La jachère: définition et terminologie « paysannes» du concept

 La jachère: définition et terminologie «paysannes» du concept

La communauté rurale de Sobaka a introduit depuis longtemps, dans sa pratique culturale, le système culture-jachère. Dans ce terroir, la jachère a toujours été incluse dans l’organisation et la structuration de l’espace. Ainsi est née une terminologie afférente à la jachère et à ses variantes. Le mot «pouwèga» en langue mooré signifie étymologiquement «champ inutilisable». Il s’en dégage une notion d’utilisation, voire même d’utilité potentielle. En milieu rural, l’utilisation d’un terrain est dictée par sa productivité, donc par ses potentialité agricoles. On peut penser que ce tenue sous-entend une notion de perte de fertilité et donc d’abandon. En effet, les paysans tout en regroupant sous ce vocable tout terrain ne portant plus de récoltes après en avoir produit pendant une ou plusieurs année, lui préfèrent le tenue «poutkuitgo» qui se rapporte à une vieille parcelle qui porte encore ou non des cultures.

De la question du système culture-jachère au BURKINA FASO

Les systèmes fonciers africains sont «une des conditions de la reproduction des sociétés agraires, permettant à la fois l’accès à la terre pour l’individu et son contrôle par le groupe» SERPANTIE, (1993). En garantissant «le droit sur les jachères et le devoir de solidarité foncière » (JEAN, 1975), les systèmes fonciers africains ont favorisé ipso facto une reproduction dans le temps, une répétabilité des pratiques agraires. L’évolution actuelle du droit foncier, dans la plupart des Etats africains et particulièrement au BURKINA FASO, modifie les rapports entre le paysan et la terre, crée la propriété privée et annule de fait ce droit sur la jachère et ce devoir de solidarité foncière. Ce nouveau droit nie le caractère sacré de la terre, modifie le mode d’acquisition du patrimoine foncier et fait de la terre un objet de spéculation (rente foncière). Au BURKINA FASO la gestion de l’espace rural annoncée par la réorganisation agraire et foncière (la RAF) a créé un vide juridique et organisationnel aggravé par le transfert de l’autorité et du pouvoir aux CDR les premières années de la révolution. L’Etat, officiellement propriétaire des terres depuis 1984, ne peut en assurer une gestion satisfaisante dans une société profondément traditionnelle. On a cependant réussi à créer la méfiance chez certaines communautés, à briser un système qui permettait la reproduction d’une pratique agraire: l’alternance culture jachère.

Le développement de nouveaux systèmes de cultures (culture de rentes: coton et arachide), impliquant une gestion différente de l’espace agricole, a contribué quelquefois à modifier le système. A cela s’ajoutent la pression démographique, la tendance à la sédentarisation et les contraintes climatiques(tendance générale à la baisse de la pluviosité) qui, de nos jours, contraignent les agriculteurs à diminuer les surfaces en jachère et la durée de celles-ci.

C’est dans ce contexte apparemment défavorable au maintien à long terme du système, que l’Etat recherche depuis quelques années des solutions qui passent par une résolution globale ou sectorielle des crises (crise écologique, crise des politiques foncières et de démographie, crises technologiques) et associe une recherche qui se veut aujourd’hui très écologique sur les jachères. Le sujet est en effet d’importance, car sous l’intitulé «étude, amélioration et gestion de la jachère en Afrique de l’Ouest», un programme régional est né se donnant pour ambition «d’insérer le cycle culture jachère ou les modes de substitution à la jachère lorsqu’elle a disparu, dans une stratégie de développement durable» (FLORET et PONTANIER, 1993). Le BURKINA FASO a adopté ce programme. Notre travail, qui analyse lajachère sous l’angle écologique, est donc une contribution à cette réflexion.

Mais, comme le souligne SERPANTIE, (1993), si la jachère devait disparaître, «les finalités sociales de l’agriculture (subsistance, rémunération du travail et du capital) et ses contraintes économiques (prix des intrants et du capital) devront elles-mêmes évoluer». Le remplacement de la jachère devrait d’abord «passer par une connaissance des fonctions et des significations de la jachère… Elle nécessite ensuite une réflexion sur des règles et des techniques alternatives de gestion agro socio-écologique des espaces ruraux, mais aussi une analyse d’ensemble des fonctions sociales de l’agriculture et de son environnement économique et politique» (FLORET et al., 1993). On doit surtout et légitimement se questionner sur les chances d’emporter l’adhésion enthousiaste des agriculteurs dans une proposition qui paraît plutôt comme une invitation à gérer un risque dans une pratique dont ils n’auront pas eu l’initiative.

la fertilité des sols: concept, gestion et traduction

Essai de définition 

Le mot «fertilité», d’usage courant, véhicule en fait un concept qui se prête difficilement à une définition précise. L’école agronomique française (SEBILLOTTE et al., 1991) tentera d’être plus précise, s’écartant ainsi des synonymies vagues (richesse chimique, fécondité de la terre…) communément admises. Elle appliquera cette notion de fertilité «au niveau le plus général, c’est-à-dire celui du milieu rural considéré comme un système dont les productions résultent des interactions entre ses trois constituants fondamentaux: le milieu humain, le milieu naturel (climat, sol, plantes, animaux) et le milieu technique ou mode de gestion des espaces ruraux» (PIER!, 1990). L’idée de fertilité appartiendrait plus au domaine des représentations sociales qu’à celui des concepts scientifiques (SEBILLOTTE, 1991). Aussi, BOIFFIN et SEBILLOTTE (1982), contesteront l’intérêt même du terme fertilité, – «notion floue et peu opérante»- et lui préféreront celle d’aptitude culturale d’un milieu et non plus seulement d’un terrain (REBOUL,1989). Eu égard à cette difficulté de trouver un critère synthétique d’appréciation de la fertilité, REBOUL (1989) propose alors de nommer «fertilité agronomique», l’ensemble des fonctions de production relatif à un sol dans un milieu agronomique donné. Il en découlerait d’une part que la fertilité agronomique d’un sol exprime «sa capacité de réponse productive aux interventions culturales dans un milieu agronomique donné» et, d’autre part, que celle-ci serait différente d’une fertilité naturelle, fonction des propriétés intrinsèques du sol, et d’une fertilité économique, qui fournirait plutôt une base d’appréciation globale de la valeur des terres. En milieu paysan africain, seules les fertilité agronomique et naturelle ont un sens .

le concept africain: «savoir paysan et lecture des indices de fertilité du sol»

Pour le paysan de la zone soudanienne, la fertilité d’une terre n’apparaît pas comme un vague concept, mais comme une réalité physique traduite par la présence d’une espèce végétale, par l’aspect du sol ou par sa production. La perception de la fertilité des sols par les cultivateurs africains «s’appréhende à travers les rapports qu’ils ont avec cette terre qui apparaît comme une mère nourricière, un don du ciel, sinon comme une divinité» (RlZT, 1991). La terre a une valeur sacrée; c’est pourquoi, le paysan sollicite sa générosité par des rituels, la maintient et l’entretient par son travail.

Dans l’échelle sociale des valeurs paysannes, comme le note par ailleurs RlZT (1989), la fertilité n’apparaît pas comme une valeur significative. Ceci expliquerait peut-être la difficulté de donner une traduction littérale du mot «fertilité» dans la plupart des langues africaines. En effet, la connaissance et la reconnaissance paysannes des qualités d’un sol se traduisent par les notions de «bonne» ou «mauvaise» terre ou celle de terre «possédant de la pourriture» (la pourriture étant la matière organique en cours d’humification).

La lecture que le paysan fait de la fertilité se fonde sur une connaissance longuement acquise de la valeur indicatrice de la végétation. Cette valeur indicatrice repose sur des principes reconnus également en écologie. En effet, «la composition floristique de la végétation spontanée est le résultat d’une combinaison précise de facteurs écologiques; ceux ci fournissent par rapport à la présence d’une espèce en un lieu donné une valeur informative qui peut ne pas être d’une précision constante pour toutes les espèces» (BALENT et FILY, 1991).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1: DYNAMIQUE POST-CULTURALE ET FERTILITE: CONCEPTS ET MODELES
1.1. Problème de définition
1.2. La jachère: définition et terminologie « paysannes» du concept
1.3..- De la question du système culture-jachère au BURKINA FASO
1.4.. la fertilité des sols: concept, gestion et traduction
104.1. Essai de définition
1.4.2. le concept africain: « savoir paysan et lecture des indices de fertilité du sol»
1.5. Dynamique végétale post-culturale: théories et modèles
CHAPITRE II: LA ZONE D’ETUDE
Il.1. Le cadre géographique et phytogéographique
IL2. Le milieu naturel
11.2.1. Le climat
II.2.2. La pluviosité
11.2.3. Les températures
II.2A. L’humidité relative
II.3. Géologie et sols
II.4. Végétation naturelle et occupation du sol
Il. 5. Population: son histoire et ses activités socio-économiques
CHAPITRE III: MATERIELS ET METHODES
1I1.. Le choix des sites d’étude
IIU. Etude de la végétation et du milieu
III.2.1. Etude de la végétation ligneuse et du milieu
1lI.2.2. Etude de la végétation herbacée
III.2.3. Caractérisation et cartographie des faciès de végétation
III.3. Etude de l’état physico-chimique du sol et de son évolution
I1I.4. Echelles spatiales et temporelles -Méthode d’échantillonnage
CHAPITRE IV: CARACTERISATION DES PAYSAGES MORPHOPEDOLOGIQUES ET DES FACIES DE VEGETATION DU TERROIR DE SOBAKA
IV.I. Les paysages morphopédologlques
IV.1.1. Les unités morphopédologiques
1. Unité cartographique U1
2. Unité cartographique U2
3. Unité cartographique U3
IV.I 2. Les caractéristiques morphopédologiques
1. Classe des sols minéraux bruts
2. Classe des sols peu évolués
3. Classe des sols à sesquioxydes de fer et de manganèse
Classe des sols hydromorphes
IV. 1.3. Etats de surface et susceptibilité à la dégradation des unités morphopédologiques
IV.2. Caractérisation desfaciès de végétation
IV.2.l. Importance des types biologiques
IV.2.2. Affinités et niveaux d’homogénéité écofloristique identifiée par ACP et CHA
IV.2.3. Les différents faciès post-culturaux
IV.2.4. Carte des stades d’évolution de la végétation et de l’occupation du sol
IV.3. Conclusion
V.l. Stratégies bio-démographiques des espèces de la jachère
V.I.I. Les espèces sous-ligneuses: quelques traits biologiques
1. Régénération et croissance
2. Le système racinaire
V.I.2 Les espèces herbacées: remplacement progressif des types bio-morphologiques
V.I.3. Les espèces ligneuses: stratégie de croissance et développement
V.3. Modèle de représentation: les trajectoires d’évolution desfaciès pilotés par l’âge et l’intensité des pressions.
V.2. Structures des peuplements végétaux
V.2.I. Structure du peuplement herbacé: recouvrement et diversité spécifique
l.Recouvrement et état d’équilibre des biocoenoses herbacées
2. Distribution spatio-ternporelle et dynamique interannuelle de Andropogon spp.
3. La diversité spécifique: mesure de l’organisation des biocoenoses herbacées
V.2.2. Structure du peuplement ligneux: profils de stratification et diversité taxonomique
1. Définition de profils de stratification en milieu post-cultural
2. Diversité taxonomique
CHAPITRE V: STRUCTURE SPATIO-TEMPORELLE DES COMMUNAUTES VEGETALES
VU Différenciation verticale: caractéristique intrinsèque du sol
VI.2. Différenciation latérale
VI.2.l.Type de structure et nature du couvert végétal
VI.2.2. Profils racinaires herbacés
1. Système racinaire et occupation du sol
2. Distribution spatiale des racines
VI.2.3. Résistance à la pénétration
VI.2.4 Porosité
1. Macroporosité observée in situ
2. Porosité totale
CHAPITRE VI: DIFFERENCIATION STRUCTURALES DU SOL ET NATURE DU COUVERT VEGETAL
3. Distribution dimensionnelle des pores
Vl.2.5. Le profil granulométrique: diagnostic indirect du fonctionnement hydrique
DISCUSSION
CONCLUSION

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