Influence d’une distribution de mobilité sur les propriétés de transport des semi-conducteurs

Il est désormais possible d’introduire des capteurs à moindre coût dans les bâtiments, les routes, sur le réseau d’électricité ou d’eau. Ces capteurs seront reliés à un réseau de télécommunication de cinquième génération donnant la bande passante nécessaire à cette nouvelle ère de l’internet des objets. Cela donnera naissance à une quantité de données colossale qu’il faudra stocker mais surtout analyser dans le but d’optimiser l’utilisation des ressources. Il sera alors important d’optimiser la performance énergétique de l’ensemble de la chaine du capteur à l’information finale. Pour cela, plusieurs stratégies sont possibles, améliorer l’architecture des composants informatiques en est une. L’autre est de faire en sorte que les principales pertes d’énergie sous forme de chaleur soient réutilisées d’une autre manière. On peut les utiliser comme source d’énergie pour par exemple chauffer le réseau d’eau d’une ville. Mais, on peut aussi imaginer utiliser ce dégagement de chaleur pour alimenter d’autres capteurs ou d’autres unités de traitement d’information améliorant ainsi l’efficacité énergétique. Le domaine de la caloritronique de spin s’inscrit dans cet idéal. C’est un domaine où différents domaines de la physique se côtoient car il s’agit de mesurer une tension dépendant du spin ou de l’aimantation en réponse à un courant de chaleur. Il se situe donc à l’interface entre la thermique (calor), l’électronique (tronique), le magnétisme et la spintronique (de spin).

L’effet Hall de Spin (et effet Hall de spin inverse)

Originellement l’effet Hall de spin et l’effet Hall de spin inverse ont été prédits par M. I. D’yakonov et V. I. Perel dans (D’yakonov & Perel, 1971). Dans cet article, l’effet n’est pas encore appelé effet Hall de spin mais discute un effet permettant d’orienter la polarisation des électrons à l’aide d’un courant électrique dans les matériaux semi-conducteurs à fort couplage spin-orbite.

Le regain d’intérêt pour l’effet Hall de spin a eu lieu après que Hirsch a proposé un moyen électrique pour créer et détecter un courant de spin dans les matériaux paramagnétiques. (Hirsch, 1999). C’est après cet article que l’on parle d’effet Hall de spin. Dans la figure 1 de cet article il décrit l’effet Hall de spin comme deux effets Hall avec un champ opposé agissant séparément sur chacun des deux types de spins (Figure 1). La théorie est rapidement raffinée par l’introduction de l’équation de diffusion de la différence de potentiel chimique entre les deux populations de spin (Zhang, 2000). Zhang propose une théorie de l’effet Hall de spin reposant sur des équations de Boltzmann semi-classique (une pour chaque spin) dans lesquelles il introduit une vitesse anomale de signe opposé pour chacune des deux populations. Il obtient alors un courant de spin dans le cœur du matériau et une accumulation de spins sur les bords dont la dimension caractéristique est la longueur de diffusion du spin obtenue par Valet et Fert dans (Valet & Fert, 1993) pour expliquer la magnétorésistance géante. Ce dernier point n’est pas surprenant car Zhang a précisément utilisé le modèle décrivant la magnétorésistance géante et lui a ajouté un terme. Le profil linéaire de potentiel chimique obtenu dans (Hirsch, 1999) devient, dans cette théorie, un sinus hyperbolique.

Une mise en évidence optique de l’effet Hall de spin par rotation Kerr a été obtenue en 2004 dans (Kato, Myers, Gossard, & Awschalom, 2004). Ils ont observé que quand il faisait passer un courant électrique dans GaAs alors la rotation Kerr changeait de signe entre les deux côtés de l’échantillon et que l’application d’un champ magnétique faisait disparaitre ce signal.

Le premier article que j’ai trouvé parlant d’effet Hall de spin inverse (« Inverse spin Hall effect ») date de 2006 (Saitoh, Ueda, Miyajima, & Tatara, 2006). L’expérience est la suivante : ils utilisent une bicouche composée d’un métal ferromagnétique déposé sur une couche d’un métal paramagnétique à fort couplage spin-orbite (dans leur cas 10nm de Ni81Fe19 sur 3nm de Pt). Ils excitent la couche de métal ferromagnétique à la résonance ferromagnétique et mesurent la tension électrique obtenue dans la couche de platine. Leur interprétation est que lorsque la couche de Ni81Fe19 est à la résonance ferromagnétique, un courant de spin est injecté dans la couche de platine qui convertit ce courant de spin en un courant de charge.

La même année dans un article appelé « Direct electronic measurement of the spin Hall effect » (Valenzuela & Tinkham, 2006) obtient une tension qui est attribuée à l’effet Hall de spin. Pour cela ils font passer un courant électrique d’un métal ferromagnétique vers un métal paramagnétique. A l’interface entre ces deux métaux, se développe une accumulation de spin (celle de la GMR) qui diffuse dans le métal ferromagnétique. Le courant de spins ainsi obtenu est converti dans le métal paramagnétique en une tension transverse par ce qu’ils disent être l’effet Hall de spin. Je trouve que cette expérience relève plus de ce qu’on appelle désormais l’effet Hall de spin inverse que de l’effet direct car il s’agit in fine d’une mesure de tension électrique dont l’origine est un courant de spins.

L’effet Hall de spin et effet Hall de spin inverse ont par la suite été utilisés pour étudier d’autres phénomènes tels que l’utilisation du courant de spin pour exciter la résonance ferromagnétique dans une couche mince ferromagnétique (Liu, Moriyama, Ralph, & Buhrman, 2011) ou pour retourner l’aimantation (Liu, et al., 2012). Ils sont aussi responsables de la magnétorésistance spin Hall (Nakayama, et al., 2013) et de la magnétorésistance spin Hanle (Dyakonov, 2007) (Vélez, et al., 2016). Je ne développerai pas ces points dans cette thèse.

Je vais m’intéresser dans la suite de cet état de l’art à l’effet Seebeck de spin car il constitue le point de départ de notre questionnement. La raison pour laquelle nous avons évoqué l’effet Hall de spin est que ce dernier est une des composantes de l’effet Seebeck de spin.

L’effet Seebeck de spin

La première observation de l’effet Seebeck de spin, et même la définition de celuici remonte à 2008 (Uchida, et al., 2008). Les échantillons sont composés d’une couche d’un métal ferromagnétique (dans leur cas du Ni81Fe19), et d’électrodes de platine déposées tout le long de l’échantillon. L’expérience consiste en la mesure de la tension aux bornes de l’électrode de platine en fonction de l’aimantation de la couche lorsque l’échantillon est soumis à un gradient de température. Ils observent alors une tension proportionnelle à l’aimantation de la couche ferromagnétique linéaire en position   et qui s’annule au milieu de l’échantillon. Par ailleurs, en l’absence d’électrode de platine, ils n’ont pas mesuré de tension.

Ils font l’hypothèse que le gradient de température est bien le long de la ligne de Ni81Fe19 et que l’ajout d’électrode de platine ne perturbe pas la direction des courants de chaleur. Ils en déduisent que la tension mesurée n’existe pas dans le Ni81Fe19 et donc que son origine est due à un effet se produisant dans le platine. Leur interprétation est qu’une différence de potentiel chimique entre deux populations de spin apparait. Son amplitude est linéaire en position et s’annule au milieu de l’échantillon. Cette différence de potentiel chimique peut alors diffuser dans l’électrode de platine. Ce courant de diffusion de spin dans le platine est converti en un courant de charge par effet Hall de spin inverse et une tension peut être mesurée. Elle est proportionnelle à l’amplitude et à la polarisation du courant de spin. Le platine agit ici comme un détecteur de courant de spin et on voit bien l’influence de leurs travaux antérieurs dans le choix de cette interprétation(Saitoh, Ueda, Miyajima, & Tatara, 2006).

L’effet Seebeck de spin a par la suite été étudié dans d’autres matériaux. En particulier deux ans après le papier original parlant d’effet Seebeck de spin, ce dernier est observé dans un semi-conducteur ferromagnétique, GaMnAs (Jaworski, et al., 2010). Cette étude est intéressante car elle montre beaucoup de résultats expérimentaux et questionne l’interprétation initiale. D’abord la tension obtenue n’est pas linéaire en fonction de la position mais le changement de signe de la tension entre les deux bords et l’annulation au milieu de l’échantillon sont observés . Ils ont également essayé de voir si la tension mesurée était différente si la ligne de GaMnAs était coupée en deux. Le résultat qui a été obtenu est que la tension mesurée n’a pas besoin que le GaMnAs soit continu. L’interprétation est que le couplage entre les deux morceaux d’échantillon se fait soit par une interaction dipolaire soit par les phonons du substrat. Cette mesure remet en question l’interprétation initiale selon laquelle il y a une différence de potentiel chimique entre les deux populations de spin tout au long de l’échantillon et force donc à voir l’effet de manière locale. Enfin, ils observent cette fois des hystérésis sans électrode de platine en prenant directement un contact sur le GaMnAs. Ce signal ne change pas de signe entre les deux côtés de l’échantillon contrairement à ce qui se passait sur Ni81Fe19 dans (Uchida, et al., 2008). Les auteurs arguent que ce non changement de signe est dû à l’effet Nernst Planaire. Ils citent un article publié en 2006 (Pu, Johnston-Halperin, Awschalom, & Shi, 2006) dont un des co-auteurs est commun pour justifier cette interprétation, pourtant le signal observé est anti-symétrique alors que l’effet Nernst Planaire est symétrique.

Les effets Nernst planaire et anomaux

L’effet Nernst dans les métaux paramagnétiques est connu depuis la fin du XIXème siècle. Il est l’équivalent thermoélectrique de l’effet Hall et se traduit par l’apparition d’une tension dans la direction transverse lorsqu’un courant de chaleur est injecté dans l’échantillon et qu’un champ magnétique perpendiculaire est appliqué. Tout comme l’effet Hall, il acquiert dans les matériaux ferromagnétiques une composante anomale et une composante planaire. Bien que l’effet Nernst planaire a été considéré (Kato, Myers, Gossard, & Awschalom, 2004), une interprétation complète de la mesure en terme d’effet thermoélectrique de la couche de GaMnAs n’a pas été poussée au bout de ce qui était possible, notamment concernant l’effet Nernst anomal.

En 2011, l’effet de la position du chauffage sur la tension mesurée dans le cadre de l’effet Seebeck de spin est étudié (Huang, Wang, Lee, Kwo, & Chien, 2011). Ils partent d’une situation où la tension change de signe entre le côté froid et le côté chaud de l’échantillon (caractéristique principales de l’effet Seebeck de Spin). Ils changent ensuite la position du chauffage et obtiennent le même signe des deux côtés . L’interprétation de cette mesure est que des gradients de température apparaissent perpendiculairement au plan de l’échantillon. La tension peut alors être intégralement interprétée par l’effet Nernst anomal.

Une analyse similaire a été menée sur des échantillons suspendus et différents substrats. (Avery, Pufall, & Zink, 2012) (Schmid, et al., 2013) et pour une disposition du chauffage plus variée (Yin, Mao, Meng, Li, & Zhao, 2013).

L’effet Seebeck de spin longitudinal

Avant même la publication des articles évoquant l’interprétation Nernst anomale due à des courants qui seraient orientés perpendiculairement à la couche, le groupe à l’origine de l’effet Seebeck de spin évoque cette possibilité : « Here we note that, if ferromagnetic metallic slabs are used as the F layer, the ISHE signal not only is suppressed significantly by short-circuit currents in the F layer due to the electric conduction of F but also is overlapped with the signal of the anomalous Nernst– Ettingshausen effect in F. » (Uchida K. , et al., 2010).

Ils proposent alors une géométrie dans laquelle non seulement la direction des courants de chaleur semble plus claire car le courant de chaleur est attendu perpendiculaire à l’échantillon et en plus le matériau utilisé est un isolant ferromagnétique ce qui rend l’interprétation en terme d’effet thermoélectrique impossible . C’est l’effet Seebeck de spin longitudinal.

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Table des matières

Introduction
1.1 Motivation
1.2 Etat de l’art
1.3 Objectif de cette thèse
Modèle et théorie
2.1 Remarques préliminaires
2.2 Eléments de magnétisme
2.3 Transport anisotrope
2.4 Influence d’une distribution de mobilité sur les propriétés de transport des semi-conducteurs
2.5 L’effet Hall en géométrie Corbino
2.6 Modèle à deux canaux de l’effet Hall de spin
2.7 Diffusion de la chaleur en régime sinusoïdal forcé
2.8 Résonance ferromagnétique
Méthodes expérimentales
3.1 Présentation du dispositif expérimental de mesure de transport
3.2 Mesure électrique DC
3.3 Caractérisation thermoélectrique – Mesure des coefficients Seebeck
3.4 Mesures thermoélectriques transverse avec modulation
3.5 Résonance ferromagnétique
Résultats expérimentaux
4.1 Effets Righi-Leduc planaire et anomal dans permalloy
4.2 Effet Nernst dans le platine
4.3 Effet Hall et effet Nernst dans InSb
4.4 Détection du potentiel thermoélectrique provoqué par résonance ferromagnétique
4.5 Transport anisotrope en géométrie Corbino dans le permalloy, CoGd, CoTb et platine
Conclusion
Références
Table des figures
Annexes
6.1 Simulation numérique
6.2 Mode « 50 ohm » et High-Z
6.3 Programme Arduino de contrôle du moteur pas à pas

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