La desserte aérienne comme véritable levier de croissance touristique pour la Polynésie-Française 

L’arrivée de French Bee et de United Airlines coïncide avec une stratégie publique de relance du tourisme en Polynésie-Française

Confrontées à une faible croissance du tourisme depuis la crise économique de 2008 en Polynésie-Française, les autorités polynésiennes ont décidé en 2015 d’adopter un plan stratégique de Développement Touristique de la Polynésie-Française. Ce plan – d’un coût de 53 milliards de francs pacifique soit plus de 400 millions d’euros) était un programme sur cinq ans (2015-2020) orienté sur la mise en valeur des atouts de Tahiti et ses îles. « Le tourisme a été identifié par l’ensemble des acteurs politiques, économiques et sociaux de la Polynésie française, comme l’un des moteurs majeurs du développement de l’économie locale, pourvoyeur de l’essentiel des ressources propres du Pays. Son développement constitue une forte opportunité pour assurer une croissance endogène durable de l’activité économique et de l’emploi en Polynésie-Française ».
Selon l’IEOM, l’objectif principal de ce plan était d’accueillir sur le territoire polynésien 300 000 touristes par an d’ici 2020. 134 actions ont été regroupées en 3 axes stratégiques majeurs :
• L’amélioration de la promotion et de la commercialisation de la destination.
• Le développement des activités touristiques, des infrastructures et du transport.
• La mise en place d’une réglementation adaptée en matière d’hébergement touristique.
Le positionnement stratégique qui y est fait est celui de la « Nature Humaine », mettant en avant le Polynésien, sa culture et son environnement naturel. Ainsi, ce plan stratégique propose une intensification des arrivées touristiques à travers un prisme de durabilité. Les autorités ont pris le parti de chercher la croissance en communiquant sur le développement d’un tourisme durable (reposant donc sur les trois piliers du développement durable : l’économie, l’environnement, et le social), le bien-être de la population, tout en plaçant le Polynésien au centre du développement de la première industrie du territoire. Le rapport complet de ce plan est disponible publiquement (rapport Khan).
Il y est également indiqué que le gouvernement a fait le choix d’un tourisme de luxe, considérant que « la contrainte de la desserte internationale interdit un positionnement de masse (généraliste), c’est donc en recherchant des clients à haut niveau de contribution que la Polynésie-Française valorisera le mieux ses atouts, dans une optique de tourisme durable et de qualité ». Il y est cependant indiqué que le luxe ne restera pas le seul positionnement de l’archipel, « les pensions de famille ont, par exemple, toute leur place dans ce positionnement si elles sont en mesure d’orienter leur offre, en relation avec le positionnement stratégique (partage culturel, sites d’exception), tout en conservant l’originalité et en la qualité de leur produit ».
Enfin, selon le rapport, dans un marché touristique mondialisé, le rôle de la compagnie aérienne, en reliant le Pays aux marchés émetteurs, est crucial pour développer la stratégie d’une destination à fort potentiel.
C’est donc ce contexte stratégique que deux compagnies aériennes se sont implantées sur le territoire polynésien : tout d’abord French Bee en mai 2018, puis United Airlines en novembre 2018.
L’arrivée de ces nouvelles compagnies s’inscrit donc tout à fait dans la volonté des autorités polynésiennes de remettre la croissance touristique et l’ouverture internationale au cœur de leur stratégie. Le rapport du plan stratégique de 2015-2020 indique notamment vouloir cibler de nouveaux touristes américains car : « peut contribuer à l’augmentation de la fréquentation touristique tout en atténuant les effets de saisonnalité. Pour attirer plus de touristes en provenance de ces pays, il apparaît indispensable d’adapter la desserte aérienne et la promotion en conséquence », ce qui explique l’ouverture à United Airlines.
Pour Muriel Assouline, directrice générale de French Bee, il ne fait aucun doute que le gouvernement polynésien a été très ouvert à l’arrivée de la compagnie, « à aucun moment on a senti qu’ils voulaient bloquer », « dès qu’on a tapé à la porte pour leur dire on veut venir, ils ont ouvert tout de suite ! Alors c’est aussi peut-être le fait qu’on leur a plu, le modèle, le fait qu’on soit très solide, qu’on soit très outre-mer ». French Bee s’inscrivait dans une stratégie publique de croissance économique et a été donc bien accueillie par les autorités. Ainsi, selon elle, même s’il y avait certains réfractaires à l’arrivée d’une compagnie low cost sur le territoire, le secteur public l’a encouragée : « c’était le gouvernement polynésien qui a dit « non non ! on a besoin de générer du trafic, d’augmenter le nombre de touristes » et ils appellent ça l’effet French Bee ». Monsieur Jean-Marc Mocellin, directeur de Tahiti Tourisme , souhaite toutefois souligner qu’il n’y a pas eu de demandes ou d’incitations financières directes des autorités polynésiennes vers ces nouvelles compagnies. Elles sont venues de leur propre initiative pour des raisons commerciales, poussées par une demande existant sur le marché. « Personne ne s’est opposé ».
Monsieur Mocellin confirme cependant que, suite à des discussions avec le secteur du luxe en Polynésie-Française (notamment l’hôtellerie), Tahiti Tourisme a choisi en 2018 et de « miser sur les Etats-Unis au travers de campagnes de ventes auxquelles les hôtels et les tour-opérateurs ont participé afin de booster la fréquentation du marché américain, identifié comme porteur pour la destination ». Cela montre bien que les principaux acteurs du tourisme en PolynésieFrançaise ont contribué à leur manière à l’arrivée de ces compagnies, en créant de la demande parmi certains marchés visés, tels que celui des Etats-Unis.
On peut donc considérer que le gouvernement polynésien a placé les dessertes aériennes au cœur de sa stratégie de croissance touristique. Les autorités se sont servies de l’arrivée des nouvelles compagnies comme un outil de développement, en choisissant de mettre en concurrence la compagnie aérienne « nationale » Air Tahiti Nui.
Les nouveaux opérateurs aériens ont permis une diversification de la demande et de l’offre touristique en Polynésie-Française. Zoom sur le secteur de l’hébergement touristique.
L’arrivée de nouvelles compagnies aériennes a entraîné une forte croissance des arrivées touristiques. Cette hausse du nombre de touristes visitant la Polynésie-Française n’est pas la seule transformation qu’a connu le secteur entre 2018 et 2020, puisqu’elle a engendré l’arrivée de « nouveaux » touristes, qui ne visitaient pas ou peu l’archipel par le passé en raison du prix trop élevé des billets d’avion. Ces touristes diffèrent des voyageurs qu’attirait auparavant le territoire, par leurs caractéristiques sociales, leurs préférences et besoins, leurs habitudes de consommation. Nous allons étudier le profil de ces « nouveaux » touristes transportés par French Bee et United Airlines, pour mieux comprendre leur impact respectif sur l’industrie touristique polynésienne. Pour cela nous nous appuierons sur l’exemple du secteur de l’hébergement touristique en Polynésie-Française.

Une destination segmentée entre luxe et expérience ; exemple du secteur de l’hébergement touristique et de sa dépendance à l’aérien

L’hébergement en Polynésie-Française : un secteur partagé entre le luxe et la petite hôtellerie familiale

Analysons tout d’abord les caractéristiques de l’offre de produits et services touristiques en Polynésie-Française.
Avec ses 6 archipels, la diversité de sa topographie, de son climat (la Polynésie-Française faisant la taille de l’Europe), de ses cultures, la richesse de ses sites naturels et attractions culturelles ; le territoire polynésien offre une très grande variété de destinations différentes. Elle propose donc une offre de produits et services touristiques très diversifiées, pouvant s’adapter à plusieurs tendances du tourisme et attirer tout un panel de types de clientèle (allant du résident local, aux américains aisés, aux Français aisés ou moins aisés venant voir leur famille sur le territoire, les européens qui viennent visiter l’archipel en famille, les Japonais ou les Chinois pour lune de miel…).
Selon le Service du Tourisme polynésien, parmi les destinations touristiques mondiales, la Polynésie peut correspondre en particulier à deux types de destinations touristiques distinctes : d’une part celle des « Archipels Paradisiaques » (destinations insulaires exotiques), d’autre part celle des « Îles Hautes » (îles – continents). Selon le site, toujours :
– La famille des Archipels Paradisiaques est caractérisée par un ensemble « d’îles de rêve ». Le développement des activités et de points d’intérêt y suit une logique plutôt observatrice marine et/ou sous-marine (détente et repos, spas et massage/soins corporels, bains de mer, plages, panoramas, plongée sous-marine, sports de glisse, yachting, golf). La tendance du tourisme est à l’hôtellerie internationale et plus spécifiquement au luxe.
– La famille des Iles Hautes est caractérisée par l’aventure, les paysages littoraux et l’intérieur montagneux, la nature sauvage, les vestiges culturels. Le développement des activités et des points d’intérêts y est régi plutôt par une approche participative (sports extrêmes, escalade, randonnée sauvage, marche et découverte, pêche sportive, rencontres et découvertes culturelles). Ici c’est une clientèle plus encline à vivre des expériences au contact de la population locale et de la nature qui est ciblée, notamment des familles.
Nous verrons par la suite que les principaux types d’hébergement proposés en Polynésie Française s’adaptent très bien à ces deux profils types de voyageurs, ces deux tendances et préférences de voyage.
Pour mieux comprendre les conséquences de l’arrivée de nouvelles compagnies aériennes sur l’offre touristique en Polynésie-Française, nous avons choisi ici de nous concentrer sur le secteur de l’hébergement touristique, puisque c’est un des principaux secteurs professionnels en lien avec le tourisme sur le territoire, en termes de retombées économiques et d’emplois. En effet, d’après l’IEOM, l’hôtellerie-restauration est la branche la plus importante du tourisme,rassemblant 67% des entreprises touristiques en 2019, ce qui représente 63% des employés du secteur et près de la moitié de son chiffre d’affaires. La branche du transport de voyageurs arrive en seconde position avec 25% des entreprises, plus de 30% des emplois et 48% du chiffre d’affaires du tourisme.
Pour analyser l’impact des « nouveaux touristes » sur l’hébergement en Polynésie-Française, il est important de comprendre comment se structure ce secteur, sa répartition sur le territoire, et les différentes prestations proposées. Tout d’abord, tous les touristes terrestres arrivant en Polynésie-Française ne vont pas forcément se loger au sein d’infrastructures marchandes. Différencions bien les deux types d’hébergement (définitions fournies par l’ISPF).

Crise sanitaire et Hôtellerie Internationale en Polynésie : un segment fortement dépendant à l’aérien

La crise de la COVID-19 a eu un impact important sur tout le secteur du tourisme en PolynésieFrançaise, en limitant considérablement le nombre de passagers ayant pu débarquer sur le sol polynésien depuis mars 2020. Analysons les conséquences qu’a eues la fermeture des liaisons aériennes avec l’international sur les différentes branches de l’hébergement touristique.
En termes de capacité de l’hébergement, le site du Service du Tourisme nous dit qu’au 15 juin 2021 on dénombre en Polynésie-Française.

La clientèle étatsunienne et à haute contribution de United Airlines consomme du luxe, tandis que les passagers métropolitains et moins aisés de French Bee privilégient les pensions de famille

Tout d’abord, arrêtons-nous sur la compagnie French Bee, et sur le passager « type » qu’elle transporte jusqu’en Polynésie.
Comme on l’a vu, l’arrivée de cette compagnie à bas coût (smart cost) en 2018 a ouvert la destination à de nouveaux voyageurs, pour qui les billets d’avion pour la Polynésie étaient auparavant trop chers. Ces « nouveaux » touristes ont des caractéristiques qui diffèrent de celles des touristes visitant le territoire habituellement. En effet selon Muriel Assouline, directrice générale de French Bee, « si vous avez une croissance de 15% sur un marché ça veut dire qu’il y a des gens qui sont venus en Polynésie qui n’étaient jamais venus. C’est évident. ».
Selon elle, ce qu’il faut retenir du modèle de French Bee est « qu’on a ciblé un marché sur la Polynésie très family parmi les métropolitains mais aussi les Polynésiens ultra marins qui peuvent voyager ». Pour Christophe Guardia, l’arrivée de French Bee a permis « de faire venir une famille alors qu’avant le prix de l’avion était tellement prohibitif que la destination n’était pas ouverte à ça ».
Selon Jean-Marc Mocellin, la compagnie fait principalement voyager des métropolitains, même s’ils ont commencé à se développer aux Etats-Unis, notamment à San Francisco, « grâce aux réseaux de la communauté française installée dans cette région », de même que le marché canadien (en croissance avant la crise sanitaire). Muriel Assouline évoque les passagers nordaméricains comme un « complément bienvenu » pour French Bee, qui détient 11% des parts de marché. La majorité des parts de marché Etats-Unis – Tahiti est détenue par Air Tahiti Nui (qui fait escale à Los Angeles).
Une caractéristique intéressante de la clientèle de French Bee relevée par Monsieur Mocellin, est que celle-ci « préfère réserver en direct et organiser son propre voyage » en Polynésie, sans passer forcément par des tour operateurs et des packages. Cet aspect correspond bien au concept de smart cost développé par la compagnie, « permettant au voyageur de composer son voyage selon ses envies et son budget, en sélectionnant parmi un large choix de services et de produits », de la même façon qu’il composera son séjour en Polynésie-Française.
Enfin, le passager voyageant via French Bee ne sera vraisemblablement pas un touriste à « hautes contributions », puisque la compagnie smart cost ne dispose pas de classe business ou affaire (uniquement une classe « premium »). Ses passagers iront moins dans des hôtels très prestigieux tels que le Brando « un des hôtels les plus chers au monde » (installé sur l’île deTetiaroa, dans les Îles-du-vent), que ceux de United Airlines ou de Air Tahiti Nui par exemple.
Toutefois, selon M. Assouline, il est important de nuancer cet aspect. Elle ne considère pas forcément que French Bee soit une compagnie qui fasse voyager des passagers en majorité moins aisés. Nous développerons ce point un peu plus tard.

L’arrivée de chacune des nouvelles compagnies aériennes sur le territoire a été bénéfique à l’ensemble du secteur de l’hébergement touristique, et non pas uniquement au segment qu’elle ciblait

L’arrivée de French Bee et de United Airlines devrait, comme nous l’avons vu, contribuer aux différents segments de l’hébergement marchand en Polynésie-Française. Cela se vérifie dans les chiffres, puisqu’on remarque une hausse générale de la fréquentation des établissements touristiques :
Selon l’ISPF, en 2019, la croissance est forte sur l’ensemble des segments touristiques polynésiens, qu’ils soient terrestres marchands (hôtels, pensions), flottants (yacht, croisière intra Polynésie-Française), ou non marchands (nuit chez la famille, ou maison secondaire).
Cette augmentation est notamment portée par French Bee et United Airlines, puisque les marchés nord-américain (+ 12 700 touristes) et métropolitain (+ 6 700 touristes) sont les plus dynamiques en 2019 selon l’ISPF. Ils constituent les deux tiers de la clientèle en hébergement terrestre marchand avec 64 % des effectifs. Plus spécifiquement et toujours selon l’ISPF, le poids de la clientèle américaine et métropolitaine se renforce dans l’hôtellerie internationale.
Cette année-là, la hausse de fréquentation de la clientèle originaire des Etats-Unis (+ 10,7 %) et de France (+ 5,3 %) permet de stabiliser les ventes de chambres dans l’hôtellerie internationale, absorbant la baisse observée sur l’ensemble des marchés émetteurs. En effet on enregistre une baisse parmi les marchés : des pays européens (- 6,1 %), asiatiques (-19%) et Pacifiques (20,4 %).
Les marchés étatsuniens et français (que ciblent United Airlines et French Bee) ont donc été très importants en 2019 pour l’industrie hôtelière polynésienne dans sa globalité.
Cette croissance s’explique par la hausse générale des effectifs, conjuguée à l’augmentation de la durée moyenne de séjour à 14,9 jours. Les effectifs augmentent en effet : la clientèle privilégiant l’hébergement terrestre progresse de 11 % par rapport à 2018, et représente 81 % du total des effectifs touristiques. Parmi ces touristes terrestres, les secteurs du non marchand et du marchand (majorité des touristes en hébergement terrestres) croissent tous les deux. Tous les types d’hébergement payant sont concernés : l’hôtellerie internationale (+ 5,7 %), les pensions de familles (+ 20,4 %) et les meublés du tourisme (+ 31,2 %). Ainsi selon l’ISPF, la hausse de fréquentation touristique profite à tous les types d’hébergement et, plus particulièrement, aux locations de vacances et petite hôtellerie familiale dont les effectifs progressent fortement (on peut y voir l’influence importante de French Bee). Face à l’arrivée de nouvelles compagnies et aux nouveaux profils de voyageurs arrivant à Tahiti, le gouvernement a œuvré pour que l’offre d’hébergements touristiques s’adapte au trafic croissant et à la diversification des pouvoirs d’achat des touristes.
Ainsi, selon Jean-Marc Mocellin, des initiatives ont notamment été mises en place pour « accompagner le développement et la professionnalisation de la Petite Hôtellerie Familiale ».
Pour le directeur de Tahiti Tourisme, la multiplication des meublés du tourisme ont permis de diversifier l’offre d’hébergements touristiques et d’absorber les nouveaux flux de visiteurs transportés par de nouveaux opérateurs aériens depuis 2018, notamment French Bee. Selon BLONDY C. le développement des modes de logement alternatifs rentrent dans la stratégie touristique du gouvernement polynésien, qui désire restructurer l’offre hôtelière traditionnellement orientée vers le luxe sur le territoire tout en augmentant ses capacités, pour s’adapter au flux de touristes.
Ces chiffres confirment donc que French Bee et les passagers qu’elle amène sur le territoire contribuent pour beaucoup à la croissance de l’hébergement familial en Polynésie- Française (statistiques à l’appui) ; et United Airlines et les Étatsuniens voyageant par son biais à celle de l’hôtellerie internationale.
Toutefois, cette distinction n’est pas aussi nette qu’elle le paraît.
Dans les faits, les deux grands « types » de touristes en Polynésie-Française se mélangent souvent.
Selon Christophe Guardia, il n’est pas forcément vrai que la clientèle de French Bee est constituée de passagers moins aisés, à moyenne ou basse contribution. Si la compagnie smart cost a créé de la demande en faisant croître le marché et en faisant voyager de « nouveaux » touristes, la majorité de ses passagers la choisissent pour faire des économies sur leurs billets d’avion (mais se seraient rendus dans tous les cas sur le territoire).
Ainsi selon Madame Assouline, directrice générale de French Bee, il y a de nombreux profils de passagers différents sur la compagnie. « Il y a de tout », notamment car certains voyageurs aisés préfèrent dépenser moins dans le transport pour se faire plaisir une fois sur le territoire : « clairement les Américains ils veulent payer le juste prix […] c’est de plus en plus vrai : si les gens veulent économiser pour s’acheter… un collier de perles, ça les arrange ». Jean Marc Mocellin confirme cette nuance importante, en précisant que contrairement aux idées reçues, la clientèle de French Bee « n’est pas forcément une clientèle qui n’a pas les moyens.
Certains voyageurs préfèrent dépenser moins sur le transport aérien pour pouvoir dépenser plus sur l’hébergement et monter ainsi en gamme, ou encore sur les activités ».
Les touristes voyageant via French Bee peuvent également choisir la petite hôtellerie de façon stratégique : préférant réduire leur budget logement au profit du budget activités et visites des îles (dans lesquelles ils dépenseront beaucoup). En effet, les touristes métropolitains ou européens visitent souvent un plus grand nombre d’îles, et doivent trouver des moyens d’économiser de l’argent.
Ainsi, des passagers aisés comme moins aisés transiteraient via French Bee, et donc leur consommation de l’offre touristique sur place pourrait elle aussi varier (et non pas se concentrer uniquement sur l’offre bon marché et délaisser les offres plus chères).

La croissance du tourisme issue de l’ouverture aérienne peut être bénéfique aux polynésiens, à leur terre et à leur culture ; à la condition qu’elle soit contrôlée par les pouvoirs publics et guidée vers un objectif de durabilité

La Polynésie-Française fait rêver des touristes dans le monde entier. On lui associe souvent des termes tels que « paradisiaque » ou « dépaysant ». Elle est connue pour ses lagons turquoise, ses plages de sable fin, mais aussi pour sa riche culture et la chaleur de ses habitants. Les paysages et la richesse culturelle sont les deux plus grandes forces de la destination, plus encore que dans d’autres endroits. Elles sont au fondement de l’attraction touristique de la PolynésieFrançaise, constituent véritablement la matière première de l’offre touristique du territoire (et des campagnes marketing de ses acteurs). Pour comprendre l’impact qu’a pu avoir l’arrivée de French Bee et de United Airlines en Polynésie, il est donc nécessaire de s’intéresser aux conséquences de l’augmentation du tourisme sur l’environnement, la culture polynésienne, etles conditions de vie des habitants.

Le tourisme et son augmentation peuvent représenter un danger pour la richesse culturelle et naturelle de la Polynésie-Française, et dégrader la qualité de vie de ses habitants

Si le tourisme et son augmentation profitent largement à la croissance économique de la Polynésie-Française, ils ne sont pas sans conséquence sur les richesses de l’archipel et les conditions de vie de ses habitants.
Au cours d’un entretien, Mme. Assouline (directrice de French Bee) déclare ne pas écouter les individus qui craignent les conséquences d’une hausse du tourisme en Polynésie-Française : « si on écoute ces gens-là on fait rien. Nous on fait notre bonhomme de chemin, on leur amène les clients, et après à eux de gérer sur place. On ne peut pas prendre tout en charge, hein ». Ces paroles interpellent, car elles montrent bien qu’au-delà de l’aspect économique, Mme. Assouline en tant que directrice d’une société privée ne fait aucun cas du bien-être des habitants ni des conséquences environnementales d’une augmentation touristique.
Les acteurs publics de cette croissance ont donc une responsabilité sur ce plan, pour surveiller l’impact de la croissance des arrivées sur la qualité de vie en Polynésie, la limiter, et agir si nécessaire.
Etudions les impacts négatifs du tourisme sur la qualité de vie en Polynésie.

Des zones de forte concentration touristique menacent le bien-être des Polynésiens

L’arrivée de French Bee et de United Airlines en Polynésie-Française ont entraîné, comme on l’a vu, une augmentation du nombre de touristes visitant l’archipel. Bien que l’ouverture à de nouveaux marchés grâce à l’implantation d’une compagnie low cost ait permis une diversification et un étalement de l’offre touristique sur le territoire, la majorité des touristes passe toujours (ou passait avant la crise sanitaire) sur les mêmes 3 ou 4 îles. C’est en effet sur Tahiti, Moorea et Bora Bora que séjournent au moins quelques jours la majorité des touristes.
Or, ces îles sont en réalité de très petite taille, notamment Bora Bora qui fait à peine 31 km² soit une superficie équivalente à la ville de Lille ; ou encore Moorea et ses 134km² (légèrement plus grande que Paris Intramuros).
L’augmentation du nombre de touristes rassemblés sur de si petites îles a des conséquences sur la qualité de vie des habitants au quotidien.
En effet, un des risques que rappellent PÉBARTHE-DÉSIRÉ et H. MONDOU V. en 2014, c’est que sur ce type de territoire à la fois très vaste et très émietté, ce n’est pas tant le nombre important de touristes qui compte dans le ressenti d’un « effet de masse », mais la taille du territoire, et le nombre d’habitants comparé au nombre de touristes. Cela peut amoindrir le bienêtre des habitants. Sur la petite île volcanique de Bora Bora, il y a environ 10 000 habitants, alors qu’elle accueillait en 2018 plus de 120 000 touristes.
Madame Tehani Maueau, présidente de l’association Ia Vai Ma Noa Bora Bora, a ainsi constaté certains désagréments subis par la population du fait de l’intense activité touristique de l’île.
Cette association a été créée en 1994 à Bora Bora, dans le but de veiller au développement économique, social et culturel durable de l’île, de façon à préserver la qualité de vie de ses habitants. Tehani Maueau considère que pour maintenir des conditions de vie agréables au quotidien, il est nécessaire d’imaginer une façon de développer Bora Bora en « équilibre et en symbiose » avec son écosystème naturel et humain.

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Table des matières
Table des matières 
Introduction 
Partie 1 : La desserte aérienne comme véritable levier de croissance touristique pour la Polynésie-Française 
Chapitre 1 : Les pouvoirs publics polynésiens misent sur la croissance du tourisme pour relancer l’économie du territoire après la fin des essais nucléaire
1. Le tourisme est la principale ressource propre du territoire polynésien
2. Un développement erratique du tourisme depuis la fin du Centre d’Expérimentations du Pacifique
3. L’arrivée de French Bee et de United Airlines coïncide avec une stratégie publique de
relance du tourisme en Polynésie-Française
Chapitre 2 : L’arrivée de French Bee et United Airlines a bouleversé les chiffres du tourisme et le secteur de l’aérien en Polynésie-Française
1. L’implantation de nouvelles compagnies en Polynésie-Française a ouvert le secteur aérien local à la concurrence, et a conduit à une baisse générale des prix des billets
2. Des arrivées touristiques en forte croissance entre 2017 et début 2020 : influence directe des nouvelles compagnies sur le territoire
3. Une augmentation du nombre de touristes en Polynésie-Française très largement perçue par ses habitants, notamment par les personnes âgées
Partie 2 : Les nouveaux opérateurs aériens ont permis une diversification de la demande et de l’offre touristique en Polynésie-Française. Zoom sur le secteur de l’hébergement touristique
Chapitre 1 : Une destination segmentée entre luxe et expérience ; exemple du secteur de l’hébergement touristique et de sa dépendance à l’aérien
1. L’hébergement en Polynésie-Française : un secteur partagé entre le luxe et la petite hôtellerie familiale
2. Crise sanitaire et Hôtellerie Internationale en Polynésie : un segment fortement dépendant à l’aérien
Chapitre 2 : Un développement conjoint des différents segments de l’offre touristique
polynésienne, grâce à l’arrivée de touristes aux profils et aux préférences variés
1. La clientèle étatsunienne et à haute contribution de United Airlines consomme du luxe, tandis que les passagers métropolitains et moins aisés de French Bee privilégient les pensions de famille
2. L’arrivée de chacune des nouvelles compagnies aériennes sur le territoire a été bénéfique à l’ensemble du secteur de l’hébergement touristique, et non pas uniquement au segment qu’elle ciblait
Partie 3 : La croissance du tourisme issue de l’ouverture aérienne peut être bénéfique aux Polynésiens, à leur terre et à leur culture ; à la condition qu’elle soit contrôlée par les pouvoirs publics et guidée vers un objectif de durabilité 
Chapitre 1 : Le tourisme et son augmentation peuvent représenter un danger pour la richesse culturelle et naturelle de la Polynésie-Française, et dégrader la qualité de vie de ses habitants
1. Des zones de forte concentration touristique menacent le bien-être des Polynésiens
2. Les ressources naturelles de la Polynésie-Française – qui constituent l’un des attraits majeurs de la destination, sont fragilisées par l’augmentation du tourisme et la multiplication des resorts
3. L’identité culturelle polynésienne fragilisée par la théâtralisation des traditions à destination des touristes
Chapitre 2 : Un développement durable de la Polynésie-Française ne peut être envisagé sans
l’apport du tourisme à l’économie polynésienne et au niveau de vie de ses habitants
1. Le tourisme, en tant que principale source de richesse du territoire, contribue largement à la qualité de vie des habitants. Ses impacts négatifs sur la biodiversité peuvent être compensés par des mesures publiques
2. La culture polynésienne peut être mise en valeur et même consolidée par le tourisme international
3. Une opinion générale favorable au tourisme et à son augmentation en Polynésie-Française ; l’aérien symbole de la reprise économique après la crise pour les habitants
4. Une croissance touristique surveillée par les autorités, dans un objectif de développement durable de la Polynésie-Française
Conclusion
Bibliographie 
Annexes 

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