) binding protein nuclear 1 » (PABPN1)
2.1. La famille des protéines de liaison à la queue poly(A)
2.2. Structure du gène PABPN1
2.3. Structure de la protéine PABPN1
2.4. Expression de la protéine PABPN1
2.5. Les fonctions moléculaires de PABPN1
2.5.1. Mécanisme de polyadénylation
2.5.2. Régulation de la taille de la queue poly(A)
2.5.3. Export nuclétaire
2.5.4. Régulation de la polyadénylation alternative
2.5.5. Surveillance et dégradation des ARNs
2.5.6. Régulation de l’épissage
2.5.7. Transcription
2.5.8. Les fonctions cytoplasmiques de PABPN1
3. La dystrophie musculaire oculopharyngée (OPMD)
3.1. Le muscle strié squelettique
3.2. Les dystrophies musculaires
3.3. La découverte de l’OPMD
3.4. Physiopathologie de l’OPMD
3.5. Cause génétique de l’OPMD
3.5.1. Maladies à expansion d’alanines
3.5.2. Expansions (GCN) dans l’OPMD
3.6. Histopathologie
3.7. Les agrégats nucléaires de PABPN1
3.7.1. Structure des agrégats
3.7.2. Localisation intranucléaire des agrégats
3.7.3. Composition
3.7.4. Formation des agrégats nucléaires
3.7.5. Implication des agrégats dans l’OPMD
3.8. Les modèles cellulaires et animaux de l’OPMD
3.8.1. Modèles cellulaires
3.8.2. Modèle animaux
4. Dérégulations dans l’OPMD
4.1. Complexe ubiquitine-protéasome
4.2. Apoptose
4.3. Atrophie musculaire
4.4. Polyadénylation alternative (APA)
4.5. Fibrose
4.6. Vieillissement prématuré
4.7. Défauts mitochondriaux
5. Stratégies thérapeutiques dans l’OPMD
5.1. Traitements actuels pour l’OPMD
5.2. Etudes expérimentales : stratégies anti-agrégation et anti-apoptose
5.3. Thérapie cellulaire
5.4. Thérapie génique
5.4.1. Généralités
5.4.2. Thérapie génique pour OPMD
5.4.3. Interférence à ARN
Conclusion

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