Innover ce n’est pas faire mieux mais faire autrement

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De la contestation à la participation

Alors qu’au moment de la révolution française, le monde syndical et associatif n’avait pas encore sa place, il s’est ensuite progressivement structuré, aujourd’hui une personne sur 4 est engagée dans une association ce qui est une des spécificités de la culture politique française. Des débats de l’époque émergeaient deux enjeux ; le premier consistait à faire de la participation un outil politique, à lui attribuer la capacité de remédier aux biais et aux limites de la démocratie représentative. Le deuxième enjeu faisait de la participation un outil de contestation du système politique et social, un mouvement de lutte devant remplacer la démocratie représentative. Seul le premier enjeu s’est pérennisé dans les formes actuelles de la participation (Bherer et al., 2011).
La participation citoyenne n’est pas le simple fait d’une gouvernance plus démocratique mais a plus fait l’objet d’une longue transition de la contestation à la concertation1 (Renaud, 2001). La volonté des citoyens à s’impliquer remonte aux mouvements sociaux urbains des années 1970 fortement contestataires où l’Etat était encore en charge des politiques d’aménagement. Nombreux sont les exemples d’engagement d’une partie de la population contre un projet d’aménagement ; on peut notamment citer ceux de Plogoff et de notre Dame des Landes. Peu à peu l’objectif change ; il ne s’agit plus de faire pression sur un adversaire politique (l’Etat) mais plutôt de travailler avec les élus locaux. Dés lors, la concertation s’est institutionnalisée. Cependant, celle-ci se heurte aux limites des procédures légales ainsi ; l’innovation sociale, apparue dans ce contexte de revendication du « droit au territoire » sort des sentiers battus et fait entendre les préoccupations de certains. D’après Renaud, la ville est l’œuvre de ses acteurs ; elle se construit à travers des procédures, des projets aux nombreux intervenants. Les associations, regroupements de citoyens en comité etc ont alors joués un grand rôle dans la contestation et la revendication de la légitimité d’action des individus. En effet les associations peuvent se placer en position de veille de sorte à rester à la fois un interlocuteur des pouvoirs publics et un partenaire de la planification et un médiateur permettant l’interaction entre les élus et les habitants. Leur rôle peut aussi être engagé et défendre des revendications toujours à l’intérieur du cadre législatif (recours juridiques, élaboration de contre-expertises et de contre-projets).

Innover ce n’est pas faire mieux mais faire autrement

Est innovant, une pratique en rupture avec celles habituelles dans un contexte donné. Cette nuance participe à la confusion de la notion d’innovation. L’innovation renvoi à une nouvelle manière de faire les choses mais cette notion est subjective ; en effet ces pratiques « nouvelles » peuvent ne pas l’être pour d’autres car elles ont déjà été intégrées. (De Muro, Hamdouch, Cameron, & Moulaert, 2007) vont plus loin en écrivant qu’un retour à des organisations institutionnelles tirées du passé peut être innovateur. Ainsi pour eux, l’innovation sociale peut signifier un retour vers « d’anciennes » formes institutionnelles et peut être issue de la remobilisation d’instruments d’inclusion sociale.
Contrairement à l’innovation technologique, « l’innovation sociale ne fait pas nouveau mais fait autrement » (Chambon, David, & Devevey, 1982) dans (Cloutier, 2003). Gasse et Bussières voient la nouveauté dans la création des réseaux d’acteurs et caractérisent «d’alliance insolite» l’aspect novateur de l’association des acteurs prenant part à l’innovation sociale ainsi que le mode d’organisation qui en résulte (Gasse & Bussières, 1991) dans (Cloutier, 2003). Pour être partagée, la nouveauté doit faire sens à autrui, elle doit trouver un public pour s’encastrer socialement étant donné qu’elle est façonnée par son environnement culturel et est constamment soumise aux jugements sociaux. Un réel travail est nécessaire pour légitimer l’usage social de la nouveauté. Les jugements sont sélectifs en fonction des avantages que les usagers attendent (Bellemare & Klein, 2011). L’innovation sociale est alors un changement adapté et adaptatif.
A la nouveauté s’associe la question de la créativité ; Hamdouch et al (2017) distinguent trois notions différentes de la créativité. La première renvoi à la création de nouvelles manières de faire, de produire, d’agir ou participer. Cette créativité marque la rupture avec l’existant et met en avant le besoin d’expérimenter. Le deuxième sens est associé à l’individu et se rapproche du domaine économique car elle fait référence à de nouvelles manière d’être (notamment au sein de l’entreprise). La troisième signification fait référence au processus de création de quelque chose de nouveau. Le chemin de la création est tout aussi important à saisir que la production finale elle-mêmee. Ainsi l’innovation est la « matérialisation » de la créativité issue de plusieurs acteurs.

De la prise de conscience à la prise de pouvoir

L’émergence du processsus d’innovation sociale se fait dans un contexte particulier. Ce processus semble se décleencher en situation de crise c’est-à-dire une situation jugée insatisfaisante par un individu ou groupe d’individus. L’innovation sociale est un processus long qui passe par des étapes clés. Pour atteindre son objectif de départ et obtenir le statut d’innovation, la démarche doit obligatoirement franchir des paliiers définis. Le Centre International d’Etudes pour le Développement Local choisit dee définir le processus d’innovation selon cinq paliiers (Figure 1) (CIEDEL, n.d.).

Un processus mis en œuvre par soi et pour soi

Une innovation est sociale car elle vient d’un individu culturellement encastré dans son environnement. De plus, cet individu a réagit à une ‘impulsion’ que d’autres individus ont ressenti, cette impulsion est l’acte de création vers autrui (Bellemare & Klein, 2011). La spécificité sociale de l’innovation est dans la mobilisation déployée par les innovateurs pour rallier les individus, les organisations et les institutions à leur cause. Une initiative citoyenne devient innovation sociale que si l’objectif initial est atteint.
Au-delà de son objectif initial clairement formulé, l’innovation sociale offre d’autres retombées positives comme l’autonomisation des personnes, le développement de compétences, la création d’une structure motivante… Pour déterminer s’il y a eu une innovation sociale, il faut attendre la fin du processus. Il n’y a pas d’innovation sociale si la situation « de crise » n’a pas évolué en une situation souhaitée. Le résultat d’une innovation sociale est toujours positif car il a pour caractéristique d’être aussi
« personnalisé » que l’était le problème initial dans son contexte et répond de ce fait le mieux aux besoins des individus. Fontan n’est pas en accord avec ce point de vue ; pour lui, l’innovation ne se traduit pas forcément par un succès (J-M Fontan & Klein, 2005) dans (Bellemare & Klein, 2011). En effet, si le processus n’a pas abouti et est abandonné, il peut réapparaitre à un autre moment. Pour éviter un tel cas de figure, la diffusion est un élément primordial dans le processus d’innovation sociale car il permet de remplacer d’anciennes pratiques. C’est par sa diffusion que la nouvelle pratique prend la caractéristique d’innovation et modifie les manières de faire individuelles et collectives jusqu’aux manières de voir et de penser. Multiplier les innovations sociales ne suffit pas à créer un nouveau modèle de développement ; il faut qu’elles soient mises en relation et qu’elles visent à l’émancipation et à l’appropriation. Plus le processus compte un réseau dense et mobilise des moyens sociotechniques, plus l’innovation sociale se diffuse et prend de l’ampleur. La transition entre innovation et transformation réside alors dans la capacité d’adoption et d’adaptation des usagers.
Pour aboutir, le processus d’innovation va puiser dans des ressources humaines locales mais va également devoir être soutenu par des ressources financières (Figure 3). Cette modalité de financement joue un rôle important dans la réussite de l’innovation car l’intervention des acteurs financiers (politiques publiques, privés, associations, syndicats, fondations…) doit se faire au bon moment. L’apport financier dépend de la caractéristique du projet ; au-delà de l’objectif purement social il doit tout de même se montrer attractif et crédible (techniquement, financièrement, économiquement et poolitiquement) (Depret, Hamdouch, Monino, & Ponncet, 2010). Ainsi la mobilisation d’acteurrs financiers n’est pas à négliger.

De l’innovation à l’innovation de territoire

Depuis quelques années, nous découvrons le territoire non plus dans les domaines où il est l’objet principal comme la géographie ou l’urbanisme mais à travers des domaines élargis comme la sociologie et l’économie. Les chercheurs s’intéressent alors à qualifier l’innovation sociale au sein du territoire tout en questionnant ses effets sur le processus.

L’origine du mal-être

En France, le système urbain est très hiérarchisé (communes, villes petites et moyennes, métropoles, départements, régions, Etat) (Hamdouch et al., 2017). Nous avons vu dans la première partie la notion de stratégie descendante (top-down) et ascendante (bottom-up). Avant les années 70, la première organisation était clairement affirmée ; en effet, l’Etat absorbait toutes les fonctions sociales, cette tendance affectait le rôle du territoire dans le développement de la collectivité, il en résultait une planification régionale qui vise à l’uniformisation sociale, politique et économique en gardant toujours l’Etat comme référent. Ainsi domine l’échelle nationale sur l’échelle locale. Cette organisation est dés lors remise en cause, les effets négatifs de la centralisation sont dénoncés et la capacité d’action des acteurs locaux est mise en avant. Les décisions politiques ne sont plus en accord avec les besoins spécifiques des collectivités territoriales. L’Etat n’est plus perçu comme le seul acteur du développement mais comme un partenaire. Un tournant se fait, la vision de l’intérêt général évolue et une nouvelle alternative est créée : l’organisation bottom-up. Ainsi, le territoire local : région, agglomération, quartier revendique son intégration et devient un lieu qui peut développer des initiatives et des projets co-construits. Cependant, l’intérêt général est dur à définir. En effet, l’intérêt collectif et de l’Etat ne sont pas synonymes, on les définit alors par leurs contraires : l’intérêt individuel, privé. L’intérêt général transcende la somme des intérêts particuliers (Patsias, 2010) dans (Bellemare & Klein, 2011). Ainsi, les comités de citoyens se basent sur deux principes : le premier est que les gouverrnements peuvent se tromper sur l’intérêt des citoyens ou ne prendre en compte qu’une partie d’entre eux. De ce premier postulat en découle le second : c’est aux citoyens eux-mêmmes de s’impliquer publiquement pour se faire entendre (Figure 4). L’organisation top-down dee la société se retrouve dans la planification territoriale où l’Etat définit les buts à atteindree et les moyens pour y parvenir ; les politiques élaborent les grands axes d’orientation ; les fonctionnaires et les experts pilotennt la mise en œuvre de projets et les habitants n’ont d’autre choix que d’adhérer aux décisions puisqu’elles découlent de l’intérêt publiic. La persistance de ce modèle hiérarchique top-down est due au fait que cette méthode de planification rencontre quelques acctions positives qui ne remettent alors pas en cause la légitimité de l’Etat dans les services publics. Ce modèle top-down ne signifie pas non plus l’absence de consultation des citooyens. Néanmoins, ces négociations ne remettent pas en cause la suprématie de l’Etat poour l’action de l’intérêt général.
La question de l’intérêt général, revient sur la table de discussion des acteurs politiques qui tentent d’identifier des strratégies pour faire valoir le bien commmun ; cette réflexion a notamment fait l’objet d’uun colloque organisé par Le Rameau au Conseil économique social et environnemental (CESE) à Paris en Janvier 2018. Le Rameau est une association d’intérêt général, un laboratoire de recherche innovant qui a pour but d’éclairer les décideurs sur la dynamiquee de co-construction. En Janvier dernier la réflexion s’est portée autour de « L’intérêt générral : dès aujourd’hui, l’affaire de tous ? ». Durant ce colloque, trois leviers ont été identifiés pour répondre à la problématique ; le pouvoir d’engagement des personnes, la capacité d’action des organisations et la légitimitéé du système politique. Suite aux échanges il a été mis en avant le fait que la majorité des acteurs pensent que les alliances sont sources d’innnovation pour réduire les fragilités et faire émerger de nouveaux moteurs de croissance et d’eemplois.

Innovation sociale et territoire dans la littérature

L’innovation sociale devient une innovation territoriale lorsqu’elle entraine une transformation positive des pratiques sur un territoire y compris dans son organisation sociale et politique. En France, l’innovation sociale a du mal à se faire une place dans le domaine de l’aménagement car les usagers peinent à devenir des acteurs légitimes ; les problèmes sociaux se multiplient et sont de plus en plus spatialisés. En parallèle, la montée de l’individualisme suscite une réelle volonté de changement qui vise à redéfinir la société sur des bases plus solidaires, équitables et citoyenne. Bien qu’il nécessite de l’appropriation, le processus d’innovation sociale reste le même (et est complexe comme l’illustre l’interrelation entre les flèches) (Figure 5).

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Table des matières

Remerciements
Introduction
Problématique de recherche
I. L’innovation sociale, un processus particulier
i. De la contestation à la participation
ii. Innover ce n’est pas faire mieux mais faire autrement
iii. De la prise de conscience à la prise de pouvoir
iv. Un processus mis en oeuvre par soi et pour soi
II. De l’innovation à l’innovation de territoire
i. L’origine du mal-être
ii. Innovation sociale et territoire dans la littérature
iii. Le territoire : un objet politique ? Social ?
III. Méthodologie
i. La contribution de la recherche
ii. Un large panel d’innovations sociales territoriales
iii. Grille d’analyse
iv. Focus : Le Village Vertical, habitat participatif à Lyon
v. Focus : Le Technopôle Angus à Montréal
Conclusion
Bibliographie

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