Interaction entre cordes vocales et bandes ventriculaires en phonation

Bandes ventriculaires (Josephson & al. [96] , 1933) ? Plis ventriculaires (Zemlin [220] , 1981) ? Plis vestibulaires (Reidenbach [153] , 1998, Guida & al. [69] , 2007) ? «Fausses » cordes vocales (Agarwal & al. [3] , 2003, Kutta & al. [111] , 2004) ? Une chose est claire, la confusion règne autour de ces deux petites structures laryngées situées au-dessus des cordes vocales. Une confusion de tout ordre. Sur leur nom. Leur nature. Leur fonction. Si les ouvrages d’anatomie ne parviennent à s’accorder sur une terminologie unanime, les doutes et les interprétations ne manquent pas non plus au sujet de leur implication dans la production vocale humaine. Les bandes ventriculaires n’interviennent pas a priori dans les processus physiologiques sous jacents à la production de la parole « usuelle » (i.e. sans qualité vocale particulière), tels que l’auto-oscillation des cordes vocales et la modulation du son laryngé (Husson [92] , 1962, Sakakibara & al. [170] , 2004, Esling & al. [51] , 2007). Cependant, leur rapprochement est communément observé en phonation pathologique, chez des personnes souffrant d’un dysfonctionnement vocal (Nasri & al. [137] , 1996, Pinho & al. [152] , 1999, Tsai & al. [204] , 2007). C’est le cas par exemple des patients atteints de dysphonie ventriculaire, où une hypertrophie inflammatoire des bandes ventriculaires vient pallier une anomalie morphologique des cordes vocales ou un trouble de leur mobilité liée à une paralysie ou un blocage. Une adduction des bandes ventriculaires peut également être observée au cours du sanglot, du soupir, de la toux (Pepinsky [150] , 1942), du chuchotement (Zeroual & al. [221] , 2005, Rubin & al. [161] , 2006, Crevier-Buchman & al. [41] , 2008), ou lors de la réalisation du « coup de glotte », trait phonologique retrouvé dans un grand nombre de langues asiatiques, sémitiques et polynésiennes (Esling & al. [50] , 2005, Esling & al. [51] , 2007). Bien que leurs propriétés physiques (grande viscosité et faible raideur) soient différentes de celles généralement observées pour des oscillateurs biomécaniques tels que les cordes vocales, le vélum, la langue ou les lèvres par exemple (Haji & al. [75] , 1992, Agarwal & al. [3] , 2003, Agarwal [2] , 2004), les bandes ventriculaires peuvent s’accoler et/ou vibrer, de façon symptomatique dans des contextes pathologiques (Nasri & al. [137] , 1996), mais également dans la recherche volontaire d’une rugosité dans le timbre de voix (Granqvist & Lindestad [68] , 2001, Lindestad & al. [116] , 2004). La vibration des bandes ventriculaires est utilisée comme technique phonatoire à des fins artistiques durant certaines productions de chant diphonique retrouvées dans les cultures vocales centrasiatiques (Kargyraa des Touvas, prières tibétaines Dbyang et chants Dzo-ke) (Fuks & al. [59] , 1998, Lindestad & al. [118] , 2001, Sakakibara & al. [167] , 2001, Sakakibara & al. [170] , 2004), dans les polyphonies traditionnelles méditerranéennes (chant sarde A Tenore) (Lortat-Jacob [120] , 1998, Henrich & al. [79] , 2006), et dans des styles non-classiques (rock, métal) (Zangger Borch & al. [219] , 2004, Chevaillier & al. [33] , 2008).

L’appareil vocal humain

L’appareil vocal humain est un instrument de musique à vent. il comprend une soufflerie (poumons et trachée), une source vibratoire (cordes vocales dans le larynx) et une série de résonateurs (le conduit vocal, constitué de l’ensemble des cavités comprises entre les cordes vocales, les lèvres et les narines) qui permet à l’être humain d’émettre un son vocal, parlé ou chanté. Du point de vue acoustique, il est capable de produire des sons complexes (sons périodiques ou apériodiques, bruits impulsifs ou continus), modulables en intensité, hauteur et timbre. L’étude de la production vocale distingue les sons « voisés » (voyelles, consonnes voisées, etc.), lorsque les cordes vocales vibrent, des sons « non voisés » (consonnes non voisées, sifflement, bruits de bouche, éternuement, etc.), lorsqu’elles ne vibrent pas. Nous nous intéresserons dans ce travail essentiellement à la source laryngée et à la production des sons voisés.

Anatomie du larynx

Le larynx constitue le commencement des voies respiratoires supérieures.  C’est un conduit de 4 à 5cm de long, situé dans la partie antérieure et médiane du cou (avant l’oesophage) sur le trajet du canal aérien. Il est interposé en avant du pharynx dans lequel il s’ouvre, au-dessus de la trachée qui le prolonge, au-dessous de l’os hyoïde et de la base de la langue, soit au niveau des quatrième et cinquième vertèbres cervicales chez l’adulte. Il possède une mobilité très grande ; ses déplacements se font dans le sens vertical, dans le sens antéro-postérieur et dans le sens latéral. Il est constitué de neuf pièces cartilagineuses articulées entre elles par des ligaments et mus par des muscles, de muqueuses tapissant la cavité, de membranes, de vaisseaux et de nerfs.

La muqueuse laryngée tapisse la face interne du larynx et forme deux paires de replis saggitaux : une paire inférieure, les cordes vocales, qui délimitent la fente glottique, ou glotte, par où passe la colonne d’aire respiratoire, et une paire supérieure, plus large, les bandes ventriculaires. Ces derniers replis sont plus communément appelés « fausses » cordes vocales.

Les cordes vocales sont rattachées à l’avant au cartilage thyroïde par la commissure antérieure où elle se rejoignent et à l’arrière à la base des deux cartilages aryténoïdes (apophyses vocales). Elles sont composées de plusieurs couches de structures différentes (Hirano [83] , 1974, Guily & Roubeau [70] , 1994) :
– le « corps ». Il comprend le muscle vocal (le muscle thyro-aryténoïdien inférieur) ou vocalis , constitué de 640 fibres musculaires par mm² (Dejonckere [45] , 2008) ;
– la « transition ». Elle comprend les couches profonde et moyenne d’un tissu fibreux appelée la lamina propria, constituant le ligament vocal (ou ligament thyro-aryténoïdien inférieur) dont la base s’appuie sur le vocalis. La couche profonde est essentiellement constituée de fibres collagènes et la couche moyenne de fibres élastiques.
– la « couverture ». Elle comprend la couche superficielle de la lamina propria (espace de Reinke), pauvre en fibres élastiques et collagènes, et de l’épithélium de surface. Cette couche de muqueuse donne à la corde vocale une couleur blanc nacrée .

Le locuteur contrôle l’écartement, la longueur, la forme et la tension des cordes vocales en contractant les muscles du larynx ou en changeant les positions des cartilages du larynx les unes par rapport aux autres. Les cordes vocales ont une longueur de l’ordre de 13 à 17mm chez les femmes et 17 à 24mm chez les hommes, et peuvent s’étirer sur 3-4mm (Titze [200] , 1994, Childers [34] , 2000).

Le larynx assume trois fonctions physiologiques essentielles :
– une fonction respiratoire, en contrôlant le débit aérien vers la trachée et les bronches au cours du cycle respiratoire par écartement des cordes vocales ;
– une fonction de protection des fausses routes alimentaires, en fermant l’accès aux voies respiratoires sous-glottiques au cours de la déglutition : lors du passage des aliments, le larynx s’élève, conduisant à l’abaissement passif de l’épiglotte sur la margelle laryngée et à la fermeture de la glotte, permettant aux aliments de glisser vers les sinus piriformes jusqu’à l’oesophage (voies digestives).
– une fonction phonatoire, développée dans ce travail de thèse : le larynx est l’organe essentiel de la phonation.

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Table des matières

INTRODUCTION
I Première partie : Quels bagages ?
1 « Que sais-je ? »
Les bandes ventriculaires
1.1 L’appareil vocal humain
1.1.1 Anatomie du larynx
1.1.2 Physiologie de la voix
1.2 Les bandes ventriculaires
1.2.1 Propriétés géométriques
1.2.2 Propriétés histologiques
1.2.3 Propriétés biomécaniques
1.2.4 Participation à la production vocale
1.3 Hypothèses d’interactions entre cordes vocales et bandes ventriculaires
1.3.1 Conduction mécanique
1.3.2 Couplage acoustique
1.3.3 Interaction aérodynamique
1.4 En résumé
2 Comment observer leur implication en phonation ?
Exploration in-vivo
2.1 Méthodes d’exploration de la phonation humaine
2.1.1 Méthodes directes d’exploration in-vivo
2.1.2 Méthodes indirectes d’exploration in-vivo
2.1.3 Détails des observations déduites sur le comportement des bandes ventriculaires
2.2 Description de l’exploration in-vivo
2.2.1 Sujets et tâches
2.2.2 Procédure expérimentale
2.3 Traitement des données
2.3.1 Analyse des signaux audio
2.3.2 Analyse des signaux EGG et DEGG
2.3.3 Analyse des signaux vidéo
2.4 En résumé
3 Interaction entre cordes vocales et bandes ventriculaires : un phénomène physique
sous-jacent ? Modélisation théorique
3.1 Etat de l’art
3.1.1 Considérations théoriques sur l’influence aérodynamique des bandes ventriculaires
3.1.2 Modèles physiques de phonation intégrant les bandes ventriculaires
3.2 Modèle aérodynamique de l’interaction entre cordes vocales et bandes ventriculaires
3.2.1 Hypothèses
3.2.2 Modèle de séparation d’écoulement : As1, As3
3.2.3 Modèle de développement géométrique de jet : A2
3.2.4 Modèle aérodynamique : ∆Ptot
3.3 Modèle des auto-oscillations glottiques en interaction avec les bandes ventriculaires
3.3.1 Modèle M2M des cordes vocales avec recouvrement de pression
3.3.2 Modèle dynamique M2×2M du larynx avec recouvrement de pression
3.4 En résumé
4 Comment tester la pertinence du modèle théorique ? Validation in-vitro
4.1 Etat de l’art
4.1.1 Mesures in-vitro sur des larynx excisés
4.1.2 Mesures in-vitro sur des maquettes de l’appareil phonatoire
4.2 Description de l’exploration in-vitro
4.2.1 Maquettes du larynx
4.2.2 Protocole expérimental
4.3 Traitement des données
4.3.1 Extraction de paramètres liés au comportement de la maquette déformable
4.3.2 Analyse des données PIV
4.4 En résumé
II Deuxième partie : Pour quelle destination ?
5 Bandes ventriculaires très écartées
5.1 Corrélats physiologiques de la production de voisement usuel
5.1.1 Description du comportement des bandes ventriculaires
5.1.2 Description du comportement des cordes vocales
5.2 Caractérisation physique de la production de voisement usuel
5.2.1 Conditions d’auto-oscillation glottique
5.2.2 Comportement de l’écoulement translaryngé
5.3 En résumé
6 … rapprochées… accolées
6.1 Occurrences in-vivo d’un rapprochement et d’un contact ventriculaire
6.1.1 Rapprochement ventriculaire
6.1.2 Contact ventriculaire
6.2 Impact d’une constriction ventriculaire sur l’écoulement d’air translaryngé
6.2.1 Variations de la structure du jet glottique
6.2.2 Variations de la structure du jet ventriculaire
6.2.3 Altération des grandeurs cinématiques de l’écoulement
6.2.4 Altération de la chute de pression aux cordes vocales
6.2.5 Chute de pression aux bandes ventriculaires
6.3 Impact d’une constriction ventriculaire sur la vibration glottique
6.3.1 Pressions de seuils d’oscillation
6.3.2 Fréquence fondamentale de vibration
6.4 En résumé
7 … et en vibration
7.1 Occurrences dans le geste phonatoire humain d’une vibration ventriculaire
7.1.1 Vibration ventriculaire apériodique
7.1.2 Vibration ventriculaire périodique
7.2 Le doublement de période (DDP)
7.2.1 Corrélats physiologiques de la phonation DDP
7.2.2 Altération de la vibration glottique
7.2.3 Discussion autour des origines de l’oscillation ventriculaire
7.3 En résumé
CONCLUSIONS

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