La culture d’agrumes

La culture d’agrumes

La culture d’agrumes à la Réunion

Avec environ 6 400 tonnes de fruits produits par an (Agreste, 2012), l’agrumiculture est la 3ème production fruitière de la Réunion après les cultures d’ananas et de bananes (Chambre d’agriculture de la Réunion, 2016). C’est une culture de diversification développée pour le développement endogène de l’île et quasi exclusivement destinée à la consommation locale. Pour lutter contre le grand nombre de ravageurs et de maladies, la méthode chimique est encore la plus utilisée à la Réunion. Il n’existe pas d’indice de fréquence de traitement (IFT2) de référence pour les vergers d’agrumes à la Réunion. Ceux des producteurs du réseau Agrum’aide varient de 5 à 18 selon les années et les producteurs (Fabrice Le Bellec, communication personnelle). Cependant, bien qu’aujourd’hui l’essentiel de la lutte contre les ravageurs et les maladies soit encore chimique (Lecomte, 2011), il y a une prise de conscience de la part de la société sur l’importance de faire évoluer les pratiques agricoles afin de préserver les hommes et l’environnement. En effet, malgré leur efficacité immédiate apparente, les produits phytosanitaires impactent la santé humaine (Bolognesi et Merlo, 2011) et exercent une pression sur l’environnement, comme en témoigne l’érosion de la biodiversité dans les paysages agricoles (Pereira et al., 2010 ; MEA, 2005 ; Altieri et Nicholls, 2004). De plus, avec l’apparition régulière de résistances chez les ravageurs, certaines matières actives deviennent inefficaces posant alors la question de la durabilité de l’efficacité de la lutte chimique (Albouy, 2012). Depuis les années 1950, le concept de protection intégrée s’est développé. Son principe est de combiner l’ensemble des techniques agronomiques existantes et adaptées au milieu pour maintenir le niveau de bio-agresseurs en dessous du seuil de pertes économiques tout en limitant l’utilisation de produits phytosanitaires. (Lucas, 2007). Le maintien d’un enherbement permettant de favoriser l’établissement de prédateurs semble donc être une technique à considérer dans la protection intégrée. Pour autant, ce n’est que depuis les années 2000, que les producteurs d’agrumes commencent à considérer l’enherbement de leur verger comme une zone à préserver pour protéger les insectes utiles tels que les auxiliaires ou les pollinisateurs. Certains continuent à utiliser des herbicides totaux pour détruire l’enherbement mais d’autres essaient de favoriser la gestion mécanique tout en s’autorisant des traitements chimiques du fait de la forte pression des adventices en milieu tropical. Le désherbage manuel est encore parfois employé mais limité du fait de sa forte demande en main d’œuvre (Le Bellec, 2015).

Les principaux ravageurs et auxiliaires en vergers d’agrumes

Les agrumes sont la cible d’une large communauté de ravageurs. Sur l’île de la Réunion ce cortège de ravageurs rassemble plus d’une vingtaine d’espèces, parmi 13 genres, dans 6 ordres (Lepidoptera, Diptera, Acari, Thysanoptera, Hemiptera, Coleoptera). Les dégâts sont divers et apparaissent à différents stades phénologiques de la plante (Quilici et al., 2003).
Parmi les ravageurs des agrumes à la Réunion on retrouve principalement des arthropodes piqueurs-suceurs tels que des pucerons, des psylles, des cochenilles, des acariens, des aleurodes ou encore des thrips. Les dégâts qu’ils occasionnent sur les agrumes peuvent être directs, avec une dégradation de l’aspect visuel et qualitatif des fruits ainsi qu’un affaiblissement des arbres ponctionnés, mais également indirects. Les pucerons, les cochenilles, les psylles et les aleurodes sécrètent du miellat qui favorise l’établissement de la fumagine, une maladie cryptogamique recouvrant le miellat d’un feutrage noir pouvant limiter la photosynthèse si son développement est important. De plus, le puceron brun, Toxoptera citricida Kirkaldy et le psylle asiatique, Diaphorina citri Kuwayama, présents à la Réunion sont respectivement des vecteurs du virus de la tristeza (CTV) et de la bactérie responsable du greening (ou Huanglongbing) des agrumes (Candidatus Liberibacter spp.). Ces deux maladies engendrent une dégénérescence puis la mort des arbres (F. Leblanc, P. Fournier, et J. Etienne 1998; Quilici, Vincenot, et Franck 2003; F Le Bellec 2005a; F Le Bellec 2005b; Ryckewaert 2011).
Ces divers ravageurs sont régulés par un cortège d’ennemis naturels, encore appelés auxiliaires. Ces auxiliaires peuvent être des prédateurs qui vont alors manger leurs proies ou des parasitoïdes qui se développent aux dépends de leur hôte. Il existe deux sortes de parasitoïdes :
Les endoparasitoïdes qui pondent dans le corps de l’hôte. ;
Les exoparasitoïdes qui pondent sur l’hôte ou non loin et dont les larves attaqueront l’hôte.
Dans les deux cas, le développement des larves entraîne la mort de l’hôte (INRA, 2016).
Selon leur régime alimentaire, on différencie les auxiliaires polyphages des auxiliaires oligophages et monophages. Les premiers sont généralistes et peuvent se nourrir d’un grand nombre d’espèces de proies tandis que les deux autres se nourrissent respectivement d’un groupe restreint d’espèces de proies et d’une seule espèce. Qu’ils soient prédateurs ou parasitoïdes, les auxiliaires considérés dans ce rapport sont tous entomophages, c’est-à-dire qu’ils se nourrissent d’insectes. En vergers d’agrumes à la Réunion on retrouve en tant que généralistes principalement des coccinelles tandis que les syrphes et les chrysopes sont pour la plupart oligophages et plus précisément aphidiphages.

La lutte biologique par conservation des habitats : une alternative

à l’utilisation des produits phytosanitaires Dans le contexte actuel de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, soutenu par le Plan ECOPHYTO II en France, il est nécessaire de considérer toutes les pratiques culturales alternatives limitant l’utilisation d’intrants chimiques. Selon le Millenium Ecosystem Assessment (2005), la biodiversité est source d’un grand nombre de services écosystémiques bénéfiques à l’agriculture. Elle participe directement à la production agricole au travers notamment de la pollinisation ou de la régulation des maladies et des ravageurs par les auxiliaires (Lecomte, 2011). Elle offre un milieu et une nourriture diversifiés qui permettent d’attirer un plus grand nombre d’espèces animales qu’un paysage simplifié.
L’augmentation de la biodiversité au sein d’une exploitation peut provenir de la diversification des espèces cultivées dans l’espace et dans le temps mais également de l’entretien et de l’amélioration de toutes les zones semi-naturelles entourant les parcelles ou au sein des vergers. La lutte biologique par conservation des habitats consiste à maintenir ces zones non-cultivées peu perturbées, pour favoriser l’installation des auxiliaires en leur fournissant : de la nourriture, un lieu de refuge et de reproduction ainsi qu’un milieu d’estivation et d’hivernation (Sarthou, 2006 ; Ratnadass et al., 2012 ; Rouabah, 2015). Bien que l’on prête souvent un régime alimentaire carnivore aux prédateurs, on sait actuellement qu’un grand nombre sont omnivores et consomment également de la nourriture provenant des plantes (Wäckers et al., 2005 ; Wäckers et Fadamiro, 2005). Ainsi, les éléments nutritifs tels que le nectar et le pollen fournis par les milieux semi-naturels sont essentiels aux auxiliaires quand les proies se font rares (Medeiros et al., 2010). Un autre élément essentiel des zones semi-naturelles est qu’elles hébergent des ravageurs en plus des auxiliaires. Ceux-ci sont une source de nourriture pour les auxiliaires lorsque les cultures ne sont pas attaquées. La préservation de milieux non perturbés aux alentours des cultures doit donc permettre d’attirer les auxiliaires mais surtout de garantir leur maintien au cours du temps. Même si l’effet des habitats semi-naturels est encore parfois complexe à appréhender (Ratnadass et al., 2012), la biodiversité végétale permet une plus grande résilience des agrosystèmes (Sarthou, 2006) et s’accompagne de façon générale d’une régression du nombre d’attaques de ravageurs (Altieri et Nicholls, 2004 ; Ratnadass et al., 2012 ; Rouabah, 2015). Cependant, il ne s’agit pas d’augmenter la biodiversité pour la biodiversité mais de favoriser la diversité utile pour l’agrosystème (Altieri et Nicholls, 2004 ; Lavandero et al., 2006 ; Rouabah, 2015). Pour cela, il est nécessaire de connaître les relations qui existent entre les plantes et les insectes afin de favoriser la « bonne » diversité (Burgio et al., 2006).

L’approche fonctionnelle pour l’étude des relations plantes insectes

L’approche fonctionnelle est très utilisée en écologie pour comprendre la structuration des communautés et le fonctionnement des écosystèmes ( Violle et al., 2007 ; Moretti et Legg, 2009 ; Vandewalle et al., 2010). Elle permet d’évaluer le comportement qu’auront les communautés face à des perturbations du milieu et de mettre à jour des interactions au sein d’un écosystème, telles que des relations plantes-insectes que l’approche taxonomique ne révèle pas (Lavorel et Garnier, 2002; Moretti et Legg, 2009). Malgré son utilisation courante, le concept de trait fonctionnel et notamment ses définitions peuvent varier suivant les auteurs et leur domaine de recherche. Selon Violle et al. (2007), un trait fonctionnel est un paramètre phénologique, morphologique ou physiologique d’un individu, qui impacte indirectement la fitness de ce dernier de par son action sur sa croissance, sa reproduction et son taux de survie.Cette définition sera celle considérée dans ce mémoire. Il existe deux types de traits fonctionnels pour l’étude des communautés végétales.Dans le cadre de l’étude des relations plantes – insectes il convient de s’intéresser aux traits d’effet qui déterminent l’influence d’une communauté végétale sur son écosystème (Lavorel et Garnier, 2002). L’étude fonctionnelle permet de caractériser une communauté végétale par des traits d’effet et leur proportion respective dans la communauté. Ainsi, elle permet de s’affranchir des espèces végétales constitutives de cette communauté. En connaissant l’action des différents traits d’effet sur les insectes il serait alors possible d’appréhender globalement l’intérêt d’une communauté végétale pour la lutte biologique par conservation.

Traits d’effets d’intérêt dans le cas de l’étude

Sur la base de recherches bibliographiques effectuées dans des rapports précédents, dans le cadre du projet Agrum’aide, nous avons sélectionné 10 traits fonctionnels ayant un intérêt pour soutenir la lutte biologique et facilement observables (Ollivier, 2015 ; Audouin, 2016).
Parmi ces traits, certains fournissent un habitat, c’est le cas de tous ceux concernant les caractéristiques morphologiques des feuilles, d’autres de la nourriture alternative aux proies (Nectaire extra floraux (NEF), pollen) ou encore facilitent la visibilité et l’accessibilité à la ressource (taille des fleurs, de l’inflorescence, couleur des fleurs). Quelques traits, comme les trichomes, et les domaties peuvent fournir les deux car ils constituent un abri pour les auxiliaires de petite taille mais permettent également de piéger des ravageurs ou d’accrocher du pollen pouvant alors être consommés par les auxiliaires présents (Agrawal et al., 2000 ; Dalin et al., 2008).
De par leur nombre important, les fourmis régulent de façon efficace les phytophages, telles que des chenilles ou des mouches, présents dans leur rayon d’action (Albouy, 2012).
Cependant, certaines fourmis peuvent participer au maintien de ravageurs telles que les cochenilles en les élevant à l’intérieur des tiges par exemple, pour se nourrir de leur miellat (Jolivet, 1991).

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Table des matières

1. Introduction
2. Contexte 
2.1. La culture d’agrumes à la Réunion
2.2. Les principaux ravageurs et auxiliaires en vergers d’agrumes
2.2.1. Les Coccinellidae
2.2.2. Les Chrysopidae
2.2.3. Les Syrphidae
2.2.4. Micro-hyménoptères parasitoïdes
3. Lutte biologique par conservation et approche fonctionnelle 
3.1. La lutte biologique par conservation des habitats : une alternative à l’utilisation des produits phytosanitaires
3.2. L’approche fonctionnelle pour l’étude des relations plantes-insectes
3.3. Traits d’effets d’intérêt dans le cas de l’étude
3.3.1. Nectaires extra floraux (NEF)
3.3.2. Les trichomes
3.3.3. Recouvrement de espèces végétales
3.3.4. Taille de l’inflorescence et des fleurs
3.3.5. Textures et structures foliaires
4. Objectifs du stage
5. Matériel et méthodes 
5.1. Dispositif expérimental
5.2. Caractérisation en traits fonctionnels des couverts étudiés
5.3. Suivi entomologique
5.3.1. Présentation des pièges cornet unidirectionnels
5.3.2. Protocole de piégeage
5.4. Traitement des données
5.4.1. Etude des couverts végétaux du projet
5.4.2. Comparaison des communautés d’arthropodes en fonction du stade de croissance des couverts et de la modalité de gestion de l’enherbement
5.4.3. Mise en relation des traits d’effet des plantes avec les auxiliaires observés
6. Résultats
6.1. Différenciation en traits d’effet d’intérêt des quatre enherbements
6.1.1. Caractérisation de la flore du relevé 1
6.1.2. Caractérisation de la flore du relevé 2
6.1.3. Caractérisation de la flore du relevé 3
6.1.4. Comparaison des compositions fonctionnelles des couverts entre les trois relevés
6.2. Impact de l’état de l’enherbement sur les populations d’auxiliaires et de pucerons
6.2.1. Nombre d’individus piégés selon les trois relevés : étude des coccinelles, des syrphes et des araignées
6.2.2. Comparaison des populations de coccinelles, parasitoïdes, fourmis et pucerons avant et après gestion de l’enherbement pour les quatre modalités
6.3. Effet de l’ITK sur les auxiliaires et les pucerons
6.4. Etudes des relations existantes entre les traits d’effet et les coccinelles
6. Discussion
6.1. Pièges cornets
6.2. Dispositif expérimental .
6.3. Impact des modes de gestion sur la fonctionnalité de l’enherbement
6.4. Relations plante-insecte
7. Conclusion 

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