Importance des connaissances en nutrition

Importance des connaissances en nutrition

La saine alimentation est un concept qui, malgré son utilisation au quotidien, n’est pas toujours défini adéquatement (Elmadfa & Meyer, 2012). La plupart des instances dans le domaine s’entendent cependant sur l’objectif d’une alimentation saine, soit l’atteinte d’un état de santé globale par une quantité adéquate d’aliments et de nutriments (Elmadfa & Meyer, 2012). Plusieurs modèles alimentaires ont été identifiés comme favorables pour la santé (Jacobson & Stanton, 1986), et ceux-ci se ressemblent en termes de recommandations, soit de privilégier les fruits et légumes ainsi que les grains entiers et les viandes maigres, et de diminuer les viandes rouges, les céréales raffinées et les autres produits transformés (Stoody et al., 2014). Une alimentation saine est d’autant plus importante étant donné son rôle comme facteur de risque modifiable dans le contexte de maladies chroniques, dont la prévalence demeure élevée au Canada comme dans le monde (Agence de la santé publique du Canada, 2015). D’ailleurs, partout au monde, des recommandations alimentaires sont établies par les autorités en santé, afin d’encourager des habitudes alimentaires optimales dans les populations (Brown et al., 2011). Au Canada, le Guide alimentaire canadien (GAC), dont la dernière version date de 2007, fait office de référence en saine alimentation (Santé Canada, 2007a). Bien que le GAC fasse la promotion d’une alimentation saine, les recommandations ne semblent pas bien respectées par la population, puisque les apports alimentaires des Canadiens ne reflètent pas les recommandations alimentaires au pays (Garriguet, 2007; Mathe et al., 2015; Vanderlee, McCrory, & Hammond, 2015).

Afin de déterminer ce qui cause la non-adhésion aux recommandations alimentaires, il faut donc se rapporter aux facteurs qui influencent la consommation alimentaire. Ces facteurs se divisent en déterminants environnementaux, sociaux et individuels, et ont leur rôle à jouer sur les apports et les comportements alimentaires des individus (Raine, 2005). Au niveau environnemental, l’accès à des supermarchés semble faciliter l’atteinte d’une saine alimentation, alors que la proximité de dépanneurs et de restaurants de type fast-food semble plutôt encourager une moins bonne alimentation en général, bien que la littérature demeure mitigée à ce sujet (Giskes, van Lenthe, Avendano-Pabon, & Brug, 2011). Du côté social, un soutien de la part de la famille s’avère particulièrement aidant dans l’adoption de saines habitudes alimentaires, bien que les pairs puissent également avoir une influence sur les apports, de façon soit positive ou négative, selon leur attitude (Kalavana, Maes, & De Gucht, 2010; Williams, Thornton, & Crawford, 2012). Parmi les déterminants individuels, certains facteurs sociodémographiques sont associés à l’alimentation saine, tels que le sexe féminin, un âge plus avancé, de même qu’un statut socio-économique élevé (Garriguet, 2007). Les préférences alimentaires ont également un impact dans l’adoption d’une saine alimentation, particulièrement l’attrait pour les fruits et légumes (Williams et al., 2012). De plus, un niveau élevé d’efficacité personnelle, ainsi que le fait de percevoir peu de barrières à la saine alimentation, semblent être positivement associés à une consommation plus élevée d’aliments sains (Shaikh, Yaroch,  Nebeling, Yeh, & Resnicow, 2008).

Parmi les facteurs individuels, les connaissances en nutrition ont également un rôle majeur à jouer. En effet, leur importance relève particulièrement de l’utilisation qui en est faite, soit les nombreux programmes d’éducation en nutrition basés sur l’amélioration des connaissances pour entraîner une amélioration des comportements alimentaires (Spronk, Kullen, Burdon, & O’Connor, 2014). Par ailleurs, les connaissances en nutrition proviennent souvent de plusieurs sources d’informations, si bien que les connaissances sont parfois plutôt des croyances, véhiculées entre autres par les différents médias, et ne concordent pas nécessairement avec la littérature scientifique actuelle (Fitzgibbon et al., 2007). Il faut également considérer que plusieurs facteurs influencent les connaissances en nutrition, soit le sexe, le niveau d’éducation et les revenus familiaux (Barbosa, Vasconcelos, Correia, & Ferreira, 2016). Bien que les études n’observent pas toujours des associations hautement significatives entre les connaissances en nutrition et les apports alimentaires, il demeure qu’une revue de la littérature a identifié que de meilleures connaissances en nutrition seraient associées à une consommation plus élevée de légumes et fruits (Spronk et al., 2014). Une consommation d’aliments « camelote » serait au contraire associée à de moins bonnes connaissances en nutrition. Tel qu’observé par les auteurs, les associations les plus manifestes étaient présentes dans les études où le questionnaire utilisé avait été soumis à un processus de validation (Spronk et al., 2014).

Dans cette optique, le développement de questionnaires valides est donc primordial, et c’est pourquoi de plus en plus d’études s’assurent d’utiliser des méthodes de validation appropriées avant d’utiliser un questionnaire, tel que proposé par Parmenter et Wardle (2000). Ces auteurs sont d’ailleurs à l’origine du General Nutrition Knowledge Questionnaire (GNKQ), l’étalon d’or en matière de questionnaires sur les connaissances en nutrition (Parmenter & Wardle, 1999). Lors de la conception d’un questionnaire, les auteurs doivent d’abord bien définir les sections comprises dans l’outil, puis concevoir des questions basées sur la littérature scientifique (Dickson-Spillmann, Siegrist, & Keller, 2011; Parmenter & Wardle, 1999). Plusieurs études rapportent une évaluation de la validité de contenu et de construit de leur questionnaire (Alsaffar, 2012; Hendrie, Cox, & Coveney, 2008). L’analyse factorielle, bien que peu utilisée dans le domaine des connaissances en nutrition, pourrait être un bon moyen de vérifier la structure du questionnaire ainsi que les questions les plus appropriées (Henson & Roberts, 2006). En ce qui a trait à la fiabilité, la grande majorité des auteurs vérifient la cohérence interne ainsi que la fiabilité test-retest pour compléter la validation de leur questionnaire (Jones et al., 2015; Parmenter & Wardle, 1999).

Vu l’absence d’un outil de mesure validé sur les connaissances en nutrition et plus particulièrement de l’adhésion aux recommandations du GAC, le développement d’un outil pour la population canadienne pourrait permettre d’évaluer les connaissances en nutrition et leur lien avec différents facteurs comme l’âge, le sexe, le niveau d’éducation et les revenus familiaux. Ce mémoire traite donc principalement des connaissances en nutrition, plus précisément de la validation de questionnaires sur le sujet. Le chapitre II de cet ouvrage présente l’état actuel de la littérature englobant les connaissances en nutrition, regroupées sous quatre thèmes, soit la saine alimentation, les déterminants de la saine alimentation, les connaissances en nutrition et la validation de questionnaires sur les connaissances en nutrition. Le chapitre III désigne les objectifs et hypothèses et met l’étude en contexte. L’article est inclus au chapitre IV, présenté dans sa version originale en anglais. Finalement, le chapitre V, le dernier de ce mémoire, fait office de discussion générale sur le projet, et offre des perspectives pour la poursuite d’études dans le domaine.

Problématique:

La saine alimentation

Définition de la saine alimentation
Une alimentation saine signifie qu’elle permet d’obtenir les quantités idéales de nutriments et d’aliments afin d’assurer un état de santé globale, et ce, en évitant les excès (Elmadfa & Meyer, 2012). Afin de caractériser la notion d’alimentation saine, il est de plus en plus fréquent de considérer l’alimentation non pas en termes d’aliments ou de nutriments, mais davantage sous forme d’un profil alimentaire (Jacques & Tucker, 2001). Cette façon de définir et d’analyser l’alimentation permet d’étudier les effets globaux de la diète et a l’avantage d’être plus représentative de l’alimentation des individus, puisque ces derniers consomment en réalité des combinaisons d’aliments et non des nutriments ou des aliments seuls (Jacobson & Stanton, 1986; Kant, 1996). À titre d’exemple d’un profil alimentaire associé à la santé, la diète méditerranéenne a été identifiée comme étant représentative d’une alimentation saine (Ros et al., 2014). L’alimentation méditerranéenne est illustrée par une pyramide, et basée sur une abondance d’aliments d’origine végétale peu transformés, une quantité modérée de poisson et de volaille, et peu de sucres concentrés et de viandes rouges (Willett et al., 1995). Plusieurs régimes alimentaires dits « sains » sont comparables en termes d’aliments à privilégier ou à limiter, puisqu’un profil alimentaire sain se caractérise généralement par des apports élevés en légumes, fruits, volaille, poisson et grains entiers, et des apports plus faibles en viande rouge et céréales raffinées (O’Sullivan, Gibney, & Brennan, 2011). L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a également offert sa définition d’une alimentation saine comme étant la réduction des apports en gras trans et saturés, en sucre et en sel, et l’augmentation des apports en fruits, légumes, grains entiers et noix (OMS, 2015). Selon une revue de la littérature menée par le département d’agriculture américain (USDA), il a été observé que parmi les différents profils alimentaires analysés, on n’en retrouvait pas un qui se démarquait particulièrement des autres au niveau des effets sur la santé (Stoody et al., 2014). En effet, autant l’alimentation méditerranéenne, la diète DASH que des profils alimentaires basés sur différents guides alimentaires entraînaient des effets positifs sur la santé. Cela indique que malgré une certaine variabilité au sein des modèles alimentaires existants, il n’existe pas nécessairement un profil manifestement plus bénéfique (Stoody et al., 2014).

Par ailleurs, afin de déterminer si une population adopte ou non une alimentation saine, il importe d’avoir des moyens de mesurer cette donnée, ce qui n’est pas toujours simple (Alkerwi, 2014). L’alimentation peut être mesurée par des scores de qualité alimentaire (diet quality scores). Auparavant, ces indices étaient basés sur les nutriments, mais il a depuis été établi que les profils alimentaires sont davantage représentatifs (Waijers, Feskens, & Ocke, 2007). Les scores basés sur des profils alimentaires (par exemple, les groupes alimentaires d’un guide alimentaire quelconque), consistent en une mesure des dimensions de la qualité alimentaire afin d’établir un score pour chaque individu (Kant, 1996). Tel que rapporté par Waijers et al. (2007), les indices de qualité alimentaire indiquent généralement l’adhésion à des recommandations alimentaires, et non la qualité alimentaire absolue. Par exemple, plusieurs scores ont également été développés en lien avec le régime alimentaire méditerranéen, afin de mesurer le lien entre l’adhésion à cette diète et plusieurs paramètres de santé, comme les maladies cardiovasculaires ou la prévalence d’obésité. (Bach et al., 2006). Aux États-Unis, le Healthy Eating Index 2010 (HEI-2010) permet de mesurer la saine alimentation telle que proposée par les recommandations alimentaires américaines (Guenther et al., 2014). Au Canada, l’indice de mesure de la qualité alimentaire est basé sur la version de 2005 de l’indice américain (HEI2005). L’indice a été modifié afin d’être adapté aux plus récentes recommandations en termes d’alimentation au Canada, soit le GAC de 2007 (Garriguet, 2009).

Lien entre l’alimentation et la santé
Une alimentation saine peut donc être définie de plusieurs façons, mais l’objectif demeure l’atteinte d’une bonne santé ainsi que la prévention des décès liés à des maladies chroniques. Près de 68% des décès au niveau mondial sont attribuables aux maladies chroniques, incluant les maladies cardiovasculaires, le cancer et le diabète (WHO, 2014). Au Canada, en 2014, le pourcentage de Canadiens atteints d’au moins une des maladies chroniques importantes (cancer, diabète, maladie cardiovasculaire, maladie respiratoire chronique) était de 21,4% chez les adultes âgés de 20 ans et plus (Statistique Canada, 2014). La prévalence semble avoir augmenté puisque les données de 2010-2011 indiquent que le pourcentage des adultes âgés de 20 ans et plus souffrant d’une maladie chronique majeure était alors de 15,7% (Statistique Canada, 2011).

Bien que certains facteurs de risque non modifiables tels que l’âge, le sexe ou la composition génétique soient impliqués dans la prévalence des maladies chroniques, ils ne sont pas les seuls dans la balance (Agence de la santé publique du Canada, 2015). En effet, plusieurs facteurs comportementaux sont hautement associés aux maladies chroniques, que ce soit pour leur rôle protecteur ou pour les risques qu’ils occasionnent (Agence de la santé publique du Canada, 2014). Les déterminants ayant des effets positifs dans le cadre de la prévention des maladies chroniques incluent l’activité physique et une alimentation saine. Au contraire, le tabagisme, la sédentarité, l’alimentation malsaine, la consommation d’alcool et le stress chronique représentent des facteurs de risque de développement de ces maladies (Agence de la santé publique du Canada, 2014).

Parmi les solutions pour faire face à la prévalence importance de maladies chroniques, l’alimentation est donc un aspect primordial (WHO, 2014). D’ailleurs, une alimentation saine a non seulement été associée à la prévention ou au contrôle des maladies chroniques, mais également à une réduction de la mortalité toutes causes confondues (McNaughton, Bates, & Mishra, 2012).

Recommandations alimentaires
Afin de sensibiliser les citoyens à l’adoption d’une saine alimentation dans le but d’améliorer la santé de la population, les autorités en santé partout dans le monde émettent des recommandations alimentaires s’adressant aux habitants de leur pays respectif (Brown et al., 2011). Ces recommandations, présentées sous forme de guide alimentaire ou autrement, ont pour objectif de favoriser des habitudes et comportements alimentaires sains en établissant des bases pour la nutrition publique et les programmes d’éducation en nutrition de même que pour les politiques agricoles (FAO, 2016). Le but est également de promouvoir la santé globale et de prévenir les maladies chroniques par le biais de modèles alimentaires permettant l’atteinte et le maintien d’une bonne santé (FAO, 2016).

La connaissance des recommandations nutritionnelles est très variable d’un pays à l’autre (Brown et al., 2011). Par exemple, il a été rapporté qu’en Nouvelle-Zélande, la majorité des gens étaient peu sensibilisés aux recommandations alimentaires gouvernementales (Keller & Lang, 2008). Par ailleurs, en 2006, aux États-Unis, 80,4% des citoyens étaient sensibilisés à la « Food Guide Pyramid », le guide alimentaire entré en vigueur en 1992 (Wright & Wang, 2011). Selon une étude américaine sur la sensibilisation de la population aux recommandations alimentaires, il semble que les niveaux de connaissance varient selon les sous-groupes de la population (Wright & Wang, 2011). Selon les résultats de l’étude, les jeunes de 16-19 ans étaient bien sensibilisés aux recommandations gouvernementales, alors que les personnes âgées l’étaient moins. Les auteurs mentionnent que la présence de programmes d’éducation en nutrition dans les écoles pourrait expliquer cette disparité. Ainsi, il pourrait être pertinent d’élargir les cibles dans l’éducation nutritionnelle afin de rejoindre toutes les strates de la population et d’assurer un enseignement uniforme des recommandations (Wright & Wang, 2011).

Un autre aspect à évaluer lorsqu’il est question de recommandations alimentaires est le temps nécessaire aux citoyens pour apprendre à connaître un nouveau guide alimentaire suite à son émission. À ce titre, une revue systématique effectuée aux États-Unis suggère que la connaissance des guides alimentaires augmente avec le temps (Haack & Byker, 2014). Dans cette revue, on comparait entre autres les plus récents guides alimentaires publiés par l’USDA, soit MyPlate, publié en au début 2011 et son prédécesseur MyPyramid, publié en 2005. Dans cette revue, plusieurs études portant sur MyPyramid montraient que la connaissance du guide augmentait sur 12 ans, et ce même après l’introduction de MyPlate, (Uruakpa, Moeckly, Fulford, Hollister, & Kim, 2013; Wansink & Kranz, 2013; Wright & Wang, 2011). De plus, il a été démontré que les participants connaissaient davantage MyPyramid que MyPlate, et ce même en 2013, soit deux ans après la publication de MyPlate (McKinley, Lee, & Policastro, 2012; Uruakpa et al., 2013; Wansink & Kranz, 2013). Il apparait donc que malgré la publication d’un nouveau guide alimentaire, la population a besoin d’un certain temps pour s’y familiariser, et sans doute encore davantage pour y adhérer.

Guide alimentaire canadien
Au Canada, les recommandations alimentaires pour la population sont contenues dans le GAC, qui représente la référence en matière de saine alimentation au pays, et dont la dernière version a été émise en 2007 (Santé Canada, 2007a). Selon le gouvernement canadien, une alimentation saine comprend une variété d’aliments provenant des quatre groupes alimentaires, et permet de maintenir une bonne santé et un état de bien-être (Gouvernement du Canada, 2015). Les groupes alimentaires sont, en ordre décroissant de proportion dans l’alimentation, les légumes et fruits, les produits céréaliers, les lait et substituts ainsi que les viandes et substituts (Santé Canada, 2011). Tel que mentionné précédemment, le GAC constitue également la base de plusieurs programmes d’éducation en nutrition et politiques alimentaires (Santé Canada, 2011).

Le modèle de saine alimentation proposé par le GAC est fondé sur les données scientifiques probantes (Santé Canada, 2011). Son élaboration a nécessité l’examen de plusieurs types et quantités d’aliments, puis mené à l’identification d’un profil alimentaire reflétant les besoins nutritionnels et les données actuelles sur la réduction du risque de maladies chroniques. De plus, le modèle alimentaire tient compte du contexte et de la réalité canadienne dans le choix des aliments et groupes d’aliments. Il comporte des recommandations d’ordre quantitatif et d’ordre qualitatif. L’image suivante (figure 1) est une représentation du GAC, soit un arc-en-ciel, dont les quatre arcs illustrent les proportions relatives de chaque groupe alimentaire pour une alimentation saine. De plus, quelques aliments compris dans chaque groupe y sont représentés.

Qualité alimentaire des Canadiens
Bien qu’il semble que les Canadiens soient assez familiers avec le GAC, sans nécessairement l’appliquer, qu’en est-il de leurs apports alimentaires ? En fait, peu de rapports récents ont évalué l’alimentation globale des Canadiens, le plus récent étant l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC), datant de 2004, dont les résultats ont été rapportés dans une étude de Garriguet (2007). Malgré le fait que cette enquête date de 2004, la littérature semble montrer que les profils alimentaires sont stables dans le temps, et ainsi les habitudes alimentaires des Canadiens sont peu susceptibles d’avoir changé drastiquement depuis ce temps (Cutler, Flood, Hannan, & NeumarkSztainer, 2009; Jankovic et al., 2014). De plus, l’étude est parue en 2007, soit la même année que la publication de la dernière version du GAC. Ainsi, les apports alimentaires sont comparés non pas au GAC de 2007, mais bien aux recommandations en vigueur au moment de l’étude, soit le GAC de 1992. Par ailleurs, on peut tout de même relever certaines informations importantes. Par exemple, la majorité des Canadiens n’atteignaient pas les 5 portions minimales du groupe légumes et fruits par jour recommandées par le GAC de 1992 (Santé Canada, 2007b). Sachant que les recommandations du GAC de 2007 sont maintenant de 7-8 portions pour les femmes adultes et entre 8-10 pour les hommes adultes pour ce même groupe alimentaire (Santé Canada, 2007a), on peut supposer que les apports d’un plus grand nombre d’individus se situeraient en-dessous des recommandations pour les légumes et fruits. Chez les hommes, les apports du groupe des viandes et substituts se situaient en haut des recommandations alors que cette tendance n’était pas vue chez les femmes. Le groupe des autres aliments, malgré qu’il ne soit pas un groupe officiel du GAC, représentait alors près de 22% des apports des Canadiens, alors que le GAC de 1992 recommandait de les inclure de façon modérée (Santé Canada, 2007b). Au Québec, un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), également basé sur les données de l’ESCC, a montré des résultats similaires, avec 39% des adultes québécois n’atteignant pas 5 portions de légumes et fruits par jour (INSPQ, 2009). De plus, moins du tiers d’entre eux consommaient le nombre recommandé de 2 portions de lait et substituts, et la consommation de produits céréaliers à grains entiers était également en-deçà des recommandations.

Déterminants de la saine alimentation 

Malgré les recommandations bien établies pour encourager la saine alimentation chez les Canadiens, le fait de connaître leur existence n’est pas suffisant pour obtenir des effets concrets sur la prise alimentaire des individus. En effet, il semble qu’il y ait discordance entre les évidences scientifiques et l’adhésion aux recommendations alimentaires. Malgré la littérature scientifique qui suggère un lien évident entre la saine alimentation et la santé, on constate une faible adhésion aux recommendations alimentaires qui favorisent une telle alimentation. (WHO, 2003a). Une revue de la littérature de Raine (2005) sur les déterminants de la saine alimentation au Canada indique d’ailleurs que bien que l’adoption d’une alimentation saine et l’acte de manger en général puissent paraître simples à première vue, les apports alimentaires sont en fait influencés par un grand nombre de facteurs. Ces déterminants ont un impact sur les choix alimentaires de la personne et sur ses comportements alimentaires et peuvent être d’ordre environnemental, social ou individuel (Raine, 2005). Il est à noter que de nombreuses études sur les déterminants de la saine alimentation portent en réalité sur les déterminants de la consommation de fruits et légumes, puisqu’il a été démontré dans la littérature qu’une consommation élevée de fruits et légumes était en général représentative d’une saine alimentation dans la population (Staser et al., 2011). Le diagramme suivant de Contento (2008) illustre les différents déterminants qui influencent les choix et comportements alimentaires, et expose bien la multitude de facteurs qui entrent en compte pour mener aux choix alimentaires, à commencer par les facteurs biologiques (Figure 2). Les autres déterminants présentés sont les facteurs associés à l’expérience avec la nourriture, comme les préférences alimentaires, suivis des facteurs intra-personnels tels que le soutien social, ainsi que les déterminants environnementaux, par exemple l’accessibilité alimentaire.

Déterminants environnementaux
L’environnement alimentaire dans lequel les individus évoluent, notamment en termes d’accessibilité à la nourriture et de la disponibilité alimentaire, influence l’adhésion à la saine alimentation (Bleich, Jones-Smith, Wolfson, Zhu, & Story, 2015). Certaines études ont observé que lorsque plus d’options d’aliments sains sont disponibles dans les épiceries, les achats et les apports alimentaires des individus ont tendance à être de meilleure qualité nutritive (Cheadle et al., 1991; Morland, Wing, Diez Roux, & Poole, 2002). Par ailleurs, en plus des épiceries, de nombreux commerces ont maintenant une offre alimentaire grandissante facilitant ainsi l’accès à la nourriture, comme les pharmacies et même certaines librairies et quincailleries, sans compter les machines distributrices qu’on retrouve pratiquement partout (Gordon-Larsen, 2014). La qualité nutritive des aliments disponibles n’y est cependant pas toujours optimale et selon certaines études, l’accès à des aliments de type « camelote », soit des aliments non favorables à la santé, serait associée à un régime alimentaire de niveau nutritif faible, alors qu’un meilleur accès à des aliments sains serait lié à une diète dite « santé » (Cummins, Flint, & Matthews, 2014). Toutefois, dans d’autres études, de telles associations n’ont pas été observées (Ball, Crawford, & Mishra, 2006; Boone-Heinonen et al., 2011). Dans certains quartiers défavorisés, on compte un moins grand nombre d’épiceries, et davantage d’établissements comme des dépanneurs ou restaurants de type fast-food, qui font office de lieux d’approvisionnement alimentaire pour les résidents de ces secteurs (Giskes et al., 2011; Larson, Story, & Nelson, 2009; Powell, Slater, Mirtcheva, Bao, & Chaloupka, 2007). En ce sens, certaines études rapportent que le fait de résider dans un quartier plus défavorisé quant au niveau socio-économique aurait également une influence sur les apports alimentaires, vu l’offre alimentaire peu favorable à la saine alimentation dans ces commerces (Morland, Diez Roux, & Wing, 2006). Cependant, certaines études, dont une récente de Oexle (2015) n’ont pas observé d’association entre l’accès à des restaurants de type fast-food et la consommation d’aliments qui proviennent de ces établissements. Certains aspects restent donc à être éclaircis quant à l’influence de l’accès à différents types d’établissements ayant une offre alimentaire et l’utilisation de ceux-ci par les résidents. Vu les résultats mitigés dans la littérature, il est difficile de se prononcer sur un effet direct de la disponibilité et de l’accessibilité alimentaire sur les apports. L’environnement semble tout de même avoir une certaine influence sur l’alimentation, mais il est difficile pour l’instant d’en connaître la portée.

Déterminants sociaux
Les déterminants sociaux de l’alimentation touchent surtout l’aspect du soutien social offert par les proches. D’abord, la famille a un rôle à jouer dans l’adoption de saines habitudes alimentaires chez les enfants, puisque les parents agissent comme premiers modèles d’alimentation pour les enfants et encouragent, ou non, la consommation d’aliments sains (Johnson, 2016). Par ailleurs, l’adoption de saines habitudes alimentaires serait influencée par le soutien de la famille chez les adultes également (Ball et al., 2006; Evans, McNeil, Laufman, & Bowman, 2009; Homish & Leonard, 2008; McGee et al., 2008; Shaikh et al., 2008; Williams et al., 2012; Yates et al., 2012). Par exemple, Williams et collaborateurs (2012) ont effectué une étude portant sur les facteurs associés positivement à une alimentation saine et négativement à une alimentation malsaine. Ils ont observé que lorsque les membres de la famille agissaient à titre de soutien positif, la consommation d’aliments sains était plus élevée, alors que la consommation d’aliments de type « camelote » était plus faible ( Williams et al., 2012). Ainsi, certaines études semblent indiquer que le soutien familial favorise une alimentation saine, et décourage la consommation d’aliments moins nutritifs.

Déterminants individuels
Les apports alimentaires des individus sont également influencés par certains facteurs individuels. En effet, en plus des facteurs extérieurs comme le soutien social et l’environnement, l’alimentation est également régie par plusieurs influences au niveau même de l’individu, qui affectent son comportement (Raine, 2005). Ces déterminants étant très nombreux, seulement quelques-uns d’entre eux seront présentés ici, soit ceux plus présents dans la littérature. D’abord, parmi les facteurs sociodémographiques, de nombreuses études ont observé que l’alimentation variait selon le sexe, l’âge et le niveau socio-économique des individus (Garriguet, 2009; Marques-Vidal et al., 2015; Swan, Bouwman, Hiddink, Aarts, & Koelen, 2015). Selon les études effectuées au Canada comme ailleurs dans le monde, il semble que les femmes aient de meilleures habitudes alimentaires que les hommes (Dehghan, Akhtar-Danesh, & Merchant, 2011; Garriguet, 2007; MarquesVidal et al., 2015; Swan et al., 2015). Cette association pourrait être expliquée par certaines caractéristiques observées chez les femmes, comme une conscience plus marquée de leur état de santé, de même qu’une plus grande attention portée à leur poids et leur apparence et une plus grande fréquence de préparation des repas (Hiza, Casavale, Guenther, & Davis, 2013). Une association a aussi été observée entre une alimentation saine et un âge plus avancé (Garriguet, 2009). Selon plusieurs études, les individus âgés tendent à avoir de meilleures habitudes alimentaires (Marques Vidal et al., 2015), ce qui pourrait être expliqué par le fait qu’ils passent plus de temps à préparer des repas faits maison, ou encore par leur moins grande consommation de repas de type fast-food (Adams et al., 2015; Adams & White, 2015). En ce qui concerne le niveau socio-économique, Beydoun et Wang (2007) ont rapporté qu’un statut socio économique faible pourrait engendrer une barrière due au prix des aliments sains, et encourager la consommation d’aliments « camelote » moins dispendieux. Il semble qu’un niveau d’éducation élevé soit également marqueur d’une meilleure alimentation (Estaquio et al., 2008; Hu et al., 2013), ce qui pourrait être expliqué par les revenus plus élevés rapportés chez ces individus (Marques-Vidal et al., 2015). Par ailleurs, des revenus familiaux plus élevés ont tout de même été associés à une meilleure alimentation indépendamment du niveau d’éducation, et ainsi les deux facteurs doivent être considérés dans l’équation (Marques-Vidal et al., 2015).

Les préférences alimentaires ont également un impact sur les habitudes alimentaires. Selon une étude de Williams et collaborateurs (2012), une préférence pour les fruits et légumes était associée de façon positive à une alimentation saine, et de façon négative à une alimentation malsaine. Également, la perception de barrières à la saine alimentation pourrait être un facteur limitant dans l’adoption d’une telle alimentation. En effet, chez les femmes qui percevaient le temps et le coût des aliments comme étant des barrières majeures à la saine alimentation, la consommation de fruits et légumes était plus faible (Williams et al., 2012). L’importance de l’efficacité personnelle comme déterminant de la saine alimentation a également été soulignée dans plusieurs études, notamment dans une revue de la littérature de Shaikh et al. (2008) portant sur les déterminants de la consommation de fruits et légumes. On compte également comme déterminant de la saine alimentation les connaissances en nutrition (Ball et al., 2006; Guillaumie, Godin, & VezinaIm, 2010), dont il sera question plus en détail dans la section suivante.

Connaissances en nutrition  :

Importance des connaissances en nutrition :

Il importe de souligner que les connaissances en nutrition, bien qu’elles aient leur rôle à jouer dans l’adoption de comportements alimentaires sains, représentent seulement un des facteurs dans la panoplie présentée dans la section précédente (Contento, 2008). Cependant, ce facteur est non négligeable car l’amélioration des connaissances est souvent visée pour améliorer les habitudes alimentaires. En effet, partout dans le monde, des programmes d’éducation en nutrition sont mis sur pied dans le but d’améliorer les comportements alimentaires de la population et souvent, ces programmes sont basés entièrement ou en partie sur l’amélioration des connaissances en nutrition (Spronk et al., 2014; Williams et al., 2012). Un autre aspect expliquant l’importance de considérer les connaissances en nutrition comme déterminant de la saine alimentation concerne la perception qu’ont les individus de son rôle dans l’adoption de saines habitudes alimentaires (Raine, 2005). En fait, il a été observé que dans la population, la perception d’un manque de connaissances en nutrition se révèle un obstacle important à l’adoption d’une saine alimentation, tel que rapporté dans deux études traitant des barrières à la saine alimentation (Farahmand et al., 2015; Farahmand, Tehrani, Amiri, & Azizi, 2012).

Sources d’information en nutrition :

Il est donc reconnu que les connaissances en nutrition sont un facteur qu’il importe de considérer, mais avec la médiatisation actuelle de la nutrition, il peut être difficile pour la population de distinguer le vrai du faux. En effet, bien que des recommandations sur l’alimentation aient été émises autant au niveau mondial par l’OMS qu’au niveau national par le GAC, une multitude d’autres informations en nutrition sont disponibles à la population et ce, provenant d’innombrables sources (OMS, 2015; Santé Canada, 2007a). Par le biais des médias, une grande quantité d’information circule, basée souvent davantage sur des croyances en nutrition plutôt que sur des faits et émergeant d’une variété de sources différentes. Selon une étude de Fitzgibbon et al. (2007), on retrouve comme sources d’information en nutrition non seulement les guides alimentaires officiels émis par les gouvernements des différents pays, mais également l’industrie alimentaire, les médias de masse ainsi que les annonceurs publicitaires. Malgré que la facilité d’accès à de tels renseignements puisse être positive, c’est plutôt l’intérêt de ces différents informateurs qui est questionnable. En effet, le gouvernement vise, par le biais de ses recommandations alimentaires, à éduquer la population ainsi qu’à améliorer les apports alimentaires en se basant sur des données scientifiques probantes. Par ailleurs, d’autres groupes d’intérêts ont des objectifs différents. Les auteurs de la même étude indiquent à ce sujet l’intention des médias de masse qui, par le biais des publicités, visent à générer des profits, par exemple par la promotion des régimes à la mode, et ce sans se fier aux évidences scientifiques. Miller et ses collaborateurs (2006) ont également souligné dans leur article sur la communication en nutrition que la disparité entre les informations peut entraîner un sentiment de confusion chez les consommateurs. Selon les auteurs, ces derniers se sentent partagés entre des messages contradictoires, d’une part les informations retrouvées dans la littérature scientifique en nutrition, et d’autre part l’interprétation souvent erronée que les médias font des conclusions d’études (Miller et al., 2006). Il est donc normal que la population se sente perdue dans cette cacophonie d’informations, au sein de laquelle il est difficile de reconnaître le vrai du faux.

Facteurs influençant les connaissances en nutrition :

Mise à part cette cacophonie au niveau de l’information en nutrition, plusieurs facteurs influencent les connaissances en nutrition. Une revue de la littérature récente de Barbosa et collaborateurs (2016) a mis en lumière les différentes études existantes sur les connaissances en nutrition et a rapporté les différents facteurs agissant sur les connaissances. Selon cette recension de la littérature, il semble que les facteurs étant le plus fortement associés aux connaissances en nutrition soient les revenus familiaux, le niveau d’éducation et le sexe. Des revenus familiaux ainsi qu’un niveau d’éducation plus élevés étaient associés de façon quasi systématique avec de meilleures connaissances alimentaires. En ce qui a trait au sexe, les femmes semblent avoir en général de meilleures connaissances en nutrition que les hommes. Zawila et collaborateurs (2003), dans leur étude sur les connaissances en nutrition de femmes athlètes, ont émis l’hypothèse que les femmes sont en général plus concernées par les aspects esthétiques, par exemple le poids corporel, et seraient plus disposées à rechercher de l’information sur l’alimentation et ainsi à acquérir de meilleures connaissances.

Conclusion générale :

Malgré son importance dans le maintien d’une bonne santé, la saine alimentation ne semble pas être adoptée de façon constante dans la population. Au Canada, la qualité alimentaire ne semble pas refléter les recommandations du GAC, et cette tendance est également observée dans les études menées ailleurs dans le monde, pour leurs recommandations respectives. De plus, de nombreux facteurs environnementaux, sociaux et individuels influencent l’adoption d’une alimentation saine et peuvent contribuer à favoriser des choix alimentaires plus nutritifs. Les connaissances en nutrition font partie  intégrante de ces facteurs, par lesassociations positives rapportées entre le niveau de connaissances et la consommation d’aliments sains, de même que par l’importance qui leur est accordée dans la conception de programmes d’éducation en nutrition. Pour bien identifier les effets des connaissances en nutrition, l’utilisation de questionnaires validés est essentielle, et plusieurs méthodes d’évaluation de la validité et de la fiabilité ont été suggérées dans la littérature. Par ailleurs, comme aucun instrument de mesure des connaissances en nutrition adapté au contexte canadien ne rencontrait les besoins de notre équipe de recherche, la présente étude s’est penchée sur le développement et la validation d’un questionnaire sur les connaissances en nutrition dans une population canadienne-française du Québec.

 

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Table des matières

Chapitre I : Introduction générale
Chapitre II : Problématique 
1 La saine alimentation
1.1 Définition de la saine alimentation
1.2 Lien entre l’alimentation et la santé
1.3 Recommandations alimentaires
1.4 Guide alimentaire canadien
1.5 Qualité alimentaire des Canadiens
2 Déterminants de la saine alimentation
2.1 Déterminants environnementaux
2.2 Déterminants sociaux
2.3 Déterminants individuels
3 Connaissances en nutrition
3.1 Importance des connaissances en nutrition
3.2 Sources d’information en nutrition
3.3 Facteurs influençant les connaissances en nutrition
3.4 Lien entre les connaissances en nutrition et la qualité de l’alimentation
4 Développement et validation de questionnaires sur les connaissances en nutrition
4.1 Développement de questionnaires sur les connaissances en nutrition
4.1.1 Définir le champ d’application du questionnaire
4.1.2 Recherche et développement de questions
4.2 Validation de questionnaire sur les connaissances en nutrition
4.2.1 Méthodes de vérification de la validité
4.2.1.1 Validité de contenu
4.2.1.2 Validité apparente
4.2.1.3 Validité de construit
4.2.1.4 Analyse factorielle
4.2.2 Méthodes de vérification de la fiabilité de questionnaires
4.2.2.1 Fiabilité test-retest
4.2.2.2 Cohérence interne
Chapitre III : Mise en contexte, objectifs et hypothèses 
Chapitre IV : Développement et validation d’un questionnaire sur les connaissances en nutrition pour une population canadienne 
Chapitre V : Conclusion générale.

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