LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE EN VOLUME DES MENAGES

LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE EN VOLUME DES MENAGES

La consommation alimentaire 

Tout au long de cette thèse, la consommation alimentaire renvoie à la consommation alimentaire humaine. La consommation alimentaire non humaine est donc exclue. Dans la théorie économique, la consommation est définie comme l’utilisation des biens et des ressources pour la satisfaction des besoins. Devant l’impossibilité de mesurer leur utilisation effective par les agents économiques, c’est l’achat des biens et services qui est le plus souvent utilisé pour mesurer la consommation dans les analyses économiques. Les économistes mesurent habituellement la consommation à partir des dépenses de consommation. C’est-à-dire le montant d’argent dépensé pour acquérir un bien. La consommation alimentaire serait donc dans cette optique, le montant d’argent dépensé pour acheter les biens alimentaires (dépense alimentaire). C’est donc en réalité la valeur monétaire de la consommation qui est mesurée, mais pas la consommation elle-même. Le problème avec cette approche est que ce qui est acheté n’est pas forcément consommé, et ce qui est consommé n’est pas forcément acheté, et la dépense alimentaire est influencée par les prix des aliments. Par exemple un ménage qui a des dépenses alimentaires plus élevées ne consomme pas forcément plus qu’un autre qui dépense moins, d’où l’intérêt d’envisager d’autres mesures de la consommation alimentaire.

Au sens strict, la consommation alimentaire renvoie à la quantité (en grammes) d’aliments mangés par un individu au cours d’une période donnée. Ainsi définie, elle représente le volume d’aliments ingérés par l’organisme. Une telle mesure de la consommation alimentaire n’est possible qu’à l’échelle individuelle. Il faudrait pour cela, peser chaque aliment avant sa consommation et en extraire les restes non consommés, représentant les déchets (les os par exemple) ou les « gaspillages » alimentaires (reste d’aliments « consommables » mais qui ne sont pas consommés). Cette approche pose de nombreux défis. D’abord, la difficulté de peser systématiquement tous les aliments consommés nécessite que l’enquêté accepte de se livrer à l’exercice, ce qui n’est pas toujours le cas. Ensuite, la difficulté d’évaluer les parts non consommées des aliments rend difficile l’estimation de ce qui est réellement ingéré.

Enfin, la possibilité que la pesée modifie la consommation alimentaire de l’individu biaise l’estimation de sa consommation alimentaire. En effet, la pesée pourrait le rendre plus conscient de sa consommation alimentaire « réelle ». Cette méthode de mesure est couteuse et est appropriée pour des suivis individuels très spécifiques ou dans le cadre d’enquêtes concernant un faible nombre de personne. Quand il s’agit d’évaluer la consommation alimentaire au niveau de populations plus importantes, d’autres méthodes sont utilisées telles l’utilisation des enquêtes de dépenses alimentaires (voir par exemple Deaton et Dréze 2009; Bricas, Tchamda, et Thirion 2014; Ecker et Qaim 2011), dans les enquêtes de consommation alimentaire ou dans les bilans alimentaires, ou bien des méthodes plus globales dérivée des « bilans alimentaires ».

Les bilans alimentaires donnent une idée d’ensemble de la composition des approvisionnements ou disponibilités alimentaires d’un pays durant une période spécifiée (FAO 2003). Au sens des bilans alimentaires, la « consommation alimentaire » est approximée par l’offre alimentaire disponible pour chaque habitant d’un pays sur une période donnée. Elle ne correspond pas à ce qui est acheté ou mangé par des individus ou des ménages, mais à ce qui est réputé « disponible » pour la consommation. La consommation alimentaire correspond alors à tout ce qui est acheté, autoproduit (consommation issue de la production du ménage) ou reçu (sous forme de dons) par le ménage et destiné à être consommé sur une période donnée (Angus Deaton 1997). Elle correspond donc à l’ensemble des aliments disponibles dans le ménage, puisqu’elle inclut toutes ses acquisitions : celles qui seront consommées et celles qui ne le seront pas (pertes, gaspillages, etc.). Cette approche est basée sur l’accès économique aux aliments. Les acquisitions alimentaires sont exprimées en valeur monétaire et/ou en volume (grammes, litres, etc.).

La consommation alimentaire 

mesure Elles mesurent l’offre alimentaire nationale, disponible sur une période donnée. Ces disponibilités sont calculées à partir des bilans alimentaires, c’est-à-dire des données de production et d’échanges au niveau agrégé par type de produit. Elles sont obtenues par différence entre la somme de la production alimentaire nationale et les importations alimentaires et la somme des exportations alimentaires, de l’alimentation du bétail, des aliments utilisés sous forme de semences, des pertes et autres utilisations et des variations de stocks en début et fin d’année. La disponibilité calorique peut être dérivée de la disponibilité alimentaire par simple conversion. Les calories sont obtenues en convertissant les quantités (en grammes) comestibles et disponibles pour l’alimentation humaine, grâce aux tables de composition des aliments. En rapportant la disponibilité au nombre d’habitants dans le pays, on déduit la disponibilité par habitant, par personne. Les données de base utilisées par la FAO pour le calcul de la disponibilité alimentaire sont issues de diverses sources.

Les données de production et de commerce sont issues d’enquêtes, de rapports ou des services gouvernementaux. Les données sur les variations de stocks sont fournies par les autorités commerciales ou proviennent des enquêtes sur les stocks à la ferme, mais en général elles sont inexistantes. Les données sur les utilisations proviennent des enquêtes et recensements auprès des usines et ateliers de transformation. Les estimations des déchets sont basées sur les opinions d’experts recueillies dans le pays. Les taux d’ensemencement et d’utilisation pour l’alimentation animale sont issues des enquêtes sur les coûts de production ou des estimations élaborées par les services publics compétents. Les pertes à la transformation proviennent des enquêtes industrielles. Les données recueillies étant généralement incohérentes et peu fiables (FAO 2003), elles sont ajustées et dans certains cas estimées par la FAO elle-même, en exploitant des sources extérieures.

Dans le cas du Cameroun, les quantités produites et échangées, utilisées par la FAO dans le calcul de la disponibilité alimentaire sont fournies par le Ministère camerounais de l’Agriculture et du Développement Rural (MINADER) et d’autres ministères ou organismes nationaux. Le MINADER publie à une fréquence plus ou moins régulière les données de production, d’échanges, des pertes et des productions utilisées comme semences. Ces données sont recensées dans un document appelé « AGRISTAT » et reprises dans une base de donnée par la FAO appelée « Country Stat ». Les données produites par le MINADER sont censées être basées sur des enquêtes agricoles annuelles, mais ce n’est pas toujours le cas, certaines sont des estimations effectuées par les services gouvernementaux. A notre connaissance, ces enquêtes ne sont pas annuelles. Cela peut donc affecter la précision de la valeur réelle de la disponibilité alimentaire calculée par la FAO. Selon la FAO (2003) elle-même, « le coût des enquêtes sur la production et la transformation qui constituent les sources de données appropriées, empêche la plupart des pays en développement d’entreprendre régulièrement ces exercices. » De plus, « là où ces enquêtes se font, leur couverture est habituellement restreinte » (FAO, 2003) et le coût de l’enquête ne permet de couvrir que les cultures vivrières principales. De Haen et al., (2011) ont recensé certains inconvénients aux approches de mesure de la consommation alimentaire de la FAO. Selon ces auteurs, les méthodes de la FAO reposent sur des hypothèses fortes, relatives à la production agricole, au commerce, aux pertes post-récoltes et à la distribution de la disponibilité alimentaire au sein de la population. Ils ajoutent que les approches de la FAO travaillent sur la structure moyenne de la population et ne permettent donc pas de mener une analyse désagrégée de la consommation alimentaire. De plus, les disponibilités alimentaires incluent les gaspillages et pertes alimentaires au sein du ménage qui ne devraient pas être comptabilisées dans la consommation alimentaire.

Origines et historique des LSMS : de l’analyse de pauvreté à l’analyse de la consommation alimentaire Les « LSMS », avant d’être un type d’enquêtes sont d’abord un programme développé par la Banque Mondiale, pour assister les décideurs des pays, dans leurs efforts d’améliorer les conditions de vie de leurs populations en ce qui concerne la santé, l’éducation, le logement, l’alimentation, etc. Ce programme a comme objectifs d’améliorer la qualité des données d’enquêtes auprès des ménages, d’augmenter la capacité des instituts nationaux de statistiques à réaliser de telles enquêtes, d’améliorer la capacité des personnels des instituts nationaux de statistique à analyser les données issues de ces enquêtes pour répondre aux besoins des politiques et de doter les décideurs, de données pouvant être utilisées pour comprendre les déterminants des indicateurs économiques et sociaux, comme la pauvreté. Deaton (1997) fait un historique très précis des enquêtes de type « LSMS ». Elles ont vu le jour en 1979. Leur objectif à l’origine était de permettre le suivi de la pauvreté et des inégalités dans les pays en développement, de mieux compter le nombre de pauvres dans le monde et de faciliter leurs comparaisons entre les pays. Les premières enquêtes ont été réalisées au Pérou et en Côte d’Ivoire en 1985 et 1986.

A la suite de ces premières enquêtes, de nombreuses autres enquêtes ont été réalisées à travers le monde. On peut citer en Afrique celle du Ghana (1987-1988), du Maroc (1990), de la Tanzanie (1990-1993) et plus récemment de l’Ethiopie (2011) et du Nigéria (2013). Au fil des années, ces enquêtes ont commencé à intégrer peu à peu différents aspects de l’environnement socio-économique des ménages tels que la santé, l’éducation et l’alimentation. Les données des enquêtes de type « LSMS » sont utilisées pour estimer le niveau de pauvreté dans les pays en développement. Précisément, elles servent à déterminer le nombre d’unités monétaires nécessaires pour qu’un individu ait accès chaque jour à un seuil minimum de consommation pour couvrir ses besoins alimentaires (estimés en calories) et non alimentaires les plus basiques. Ce seuil correspond au seuil de pauvreté monétaire.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Contexte et problématique
Questions et hypothèses
Plan de la thèse
PREMIERE PARTIE ENJEUX ET DEFIS DE L’UTILISATION DES LSMS POUR L’ESTIMATION DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE ET ILLUSTRATIONS DE L’ESTIMATION DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE A PARTIR D’UNE ENQUETE LSMS
CHAPITRE 1  ENJEUX ET DEFIS DE L’ANALYSE DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE A PARTIR D’ENQUETES DE CONDITIONS DE VIE DES MENAGES (LSMS)
SECTION 1 : CONSOMMATION ALIMENTAIRE : DEFINITIONS ET MESURESLa consommation alimentaire : définitionLa consommation alimentaire : mesure
SECTION 2 : LES ENJEUX ET DEFIS DE L’UTILISATION DES ENQUETES DE TYPE « LSMS » POUR L’ESTIMATION DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIREOrigines et historique des LSMS : de l’analyse de pauvreté à l’analyse de la consommation alimentaireQuelques exemples de l’utilisation des LSMS pour l’analyse de la consommation alimentaireDéfis et limites des enquêtes de type LSMS pour l’estimation de la consommation alimentairePistes d’amélioration des enquêtes de type LSMS pour l’estimation de la consommation alimentaire 
CHAPITRE 2  EST-IL RAISONNABLE D’UTILISER LES ENQUETES DE CONDITIONS DE VIE DES MENAGES POUR ESTIMER LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE EN VOLUME DES MENAGES ?
Introduction
Les méthodes d’estimation de la consommation alimentaire en volume à partir d’enquêtes de type LSMS
Méthodologie d’estimation de la consommation alimentaire en volume à partir des enquêtes camerounaises auprès des ménages (ECAM)
Résultats
Discussion
Conclusion
CHAPITRE 3 METHODOLOGIE DE TRAITEMENT DES « OUTLIERS » POUR L’ESTIMATION DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE DANS LES ENQUETES LSMS 
SECTION 1 : DETECTION ET TRAITEMENT DES « OUTLIERS » : ELEMENTS THEORIQUES
Position du problème
Les différentes sources d’erreurs dans une enquête déclarative
L’identification des données manquantes et des « outliers »
Le traitement des « outliers »
Impact des traitements sur l’estimation des moyennes et des variances
SECTION 2 : GUIDE METHODOLOGIQUE DE TRAITEMENT DES « OUTLIERS » DANS LES ENQUETES LSMS EN VUE DE L’ESTIMATION DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE
SECTION 3: RESULTATS DU TRAITEMENT DES « OUTLIERS » SUR LES DONNEES CAMEROUNAISES
Identification des « outliers »
Impact de l’imputation sur la médiane des distributions de données: test de robustesse de l’imputation
DEUXIEME PARTIE ANALYSES DES EVOLUTIONS DE LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE ET DE LA SOUS-ALIMENTATION A PARTIR DES LSMS AU CAMEROUN
CHAPITRE 4 LA CONSOMMATION ALIMENTAIRE DES MENAGES AU CAMEROUN EST-ELLE COMPATIBLE AVEC LA TRANSITION ALIMENTAIRE ?
La transition alimentaire : un cadre conceptuel d’analyse des changements alimentaires
L’alimentation des ménages au Cameroun en 2007
2.1. Les racines, tubercules et céréales représentent plus de la moitié de la consommation alimentaire tandis que les produits animaux sont peu présents dans le régime alimentaire
2.2. Mise en évidence des disparités de la consommation alimentaire entre les ménages
2.3. Consommation des produits alimentaires industriels
L’évolution de la consommation alimentaire des ménages entre 2001 et 2007
Discussion
CHAPITRE 5 ESTIMATING TRENDS IN PREVALENCE OF UNDERNOURISHMENT: ADVANTAGES OF USING HCES OVER THE FAO APPROACH IN A CASE STUDY FROM CAMEROON
CONCLUSION GENERALE

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