La femme, actrice ou pilote du système d’élevage bovin laitier 

La femme, actrice ou pilote du système d’élevage bovin laitier 

Pouvoir de décision de la femme

Les femmes sont responsables de la répartition du lait ( auto-consommation / transformation en produits laitiers / vente). Elles disposent des revenus de la vente du lait et des produits laitiers comme elles le désirent. Mais la décision de vendre ou d’abattre un animal relève de la responsabilité du chef de famille (même s’il a besoin de l’accord de la femme quand il s’agit d’un animal de celle-ci). Cette superposition du droit masculin de propriété des animaux et du droit d’usage féminin sur les produits laitiers peut être à l’origine de conflit notamment lors des départs en transhumance. Les maris veulent qu’un maximum de vaches participe à la transhumance, alors que les femmes veulent les retenir afin de disposer de lait à écouler sur le marché lorsqu’il est payé plus cher (Boutrais J., 1990). Parfois cette diminution du nombre de vaches fait perdre temporairement à la femme son autonomie financière. Les faibles quantités de lait tirées des quelques vaches qu’elle a pu garder avec elle (pas toujours le cas), étant destinées strictement à la consommation familiale (Boutrais J.,1990; Corniaux C., 2003). Cette situation influence également l’occupation de l’espace des éleveurs, la femme recherche la proximité des villages pour l’écoulement des produits laitiers tandis que l’homme cherche à s’en éloigner pour éviter les conflits avec les agriculteurs (Boutrais J., 2002). Cette contradiction entre les motivations des femmes et celles des hommes se retrouve aussi au niveau de la gestion des troupeaux. Alors que les hommes décideront de sauvegarder les animaux (le veau prioritaire de façon systématique) ou de faire croître le troupeau les femmes auraient préféré augmenter la traite (Corniaux C., 2003).

Il apparaît clairement que les intérêts des femmes et des hommes sont parfois opposés dans la gestion du troupeau, mais la décision finale revient à l’homme. Ainsi, c’est une erreur de croire que le bétail est la seule affaire des hommes. Les femmes aussi possèdent des animaux et leur présence quotidienne auprès des vaches en lactation et de leurs petits en font une partenaire privilégiée pour l’intensification de l’élevage laitier. Si de nombreux programmes de développement, ont souvent commis l’erreur de croire qu’·il n’y ·avait··qu-‘un· seul ·propriétaire àans le troupeau, le chef de famille, il· apparaît clairement que les femmes aussi sont intéressées par la prospérité du troupeau dans la mesure où elles exercent un contrôle sur l’activité laitière. Les tenir à l’écart des programmes de développement et s’adresser à la mauvaise cible (chef de famille, berger) c’est mettre en péril le projet de développement de l’élevage laitier, car c’est ignorer les flux de lait à l’intérieur d’une famille et des acteurs qui les génèrent (Corniaux C., 2003). Malgré leur apport considérable en travail de soin et d’entretien du troupeau, les femmes sont cependant exclues des principales décisions et du contrôle du bétail. Les traditions culturelles rationalisent cette exclusion en prétendant que les conflits hommes-femmes sont inévitables parce que les femmes accordent la priorité à la satisfaction de leurs besoins en lait tandis que les hommes mettent au premier plan les besoins des veaux, sous entendu : du troupeau (Pointing et Joekes, 1991 ).

L’intégration dans la filière moderne de commercialisation du lait

La vente du lait aux laiteries présente pour les femmes d’éleveurs l’avantage d’écouler régulièrement la production de lait. De plus, la collecte se faisant surtout par des hommes à bicyclette, elles évitent les longues marches vers les marchés pour vendre le lait. Si les femmes n’ont pas l’assurance de bénéficier des revenus de la vente (voir 2.3.2.3), livrer le lait à une laiterie leur offre des revenus inférieurs à ce qu’elles obtiennent par la filière traditionnelle (Waters-Bayer A., 1985); il faut également signaler le double effet que présente le mode de paiement différé (15 jours ou 1 mois après). S’il semble satisfaire les éleveurs qui y voient une forme d’épargne qui leur permettra de s’approvisionner en aliments intrants vétérinaires pour le bétail (Diallo A., 1998), les femmes, elles, ne disposent plus des revenus qu’elles dépensaient quotidiennement pour s’approvisionner en produits agricoles pour nourrir la famille.( Bruggemean E. et al., 2001 ; Gneima D., 2001). ·

– Dans un rapport sur le rôle et la place de la femme dans la production et la commercialisation du lait autour de Ndjamena au Tchad, la sociologue Laurence Boutinot dénonce un glissement du pouvoir masculin et un renforcement de celui-ci au sein de la sphère féminine autour des activités de commercialisation du lait. Les époux collecteurs à vélo font subir aux femmes un sérieux manque à gagner en monopolisant la dynamique commerciale dans la filière moderne. De plus les femmes doivent avoir l’accord de leur maris pour être actives au sein des groupements, l’une des conditions à son consentement étant l’achat d’une partie des compléments alimentaires du bétail avec l’argent que la femme va mettre en commun dans le groupement, en échange de quoi elles disposeront de leur production laitière commercialisable. Ce qui était sans condition et relevait d’une tradition séculaire devient, à travers l’ organisation des actions communautaires, un échange marchand au sein même des ménages ruraux (Boutinot L., 1998). La vente du lait sert de processus de socialisation entre les pasteurs et les populations locales. Vendre le lait aux laiteries prive les femmes de ces relations sociales qu’elles établissent avec leurs clientes (Waters-Bayer A., 1985).

Un statut qui limite l’appropriation des moyens de production par la femme

Toutes les sociétés sont basées sur des coutumes qui régissent les relations des hommes et des femmes entre eux. De celles-ci naissent une division du travail entre les hommes et les femmes et une répartition des responsabilités à l’ intérieur du ménage. Dans la plupart des sociétés africaines le statut social des femmes basé sur leur rôle de mère et d’épouse a longtemps caché le rôle joué par les femmes sur le plan économique. En plus des travaux dits domestiques qui représentent 55 % du temps de travail quotidien et qui requièrent un effort physique important ( entretien de la case, éducation des enfants, ramassage du bois et approvisionnement en eau et denrées alimentaires, pilage des céréales … ) les femmes ont des activités productives. Elles réalisent 70 % du travail agricole (80 % de la production vivrière mais elles s’investissent dans les cultures de rentes également) ; elles ont des activités d’élevage et d’artisanat; elles accomplissent la quasi totalité de la transformation et de la conservation des produits de base ainsi que leur mise sur le marché. Mais force est de constater qu’en dépit de ce rôle moteur dans la société africaine, la femme est tenue à l’écart des moyens de . production. Les femmes n’ont pas accès aux équipements, aux innovations techniques et aux intrants en raison de leurs coûts élevés.

Cela rend leur travail extrêmement pénible et peu productif ( détiquage manuel/bain insecticide). Elles n’ont pas accès au foncier, sinon un droit d’usage sur des lopins de terre alloués par leur époux (chez les femmes peules c’est le droit sur le lait qui est déterminant). Les femmes n’ont pas accès au crédit sinon dans le cadre de l’aide réciproque (tontine) mais il s’agit de quantité limitée. Elles ne peuvent s’adresser aux banques pour de multiples raisons (montant pas assez élevé, caution inexistante, pas de confiance de la part des banquiers qui les considèrent comme des clientes à risques, n’étant ni propriétaires ni exploitantes elles ne disposent pas des garanties exigées, mal vu que la femme soit indépendamment financière du mari, analphabétisme des femmes qui se heurtent à des procédures de prêts complexes, pas d’habitude des lieux officiels, … ). Le travail agricole qu’elle fait dans les champs de son époux n’étant pas rémunéré et les revenus de la vente des produits agricoles et d’élevage étant utilisés pour l’entretien de la famille en priorité les femmes disposent donc de peu de capitaux. La plupart du temps elles ne participent pas aux prises de décisions (aussi bien au niveau familial qu’au sein de la communauté).

L’un des obstacles majeurs à la promotion de la femme demeure les pesanteurs socio-culturelles qui lui confèrent un statut social inférieur à celui de l’homme, si bien que sur le plan juridique leur subordination tient lieu de loi. Sur le plan de l’éducation, les femmes constituent la majorité des analphabètes (48 % des femmes sont recensées comme analphabètes en 2000 en Afrique subsaharienne par l’Unesco). Pour les parents, la formation des filles est un investissement perdu lors du mariage. Il est préférable qu’elles restent aider leur mère dans les nombreuses taches domestiques. En outre, suivant les coût de scolarisation les familles préfèrent envoyer un garçon. De plus, les formations techniques (agricoles, … ) sont surtout destinées aux hommes, les femmes continuant à faire leurs tâches comme à l’accoutumée, d’où un renforcement de la domination des hommes sur les femmes.

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Table des matières

RESUME
INTRODUCTION
1 La femme, actrice ou pilote du système d’élevage bovin laitier 
1.1 Les Peuls
1.2 Organisation de la famille peule
1.2.1 Groupe domestique
1.2.2 Taille du troupeau et polygamie
1.3 Accès des femmes à la orooriété
1.3.1 Capital bovin possédé par les femmes
1.3 .1.1 Origine du bétail des femmes
1.3.1.2 Répartition du bétail au sein d’une famille
1.3.1.3 Taille des troupeaux possédés par les femmes
1.3.1.4 Droits successoraux sur le bétail..
1.3 .2 Droits de la femme sur le lait..
1.4 Répartition du travail au sein de l’unité de production familiale
1.4 .1 Répartition traditionnelle du travail.
1.4.2 Répartition des tâches d’élevage
1.4.3 La femme et la santé animale
1.5 Pouvoir de décision de la femme
2 La femme et le commerce du lait et des produits laitiers 
2.1 Le lait frais
2.2 La transformation du lait, stratégie pour s’adapter aux contraintes
2.2.1 Un moyen de conservation et de stockage du lait.
2.2.2 La demande des clients
2.2.3 La valorisation du lait frais
2.2.4 Un double objectif: satisfaire l’autoconsommation et obtenir des revenus
2.3 Les revenus laitiers
2.3.1 Les facteurs influençant les revenus
2.3.2 Les revenus laitiers sont intégrés aux ressources familiales
2.3 .2.1 Le troc
2.3.2.2 Part des revenus de la femme dansle budget familial
2.3.2.3 Perte des revenus laitiers
3 La femme, contraintes et perspectives au sein de la filière lait 
3.l Une évolution de la filière gui menace le rôle économique joué par la femme
3.1.1 L’ intégration dans la filière moderne de commercialisation du lait
3 .1.2 La sédentarisation
3.1.3 Dégradation de l’échange lait – céréales
3.1.4 Concurrence entre la viande et le lait.
3.2 Un statut gui limite l’appropriation des moyens de production par la femme
3.Les perspectives
3.3.1 Agir au niveau de la filière
3.3.2 Agir au niveau des femmes
3.4 Femme et projet de développement
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE

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