La collecte de l’objet contemporain au sein de l’écomusée et du musée de société

L’impact de la pensée anthropologique sur l’ethnologie française

   La notion de l’objet exotique est née avec les cabinets de curiosité au XVIIIe siècle. À cette époque, les souverains d’Europe développaient ces cabinets où ils rassemblaient toutes sortes d’objets rares ou insolites, rapportés de pays lointains en voie de colonisation. Ce fut le cas, par exemple, du Cabinet du Roy, devenu Muséum d’histoire naturelle en 1793, ou encore du Cabinet des antiques de la Bibliothèque nationale en 1795. Au XIXe siècle, l’expansion coloniale offrit à l’ethnologie évolutionniste naissante de vastes domaines d’étude et permit à des institutions officielles de voir le jour : ce fut par exemple le cas en 1827, sous le règne de Charles X, lorsque fut ouvert, dans les Galeries du Louvre, le musée de la Marine et d’Ethnographie. Progressivement, la recherche des peuples « primitifs » dits « sauvages » et de leurs productions matérielles a abouti à un discours scientifique élaboré sur la relation de l’objet avec d’autres objets de la même culture. C’est ainsi qu’est née la notion de l’objet ethnographique, témoignage culturel et scientifique qui permet d’expliquer, d’illustrer et de reconstituer une partie de la vie de l’ethnie étudiée. « Contrairement à la “curiosité” des cabinets du XVIIIe siècle, l’objet ethnographique qui émerge au XIXe siècle n’a de sens que mis en relation avec d’autres, constituant ainsi une collection, base de la réflexion et du discours scientifique », explique Fabrice Grognet (2005 : 50). Les productions matérielles sont répertoriées en fonction de leur origine géographique, de leur époque et de leur usage. Elles sont donc considérées sous l’angle de l’utilité pratique et sociale. Ce sont des objets d’étude heuristique. La conceptualisation sous-jacente à cette démarche avait pour but de classer les objets et de les référencer au moyen de toutes les informations nécessaires à leur identification : cartels, cartes géographiques, dessins, photographies, etc. C’est cet effort de conceptualisation que l’on trouve à l’origine de la notion de l’objet « document ». La valeur documentaire de l’objet repose aussi bien sur sa relation avec d’autres objets matériels de son milieu que sur son appartenance à un environnement physique particulier (une maison, un atelier d’artisan…). L’objet in situ, conservé dans son contexte d’origine ou dans son milieu naturel, est le plus à même de représenter les activités humaines qui ont conduit à sa production ou à son utilisation. Pour mieux l’appréhender, il faut en dresser un inventaire complet en préalable à l’acquisition et aux études et analyses à venir. Selon Fabrice Grognet (2005 : 50), bien que l’objet-témoin ait été conçu par la collecte sur le terrain, c’est bien l’inventaire qui marqua sa naissance officielle en légitimant son existence dans le patrimoine français et dans les musées. C’est dans cet esprit que le « service des missions » a été mis en place en 1842, afin d’enrichir les collections. L’Exposition universelle de 1878 à Paris a accentué l’engouement pour les spécimens ethnographiques des colonies qui nourrissaient l’imaginaire colonial. Le succès de cet événement est à l’origine de la construction, sur le site même où elle avait eu lieu, du musée d’Ethnographie du Trocadéro(MET), premier musée ethnographique en France, fondé par le professeur Ernest-Théodore Hamy en 1878 et ouvert au public en 1882. Le MET accueillit les collections présentées au cours des grandes Expositions universelles ; les Fauves et les Cubistes y découvrirent l’art nègre au début du XXe siècle. Il rassemblait, entre autres, les collections du musée du Louvre, du Muséum d’histoire naturelle– auquel il fut rattaché en 1928 – de la Bibliothèque nationale et de la bibliothèque SainteGeneviève. Le 18 avril 1884, jour de l’inaugurationde la Salle de France, on y présenta pour la première fois au public, à côté des objets exotiques provenant des colonies extraeuropéennes, des objets témoins de la société française. Cette salle marqua la matérialisation d’une section principalement consacrée à l’ethnologie de la France et à d’autres cultures paysannes d’Europe, à un moment où les missions de collectes d’objets, entreprises au nom de l’État, ne concernaient que le monde extra-européen. Son aspect patriotique eut beaucoup de succès auprès du public. Elle constitua le premier noyau des futures collections du musée national des Arts et Traditions populaires (MNATP). Cependant, la création du MET, bien qu’elle ait contribué à l’entrée des objets extra-européens dans les collections du patrimoine français, n’a pas fait évoluer le sens donné à l’objet ethnographique depuis le début de l’ethnologie évolutionniste du XIXe siècle, qui considérait l’objet comme un indicateur du stade de développement d’une culture et postulait que l’histoire des sociétés se déroule de façon progressive et sans discontinuité. Cela s’expliquait par la généralisation du terme d’objet ethnographique à toutes les choses matérielles (Grognet, 2005). Effectivement, ce courant de pensée anthropologique présuppose que puisqu’il n’existe qu’une espèce humaine, toutes les sociétés suivent le même schéma d’évolution, depuis l’état primitif jusqu’au stade atteint par la civilisation occidentale. Ces principes ont certainement enrichi l’ethnologie, dans le même temps qu’ils assimilaient l’évolution de l’humanité à l’évolution biologique : l’objet fut alors appréhendé, selon Ernest-Théodore Hamy, comme une sorte de prolongement de l’organisme humain, le biologique et le culturel ne faisant qu’un, ce qui mit fin à la perpétuelle opposition entre sciences naturelles et sciences humaines. Cependant, ce paradigme finit par susciter des critiques, car il impliquait de concevoir l’évolution de l’histoire de l’humanité de façon univoque, quelle que soit la situation des peuples dans le temps et dans l’espace, et appliquait cette évolution, au sens large de progrès, à différentes notions comme l’organisation sociale, la parenté ou encore les caractéristiques politiques et religieuses des sociétés.

La professionnalisation de l’ethnologie

   La célèbre mission Dakar-Djibouti, organisée par l’Institut d’ethnologie de Paris à l’initiative de Georges Henri Rivière et dirigée par Marcel Griaule de 1931 à 1933, a concrètement inauguré l’ethnologie de terrain en France. Traversant les empires coloniaux français et anglais, cette mission a rapporté une collection impressionnante de près de trois mille objets, déposés au musée d’Ethnographie du Trocadéro. Grâce à cette mission et à l’observation participante qu’elle a initiée comme nouvelle méthode d’investigation, l’objet exotique devint un témoin scientifique, notion qui allait s’accentuer plus particulièrement en raison de la place qu’il occupait dans la vie quotidienne de ses cultures d’origine. Ainsi, « l’ethnographe, par définition, de terrain, remplace (…) le voyageur et l’anthropologue de cabinet » (Grognet, 2005 : 52). Cette démarche amorçait les premières étapes de la redéfinition de l’objet ethnographique. Le terme d’objet dit « ethnographique » désigne tout objet fabriqué, modifié ou utilisé par l’homme et qui témoigne de son organisation matérielle et culturelle en société. C’est un outil d’interprétation indispensable à partir duquel il est possible d’expliquer, d’illustrer et de reconstituer une partie de la vie de l’homme dans son milieu. Il comprend aussi bien les objetsà trois dimensions que les photographies, les enregistrements ou les témoignages culturels recueillis ou documentés en vue de l’étude de la culture humaine. De ce fait, il est un bien culturel. La définition de l’objet ethnographique fut longtemps liée, aux débuts de la discipline ethnologique française, à la culture matérielle, notamment dans l’interprétation et l’étude des sociétés primitives sans écriture, contrairement aux sociétés civilisées dont l’étude passait par les archives écrites (Turgeon, 2007 : 16). Cette opposition entre la chose matérielle et la trace écrite fut longtemps utilisée par les anthropologues et ethnologues, particulièrement en France.Dans ce sens, Marie-Pierre Julien et Céline Rosselin (2005 : 31) notent que le terme d’objet ethnographique « renvoie communément à un objet matériel fabriqué et utilisé dans les sociétés dites “primitives” ou plus rarement, dans les régions de France d’avant l’ère industrielle ». Dans le contexte ethnographique de l’entre-deux-guerres, l’objet ethnographique fut d’abord considéré uniquement dans sa matérialité, en vue de sa conservation ; il fut collecté comme « témoin » (Instructions sommaires, 1931 : 8), c’est-à-dire comme document servant à faire connaissance d’une culture donnée. Ainsi, l’objet-témoin, tel qu’il fut révélé par la mission ethnographique et linguistique Dakar-Djibouti (1931-1933), et ses Instructions sommaires de collecte, était classé au rang de « preuve objective » (Jamin, 1985 : 66) et de « pièce à conviction » (Instructions sommaires, ibid. : 6). Ce dernier précepte a été forgé par Marcel Griaule, lorsqu’il avançait en 1933 que, contrairement au témoignage écrit ou oral, l’objet « ne peut ni tromper ni mentir », comme l’explique Jean Jamin (1995 : 18) : « L’objet ethnographique devient un témoin, une “pièce à conviction”, en d’autres termes un échantillon de civilisation. Il est à la fois signe, reflet, spécimen. Comme la photographie à laquelle on recourt muséographiquement pour en montrer les usages ou faire voir le contexte, l’objet ethnographique vient dire que quelque chose a été ». Cette notion d’objet-témoin a réduit l’ethnographie à l’étude de la culture matérielle. Il suffit pour s’en convaincre de considérer l’objectif que s’était donné la mission DakarDjibouti de rassembler le plus grand nombre possible d’objets représentatifs, provenant de cultures lointaines, particulièrement en Afrique, en multipliant les enquêtes “extensives” ou “intensives” sur le terrain (Rivet, Rivière, 1931 : 11) afin de compléter les collections du musée d’Ethnographie du Trocadéro. Cela explique en partie le paradoxe que comporte cette notion de « témoin », prédominante à l’époque, qui accordait aux productions matérielles le statut absolu d’« archives plus révélatrices et plus sûres que les archives écrites » (Instructions sommaires, 1931 : 6) et orales, mais sans pour autant qu’elles se suffisent à elles-mêmes ni ne signifient quelque chose sans un travail de documentation préétabli, susceptible de les rendre compréhensibles à l’intérieur d’un corps social et de les transformer en objets scientifiques de musée. « Toutes les activités humaines se traduisent par des objets […], mais il serait imprudent de s’en tenir là », affirmait Marcel Griaule (1933 : 7). En l’absence de documents écrits, l’objet a donc un statut d’« archive matérielle » au même titre que les documents historiques écrits (Dubuc, 1998).

La notion de « fait social total »

   De la même façon que l’objet archéologique constituait une preuve tangible, irrévocable, pour révéler et interpréter les données historiques et archéologiques, les objets étaient la « preuve du fait social total » Ce concept introduit par Marcel Mauss dans son Manuel d’ethnographie, signifie que c’est la culture dans sa globalité qui donne sens aux objets. Ces derniers sont pensés en forme de « synecdoque » (Julien, Rosselin, 2005 : 34) et doivent être pris en compte dans leur relation avec toutes les composantes et institutions du corps social observé. Le « fait social total » consiste à saisir les réalités sociales dans leur totalité : tout est fait social, y compris la dimension psycho-physiologique (manière de parler, de marcher, des’habiller…). C’est un principe heuristique d’accès à la connaissance d’une société. Il ne donne sens aux objets (parties) qu’incorporés à une culture considérée comme un tout. En conséquence, ceux-ci ne peuvent être étudiés pour eux-mêmes car il est impossible de les saisir sans recourir à une documentation préalable. Pour appliquer ce concept de « fait social total » sur le terrain, les ethnologues avaient recours à l’« observation plurielle », telle que l’a définie Marcel Griaule, pour fournir aux enquêteurs un outil méthodologique d’investigation sur place. Ce procédé avait l’avantage de réunir les membres d’une même équipe de recherche autour d’un même objet d’étude, ce qui permettait de croiser les informations obtenues à son sujet et de les interpréter suivant plusieurs points de vue (Clifford, 1996 : 72). Par ailleurs, il conduisait à considérer l’informateur comme sujet absolu, détenant à lui seul la réalité totale de la société à laquelle il appartient. De ce fait, l’observation plurielle transformait l’indigène en un objet de savoir(Jamin, 1984 : 40), ce qui révélait en soi une part importante de subjectivité. La notion de « fait social total » appuie donc l’idée de la matérialisation de la culture, mais elle reste « ambiguë » et « embarrassante », pour reprendre les termes de James Clifford ; car même si elle rend légitimes les « descriptions culturelles partielles », elle n’indique pas lesquelles on doit préférer (Clifford, ibid. : 69). Certes, l’objet représentait les faits sociaux, mais il n’en disait pas tout. Néanmoins, comme l’a souligné Jean Jamin, cette notion a le mérite d’avoir permis de reconnaître que les sociétés se définissent aussi bien par les institutions que par les objets (1985 : 60).

Les « années Rivière » et le lancement de la muséographie avant gardiste

   À partir des collections de la section française du musée d’Ethnographie du Trocadéro, sous l’impulsion de Georges Henri Rivière, naquit le projet de ce qui serait le musée national des Arts et Traditions populaires, à l’occasion de l’Exposition universelle de 1937, alors que les collections étrangères étaient attribuées au musée de l’Homme. Installé à ses débuts au Palais de Chaillot, le MNATP s’est vu attribuer en 1969 de nouveaux locaux au Jardin d’acclimatation, dans le Bois de Boulogne, pour abriter les collections et les équipes de recherche. À cette époque, Georges Henri Rivière observait que la France était le seul pays européen à ne pas disposer d’un musée national du folklore et de la culture populaire. Le MNATP de Rivière s’inscrivait à la suite du mouvement des folkloristes et avaitpour double ambition de montrer la diversité du monde rural et paysan français, et de réhabiliter les traditions locales et préindustrielles en voie d’extinction. Le Front populaire, arrivé au pouvoir en 1936, devait témoigner un grand intérêt au patrimoine rural et paysan et soutenir la mise en place de l’institution. Le MNATP fut le premier musée à promouvoir le folklore français, entendu comme l’étude du peuple, et à faire du champ des arts et traditions populaires un véritable objet d’étude scientifique. Des équipes d’enquêteurs, de disciplines diverses, parcoururent les campagnes françaises pour en rapporter le plus grand nombre possible d’informations et d’objets souvent délaissés jusqu’alors et dont on avait oublié jusqu’à l’usage et la fonction. En 1966, la recherche ethnologique fut institutionnalisée au MNATP avec le Centre d’ethnologie française, rattaché au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; le musée devint le siège de la nouvelle Société d’ethnographie française et de sa revue. Derrière cette professionnalisation se trouvait le principe de « musée-laboratoire » de George HenriRivière, qui associait recherche, documentation, collecte d’objets et classification, selon des préceptes scientifiques élaborés au MET par Paul Rivet et reprenait une  systématique prônée par Marcel Mauss à l’Institut d’ethnologie. La recherche ethnographique du MNATP prit deux aspects, selon André Des vallées : « d’une part la recherche spéculative et des études sur le terrain de plus en plus affinées, d’autre part l’expression muséographique des résultats » (1991 : 133). L’objectif était d’analyser les phénomènes de société à la lumière des sciences humaines et sociales. Des équipes de chercheurs furent constituées pour relever les coutumes locales et collecter des objets, mais leurs enquêtes de terrain restaient centrées sur le monde rural. Cette mode d’avant-garde axée sur le rural intéressait les surréalistes, parmi lesquels Rivière comptait beaucoup d’amis et qui voyaient l’art populaire comme un art exotique. Ainsi, « le “musée de synthèse” était un musée français, tandis que le musée de l’Homme était un musée de l’ethnographie mondiale, moins la France » (Trochet, 1995 : 13). À partir de 1968, Georges Henri Rivière a signé avec le MNATP un moment muséographique d’avant-garde, faisant de ce musée ce qu’on a surnommé « le Louvre du peuple ». En adoptant l’anthropologie sociale et culturelle, le musée présentait « une vision synthétique » de l’histoire régionale rurale depuis le XIXe siècle jusqu’aux années 1960. Dans son domaine, le musée d’ethnographie s’est imposé face aux musées des beaux-arts et d’histoire naturelle, « non par présentation d’œuvres mais expression d’un savoir » (Hubert,1991 : 77). Sur le plan muséographique, Georges Henri Rivière a remplacé par des vitrines thématiques les expositions sur mannequins connues jusqu’alors, montrées par exemple lors des expositions universelles. Véritable « magicien des vitrines », il parvint à présenter les objets dans toute leur histoire depuis leur acquisition par le musée.Georges Henri Rivière a créé, de la sorte, une muséographie novatrice pour son époque, que Claude Lévi-Strauss qualifiait de « puriste et élégante » (Lévi-Strauss, 1986 : 130). Fondée sur une « esthétique de présentation » qui équivalait à celle des objets d’art, elle visait à susciter l’émotion du visiteur. Décrivant ces réalisations muséographiques remarquables, Isac Chiva explique que George Henri Rivière, en recherchant ce qu’il appelait « une sorte de fonctionnalisme muséographique », « s’efforçait de “purifier” l’objet, de se libérer des “routines” telle celle de la symétrie axiale, d’imposer aux présentations des “ rythmes dynamiques ”, en ménageant des vides et des pauses. La construction muséographique devait cependant rester aussi proche que possible du programme scientifique. Toute présentation devait être conçue pour permettre des modifications élémentpar élément et, par là, rester évolutive. Il préconisait, enfin, l’emploi systématique, massif, des techniques audiovisuelles » (Chiva, 1985 : 81).

Le manque d’autonomie scientifique et budgétaire

   Un autre facteur, d’ordre scientifique, participait également de cette crise. Il s’agissait du conflit entre les chercheurs d’une part et les conservateurs du musée de l’Homme et du MNATP de l’autre, et de la rupture de ces musées avec l’anthropologie sociale, ce qui anticipait leur fermeture. Alors que les recherches des conservateurs portaient sur les collections, celles des chercheurs s’intéressaient aux faits sociaux et culturels des groupes humains. Les premiers étaient partisans de la  collecte systématique des objets, les seconds aspiraient à analyser les différents aspects de l’ethnologie moderne, d’un point de vue plus sociologique. Les champs d’étude de l’ethnologie française se renouvelaient, contrairement au domaine des traditions populaires. Avec l’arrivée d’une nouvelle génération de conservateurs, ce déséquilibre apparent entre recherche et conservation s’est aggravé au MNATP, dégénérant en querelles institutionnelles entre le laboratoire et le musée, particulièrement au sujet des statuts des uns et des autres et de leurs rôles respectifs au sein de l’établissement. Miné par cette atmosphère conflictuelle, le musée était en mal d’un projet fédérateur capable de réunir les deux clans. Ses locaux devenaient vétustes et le nombre de ses visiteurs chutait considérablement. La Direction des musées de France (DMF) finit par lui accorder moins de crédits et par le juger très onéreux en coûts de fonctionnement. De plus en plus isolé parmi les musées nationaux relevant du ministère de la Culture, car davantage tourné vers une démarche de transmissionque de conservation, « le beau projet de Rivière était mort » (Segalen, 2005). Cette mort lente fut évidente après l’échec des tentatives d’expertises45 visant son redressement interne. À partir de 1999, le musée fit l’objet d’une décentralisation culturelle à Marseille. Il doit désormais devenir ce que Martine Segalen appelle un « musée citoyen », dont l’ouverture complète est prévue à l’horizon 2013. Ce projet vise à élargir son territoire géographique (l’Europe et la Méditerranée), en lien avec le musée du Quai Branly. Le passage des cultures populaires françaises aux civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, et des riches collections nationales aux collections internationales, s’accompagne d’une nouvelle orientation donnée aux recherches, initialement centrées sur l’ethnologie française uniquement. Une approche transdisciplinaire est adoptée, visant à l’étude des sociétés dans leur totalité et à travers l’épaisseur du temps. Les galeries du MNATP ont définitivement fermé leurs portes au printemps 2005 : le MNATP de Rivière était définitivement un muséequi « avait vécu » (Segalen, 2005). Les mêmes difficultés étaient manifestes au sein du musée de l’Homme. Celui-ci ne pouvait plus gérer les trois laboratoires de recherche du Muséum national d’histoire naturelle (les laboratoires d’Anthropologie biologique, de Préhistoire et d’Ethnologie), lesquels travaillaient chacun isolément. L’établissement, victime d’incohérences budgétaires et d’un certain manque d’autonomie, fut en fin de compte abandonné par ses autorités de tutelle, dontle Muséum national d’histoire naturelle. Les tentatives de mobilisation, entreprises dès la findes années 1980 pour le sauver de la crise en le rapprochant du MAAO et du MNATP n’ont pu aboutir. En 2002, fut commanditée une mission pour préparer sa rénovation, suivie du lancement d’un concours international d’architecture en vue de la modernisation du site Chaillot du Muséum d’histoire naturelle. Le projet visait la transformation du musée en un ambitieux établissement qui devrait montrer l’histoire de toute l’humanité dans son unité et sa diversité, à travers l’évolution biologique de l’Homme et son adaptation au milieu jusqu’à l’élaboration de modèle culturel. Le projet devait également adopter un sens muséographique plus moderne. Le 23 mars 2009, des journées portes ouvertes furent organisées avant la fermeture effective du musée pour travaux ; le public put visiter les locaux pratiquement vidés des collections qu’il renfermait pour s’imprégner du bâtiment dans son état originel avant transformation. La réouverture du site est prévue en 2012, date à laquelle il devrait retracer l’actualité du lien entre anthropologie et muséographie sous de nouveaux augures.

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Table des matières

Introduction générale
La construction du sujet et de la problématique
Les objectifs de la recherche
Le parti pris méthodologique
PREMIÈRE PARTIE – L’OBJET ETHNOGRAPHIQUE EN QUESTION
Introduction de la première partie
Chapitre premier – Les origines de l’objet ethnographique
1. L’impact de la pensée anthropologique sur l’ethnologie française
2. La conception de l’objet : de l’objet exotique à la théorisation de l’objet-témoin
2.1. La professionnalisation de l’ethnologie
2.2. La notion de « fait social total »
3. L’ambiguïté de la notion d’objet-témoin : effets du contre-esthétisme et perspective fonctionnaliste
4. Les « années Rivière » et le lancement de la muséographie avant gardiste
Chapitre II – La crise des « grands musées » d’ethnologie français
1. L’échec du paradigme disciplinaire
2. Le manque d’autonomie scientifique et budgétaire
3. L’incohérence du schéma institutionnel
4. Le statut univoque de l’objet
Chapitre III. L’émergence des écomusées et des musées de société
1. L’effervescence patrimoniale de la décennie 1980-1990 : de l’objet témoin à l’objet patrimonial
2. La genèse écomuséale
2.1. Le contexte de naissance des écomusées
2.2. La théorie communautaire : un principe fédérateur
2.3. Le primat de l’action culturelle
3. De l’écomusée au musée de société
3.1. Les musées de société, symbole d’une nouvelle muséologie
3.2. L’importance de la notion du territoire
3.3. La dimension sociale et participative
3.4. La création et le rôle de la Fédération des écomusées et des musées de société (FEMS)
4. Le contexte de crise des écomusées et des musées de société
4.1. Facteurs d’ordre territorial et scientifique
4.2. Facteurs d’ordre politique et institutionnel
4.3. Facteurs liés au statut de l’objet
Conclusion de la première partie
DEUXIÈME PARTIE. VERS DE NOUVELLES PRATIQUES MUSÉALES ETHNOGRAPHIQUES LIÉES À L’OBJET DANS TROIS MUSÉES DE SOCIÉTÉ 
Introduction de la deuxième partie
Chapitre IV. L’approche anthropologique du musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MUCEM)
1. L’aspect émergent du projet
1.1. Un nouveau modèle d’exposition du musée du XXIe siècle
1.2. Le « chantier des collections »
1.3. Les “campagnes-collectes” : un nouveau dispositif d’acquisition
2. Le contexte de l’étude de terrain
3. Présentation des “campagnes-collectes” étudiées
3.1. Histoire et mémoires du sida
3.1.1. La légitimité scientifique d’un thème « difficile »
3.1.2. Les champs d’intervention muséale sur le sida
3.1.3. La typologie des objets collectés
3.1.4. La complexité des objets liés au sida au musée
3.2. Graff, tag et musiques/danses
3.2.1. La valorisation des arts de la rue au musée
3.2.2. Les critères d’acquisition d’objets liés au graff
3.2.3. Les typologies des objets collectés
3.2.3.1. Le mobilier urbain
3.2.3.2. Les outils des graffeurs
3.2.4. Les typologies des acquisitions liées aux musiques et aux danses urbaines
3.3. Objet touristique et imaginaire du lieu. Le cas de l’objet souvenir dans quelques villes d’Europe et de Méditerranée
3.3.1. La référence aux emblèmes identitaires urbains par l’objet exogène, local et sériel
3.3.2. Les classification muséologiques des objets collectés
3.3.3. L’ambiguïté de la place de l’objet souvenir au musée
3.4. Mariage : Construction du genre en Europe et en Méditerranée
3.4.1. Une campagne d’acquisition à caractère ethnologique
3.4.2. La construction de trois modèles d’artefacts : les objets « documents », les objets « à histoire », et les objets « exemples »
3.5. Écologisation des pensées et des pratiques, conflits et enjeux de pouvoir autour de l’eau
3.5.1. La place des pratiques écologiques contemporaines au musée de civilisation
3.5.2. Les thèmes et les objets représentatifs de l’« écologisation des pensées »
Chapitre V. L’approche « participative » à l’écomusée du Val de Bièvre, Fresnes
1. Le contexte de l’approche contemporaine à l’écomusée du Val de Bièvre
1.1. Les structures de fonctionnement de l’écomusée
1.2. La particularité des missions
1.2.1. Un engagement dans l’action territoriale
1.2.2. Une muséologie participative
1.3. Les orientations de la politique de collecte
1.4. Présentation du corpus de la recherche
1.4.1. La campagne de collecte Vos objets au musée : collecte à l’écomusée
1.4.1.1. Le cadre thématique de la collecte du troisième millénaire
1.4.1.2. Des acquisitions axées sur le territoire
1.4.2. L’exposition Un temps pour soi
1.4.2.1. De l’évolution de la mobilité et des loisirs en ville
1.4.2.2. Les objets matériels et immatériels ciblés
1.4.3. L’exposition C’est un petit Val qui mousse : le patrimoine du Val de Bièvre
1.4.3.1. Autour de l’histoire du Val de Bièvre
1.4.3.2. Le choix muséographique de deux objets emblématiques du territoire
1.4.4. L’exposition Au plaisir du don
1.4.4.1. Un dispositif particulier de collecte auprès de l’habitant
1.4.4.2. Les objets représentatifs du geste de donner
1.4.5. L’exposition Images d’elles. Elles se font femmes
1.4.5.1. La représentation de l’identité du genre à l’écomusée
1.4.5.2. Deux typologies d’objets de la mise en scène de soi : l’objet photographique et l’objet matériel
1.4.5.3. Le statut de l’objet contemporain à l’écomusée du Val de Bièvre
Chapitre VI. L’approche « compréhensive » au musée de la ville de Saint-Quentinen-Yvelines
1. La particularité d’un musée de la ville nouvelle
1.1. L’espace muséographique
1.2. Le lien des collections avec les nouvelles urbanités
1.2.1. Un fonds documentaire singulier
1.2.2. La collection « design »
1.3. Les modes d’acquisition des collections
1.3.1. L’appel à collecte
1.3.2. L’achat
2. Présentation du corpus de recherche
2.1. L’exposition permanente
2.1.1. Un dispositif dédié à l’histoire de la ville nouvelle
2.1.2. Une approche métaphorique de l’objet
2.2. L’exposition L’appartement témoin de son temps
2.2.1. La mise en valeur du mobilier des années 1970
2.2.2. La place de l’objet « design » au musée de société
2.3. L’exposition Photos de famille : toute une histoire !
2.3.1. Une exposition à trois dispositifs
2.3.2. L’objet photographique : un support mémoriel
2.4. L’exposition Vous avez de beaux restes ! Objets et modes de vie du XXe siècle
2.4.1. La muséographie de l’objet contemporain
2.4.1.1. Le « chantier de fouille » : la phase de la « trouvaille »
2.4.1.2. Le « laboratoire » : la phase de l’interprétation
2.4.2. Les spécificités de l’objet du XXe siècle au musée de société
2.5. L’exposition L’art public à Saint-Quentin-en-Yvelines : des œuvres qui ne manquent pas d’air !
2.5.1. La sensibilisation au territoire par l’art monumental
2.5.2. L’importance de l’art public au musée
2.5.3. L’approche de l’objet d’art public au musée
2.6. La posture scientifique du musée de la ville face à l’objet contemporain
Conclusion de la deuxième partie
TROISIÈME PARTIE. LES ENJEUX DE LA COLLECTE DU CONTEMPORAIN AU SEIN DU MUSÉE DE SOCIÉTÉ
Introduction de la troisième partie
Chapitre VII. Le sens du contemporain au sein du musée de société
1. La représentativité des exemples retenus sur le terrain
2. Une connotation tripartite de l’objet contemporain
Chapitre VIII. La collecte du contemporain à l’échelle de la Fédération des écomusées et des musées de société (FEMS)
1. Présentation de l’outil d’analyse
2. Les besoins et l’intérêt de la collecte du contemporain au sein du réseau de la FEMS
Chapitre VIIII. Les conséqeunces de la collecte du contemporain sur le statut des objets au musée de société
1. La mise à distance temporelle entre passé et présent
2. La perspective documentaire des collectes d’objets contemporains
2.1. La logique des « archives » et du « document » dans les cas d’étude de terrain
2.2. Le sens de la mise en archives au musée de société
3. La logique évaluative de la collecte au musée de société
3.1. Le tri des objets : un enjeu scientifique
3.2. Les critères de tri des objets contemporains
3.2.1. Critère lié au contexte de production et de diffusion
3.2.2. Critère lié à l’information
3.2.3. Critère lié à la mémoire
4. La logique de la mise en patrimoine
4.1. Le sens de la notion de patrimoine
4.2. Les principes de la patrimonialisation
4.3. La contradiction de la mise en archives et de la mise en patrimoine
Conclusion de la troisième partie
Conclusion générale

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