La justice civile à trois-riviéres : de la conquéte au début du XIXe siécle

Au cours de la Guerre de Sept ans, plusieurs puissances s’affrontent, dont la France et le Royaume-Uni. À l’issue de cette guerre, par le traité de Paris, la France se voit dans l’obligation de céder le territoire de la Nouvelle-France aux Britanniques. Ce traité a des répercussions majeures sur l’administration de la province du Québec, maintenant sous le joug de l’Empire britannique. Le domaine de la justice, civile et criminelle, subit de nombreux changements. Ce chapitre a comme objectif d’examiner l’évolution de l’administration de la justice civile dans le district de Trois-Rivières, du traité de Paris jusqu’à l’établissement de la Cour provinciale en 1794. Par la suite, nous définirons quel est le mandat de cette cour et quels sont ses pouvoirs. Enfin, nous examinerons la population qui en fait l’usage.

Abolition et renaissance d’un district judiciaire

L’année 1760 marque la victoire des Britanniques sur les forces françaises. Le district de Trois-Rivières est maintenant administré par un gouvernement militaire. En attendant la ratification des traités de paix, c’est donc l’armée britannique qui gère la ville. Quant à la justice, elle est confiée au capitaine de milice. Si celui-ci n’est pas en mesure de rendre un jugement, il doit renvoyer les requêtes à l’officier supérieur en présence ou, ultimement, au gouverneur . Somme toute, d’après Normand Séguin et René Hardy, « cette réorganisation opérée après la Conquête par l’occupation britannique n’est pas trop contraignante pour les habitants ». Cependant, par l’ordonnance du 17 septembre 1764, un peu plus d’ un an après la ratification du traité de Paris, l’administration de Trois-Rivières subit un changement lourd de conséquences. En effet, le district judiciaire de Trois-Rivières disparaît et son territoire est scindé en deux parties. La partie située à l’ouest de la rivière St-Maurice est annexée au district de Montréal, tandis que la partie située à l’ est est annexée au district de Québec. De cette manière, Trois-Rivières et le Cap-de-Ia-Madeleine ne font plus partie du même district. D’ après l’ordonnance, cette division découle de la quantité insuffisante de sujets protestants aptes à remplir la charge de juge de paix et à tenir des sessions trimestrielles . Le district sera restauré à la minute où il y aura assez de sujets capables d’ assumer ces fonctions ou jusqu’ à ce que « sa Majesté fasse connaître son bon plaisir à ce sujet  ». Notons tout de même qu’une fois par année, par l’entremise du juge en chef de la Cour du Banc du Roi de Québec, une cour d’assises sera tenue dans les villes de Montréal et Trois-Rivières. Pour des raisons monétaires, cette cour sera abolie l’année suivante à Montréal. Dans le cas de Trois-Rivières, même si officiellement, cette cour n’est pas abolie, Fyson présume qu’elle a probablement subi le même sort qu’ à Montréal .

Malgré les ordonnances et les changements constitutionnels de la décennie 1770, la situation ne s’améliore guère pour les habitants de la région de Trois-Rivières. En 1770, une Cour des Plaidoyers Communs est mise en place à Montréal . La Mauricie est toutefois laissée pour compte. Puis, en 1774, l’ utilisation des anciennes lois françaises est rétablie par l’Acte de Québec. Même si cet acte est bénéfique pour l’ensemble des Canadiens, les habitants de Trois-Rivières et des alentours doivent continuer de plaider leurs causes à Montréal ou à Québec. Peu à peu, l’impatience s’ installe et des actions sont entreprises afin d’ obtenir le retour d’ instances judiciaires dans la région trifluvienne. En 1778, une pétition réclamant une cour de justice convenable est signée par les habitants de Trois-Rivières . Celle-ci est adressée à Frederick Haldimand, le gouverneur de la province de Québec. Le gouverneur répond aux signataires que tant et aussi longtemps qu ‘ il sera possible pour lui de le faire, il agira à leur avantage. Malgré sa réponse encourageante, ce n’est pas sous la gouverne d’Haldimand que les cours de justice seront restaurées à Trois-Rivières. Quelques années plus tard, une poignée de notables revient à la charge. C’est à la toute fin de l’ année 1786 que Joseph Boucher de Niverville, ex-officier et seigneur de St-Marguerite et de Chambly, adresse une lettre au gouverneur Guy Dorchester. Aux dires de Niverville, en raison de l’absence de cour, les habitants doivent plaider aux extrémités de la province, ce qui ruine le gouvernement, fait tomber le commerce et décourage l’ agriculture et tous les arts . JI est également mentionné que les cours de tournée ne sont pas efficaces. Les jugements sont rarement rendus lors de la première motion et sont remis à une tournée future. Par conséquent, les défendeurs deviennent insolvables et déménagent, privant ainsi les créanciers de leur dû  . Pour remédier à la situation, Niverville, soutenu par plusieurs notables de la ville, réclame la restauration de l’ancien district. Concernant la justice civile, ils exigent une cour établie en ville, apte à traiter les litiges liés à la propriété et aux dettes. La réponse de Dorchester nous est inconnue. Toutefois, il semblerait que la missive ait porté fruit puisque dans la décennie qui va suivre, le district sera rétabli et la justice redeviendra plus accessible aux habitants.

Avec les mêmes frontières qu’avant sa dissolution, le district de Trois-Rivières est finalement rétabli en 1790. L’ordonnance stipule que les inconvénients causés par l’étendue immodérée des districts de Montréal et de Québec et les demandes pressantes des habitants sont à l’origine de cette action . De plus, une Cour des Plaidoyers Communs avec la même juridiction et les mêmes privilèges que celles des deux autres districts est mise en place. Par contre, cette cour ne tiendra à Trois-Rivières que deux sessions, au mois de février et au mois d’août. Elle demeure en fonction pour quatre années seulement, puisqu’en 1794 l’organisation judiciaire du district est modifiée pour laisser place à l’ institution au cœur de notre recherche, soit la Cour provinciale de TroisRivières.

La Cour provinciale de Trois-Rivières 

Pour prendre en charge les affaires civiles et criminelles où les enjeux sont supérieurs à 10 livres sterling, une Cour du Banc du Roi est érigée dans le district en 1794. Une deuxième cour, la Cour provinciale, est également érigée afin d’ entendre les affaires civiles de moindre importance. La Cour provinciale de Trois-Rivières a pour mission d’entendre d’ une manière sommaire et sans appel les poursuites en matière civile. Seules les causes où le montant réclamé n’excédera pas dix livres sterling seront entendues. À ce sujet, une précision s’ impose. À cette époque, plusieurs devises sont en circulation au Bas-Canada, notamment la piastre d’Espagne, le cours d’Halifax, la livre de 20 sols et la livre sterling. Le cours d’Halifax, aussi appelé la livre courante, est non seulement la devise la plus répandue dans les affaires britanniques au Bas-Canada  mais aussi la plus utilisée, et de loin, dans les requêtes entendues par la Cour provinciale. Pour des raisons pratiques, lorsqu ‘ il sera question d’argent, nos analyses futures teindront compte de la valeur des réclamations en livres courantes. Grâce à la table de conversion conçue par Jean Pierre Wallot et Gilles Paquet , il nous a été possible d’harmoniser les différentes devises en usage. Ainsi, dans leur requête, un grand nombre de justiciables réclament la somme de Il livres et 2 shillings courants. En réalité, lorsque convertie, cette somme équivaut au montant maximal pouvant être réclamé, soit 10 livres sterling.

Pour en revenir à la Cour provinciale, six termes seront tenus annuellement, soit en février, en avril, en juin, en août, en octobre et en décembre. Les causes seront entendues pendant les dix premiers jours de chaque terme, à l’ exception des dimanches et des journées fériées. Bien que couvrant l’ essentiel des poursuites civiles, trois types d’affaires sont exclues de la juridiction de cette cour. Premièrement, la cour ne possède pas les compétences en matière d’ amirauté pour agir. Deuxièmement, toutes les actions liées aux honoraires d’office, aux rentes, aux droits, aux revenus et à tout ce qui est payable à Sa Majesté  sont en dehors de la juridiction de la cour. Troisièmement, les affaires dans lesquelles les droits à venir sont en jeu ne sont pas de son ressort. Toutefois, à la réquisition des justiciables, celles-ci pourront être entendues par la Cour du Banc du Roi. Pour le reste, toutes les procédures, records, registres, papiers et minutes de la Cour des Plaidoyers Communs sont transférés et mis à la disposition de la Cour provinciale, dans la mesure où ces documents concernent des poursuites où les réclamations n’ excèdent pas 10 livres sterling.

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Table des matières

INTRODUCTION 
1. État de la question
1.1 L’histoire du droit: de la Nouvelle-France à la Codification
de 1866
1.2 L’ économie bas-canadienne
1.3 Les salaires et les gages
1.4 Le monde de la terre
1.5 Les héritages et la transmission de patrimoine
1.6 Les dommages moraux
2. Définition de l’objet de recherche
2.1 Les sources
2.2 Critique de la valeur scientifique des sources
2.3 Les méthodes et stratégies de recherche
CHAPITRE 1 LA JUSTICE CIVILE À TROIS-RIVIERES : DE LA CONQUETE AU DEBUT DU XIXe SIECLE
1.1. Introduction
1.2. Portrait des cours à l’étude
1.2.1 La Cour provinciale de Trois-Rivières
1.2.2 La Cour de circuit de Trois-Rivières
1.2.3 La magistrature
1.3. Les justiciables
1.3.1 Genre et origine ethnique
1.3.2 Catégories socioprofessionnelles
1.3.3 Provenance des justiciables
1.4. Conclusion
CHAPITRE 2 – LA NATURE DES LITIGES 
2.1. Introduction
2.1.1 La justice civile canadienne avant la codification
2.1.2 Typologie des litiges
2.2. Les litiges commerciaux et professionnels
2.2.1 Les échanges marchands
2.2.2 Les billets promissoires
2.2.3 Les services professionnels
2.3. Les transactions mobilières et les contrats
2.3.1 Ouvrages, salaires et gages
2.3 .2 Contrats
2.4. Les litiges immobiliers: le monde de la terre et le régime
seigneurial
2.4.1 L’acquisition et la vente de biens fonciers
2.4.2 Les baux
2.4.3 Les droits seigneuriaux
2.4.4 Les travaux agricoles
2.5. Les dommages
2.5.1 Les dommages matériels
2.5.2 Les dommages moraux et physiques
2.6. Les affaires familiales
2.6.1 Les successions
2.6.2 Les donations
2.7. Les autres types de litiges
2.7.1 Les affaires judiciaires
2.7.2 Les affaires étatiques
2.7.3 Les dettes indéterminées
2.8. Conclusion
CHAPITRE 3 – LES JUGEMENTS 
3.1. Introduction
3 .1.1 L’ issue des jugements
3.1.2 Précisions méthodologiques
3.1.3 Répartition globale de ,’ issue des jugements
3.2. L’issue des jugements dans les affaires commerciales
3.2.1 Les échanges marchands
3.2.2 Les billets promissoires
3.2.3 Les affaires professionnelles
3.3. L’issue des jugements dans les causes concernant les transactions
mobilières et les contras
3.3.1 Ouvrages, salaires et gages
3.3.2 Les contrats
3.4. L’issue des jugements dans les affaires immobilières
3.4.1 La possession d’ immeubles
3.4.2 Les droits seigneuriaux
3.4.3 Les baux
3.4.4 Les travaux agricoles
3.5. L’issue des jugements dans les causes pour dommages
3.5.1 Les dommages matériels
3.5.2 Les dommages moraux
3.6. L’issue des jugements dans les affaires familiales
3.7. L’issue des jugements dans les affaires judiciaires
3.8. L’issue des jugements dans les affaires étatiques
3.9. L’issue des jugements dans les causes pour dettes indéterminées
3.10. Conclusion
CONCLUSION

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