La littérature de jeunesse, un médiateur culturel privilégié

Du constat du sens : le rapport au savoir, au constat de la crise du sens à l’école

C’est ainsi que se profila la question du « rapport au savoir ». Après des années de recherches, en école, collège, lycée technologique et professionnel, il proposa une définition de ce concept . Pour lui, le rapport au savoir est une forme de « rapport au monde », « Analyser le rapport au savoir, c’est étudier le sujet confronté à l’obligation d’apprendre, dans un monde qu’il partage avec d’autres : le rapport au savoir est rapport au monde, rapport à soi, rapport aux autres » . Ainsi, ces recherches prennent en compte un panel plus important de facteurs explicatifs de ce qui résonne en l’individu qui apprend, un savoir apporté par l’institution, par d’autres individus, par soi-même. Il pose ces questions en terme de relations, d’actions,et non en terme d’échecs, c’est à dire de différences de positions entre ceux qui réussissent et ceux qui échouent.
Bernard Charlot met, par ce médium, en avant la question du sens qu’a l’école, qu’a le savoir pour l’individu. Il part du postulat que ce que l’on retient relève de ce qui a du sens pour nous. Difficile de nier, quand nous savons que nous ne retenons qu’un faible pourcentage des informations que l’on traite, que nous abordons le savoir avec des attentes. Au-delà des savoirs que nous investissons car ils sont en adéquation avec ces attentes, nous ne retiendrons que ce qui sera pertinent pour nous et notre évolution individuelle, par l’intérêt que nous portons à l’objet du savoir, à l’instant donné, dans notre projet personnel de résonance ou d’exploitation de ces données. Bernard Charlot nous donne ainsi sa définition de ce qu’est le sens pour l’individu : Pour lui, « a du sens un mot, un énoncé, un événement qui peut être mis en relation avec d’autres dans un système, ou dans un ensemble; fait sens pour un individu quelque chose qui lui arrive et qui a des rapports avec d’autres choses de sa vie, des choses qu’il a déjà pensées, des questions qu’il s’est posées », etc. Il en conclut par « le sens est produit par une mise en relation, à l’intérieur d’un système ou dans les rapports avec le monde ou avec les autres ». Soit, cela rejoint parfaitement la définition du rapport au savoir qu’il nous propose, une interaction entre soi-même, les autres et le monde, qui est indéniable. Si le sens est une mise en relation, alors cette mise en relation se fait au sens large, et passera ainsi les frontières de l’école, et du temps. Seulement aujourd’hui, la littérature abondante traitant du sens reflète un manque de sens à l’école, ressenti par un grand nombre d’élèves, et est pour beaucoup dans la difficulté scolaire. Pourquoi les apprentissages ne « parlent pas » aux élèves ? Quel décalage entre ce qui va faire écho aux élèves dans la vie et à l’école ? Il s’agira donc de traiter la cohérence des apprentissages face aux valeurs véhiculées par notre société, aujourd’hui. Il s’agira de mettre en lien ce qu’on apprend et ce pour quoi on apprend : pour ce qu’on vit, pour une confrontation au monde dans les meilleures circonstances possibles. Ainsi, qu’est-ce que la société peut nous apporter comme éclairage sur cette « crise du sens à l’école ? ».

Donner du sens dans une société qui remet en question le sens de l’école

Des valeurs opposées

Pour traiter la difficulté scolaire, cette question du sens est primordiale. La question de la perte du sens de l’école et des apprentissages est aujourd’hui bouillante. Pour Michel Develay, « l’école est en crise ». Il développe l’idée selon laquelle l’école transmet des valeurs qui s’opposent aux valeurs véhiculées par la société. Par exemple, l’idée du « tout, tout de suite »: lorsque l’école favorise la progressivité et la construction des apprentissages, la répétition, moyennant beaucoup de temps, alors que la société poursuit une course effrénée contre la perte de ce temps, pour une productivité performante, est une société « du zapping ». Pour Develay, « Le temps scolaire est celui de la durée. Le temps social, aujourd’hui véhiculé par les techniques modernes d’information et de communication est davantage celui de l’instant. » . Au-delà de la différence entre temps scolaire et temps social, il existe un décalage entre la vie vécue dans la société et la vie vécue à l’école. La société est un espace que l’on peut personnaliser, où l’on peut agir et exprimer son identité. L’école est souvent un lieu où l’apprenant est passif, et est un lieu public, donc personnalisé au mieux par une entité groupe-classe, et où l’on véhicule des valeurs communes à tous.

L’école : Encore le temple privilégié du savoir ?

La société nous offre aujourd’hui un accès gratuit, illimité et aisé au savoir, que l’on peut piocher à sa guise parmi le choix que nous offrent les différents médias. Les savoirs scolaires tels que décrits dans le « socle commun de connaissances et de compétences » ou dans les programmes officiels peuvent être acquis, en apparence, sans l’aide de l’institution scolaire. Ce « socle commun », peut ainsi être ressenti comme imposé, impersonnel, incohérent pour beaucoup, tandis que l’école perd son statut de sanctuaire du savoir. Pour Philippe Perrenoud , les élèves sont parfois en position délicate : « Dans un système aussi contraignant que l’éducation obligatoire, ils sont condamnés à des stratégies d’acteurs dominés, face à un système qui leur laisse extrêmement peu de choix, qui leur impose un nombre impressionnant de choses absurdes, incompréhensibles ou pénibles, ou qui, en tous les cas, ne correspondent pas à leurs envies du moment ». Le sens que donne un enfant aux apprentissages scolaires est en effet personnel, en lien étroit avec ses préoccupations quotidiennes, existentielles. « Le sens dépend des envies qu’il satisfait, des besoins qu’il comble, des projets qu’il sert, des obligations qu’il honore » . Ainsi, nous retrouvons cette singularité dans le rapport au savoir. On ne peut détacher sa personnalité de la façon dont l’on perçoit l’école, et l’école doit faire avec les différentes personnalités des élèves.

L’école est-elle toujours un ascenseur social? Si oui, pour qui ?

Dans une société de l’individualisation, de la rapidité et des nouvelles technologies, la grande machine scolaire peut apparaître à contre-courant, pour certains élèves, ou même parents, qui exerceront une influence, ne serait-ce que minimale, sur l’opinion de leurs enfants à ce sujet.
Notre société semble également accorder moins d’importance à l’école en tant que voie privilégiée à la réussite sociale. Certes, l’idée que l’école est un tremplin pour l’avenir est indéniable, pour tout le monde. Cependant, notre société des médias nous a fait entrer dans une ère d’avènement de la téléréalité, et du modèle du « self-made man », qui véhiculent des idées selon lesquelles l’école n’est plus la seule voie d’accès à la réussite sociale, du moins de celle qu’admirent un grand nombre d’élèves , principal public des démonstrations de ces idéaux. Notre président de la république actuel est le premier à ne pas avoir fait l’ENA pour accéder à son statut, tout comme les candidats des émissions de télé-réalité n’ont pas fait d’études audiovisuelles, écrit un livre, ou été acteurs d’un fait divers pour s’exprimer à la télévision à heure de grande écoute.
Malgré cela, l’école reste une voie sûre d’ascension sociale, mais en d’autres lieux elle est souvent vue dans une perspective uniquement professionnelle, et non dans une perspective plus générale d’apports de savoirs, savoir-être et savoir-faire. Cela peut découler du fait que la culture scolaire peut paraître souvent décalée de celle de certaines couches sociales, dont celles qui ont traditionnellement été identifiées comme plus enclin à être confrontées aux difficultés scolaires.
Philippe Perrenoud souligne également ce problème de la culture scolaire. « Les individus issus de classes sociales différentes sont très inégaux devant la construction du sens, notamment, parce que l’école privilégie des codes et des tâches qui correspondent mieux à la vision du réel, au langage, à la pratique de l’abstraction des classes instruites ; et aussi parce que les familles et les cultures de classes préparent diversement à se débrouiller devant des situations déconcertantes, nouvelles ou artificielles ».

La littérature de jeunesse, un médiateur culturel privilégié

Vous avez dit littérature de jeunesse ?

La littérature de jeunesse n’est pas un phénomène nouveau, elle a toujours existé. Elle a évolué avec le statut de l’enfant, notamment au XIX ème siècle, où l’enfant se distingue de l’adulte, et où ce concept « d’enfance » se détache nettement. Les livres enfantins sont alors produits dans un but d’instruction, d’édification de l’enfant. Christian Poslaniec , à propos de ces œuvres, nous fait part de cette réflexion : « Je les considère davantage comme les ancêtres des manuels scolaires, d’une part, et des documentaires, d’autre part, que comme ceux de la littérature de jeunesse ». La création des bibliothèques roses (1855), vertes (1924), ainsi que les éditions du Père Castor (1927) situe traditionnellement l’avènement du livre comme objet de plaisir. Aujourd’hui, la littérature est à un âge d’or. Depuis une trentaine d’années, la croissance de l’édition jeunesse est exponentielle, des milliers de ces livres sortent des imprimeries chaque année. Le genre traite de sujets actuels et divers, et s’efforce de présenter une double lecture, celle qui, d’une part, plaira aux enfants et d’autre part séduira les adultes dans leur rôle de prescripteurs. C’est ainsi que l’évoquent Nadia Miri et Anne Rabany : « L’amour sous toutes ses formes, la mort, la famille, la famille, la misère, l’injustice…rien ne leur (les jeunes lecteurs) est épargné. Les parents peuvent trouver, pour traduire un événement de la vie, un livre médiateur prétexte à discussion ».
Les programmes de l’enseignement primaire sont le reflet de la légitimité dont bénéficie aujourd’hui la littérature pour la jeunesse. La culture littéraire est aujourd’hui une priorité absolue, et cette responsabilité s’est déplacée de la sphère familiale à la sphère scolaire. En 1990, est inauguré par Lionel Jospin le « Plan lecture », qui tend à promouvoir, par le biais d’un concours interscolaire, des projets autour de l’articulation lecture/écriture, avec à la clé « cent livres pour les écoles ». Mais c’est avec les programmes de février 2002 que la littérature devient une question centrale. ChristianPoslaniec met en avant trois thèmes qui composent le nouveau regard porté sur la littérature de jeunesse dans les programmes. Elles placent en premier lieu la littérature de jeunesse dans la sphère littéraire, n’étant plus une « sous », ou une « pré » littérature. Le deuxième point traite de l’intertextualité de ces œuvres (ces livres sont en lien avec d’autres livres et une culture commune), des théories de la réception… Pour Poslaniec, ce deuxième point nous dit que «lire, ce n’est plus seulement comprendre, mais interpréter », les programmes distinguant ainsi la lecture « simple » de la lecture « littéraire ». En troisième lieu, Poslaniec détecte dans ces programmes une volonté de promouvoir une culture commune à tous. Peu après apparaissent des listes « Littérature », « Littérature (2) », de littérature de jeunesse pour le cycle 3, qui sont modifiées et étendues au cycle2 en 2007.
Ces références se caractérisent ainsi par une recherche de qualité dans les œuvres recommandées, de textes qui « résistent », afin de pouvoir les exploiter de manière à dépasser le cadre de l’apprentissage de la langue, voire des structures narratives formelles. Pour la lecture littéraire, l’important n’est pas la technique, mais le sens. Grâce à des auteurs talentueux et audacieux, pariant gros sur l’intelligence des jeunes lecteurs, la production nous donne aujourd’hui accès à des textes porteurs de sens, de profondeur, portes d’accès à la compréhension fine en littérature. Des auteurs comme Anthony Browne, Thierry Dedieu, Philippe Corentin, Marie -Aude Murail et des dizaines d’autres sont en mesure de répondre à ces exigences.
Ces œuvres riches seront ainsi des supports privilégiés d’accession à des questionnements existentiels. Jean-Charles Pettier et Jacques Châtain, ainsi qu’Edwige Chirouter , mettent en avant le fait que le jeune ne parvient pas spontanément à se décentrer de son opinion sur un sujet. Ainsi, un support médiateur lui permettrait non seulement de se décentrer, condition nécessaire pour faire de la philosophie, mais également d’y trouver un écho propre à soi, et ainsi de nourrir sa réflexion personnelle d’expériences, d’exemples qu’il ne possède pas forcément.

Intentions méthodologiques concernant le recueil de données

Afin de vérifier nos hypothèses, nous chercherons à rencontrer le théorique et la pratique.
Tout d’abord, nous réaliserons des entretiens avec deux spécialistes de la pratique de débats à visée philosophique avec les élèves en grande difficulté scolaire. Caroline Faivre, actuellement professeur en E.G .P .A., et Jean-Charles Pettier, professeur de philosophie, Docteur en Sciences de l’Education, à l’IUFM de Créteil. Nous poursuivrons nos recherches avec l’observation et l’exploitation à partir d’enregistrements audio de séances menées en classe et d’entretiens des acteurs qui y ont participé. Ainsi, le corpus littéraire sera traité selon les choix de l’enseignant observé. Les œuvres porteuses de questions anthropologiques sur les « sources du savoir », ou/et l’intérêt de l’instruction, seraient privilégiées pour notre sujet. Pour exemple, des œuvres au programme pour le cycle 3 telles que Léon, de Léon Walter Tillage, biographie d’un homme d’origine africaine au cœur de l’Amérique de la ségrégation, qui accèdera à un avenir plus confortable grâce à son alphabétisation. Rêves amers, de Maryse Condé, peut présenter également cet intérêt, narrant le destin tragique d’une adolescente en prise avec l’esclavage moderne, et qui rêve d’éducation.
Les deux moyens permettront ainsi d’avoir des points de vue qui relèvent de réflexions profondes en lien avec le cadre théorique, mais également de ces pratiques en action, qui permettront de confronter notre réflexion au concret.

Quels moyens pour répondre à la problématique ?

Rappel de la problématique : La réflexion à visée philosophique à partir d’œuvres de littérature de jeunesse porteuses de sens peut-elle favoriser un rapport au savoir positif ?
Cette question implique non pas une, mais des réponses. Elle nécessite de s’intéresser.

Aux acteurs qui ont mis en place ces débats 

En effet, nous visons plus particulièrement les acteurs au cœur de ces pratiques : les enseignants. Ces personnes ont double emploi ici : ils mettront en place un dispositif en classe qu’ils auront pensé en essayant de favoriser l’acquisition de compétences réflexives et littéraires, à visée philosophique, mais pourront également observer leurs effets sur les élèves et leur apprentissage.
Ces effets pourraient également se sentir sur leur enseignement. A travers ce type de pratiques, l’enseignant doit lui-même réfléchir à la question, effectuer une transposition didactique pour rendre intelligible le sujet pour les élèves, et évaluer ses élèves dans ces pratiques. S’ils choisissent de ne pas prendre en charge la totalité de cette démarche de transposition, des outils sont à leur disposition (les mallettes pédagogiques, par exemple). Nous pourrons ainsi prendre acte des choix pédagogiques de ces enseignants (choix de ce dispositif, du thème, du corpus, mise en œuvre pédagogique, impressions, prolongements), recueillir leurs observations concernant ledéveloppement de compétences et attitudes chez les élèves, et leurs conséquences.

Aux acteurs qui ont réfléchi, travaillé sur cette question

Notre cadre théorique s’appuie sur de nombreux auteurs, dont certains sont de purs enseignants  chercheurs, et d’autres des enseignants du primaire ou de sections spécialisées qui ont pratiqué ces expériences et qui ont décidé de les transformer en objet de recherche. Ainsi, ce regard sera double, celui du praticien et du chercheur, et nous pourrons avoir accès à une pensée qui se situe d’une part dans un cadre théorique, mais également dans un cadre professionnel vécu. Ces regards seront ainsi extrêmement riches et complets, et seront au cœur de ce mémoire. Nous essayerons également de moduler les manières d’aborder leurs apports, par les entretiens oraux, mais également par un questionnaire écrit.

Mais également aux élèves qui ont pu pratiquer ces expériences de pensée

Cet aspect est plus difficile à appréhender et pose beaucoup de questionnements. En effet, outre la difficulté d’interroger ces élèves sur un vécu récent, il semble difficile de jauger à quel moment seraient stabilisés ces effets chez l’individu. De plus, il y a de fortes chances pour que ces effets ne soient pas observables par l’individu lui-même, ou qu’ils ne soient pas distanciés. Pour remédier à ce problème, il serait judicieux d’interroger des élèves qui auraient vécus cette expérience il y a quelques années, mais dans le cadre de ce mémoire, cette observation n’a malheureusement pas pu être mise en place. Cette possibilité se situerait dans les prolongements de ce mémoire. Bien que l’objectivité ne puisse non plus être trouvée chez les enseignants qui pratiquent ces débats depuis de nombreuses années, s’entretenir avec ces acteurs présente des avantages : la possibilité d’avoir pratiqué ces débats avec les mêmes élèves sur plusieurs années ; un retour réflexif nécessaire sur sa pratique, afin de la poursuivre de manière efficace d’une part, et de la faire évoluer d’autre part ; une fréquentation de l’élève tout au long du temps scolaire, ce qui permet de rendre compte des savoirs transférables à d’autres matières qui auront été acquis, et des effets sur le rapport au savoir des élèves. C’est donc à travers eux que les effets de ces débats à visée philosophique seront observés chez les élèves.

Choix du lieu d’observation

L’Ecole Ledru-Rollin est une des deux écoles de la ville de La Ferté-Bernard en Sarthe. Elle se situe au cœur d’un quartier HLM, mais est également proche de regroupements pavillonnaires. Ainsi, on retrouve dans ses classes une mixité sociale, et culturelle. C’est un avantage, car cette mixitéreprésente autant de rapports aux savoirs différents à observer.

Présentation des classes (enseignants, élèves, niveau)

La particularité de ce dispositif de recueil de données est qu’il a eu lieu dans deux classes de même cycle, mais de niveaux différents, et avec deux enseignantes.
La première classe est la classe de CP de Marion Auger, professeur des écoles depuis 6 ans. Cette classe est composée de 22 élèves, issus de différents milieux socio-culturels, et caractérisée par une hétérogénéité des résultats scolaires.
La seconde classe est celle de Gaëlle Moriette, un CE1 de 24 élèves. Mme Moriette enseigne depuis une quinzaine d’années et est également directrice de l’école. Sa classe est également hétérogène sociologiquement, culturellement, et dans ses niveaux scolaires.
Notons que pour ces deux enseignantes, la mise en place des débats est une découverte, ce dispositif n’ayant jamais été expérimenté avant dans l’école ou dans leurs classes.

Présentation du dispositif pédagogique 

Nous avons pu avoir l’occasion d’observer un dispositif double : une séquence de débats à visée philosophique à partir de la mallette pédagogique « L’argent et le travail » d’Edwige Chirouter, appliquée à deux classes.
Le dispositif suit les recommandations de la mallette pédagogique. En amont, ont été lus et compris un corpus d’albums jeunesse. Soulignons que dans ce corpus figure également un DVD de Charlie Chaplin, Les temps modernes, qui n’a pas été exploité.
La disposition géographique de l’activité est ritualisée et reprise à presque chaque débat: le groupeclasse (élèves et enseignant) est assis sur des chaises disposées en cercle. Au centre du cercle, le corpus de livres utilisés pour la séquence est disposé à terre. Les débats durent quarante minutes.
Le thème choisi est « L’argent et le travail ». C’est ce concept qui nous a amenées à collaborer dans le cadre de ce mémoire, car ce thème nous a paru riche en termes d’observation de rapports au savoir. En effet, un des signes de manque de sens à l’école est la non perception de l’intérêt de l’école au-delà de la fonction « lire, écrire, compter », dans un but de recherche d’un emploi alimentaire dans le futur. Un élève qui n’a pas un rapport au savoir positif ne travaillera que pour des matières dites « scolaires », liées au lire-écrire-compter, et l’école aura une finalité primaire d’accès à un emploi, qui lui permettra de subvenir à ses besoins élémentaires. Elle ne sera pas un lieu d’épanouissement intellectuel, personnel, collectif, ou un ascenseur social. Réfléchir sur ce thème pourrait également amener la question du « métier d’élève », soulevée par Perrenoud, qui est étroitement liée au sens, et donc au rapport au savoir.

Analyse de l’entretien avec les enseignantes 

Nous avons choisi de nous entretenir avec les deux enseignantes à la suite des séances menées. Cet entretien n’a pas été enregistré et les données sont basées sur les notes prises lors de l’entretien. Le questionnaire avec les finalités des questions (annexe 2) ainsi que l’entretien (annexe 3) sont présentés en annexe de ce mémoire.
Nous reprendrons les trois axes de notre cadre théorique pour l’analyse de cet entretien.

Le rapport au savoir

La classe choisie pour l’observation se caractérise par sa mixité sociale et culturelle. Ainsi, les rapports au savoir des élèves sont de natures diverses (question 1), allant des élèves qui ont compris leur rôle et celui de l’enseignant à l’école, à des élèves pour qui l’école ne fait pas encore sens. Les enseignantes soulignent l’aspect positif de cette mixité, où les élèves qui ont un rapport au savoir positif tirent vers le haut ceux qui ne l’ont pas, ou pas encore. C’est d’ailleurs ce qu’on retrouve en question 6, où les enseignantes constatent une évolution positive de la cohésion de classe. Ces débats, pour elles, ont davantage soudé les élèves, ce qui favorise ce phénomène. Nous retrouvons ainsi un des aspects du rapport au savoir selon Charlot, « un rapport aux autres ».
Le rapport au savoir de certains élèves a amené les enseignantes à mettre en place ce dispositif et à choisir ce thème, qui leur paraissait pertinent quant à son évolution (question 7). Le fait que certains élèves aient des parents sans emploi, et qui ne se lèvent donc que pour amener leurs enfants à l’école, seuls membres de la structure familiale à avoir une activité, a amené les enseignantes à retenir ce dispositif et ce thème (« L’argent et le travail ») afin de maintenir un lien entre l’école et la société, le monde du travail chez ces élèves. Ainsi, nous retrouvons ce « rapport au monde », de la définition du rapport au savoir de Bernard Charlot.
La question 4 traite davantage du « rapport à soi » de la définition de Charlot. Pour les enseignantes, ces débats ont une influence positive sur le langage, mais qui reste à vérifier sur le long terme (évaluation en fin d’année par exemple). Ce dispositif permet d’enrichir les séances de langage carau-delà de la prise de parole, il y a une réelle écoute. Ainsi, nous avons pu constater un réinvestissement des arguments des élèves par d’autres, et une prise de parole pertinente d’élèves
habituellement inhibés dans ce domaine. La séance 3 analysée précédemment a également vu se manifester un échange contradictoire entre un élève et une partie de la classe, qui n’était pas d’accord avec son propos. Cet échange aurait pu se solder par une vexation de l’élève, ou un retour sur son opinion. Cependant, l’argumentation a permis à l’élève d’accepter cette contradiction, et de réagir positivement. Cela a donc une influence sur sa confiance, car pour un élève de CP, maintenir une opinion que le groupe contredit nécessite une certaine estime de soi, permise grâce à ce dispositif ouvert à de réels échanges.
Les enseignantes ont également constaté une évolution dans la prise de parole des élèves (question 2) et un affinage de la réflexion, dont les élèves se saisissent davantage au fil des séances, preuve d’une entrée de plus en plus impliquée dans les apprentissages de manière individuelle, mais grâce à un engouement collectif.

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Table des matières
Page de garde
Remerciements
Sommaire
Introduction et formulation des questions de recherche
Partie 1 : Cadre théorique du mémoire 
1. Inscription de la question dans un champ théorique
I. Le rapport au savoir aujourd’hui, donner du sens à l’instruction
II. Les débats réflexifs, entrée privilégiée dans le sens
III. La littérature de jeunesse, un médiateur culturel privilégié
2. Hypothèses de recherche et intentions méthodologiques
Partie 2 : Explicitation de la méthodologie de recherche
A. Quels moyens pour répondre à la problématique ?
a) Les acteurs qui ont mis en place ces débats en classe
b) Les acteurs qui ont réfléchi, travaillé sur la question
c) Les élèves qui ont pu pratiquer ces expériences de pensée
B. Choix des modalités de recueil des données
a) Un dispositif double en classe
b) Une enseignante qui met en place ces pratiques depuis des années
c) Un enseignant chercheur
C. Le questionnaire de recherche présenté à Caroline Faivre et Jean-Charles Pettier et ses finalités
Partie 3 : Recueil de données
A. Ecole Ledru-Rollin, La Ferté-Bernard
B. Analyse croisée de l’entretien de Jean-Charles Pettier et des données du questionnaire de Caroline Faivre
Partie 4 : Conclusion du mémoire 
Partie 5 : Bibliographie 
Partie 6 , Annexes : p. 65-103. (voir table des annexes, p. 65)
Résumé du mémoire

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