LA DOULEUR CHEZ LE CHEVAL

LA DOULEUR CHEZ LE CHEVAL

L’évaluation de la douleur

S’il est reconnu aujourd’hui qu’il est nécessaire de lutter contre la douleur, le clinicien reste confronté à une difficulté : reconnaître et évaluer la douleur. La plupart des études s’accordent sur le fait qu’évaluer la douleur animale repose sur l’observation de modifications comportementales et physiologiques. De nombreuses études abordent le sujet de la reconnaissance de la douleur sous une approche expérimentale ou clinique. L’expression de la douleur étant éminemment variable selon les espèces, une étude menée sur une espèce ne peut être transposable à une autre. Chez le cheval, les publications consacrées à l’évaluation de la douleur sont rares.
Une enquête épidémiologique menée en 2002 auprès de praticiens équins et mixtes en Angleterre met en évidence une grande disparité dans l’estimation de la douleur en fonction des conditions cliniques (119). Cette étude reposa sur l’envoi de questionnaires portant sur l’appréciation de la sévérité de la douleur dans certaines conditions cliniques, l’administration et le choix des analgésiques… Un quart des 260 questionnaires furent remplis. Ainsi, les gradations de douleur dans le cas des coliques spasmodiques, des tendinites aiguës ou des abcès de pied ont été également partagées entre « douleur légère » et « douleur sévère ». Une telle différence d’estimation de la douleur entre les 93 questionnaires analysés suggère que le comportement algique du cheval reste mal reconnu ou apprécié. Il ressort cependant de cette enquête que dans leur grande majorité, les praticiens britanniques désignent le comportement du cheval et sa fréquence cardiaque comme critères majeurs d’évaluation de la douleur.

L’importance de l’anamnèse pour la reconnaissance de la douleur

Idéalement, les signes de comportement algique, pour être considérés comme tels, doivent être facilement reconnaissables et doivent être présents, augmentés ou plus fréquents en association avec la douleur. Leur interprétation reste cependant souvent subjective : il est difficile, par exemple pour un cheval hospitalisé, de savoir si le changement de comportement est dû à de la douleur ou à l’environnement qui ne lui est pas familier.Si les vétérinaires travaillant au contact des chevaux ont généralement une bonne connaissance de l’éthogramme équin, il n’en reste pas moins que l’expression de la douleur est particulière à l’individu. C’est la raison pour laquelle le propriétaire est souvent le plus à même de repérer des modifications comportementales chez son cheval. En témoigne une étude lors de laquelle un groupe de vétérinaires et un groupe de soigneurs devaient attribuer des scores de douleur à des chevaux ayant subi une arthroscopie et à des chevaux témoins. Seuls les soigneurs accordèrent une différence significative entre les chevaux opérés et les chevaux témoins (120). Le praticien ne doit donc pas négliger la description des changements dans le comportement observés par le propriétaire.

L’examen à distance

Apparence et attitudes Le cheval est sans doute l’un des animaux qui traduit le mieux la douleur sur son faciès. Son expression faciale lors de douleur se manifeste généralement par un regard fixe, des paupières mi-close ou à l’inverse des yeux grands ouverts en mydriase, les oreilles vers l’arrière, les naseaux dilatés (37). La douleur intense peut même entraîner des grimaces faciales, rire sardonique ou faciès tendu lors de coliques (11). Le flehmen peut traduire une douleur d’origine digestive. Les bâillements répétés et les grincements de dents sont souvent révélateurs de douleurs gastriques (117). Lors de douleurs dans la région de la tête, le cheval va secouer la tête, s’ébrouer et s’agiter. Les douleurs dans la bouche entraînent une difficulté à mastiquer, une hypersalivation, parfois des mâchonnements continuels. Les douleurs dans les membres, outre la boiterie, provoquent parfois des modifications de posture des membres à l’arrêt (exemple du cheval fourbu qui reporte tout son poids sur les postérieurs ou du cheval souffrant d’une maladie naviculaire qui pointe le membre atteint vers l’avant). Une amyotrophie du membre atteint révèle l’ancienneté d’une douleur ostéoarticulaire. Les douleurs du dos peuvent se manifester par des mouvements de la queue, des grincements de dents, des balancements de la tête lors du pansage ou lorsque le cheval est sellé et de la rétivité au travail.
Remuer la queue, hormis toute cause banale comme les mouches, est un signe de douleur, parfois sévère.

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Table des matières

TABLE DES ILLUSTRATIONS
INTRODUCTION
I. LA DOULEUR CHEZ LE CHEVAL : POURQUOI LA TRAITER, COMMENT L’EVALUER…
1 . Définitions de la douleur
a. Définitions générales
b. Douleur aiguë et douleur chronique
c. Douleur physiologique et douleur pathologique
2. Historique de la prise en compte de la douleur chez les animau
3. Physiologie de la douleur
a. Présentation
b. Voies périphériques : des récepteurs à la moelle épinière
c. De la moelle épinière aux structures cérébrales
d. Modulation de la nociception
4. Pourquoi traiter la douleur : physiopathologie, conséquences et idées reçues
a. Physiopathologie
b. Récapitulation des conséquences cliniques de la douleur
c. Apports de la physiopathologie contre les idées reçues en médecine vétérinaire
5. Evaluation de la douleur
a. Importance de l’anamnèse pour le reconnaissance de la douleur
b. Examen à distance du cheval
c. Facteurs de variation à prendre en compte lors de l’examen à distance
d. Examen rapproché du cheval
e. Autres méthodes
6. Quantification de la douleur
a. Présentation des échelles de douleur
b. Hétéro-évaluation de la douleur en néonatalogie humaine
c. Echelles de douleur chez le cheval
d. L’observateur: un biais dans l’évaluation et la quantification de la douleur
II. OUTILS DU PRATICIEN FACE A LA DOULEUR
A. OUTILS PHARMACOLOGIQUES
1. Présentation
2. Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS)
a. Définition et historique
b. Les différentes molécules disposant d’une AMM pour l’espèce équine
c. Pharmacocinétique
d. Mode d’action
e. Effets recherchés
f. Effets indésirables
g. Utilisation chez le cheval
3. Les agonistes des récepteurs adrénergiques alpha-2
a. Définition et historique
b. Les différentes molécules disposant d’une AMM pour l’espèce équine
c. Pharmacocinétique
d. Mode d’action
e. Effets recherchés
f. Effets indésirables
g. Utilisation chez le cheval
4. Les opioïdes
a. Définition et historique
b. Les différentes molécules utilisées pour l’espèce équine en France
c. Pharmacocinétique
d. Mode d’action
e. Effets recherchés
f. Effets indésirables
g. Utilisation chez le cheval
5. Les anesthésiques locaux
a. Définition et historique
b. Les différentes molécules utilisées pour l’espèce équine en France
c. Pharmacocinétique
d. Mode d’action
e. Effets recherchés
f. Effets indésirables
g. Utilisation chez le cheval
6. Autres outils allopathiques
a. Les anti-inflammatoires stéroïdiens
b. .Un anesthésique dissociatif : la kétamine
B. MEDECINES COMPLEMENTAIRES
1. Présentation
2. Acupuncture
3. Homéopathie
4. Phytothérapie
C. ASPECTS REGLEMENTAIRES
III. COLIQUES DIGESTIVES ET DOULEURS MUSCULOSQUELETTIQUES : GESTION DE DEUX SYNDROMES ALGIQUES FREQUEMMENT RENCONTRES CHEZ LE CHEVAL
A. LES COLIQUES D’ORIGINE DIGESTIVE
1. Origines de la douleur digestive
2. Reconnaître et évaluer la douleur digestive
a. Le comportement du cheval
b. Examen rapproché
c. Les douleurs projetées : le clavier équin de Roger
3. Intensité de la douleur selon le type d’affection
4. Importance de la gestion de la douleur du cheval en colique
5. Actes soulageant la douleur viscérale
a. Actes non chirurgicaux
b. Actes chirurgicaux
6. Médicaments non analgésiques soulageant la douleur lors de coliques digestives
a. La paraffine
b. Les pansements gastriques
c. Les antispasmodiques
7. Les analgésiques : utilisation lors de colique digestives
a. Les AINS
b. Les alpha-2 agonistes
c. Les opioïdes
d. Les anesthésiques locaux
B. DOULEURS DE L’APPAREIL LOCOMOTEUR
1. Origines des douleurs de l’appareil locomoteur
2. Reconnaître et évaluer la douleur locomotrice
3. Importance de la gestion des douleurs locomotrices
4. Actes soulageant la douleur locomotrice
a. Actes non chirurgicaux
b. Actes chirurgicaux
5. Les analgésiques par voie systémiqu
a. Les AINS
b. Les alpha-2 agonistes
c. Les opioïdes
d. Les anesthésiques locaux
e. Autres molécules ayant une activité analgésique sur la sphère musculo-squelettique
6. Les analgésiques par voie intra-articulaire
a. Avantages et risques de cette voie
b. Anesthésiques locaux et voie intra-articulaire
c. Opioïdes et voie intra-articulaire
d. AIS et voie intra-articulaire
7. La voie épidurale et la gestion des douleurs de l’arrière-main
a. Historique
b. Indications, avantages et inconvénients
c. Technique de l’injection épidurale
d. Mode d’action
e. Analgésiques utilisables par voie épidurale
f. La cathéterisation épidurale
8. Les dorsalgies du cheval : un phénomène encore mal connu
a. Origines des douleurs de dos
b .Détection et évaluation
c. Traitement
CONCLUSION

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