Intensité et énergie cinétique turbulente expérimentales

Intensité et énergie cinétique turbulente expérimentales

Problématique en théorie classique de la couche limite

La théorie classique de la couche limite pour prédire les écoulements séparés est basée sur une approche dite hiérarchique. C’est-à-dire que l’on considère en premier lieu le calcul de l’écoulement externe considéré comme non visqueux tout en ignorant la présence de la couche limite, et ce n’est que par la suite que l’on procède à son analyse. Il est cependant devenu clair qu’une telle stratégie mène inévitablement à une contradiction mathématique au point de séparation. Il s’agit de la singularite de Goldstein (Landau et Lifshitz, 1987; Goldstein, 1948). En termes simples, il est impossible de poursuivre le calcul de la solution dans le cadre de la 13 théorie de la couche limite au-delà du point de séparation. L’écoulement externe et la couche limite doivent plutôt être traites simultanement puisqu’ils ont une influence indissociable l’un envers l’autre. Ainsi, il existe en quelque sorte une forme d’interaction entre l’écoulement externe et la couche limite et c’est la structure même de l’écoulement qui vient être modifiée par l’action de la séparation.

Approches mathématiques

Bien que la théorie de Prandtl (1904) soit insuffisante pour décrire le phénomène de la séparation, les informations cruciales qu’elle a fournies sur sa nature et l’approche mathématique développée ont été les fondations méthodologiques des recherches subséquentes, notamment dans le cadre de la theorie asymptotique des ecoulements separes (Sychev, 1998). L’idée de diviser l’écoulement en régions distinctes comportant différentes propriétés s’est avérée être un puissant outil d’analyse que l’on nomme techniquement la methode des expansions asymptotiques raccordees, approche analogue aux methodes perturbatives. Cette méthode consiste à trouver des solutions en série de puissance aux équations qui gouvernent l’écoulement dans des limites asymptotiques et d’en retenir les termes dominants pour ensuite les raccorder et retenir une solution d’ensemble de l’interaction. Un effort important de description mathématique plus générale de la séparation nous ainsi vient de la théorie asymptotique et elle est mieux connue sous le nom de triple-deck theory (structure en trois plateformes) (Stewartson, 1974).

Elle est basée sur une analyse asymptotique des équations de Navier-Stokes représentant la région d’interaction de la séparation. La région d’interaction est ainsi une structure en trois couches (Voir Figure 1.3) composée d’une sous-couche visqueuse proche-paroi (région III), d’une région externe non visqueuse à l’extérieur de la couche limite (région I) et d’une région centrale (région II). Dans la sous-couche visqueuse (région III), le mouvement lent des particules de fluides présents à cet endroit exhibe une propension accrue aux variations de pression. Une petite augmentation de la pression à cet endroit peut entraîner une décélération rapide des particules de fluide. La partie principale (région II) n’apporte quant à elle pas de contribution à l’effet de déplacement de la couche limite, mais transporte seulement celui produit par la sous-couche visqueuse. Les lignes de courant à cet endroit restent parallèles l’une par rapport à l’autre.

Finalement, la partie externe est une région d’écoulement non visqueuse qui sert à convertir les perturbations créées par le déplacement des lignes de courant en perturbations de pression. Ces perturbations sont ensuite retransmises à la région principale (région II) et ensuite à la sous-couche visqueuse (région III) et vice versa. L’élément le plus important qu’il faut retenir de cette théorie est que la séparation vient modifier le champ de pression qui à son tour vient modifier les propriétés de la séparation et ainsi de suite. L’écoulement entier doit donc être traité simultanément pour obtenir une description complète du phénomène.

Les recherches théoriques récentes sur le phénomène de la séparation remettent plutôt en cause l’approche Eulérienne traditionnelle pour valoriser une approche dite Lagrangienne (Van Dommelen et Cowley, 1990; Haller, 2004; Surana et al., 2006). Le processus de la séparation est dans cette optique perçue comme un espace mathématique sous la forme d’un « pic matériel très pointu » où l’on observe l’éjection de particules de fluide à partir de la paroi solide. Cette description lagrangienne est plus favorable puisque la séparation est un processus évolutif dans le temps qui dépend de l’historique de l’écoulement. Ainsi, la nature instationnaire de la séparation est entre autre due à l’implication de différentes échelles de temps à différentes étapes du processus de la séparation (Wu et al., 2006). L’approche descriptive de la séparation par la dynamique de vorticité présentée par Wu et al. (2000) présente bien ce caractère dépendant de la séparation au passé de l’écoulement.

L’idée présentée est que puisque toute la vorticité 15 générée dans un écoulement de couche limite provient entièrement de la paroi par l’entremise d’un flux diffusif de vorticité, la séparation pourrait ainsi être reflétée et décrite à partir de la signature qu’elle laisse sur la paroi. Tout compte fait, la théorie mathématique est encore trop complexe et pas encore assez aboutie pour rendre la prédiction de la séparation une tâche simple à accomplir analytiquement. Bien qu’elle nous donne des informations importantes sur la nature des interactions en présence, elle reste encore aujourd’hui insuffisante et difficile à appliquer pour décrire la séparation dans sa globalité. Pour des aspects pratiques, il est ainsi plutôt favorable de passer par des méthodes de résolution numérique des équations qui gouvernent l’écoulement (éqs. 1.1,1.2), ce qui sera le cas dans ce mémoire.

Mécanismes physiques impliqués dans la séparation

Les différents essais expérimentaux et simulations haute résolution Large-eddy simulation (LES) et Direct numerical simulation (DNS) ont mis en lumière plusieurs particularités physiques de la séparation, fournissant ainsi des indices sur sa nature. Ces indices peuvent indiquer certaines conditions ou exigences à respecter pour conduire une modélisation scrupuleuse du phénomène. Il est important de mentionner que ces observations sont à prendre avec précautions et restent spéculatives, car la topologie de la séparation varie considérablement d’un cas à l’autre. Ainsi, une surface incurvée aura un effet différent qu’une arête vive sur la structure topologique de la séparation ce qui en fait deux cas très distincts. Garcia-Villalba et al. (2009) confirment à titre d’exemple l’interaction à double sens entre l’écoulement externe et la région séparée telle que soulevée par la théorie mathématique (Voir section 1.4.2.2). À cet effet, la séparation est d’après leurs observations continuellement modifiée par les grandes structures vorticielles générées à partir de la surface vers l’écoulement externe.

D’une manière plus détaillée et complète, Ayotte et Hughes (2004) expliquent les grandes lignes du cycle qui intervient dans la séparation en aval d’une colline rugueuse : « In the region where the mean flow is separated, lee-side eddies form in the adverse pressure gradient. These eddies form, grow and possibly even reach a quasisteady state, taking on the horizontal length scale of the pressure gradient in which they are formed. As these lee-side eddies are forming, the instantaneous mean shear at the top of the separated region increases. In the presence of this strongly sheared profile, rapidly growing unstable Kelvin-Helmholtz modes grow, roll up and break, extracting horizontal momentum from the mean flow above and injecting it into the separated region. The coherent vortex is destroyed while at the same time being swept downstream by the addition of randomly distributed streamwise momentum. Once the sweep has taken place, the process begin again. » (Ayotte et Hughes, 2004, p.548)

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE
1.1 Introduction
1.2 Équations de Navier-Stokes
1.3 Équations RANS
1.3.1 Hypothèse de Boussinesq
1.4 La séparation de l’écoulement
1.4.1 Définition mathématique
1.4.2 Contexte classique
1.4.2.1 Problématique en théorie classique de la couche limite
1.4.2.2 Approches mathématiques
1.4.2.3 Critères de séparation
1.4.3 Contexte atmosphérique
1.4.3.1 Mécanismes physiques impliqués dans la séparation
1.4.3.2 « Règles du pouce » de prédiction des zones de séparation
1.5 Modélisation de la turbulence
1.5.1 Revue des différentes approches
1.5.2 Revue des modèles RANS et choix
1.5.2.1 Classes de modèles RANS
1.5.2.2 Enjeu des modèles de viscosité tourbillonnaire
1.6 Le modèle kω SST
1.7 La couche limite atmosphérique
1.7.1 Hypothèses de terrain plat dans la couche de surface
1.7.2 Les effets de Coriolis
1.7.3 Les effets de stratification thermique
1.7.4 Les effets de rugosité
1.8 Modélisation de la rugosité
1.8.1 Mise en contexte
1.8.2 Revue des approches de modélisation et choix de modèle
1.9 Conditions aux frontières : modélisation de la couche limite atmosphérique
1.9.1 Profils d’entrée
1.9.1.1 Conditions aux frontières de Richard et Hoxey
1.9.1.2 Profils non linéaires
1.9.1.3 Application des profils non linéaires au modèle kω SST
CHAPITRE 2 MÉTHODOLOGIE
2.1 Introduction
2.2 Principes de la discrétisation
2.3 OpenFOAM
2.3.1 Calcul numérique du cisaillement de paroi τw
2.4 Problème lié à la rugosité : extension au modèle kω SST
2.5 Conditions aux frontières proposées
2.5.1 Profils d’entrée
2.5.2 Conditions du haut
2.5.3 Conditions au sol
2.5.4 Conditions de sortie
2.5.5 Conditions latérales
CHAPITRE 3 RÉSULTATS
3.1 Introduction
3.2 Cas test de Ligrani et Moffat
3.2.1 Résultats
3.3 Cas test : RUSHIL
3.3.1 Intensité et énergie cinétique turbulente expérimentales
3.3.2 Calibration des constantes du modèle
3.3.2.1 Constante β
3.3.2.2 Constante de von Kármán κ
3.3.2.3 Autres constantes
3.3.2.4 Rapport d’équilibre
3.3.2.5 Résumé des constantes modifiées
3.3.3 Méthode de résolution numérique
3.3.4 Résultats
3.3.4.1 Cas de référence H0 : analyse d’homogénéité
3.3.4.2 Cas H3 : colline
3.3.5 Discussion
3.4 Cas test : crête triangulaire
3.4.1 Méthode de résolution numérique
3.4.2 Résultats
3.4.3 Discussion
3.5 Cas test : cube tridimensionnel
3.5.1 Pré-traitement
3.5.2 Méthode de résolution numérique
3.5.3 Résultats
3.5.4 Discussion
CONCLUSION
ANNEXE I NUMERICAL MODELING OF FLOW SEPARATION IN NEUTRAL ATMOSPHERIC BOUNDARY LAYER USING THE k-ω SST TURBULENCE MODEL
ANNEXE II DETERMINATION OF WIND TURBINES EXCLUSION ZONES USING CFD
ANNEXE III PREMIER CAS TEST : VALIDATION DE L’IMPLÉMENTATION DES MODÈLES k-ω SST ET SPALART-ALLMARAS DANS OPENFOAM
LISTE DE RÉFÉRENCES

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