Intégration multisensorielle

Verticale visuelle subjective

Dans la modalité visuelle, la verticale subjective est mesurée dans l’obscurité complète avec une barre lumineuse que les participants, yeux ouverts, doivent aligner avec la verticale gravitaire au moyen de commandes verbales (e.g. Bohmer et Mast, 1999), d’un joystick (e.g. Luyat et al., 1997) ou de boutons (e.g. Yelnik et al., 2002). Dans cette tâche, un individu sain placé dans des conditions naturelles obtient des performances proches de la verticale objective (Mann, 1952 ; Witkin et Asch, 1948b). Plus précisément, la verticale subjective visuelle (VVS) serait comprise entre -2,5° et +2,5°, intervalle (moyenne ± 2 écarts-types) proposé par Pérennou et al. (2008) sur la base des performances de 33 participants sains (48,8 ± 10,8 ans) qui devaient ramener à dix reprises (cinq dans le sens horaire et cinq dans le sens anti-horaire) une barre de 15 cm présentée sur un écran d’ordinateur.

Les systèmes sensoriels impliqués dans la perception de la verticale

Cette partie décrit les systèmes sensoriels qui participent à la perception de la verticale. La description des récepteurs sensoriels précède la présentation des projections corticales.

Le système vestibulaire

Le vestibule, organe de l’équilibre, détecte les déplacements de la tête et sa position dans le champ de gravité. Les informations qu’il apporte contribuent à la stabilisation du regard et au contrôle postural. Situé dans le labyrinthe de l’os temporal, il est constitué des organes otolithiques, utricule et saccule, sensibles aux accélérations linéaires et des canaux semi-circulaires, sensibles aux accélérations angulaires. Le système utriculo-sacculaire est formé de deux cavités horizontale et verticale, renfermant une macule formées de cellules ciliées et d’otolithes (cristaux de carbonate de calcium). Les accélérations linéaires provoquent un déplacement des otolithes dans le sens inverse, entraînant une dépolarisation des cils et un potentiel d’action au niveau des fibres nerveuses. Les canaux semi-circulaires sont grossièrement orthogonaux deux à deux : quand la tête est droite, le canal horizontal est incliné d’environ 30° en arrière et les canaux antérieur et postérieur sont verticaux. Chaque canal comporte un renflement, l’ampoule, située à proximité de l’utricule. Dans cette ampoule se trouvent les cellules ciliées, qui baignent dans l’endolymphe. Elles sont toutes orientées dans la même direction. En fonction des mouvements du corps et de la tête, le déplacement relatif des cils et du corps des cellules ciliées provoque leur dépolarisation. L’organisation anatomique des organes otolithiques et des canaux semi-circulaires permet la détection des accélérations linéaires et angulaires dans toutes les directions de l’espace.

Le système visuel

Le système visuel permet de connaître rapidement et précisément la taille, la forme, la couleur ou la direction des objets en déplacement. Les yeux, qui en constituent les capteurs, ont la forme d’une sphère, tapissée d’une structure neuronale sensible à la lumière, la rétine. Avant d’atteindre la rétine, la lumière traverse la cornée, l’humeur aqueuse, puis le cristallin et enfin l’humeur vitrée. La rétine contient six types de neurones y compris les deux types de photorécepteurs, cônes et bâtonnets. Les bâtonnets ont un seuil d’activation très bas. Les cônes ont quant à eux un seuil plus élevé et ils sont responsables de la détection des couleurs grâce aux pigments qu’ils contiennent, sensibles au bleu, au rouge ou au vert. Environ 120 millions de bâtonnets et 6 millions de cônes sont répartis à la surface de la rétine. La densité des photorécepteurs et la proportion cônes/bâtonnets diminue avec l’excentricité. La fovéa, partie centrale de la rétine contient environ 200 fois plus de cônes et le segment externe de ces cônes est plus étroit. Ce sont les 200000 cônes au mm² au niveau de la fovéa qui permettent une acuité maximale, diminuant rapidement en périphérie. De plus, alors qu’au centre de la rétine, un photorécepteur est connecté à une cellule bipolaire, elle-même connectée à une cellule ganglionnaire, la rétine périphérique est caractérisée par une convergence qui croît avec l’excentricité : les cellules d’un niveau donné sont innervées par plusieurs cellules du niveau précédent.

Le système somesthésique

Le système somesthésique trouve son point de départ au niveau des récepteurs somesthésiques cutanés et sous-cutanés répartis à la surface et à l’intérieur de l’ensemble du corps.
Ces récepteurs somesthésiques sont morphologiquement et fonctionnellement variés. On distingue les mécanorécepteurs, les nocicepteurs et les thermorécepteurs. Les deux derniers types, détectent respectivement la douleur et la température, ne seront pas développés dans ce travail de thèse. Les mécanorécepteurs détectent quant à eux les vibrations et les pressions. Malgré des différences morphologiques, les mécanorécepteurs fonctionnent de manière identique : les stimuli provoquent une déformation de la terminaison nerveuse donnant naissance à un potentiel d’action. La fréquence des potentiels d’action code l’intensité du stimulus alors que l’emplacement du stimulus est déterminé par la localisation des projections corticales. Les mécanorécepteurs répondent à des stimuli externes et internes à la base de l’extéroception, de l’intéroception et de la proprioception.
L’extéroception concerne les pressions exercées sur la peau et de la stimulation des récepteurs cutanés. Ce sens tactile apporte des indices sur l’orientation du corps grâce aux pressions appliquées sur les surfaces de support (Benson, 1990). Les surfaces de support les plus discriminantes pour l’orientation corporelle sont situées au niveau de la plante des pieds (Roll et al., 2002).

Effets des lésions du système visuel sur la verticale subjective

Gentaz et Hatwell (1998) évaluent la perception de la verticale, de l’horizontale et de l’oblique chez des participants aveugles de naissance et devenus aveugles plus tardivement. Ils constatent que la verticale haptique subjective des participants aveugles n’est pas significativement différente de la verticale gravitaire. La perception de la verticale n’est donc pas altérée par l’absence complète d’information visuelle, même quand les participants ont expérimenté la vision pendant une durée d’en moyenne 16 ans. Rondot et al. (1992) montrent que la posture est influencée par une atteinte asymétrique du système visuel. Leurs patients présentent une hémianopsie droite ou gauche après une atteinte cérébrale plus ou moins récente et montrent une déviation du centre de gravité vers l’hémichamp visuel altéré. De la même manière, des participants sains portant un masque cachant l’hémichamp visuel droit ou gauche montrent une déviation du centre de gravité vers l’hémichamp caché. Les auteurs supposent que l’hémichamp visuel préservé exerce un effet sur la posture en déplaçant l’axe corporel vers l’hémichamp visuel altéré. Cet effet pourrait constituer une stratégie adaptative pour compenser la perte de la symétrie visuelle. En ce qui concerne la perception des orientations, le droit devant subjectif est dévié vers l’hémichamp visuel sain, c’est-à-dire vers la droite pour des patients cérébro-lésés droits (Saj et al., 2010) et la verticale subjective est déviée dans le sens anti-horaire chez ces mêmes patients (Saj et al., 2012a). Par ailleurs, la verticale subjective est davantage déviée quand la barre à ajuster se trouve dans l’hémichamp altéré, c’est-à-dire à gauche pour les patients cérébro-lésés droits (Saj et al., 2012a).

Effets des lésions du système somesthésique sur la verticale subjective

Chez trois patients souffrant d’une perte totale de la sensibilité à partir du cou, la VVS était comparable à celle d’un groupe de participants sains. Les performances des participants sains étaient de 0,1° ±1,0° alors que les trois patients avaient une VVS à 1,1° ± 1,0°, -0,5° ± 0,8° et 1,5° ± 1,3°. De plus, le secteur d’incertitude est de 0,3° ± 1,0° chez les participants sains, et de 1,0° ± 0,5°, 1,5° ± 0,5° et 1,5 ± 0,6° chez les patients (Mazibrada et al., 2008). Chez un autre patient dont la sensibilité générale est affectée à la suite d’une démyélinisation d’origine virale, Yardley (1990) montre que la VVS n’est pas significativement différente de celle des participants sains. Ce patient obtient une moyenne de -1,0° avec un écart-type de 1,4° en position normale. Cependant, en position inclinée en roulis à 90°, il incline la barre dans le sens inverse de l’inclinaison de son corps (effet Müller) alors que tous les participants normaux montrent un effet Aubert. Une mauvaise estimation de l’orientation du corps résultant de l’absence de système somesthésique semble être la cause de cet effet.
Une autre étude de Day et Cole (2002) chez un patient déafférenté (IW) montre l’importance de la somesthésie dans le contrôle postural. Dans cette étude, les auteurs provoquent une modification de la posture chez IW au moyen de stimulations galvaniques. En l’absence de contrôle visuel, la déviation posturale est beaucoup plus importante chez IW (de 3,4° à 8,5° selon l’intensité de la stimulation) que chez le participant témoin (de 0,2° à 0,4°). En présence d’informations visuelles, IW réajuste sa posture (2,8°) mais pas assez pour revenir à la normale (0,4° chez le sujet sain). L’interprétation de Day et Cole (2002) est que l’absence de somesthésie empêche de compenser la modification posturale induite.

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Table des matières

Cadre théorique 
Introduction 
1. Notion de verticale subjective
1.1. Définition et mesure
1.1.1. Verticale visuelle subjective
1.1.2. Verticale haptique subjective
1.1.3. Verticale visuo-haptique subjective
1.2. Les systèmes sensoriels impliqués dans la perception de la verticale
1.2.1. Le système vestibulaire
1.2.2. Le système visuel
1.2.3. Le système somesthésique
1.3. Données de la littérature concernant les participants sains
1.3.1. Effets de perturbations vestibulaires sur la verticale subjective
1.3.2. Effets de perturbations visuelles sur la verticale subjective
1.3.3. Effets de perturbations somesthésiques sur la verticale subjective
1.4. Données de la littérature concernant les patients porteurs de lésions périphériques
1.4.1. Effets des lésions du système vestibulaire sur la verticale subjective
1.4.2. Effets des lésions du système visuel sur la verticale subjective
1.4.3. Effets des lésions du système somesthésique sur la verticale subjective
1.5. Données de la littérature concernant les patients cérébro-lésés
1.5.1. Un exemple de désorientation spatiale : la négligence spatiale
1.5.2. Déficits
1.5.3. Conséquences sur la verticale subjective
1.5.3.1. Effets des informations vestibulaires sur la verticale subjective
1.5.3.2. Effets des informations visuelles sur la verticale subjective
1.5.3.3. Effets des informations somesthésiques sur la verticale subjective
1.5.4. Corrélats anatomiques de la perturbation de la verticale subjective
2. Intégration des informations sensorielles 
2.1. Cadre théorique
2.2. Etudes pionnières
2.3. Modèle d’intégration multisensorielle
2.4. Application du modèle bayésien d’intégration multisensorielle à la verticale subjective visuo-haptique
3. Objectifs de la thèse
Contributions expérimentales
Méthodologie générale
Première partie expérimentale : Étude des verticales subjectives
Etude I : Verticales subjectives chez les patients cérébro-lésés droits
Résumé
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Deuxième partie expérimentale : Intégration multisensorielle et verticale subjective
Etude II : Validation du modèle d’intégration multisensorielle pour la perception de la verticale subjective chez les participants sains
Résumé
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Etude III : Effet d’une perturbation visuelle sur l’intégration multisensorielle pour la
perception de la verticale chez les participants sains 
Résumé
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Etude IV : Effet de l’âge et d’une lésion cérébrale droite sur l’intégration multisensorielle pour la perception de la verticale
Résumé
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Troisième partie expérimentale : Évaluation de la verticale subjective dans la modalité haptique
Etude V : Effet des conditions d’évaluation sur la perception de la verticale haptique 
Résumé
Introduction
Méthodes
Résultats
Etude VI : Effet de l’âge sur la perception de la verticale subjective haptique 
Résumé
Introduction
Méthodes
Résultats
Discussion
Discussion Générale 
La verticale subjective
Intégration multisensorielle
Perspectives
Références

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