Imagerie pré‐opératoire et surveillance post-opératoire

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L’extrémité proximale ou tête de la fibula

Elle présente une forme conique à base supérieure.
Au versant médial de cette base, il existe une surface arrondie et plane, orientée en haut en dedans et en avant, s’articulant avec le tibia. Au-dessus et au-dessous de cette surface articulaire s’insèrent les ligaments tibio-fibulaires supérieurs.
A la partie postéro-externe, la base se prolonge par le processus styloïde, où s’insèrent le ligament latéral externe court du genou, le ligament poplité arqué et le tendon du biceps fémoral. La face externe présente à sa partie supérieure une empreinte pour l’insertion du ligament latéral externe du genou et à la partie inférieure, une pour le long fibulaire.
Elle s’unit au corps par une portion rétrécie, le col de la fibula. C’est à ce niveau que chemine le nerf fibulaire commun (ou sciatique poplité externe)

L’extrémité distale ou malléole externe

Allongée de haut en bas et aplatie transversalement, elle a la caractéristique d’être plus longue, plus volumineuse et de descendre plus bas que la malléole interne.
Sa face latérale est libre de toute insertion et est directement palpable sous la peau.
La face médiale possède 2 zones superposées, l’une supérieure, rugueuse, triangulaire à sommet inférieur, légèrement convexe dans le sens antéro-supérieur et épousant la face latérale du pilon tibial, l’autre inférieure, triangulaire à sommet supérieur, recouverte de cartilage et s’articulant avec l’astragale. A sa partie postérieure, s’insère le ligament talo-fibulaire postérieur (faisceau postérieur du ligament latéral externe de la cheville)
Le bord antérieur, convexe vers l’avant, donne insertion successivement au ligament tibio-fibulaire inférieur et antérieur, au ligament talo-fibulaire antérieur et au ligament calcanéo-fibulaire.
Le bord postérieur, en forme de gouttière, permet le passage des tendons fibulaires et est le site d’insertion du ligament tibio-fibulaire inférieur et postérieur. L’apex (ou pointe de malléole externe) est libre de toute insertion.

Vascularisation de la fibula8

D’une manière générale, la vascularisation des os longs est assurée par quatre réseaux artériels : endomédullaire, périosté, métaphysaire et épiphysaire. La fibula ne fait pas exception. Une artère nourricière pénètre au niveau de la diaphyse et se divise en une branche ascendante et une branche descendante. Au niveau des extrémités, on retrouve des artères métaphysaires et épiphysaires qui s’anastomosent au réseau diaphysaire en fin de croissance.
La vascularisation de la diaphyse péronière est classiquement assurée par l’artère fibulaire. L’apport de l’artère tibiale antérieure pour la diaphyse par des anastomoses avec l’artère fibulaire est accessoire
La division de l’artère poplitée en tronc tibio-fibulaire et artère tibiale antérieure constitue le schéma anatomique le plus fréquent (94,62%, Pässler). Toutefois, la naissance de l’artère fibulaire peut venir d’une trifurcation de l’artère poplitée en artère tibiale antérieure, artère tibiale postérieure et artère fibulaire (1,26%), de l’artère tibiale antérieure (0,6%) ou de l’artère poplitée (0,1%)
L’artère fibulaire nait classiquement à 3cm en dessous du bord inférieur du muscle poplité. Elle a d’abord un trajet horizontal, puis descend verticalement dans la loge externe de la jambe le long de la diaphyse fibulaire, entre le muscle tibial postérieur et la membrane interosseuse en avant et le muscle soléaire et le bord interne du muscle long fléchisseur de l’hallux en arrière. Elle se termine en deux branches, l’artère fibulaire antérieure qui perfore la membrane interosseuse pour venir s’anastomoser avec l’artère malléolaire externe (branche de l’artère tibiale antérieure) et l’artère fibulaire postérieure, qui descend en arrière de la malléole externe pour s’anastomoser avec des branches de l’artère tibiale postérieure.
La vascularisation endomedullaire est assurée par une branche collatérale de l’artère fibulaire qui pénètre la face postérieure, à la jonction tiers moyen tiers proximal, de la diaphyse fibulaire, par le trou nourricier. L’artère fibulaire donne également de nombreuses collatérales circonférentielles, tout au long de son trajet, permettant une vascularisation périostée.
De nombreuses études anatomiques portant sur le nombre d’artères nourricières de la fibula et la position du foramen ont été réalisées.
En 1981, Guo9, sur une série de 295 dissections de fibulas, ne retrouvait aucune artère dans 1,7% des cas et constatait que 66,4% des foramens se situaient au niveau du tiers proximal, 15% au niveau du tiers moyen et 13,5% au tiers inférieur.
Dans une étude similaire de 1984, Mc Kee et al10, sur 305 fibulas examinés chez des caucasiens, constataient une absence d’artère nourricière dans 5,6% des cas et retrouvaient dans les autres cas 96% de foramens au niveau du tiers moyen, 2,5% au tiers supérieur et 1,5% au tiers inférieur. Plus récemment, Cariou et al11 publiaient en 1996 une étude anatomique portant sur 100 fibulas sèches d’adultes et remarquaient que 100% des foramens étaient retrouvés au tiers moyen. 61% d’entre eux sont situés à plus ou moins 2 cm du milieu de l’os et 86% à plus ou moins 3 cm. L’éloignement maximal du foramen était de 5 cm vers le haut et de 3,25 cm vers le bas, pour une moyenne de plus ou moins 1,45 cm. Dans un cas n’était pas retrouvé de foramen à proprement parlé mais une zone cribriforme faite de multiples petits orifices.
En pratique, pour la réalisation de l’ostéotomie, il faut donc considérer que l’artère nourricière pénètre dans la diaphyse à plus ou moins 3 cm du milieu de la fibula.
L’épiphyse proximale de la fibula possède une vascularisation propre par l’artère articulaire inféro-externe (branche de l’artère poplitée) et par des branches de l’artère tibiale antérieure. L’épiphyse proximale et les 13 premiers centimètres de diaphyse peuvent être prélevés sur la seule artère tibiale antérieure.12
Le retour veineux se fait par des veines comitantes parallèles à l’artère.
Le calibre des vaisseaux fibulaires varie entre 1.5 et 2.5mm pour l’artère, celui des veines de 2 à 4 mm.13

Techniques de prélèvement

La fibula peut être prélevée en lambeau osseux, en lambeau ostéo-septo-cutané ou en lambeau ostéo-musculaire. Dans le cadre des reconstructions de perte de substance osseuse fémorale, il est rare d’avoir recours à un prélèvement composite. Nous insisterons donc plus particulièrement sur le lambeau osseux pur.

Transfert osseux isolé

Le prélèvement de la fibula tel que décrit initialement par Taylor1, se fait par un abord postérieur de la jambe avec une dissection étendue au creux poplité, réalisé sur un patient en décubitus ventral. Cependant, l’abord latéral, décrit par Gilbert3, représente actuellement la technique de référence. La technique réalisée dans le service passe également par un abord latéral, inspirée de celle de Gilbert, mais utilisant un plan de dissection antérieur qui nous semble plus aisé que le plan postérieur décrit dans la technique originale.
De manière idéale, le patient est positionné en décubitus latéral, mais pour des raisons pratiques d’accès au site receveur (abord latéral du fémur, anastomose à la face interne de cuisse), le patient est laissé en décubitus dorsal. Une flexion du genou facilite le prélèvement, en détendant les muscles gastrocnémiens. Pour obtenir cette flexion, une cale peut être positionnée sous le pied du patient, la hanche se portant naturellement en rotation interne, la face externe de jambe est alors parfaitement exposée. Un garrot pneumatique est placé, quand cela est possible, à la racine de la cuisse, raison pour laquelle le prélèvement se fait volontiers de manière controlatérale au membre à reconstruire. En effet, un membre exsangue facilite grandement la dissection de la fibula et de son pédicule.
Après champage du site receveur et du membre inférieur à prélever, le dessin du prélèvement est tracé sur la peau, suivant l’axe de la fibula.
L’incision cutanée est longitudinale, en face externe de jambe, selon une ligne passant par la tête de la fibula et la pointe de la malléole externe. Le fascia crural est exposé au niveau de l’intervalle séparant le muscle long fibulaire en avant et le muscle soléaire en arrière. Cet intervalle, ou septum intermusculaire postérieur, est abordé après avoir incisé ce même fascia crural, et la dissection se poursuit en avant, dans l’espace intermusculaire. Les corps musculaires du long et court fibulaire sont décollés par digitoclasie, jusqu’à obtention d’un contact avec la face latérale de la diaphyse fibulaire, le septum inter-musculaire postérieur étant laissé adhérant au muscle soléaire.
La dissection se poursuit alors dans un plan sous musculaire et extra-périosté. Les fibres musculaires du long et court fibulaire sont sectionnées au bistouri froid, sans léser le périoste. Les masses musculaires sont réclinées à l’aide d’écarteurs à griffes, afin d’exposer la face latérale de la fibula. Les artères musculo-périostées sont soigneusement coagulées au fur et à mesure de la dissection afin d’éviter un saignement trop important au lâchage du garrot.
Après avoir totalement libéré la diaphyse fibulaire de l’insertion des muscles long et court fibulaire, le plan de dissection arrive sur le septum inter-musculaire antérieur.
Une fois la face latérale de la diaphyse fibulaire parfaitement exposée, le dessin du prélèvement osseux est réalisé, centré sur le foramen, lieu de pénétration du pédicule fibulaire dans la diaphyse. Nous réalisons trois ostéotomies transversales afin de faciliter l’abord de la région crurale antérieure. Le fragment distal compris entre les ostéotomies distale et médiane constitue la partie fibulaire utilisée pour le transfert. Le fragment proximal améliore l’exposition du tronc tibio-fibulaire et facilite, par la suite, la mobilisation du transfert lors de la dissection. Il pourra également servir de greffon conventionnel, le cas échéant. Les ostéotomies sont réalisées à la scie oscillante, sous irrigation pour éviter l’altération du tissu osseux, et après avoir protégé l’axe vasculaire fibulaire à l’aide d’un dissecteur glissé au ras de l’os, entre la face médiale de la diaphyse fibulaire et son axe vasculaire. Un davier de Verbrugge est ensuite placé à la partie distale de la diaphyse fibulaire à transférer, permettant d’imprimer une rotation externe à l’axe diaphysaire et faisant passer la face antéro-médiale à la place de la face latérale. Ceci permet d’exposer facilement le septum inter-musculaire antérieur qui est incisé au ras de la diaphyse, pour ne pas léser le paquet tibial antérieur qui est repéré. Les muscles extenseur commun des orteils et extenseur propre de l’hallux sont libérés de leur insertion diaphysaire. En poursuivant la rotation externe à l’aide du davier, la dissection rejoint la membrane inter-osseuse.
A ce stade de l’intervention, l’axe vasculaire fibulaire est repéré au niveau du trait d’ostéotomie distale. La membrane inter-osseuse est incisée à ce niveau, en imprimant une traction sur la partie distale du transfert à l’aide du davier, afin de glisser un dissecteur le long de la face médiale du transfert. L’artère et les veines fibulaires sont isolées, liées et sectionnées. Un fil repère est laissé en place afin de faciliter la dissection du pédicule.
La dissection est alors réalisée de distal en proximal, en extériorisant de sa position anatomique la partie distale du transfert, toujours à l’aide du davier. Les insertions de la membrane inter-osseuse et du muscle tibial postérieur sont mises sous tension, permettant ainsi de les sectionner plus facilement, à l’aide d’un ciseau fin, jusqu’au niveau du tronc vasculaire tibio-fibulaire. Au cours de ce temps opératoire, il faut être vigilant au nerf tibial postérieur, exposé parallèlement à l’axe vasculaire fibulaire.
Une fois cette dissection terminée, la diaphyse fibulaire reste solidaire du pédicule vasculaire, mais libre de toute attache musculo-aponévrotique. Le garrot est levé permettant de s’assurer de la bonne vascularisation du lambeau par le saignement des tranches d’ostéotomie. Le pédicule fibulaire peut alors être sectionné en aval de la division tibio-fibulaire, puis les vaisseaux sont préparés selon les techniques classiques de microchirurgie, à savoir une dissection douce de l’artère et des veines sous grossissement optique, une adventicectomie, et une irrigation au sérum hépariné.
Dans sa description, Gilbert suggère une réinsertion musculaire sur la membrane interosseuse crurale. La fermeture s’effectue en deux plans sur drain de redon aspiratif.
Il est possible de prélever environ 25 cm de fibula chez l’adulte14. Cependant, il est important de conserver les 6 à 7 cm distaux de fibula, permettant ainsi de respecter l’intégrité fonctionnelle de la cheville. En cas d’absolue nécessité, il est possible de prélever plus proche de l’articulation tibio-talienne, mais il est alors recommandé de mettre en place une vis de syndesmodèse pour préserver l’intégrité de la mortaise tibio-fibulaire et éviter une migration proximale de la fibula restante. De même, dans les cas de reconstruction des pertes de substance osseuse diaphysaire fémorale, l’épiphyse proximale n’est jamais nécessaire et nous respectons également les 6-7cm proximaux afin de protéger le nerf fibulaire commun.
Dans le cadre des reconstructions fémorales, la réalisation d’un prélèvement dédoublé15 16 ou en double barreau17 18 peut s’avérer particulièrement utile. Le premier barreau, proximal, conserve sa double vascularisation (périostée et endomédullaire), le second ne possède plus qu’une vascularisation périostée19. Ce montage permet ainsi d’encastrer l’un des barreaux dans le fût centro-médullaire du fémur, le deuxième barreau venant en étai. Ceci permet ainsi une meilleure tenue mécanique et un meilleur comblement osseux du défect.

Lambeaux ostéocutanés 20 21

La présence de deux à cinq pédicules perforants cutanés, le long du bord postérieur de la fibula permet la levée de lambeaux ostéocutanés, avec une palette pouvant mesurer jusqu’à 16cm de long sur 6cm de large, axée sur deux à trois vaisseaux perforants.
L’intérêt de ce prélèvement composite est faible dans le cadre des reconstructions fémorales. En effet, la couverture cutanée pose rarement de problème à la cuisse où d’épaisses masses musculaires enfouissent profondément et de manière circonférentielle le fémur.
On peut toutefois souligner qu’une petite palette cutanée vascularisée par un pédicule septocutané lors du prélèvement d’une fibula peut servir de témoin permettant de monitorer le lambeau osseux en post-opératoire, comme l’a proposé Yoshimura22.

Lambeaux ostéomusculaires

L’artère fibulaire fournit généralement un pédicule proximal dominant à destinée du chef latéral du muscle soléaire. Ceci permet de prélever cette partie latérale de manière conjointe à la fibula. Pour les mêmes raisons qu’évoquées précédemment, ce prélèvement composite a peu de place dans les reconstructions fémorales.

Imagerie pré‐opératoire et surveillance post-opératoire

Bilan pré‐opératoire

Il n’existe pas de consensus concernant le bilan d’imagerie pré-opératoire23. Certains auteurs24 25 préconisent un bilan d’imagerie vasculaire pré-opératoire du membre prélevé afin d’identifier les possibles variations anatomiques telles que l’absence d’artère tibiale antérieure ou postérieure, la présence d’une artère fibulaire magna, situations où le sacrifice de l’axe péronier pourrait compromettre la vascularisation du pied avec un risque ischémique non négligeable.
Pour d’autres, notamment Disa26, la réalisation de ce bilan vasculaire n’est nécessaire qu’en cas d’anomalie à l’examen clinique (absence de pouls pédieux ou tibial postérieur), de sujets âgés, diabétiques ou artériopathes, ou de séquelles traumatiques sur ce membre prélevé. C’est classiquement cette position que nous adoptons dans notre pratique.
Lorsqu’un bilan d’imagerie est nécessaire, quatre examens sont à discuter. Il s’agit de l’artériographie, de l’angioscanner, de l’échographie-doppler et de l’angioIRM.
Concernant le bilan d’imagerie sur le membre à greffer, outre un bilan osseux afin de poser l’indication et anticiper la perte de substance à compenser, aucune imagerie vasculaire n’est systématiquement réalisée. En effet le choix du site d’anastomose est pris en per-opératoire, le branchement artériel se faisant idéalement en termino-terminale sur une perforante de l’artère fémorale profonde ou superficielle, en latéro-terminale sur l’artère fémorale superficielle quand aucune perforante n’est exploitable. Pour l’anastomose veineuse, celle-ci se fait en termino-terminale sur une veine de proximité. Parfois, lorsque le saignement se fait majoritairement par les tranches de section osseuse de la fibula et que le retour veineux est faible, voire nul, aucune anastomose veineuse complémentaire n’est réalisée.

Artériographie

Examen de référence pour la cartographie vasculaire des membres inférieurs, celui-ci consiste en la ponction de l’artère fémorale au triangle de Scarpa et l’injection de produit de contraste iodé. La réalisation de clichés radiographiques multiples et séquentiels permet de suivre la diffusion du produit de contraste iodé dans les 3 axes de jambes jusqu’au pied. En revanche, l’analyse des perforantes, en cas de nécessité de prélèvement d’une palette cutanée est imparfaite. De plus, cet examen fortement irradiant n’est pas dénué de risque, avec un taux de complication variant de 3 à 5% en fonction des séries 27 . Ces complications sont à type d’hématome, de faux anévrisme ou de thrombose au point de ponction artériel, d’insuffisance rénale ou d’allergie secondaire à l’injection de produit de contraste iodé.
Bien que cet examen constitue encore le gold standard dans l’imagerie artérielle des membres inférieurs, ces taux élevés de complication pour un bilan diagnostic le rendent de recours exceptionnel.

Angioscanner

Le recours au produit de contraste iodé est ici aussi nécessaire, mais son injection dans le système veineux périphérique n’expose pas aux complications liées à la ponction de l’artère fémorale. Dans leur étude de 2005, Chow et Al28 retrouvent une concordance radio-clinique de 100% sur une série de 20 patients. Moins irradiant, moins coûteux et permettant de réaliser une cartographie des perforantes et une imagerie osseuse du membre à reconstruire dans le même temps, cet examen est actuellement préféré par de nombreux auteurs lorsqu’une imagerie vasculaire pré-opératoire est nécessaire.

Echographie‐Doppler

Cet examen facilement réalisable et non invasif ne permet pas d’analyse anatomique mais suffit le plus souvent pour objectiver la présence de 3 axes de jambes et, dans les mains d’un opérateur entraîné, permet même de localiser une perforante nécessaire au prélèvement d’une palette cutanée. L’absence d’irradiation, son innocuité et son faible coût rendent cet examen particulièrement intéressant dans le bilan pré-opératoire d’un lambeau libre osseux de fibula vascularisé.
Smith et Al22 en 2003, retrouvaient chez 17 patients une concordance parfaite entre les résultats échographiques et les résultats artériographiques. Pour ces auteurs, l’échographie-doppler était donc suffisante pour le bilan pré-opératoire. Cependant, depuis cette étude, il semble que la présence d’une anomalie Doppler ne constitue pas une contre-indication stricte à la chirurgie, mais rend nécessaire la réalisation d’examens plus invasifs.

Angio-IRM

Plusieurs études29 30 31 32 ont montré l’efficacité de cet examen pour le bilan vasculaire des membres inférieurs, en revanche sa performance en termes de détection des perforantes septo-cutanées est encore discutée. Dans tous les cas, la difficulté d’accès à cet examen et son coût élevé le relaient malheureusement au rang d’examen d’exception.

Surveillance post‐opératoire

La reconstruction fémorale par fibula vascularisée est classiquement réalisée par un transfert osseux pur, sans palette cutanée, ce qui rend la surveillance clinique de ce lambeau enfoui impossible. De plus, même en cas de palette cutanée utilisée comme témoin, il apparaît que la souffrance de celle-ci n’implique pas obligatoirement la souffrance de la fibula sous-jacente 33 34. Les lambeaux libres, qu’ils soient osseux, musculaires, fascio-cutanés ou composites sont considérés comme une technique de reconstruction fiable puisque les taux de succès rapportés dans la littérature varient de 90 à 95% 35 36. Cependant ces chiffres ne tiennent pas compte de la nécessité de sauvetage en urgence éventuelle, qui représente 6 à 14% selon les séries. Selon Siemionow et Arslan 37, les taux de sauvetage des tissus transférés, suite à un arrêt de la vascularisation, sont inversement proportionnels au délai entre le début de l’ischémie et l’intervention chirurgicale. Si la vascularisation d’un lambeau est compromise et qu’elle ne peut pas être rétablie dans les huit à douze heures, le sauvetage du lambeau risque d’être impossible en raison du phénomène de « non-reflux ».
Dans le cas d’un lambeau enfoui, cette reprise en urgence en cas d’ischémie n’est pas envisageable lors d’une surveillance clinique seule. En effet, la surveillance classique d’un transfert de fibula libre osseux se fait par suivi radiologique, et la consolidation du transfert de même que son hypertrophie témoignent de la réussite du transfert.
La scintigraphie peut être utilisée afin de s’assurer de la persistance de la vascularisation du transfert osseux, mais un résultat négatif à cet examen ne permet pas d’envisager une reprise en urgence et constitue plus un facteur pronostique qu’un véritable moyen de surveillance 38.
Les examens précédemment cités dans le cadre du bilan vasculaire pré-opératoire peuvent être utiles en post-opératoire afin de s’assurer de la perméabilité des anastomoses 39, mais leur répétition pluriquotidienne pendant la période classique de surveillance rapprochée des lambeaux libres est quant à elle inenvisageable. En effet, la surveillance se fait à chaque heure pour les premières 24 heures puis toutes les deux heures pour les 24 heures suivantes et toutes les quatre heures les cinq à sept jours suivants. Seule l’échographie-Doppler pourrait trouver une place mais il est parfois difficile de distinguer le pédicule vasculaire des vaisseaux avoisinants, notamment à la cuisse.
Dès 1975, Creech et Miller 40 ont décrit le système idéal de surveillance, à savoir être sans danger pour le patient et le tissu transféré, permettre une détection précoce, être précis, fiable et facile d’usage pour le personnel soignant mais ce n’est que récemment, que différents outils de monitoring de la vascularisation des lambeaux libres ont été proposés 41.
Dans une revue de la littérature sur les différentes techniques de surveillance de la vascularisation des tissus transférés, Smit et al.42 ont réalisé une analyse qualitative et ont fourni des éléments d’appréciation sur l’applicabilité et la facilité d’utilisation de ces méthodes récentes. Dans cette revue de la littérature, ont été comparés le Doppler implantable, la spectrographie par infrarouge, le Doppler laser et la microdialyse. Il en ressort que seul le Doppler implantable permet de répondre aux critères émis par Creech et Miller. De plus, cette technique a également l’avantage d’être la moins coûteuse en termes de matériel et de consommables, et applicable aux lambeaux enfouis.
Il s’agit d’une technique invasive permettant une surveillance directe et continue des lambeaux libres, décrite dès 1988 par Swartz et al.43 mais elle n’est utilisée plus largement que depuis les années 2000 44 45. Le système consiste en une sonde à ultrasons implantable, de 20 MHz, montée sur un brassard en silicone et enroulée autour du pédicule veineux ou artériel lors du geste chirurgical. Un fil est extériorisé par la cicatrice et relié à un moniteur portable. A distance de l’intervention, soit cinq à dix jours selon la durée souhaitée de surveillance, une traction sur le fil permet de libérer la sonde du brassard en silicone. Une traction de 50g est suffisante, ce qui assure une innocuité totale pour l’anastomose.
Même si dans notre pratique, nous avons pour habitude de réaliser une simple surveillance clinique des lambeaux libres de fibulas, cette technique mérite d’être mentionnée et envisagée, si ce n’est de manière systématique, en cas de critères per-opératoires défavorables (mauvais retour veineux, nécessité de reprise de l’anastomose artérielle, qualité artérielle médiocre, etc..).

Caractéristiques des pertes de substances osseuses

Il est rare d’être confronté à une perte de substance osseuse contemporaine du traumatisme. Le plus souvent celle-ci est la conséquence d’une gestion imparfaite de la situation initiale et la prise en charge du défect osseux devient indissociable de la gestion des parties molles et de l’infection. Les progrès réalisés depuis les trente dernières années en termes de prise en charge des fractures, de réparation des parties molles et de couverture antibiotique ont de fait, augmenté les indications de lambeaux libres osseux, là où une association de perte de substance des tissus mous, osseux et un sepsis imposaient la réalisation d’une amputation.
Bien qu’à l’heure actuelle, les techniques chirurgicales disponibles permettent dans la quasi-totalité des cas de conserver un membre même très délabré, il est important de réfléchir en terme fonctionnel, et la reconstruction se doit d’apporter un plus par rapport à un appareillage prothétique.
Dans le cas des pertes de substance fémorale, la reconstruction osseuse doit être systématiquement envisagée car l’impossibilité de conserver l’articulation du genou rend l’appareillage plus complexe et moins fonctionnel. De plus, elles imposent très souvent la réalisation d’un moignon fémoral court, encore plus difficilement appareillable.
De manière générale, les pertes de substances osseuses peuvent se rencontrer dans trois circonstances distinctes :
– Une perte de substance contemporaine de l’accident : il s’agit d’une situation rencontrée lors d’un traumatisme à haute énergie, associée à une ouverture cutanée type III B ou III C de Gustilo 46. D’après la statistique d’Édimbourg,47 cela concerne 11,4% des pertes de substances osseuses post-traumatiques. Elle se rencontre chez des patients avec une moyenne d’âge de 37 ans, et dans 71% des cas chez des hommes.
– Une perte de substance osseuse résultant d’excisions itératives dans les suites immédiates d’une fracture ouverte
– Une perte de substance secondaire à une exérèse rendue nécessaire par une infection osseuse chronique, consécutive à une fracture ouverte ou fermée.

Données pré‐opératoires

Pour chaque patient, le sexe et l’âge au moment de la chirurgie de reconstruction ont été notés. De même le contexte traumatique (accident de la voie publique, traumatisme balistique, chute, accident du travail, etc.) et le caractère ouvert ou fermé de la fracture fémorale étaient précisés. Pour qualifier l’ouverture cutanée initiale, la classification de Cauchoix-Duparc 48 était utilisée (Annexe 1). Dans le cas des fractures fémorales, même en cas d’ouverture de stade III avec une peau non suturable, la présence de volumineuses masses musculaires rend rarement nécessaire la réalisation d’un geste de couverture du foyer de fracture en urgence. Toutefois, même en l’absence d’exposition directe du site fracturaire, le risque septique est largement augmenté. L’histoire clinique au décours du traumatisme initial a également été précisée et dans cette optique, nous avons pris en compte le délai entre la survenue de l’accident et la réalisation de la reconstruction fémorale par fibula libre. Le nombre d’interventions réalisées pendant cet intervalle ainsi que leur nature ont été recherchés. De même, le caractère septique ou aseptique de la perte de substance osseuse, et la présence d’une antibiothérapie pré reconstruction systématiquement analysés. Ce statut septique était objectivé soit par des prélèvements réalisés lors des interventions antérieures à la reconstruction, soit pendant la chirurgie reconstructrice.
Pour chaque dossier, le côté et le site fracturaire (médio-diaphysaire ou supra-condylien), ont été notés.

Données per‐opératoires

Nous avons relevé pour chaque patient le côté prélevé en précisant si sa position était homolatérale ou controlatérale au membre à reconstruire. La perte de substance a été mesurée sur les radiographies post-opératoires immédiates et la présence d’un contact cortical résiduel après parage, systématiquement recherchée.
La fibula pouvait être greffée de manière simple, bifoliée, emmanchée dans une allogreffe ou associée à une greffe osseuse conventionnelle.
Les fibulas simples étaient encastrées dans le fût fémoral en proximal et en distal après préparation de celui-ci.
Dans les cas de greffe par fibula bifoliée, lorsque la perte de substance était au niveau médio-diaphysaire, une partie de la fibula était encastrée dans le fût centro-médullaire du fémur proximal et distal à la manière d’une fibula simple, l’autre partie, placée en étai entre la corticale fémorale proximale et la corticale fémorale distale. Pour les pertes de substance de siège supra-condylien, la fibula était greffée par un montage en « tour Eiffel », c’est-à-dire encastrée dans chaque condyle en distalité.
Pour les fibulas emmanchées dans une allogreffe, un rail était réalisé dans l’allogreffe afin d’extérioriser le pédicule vasculaire de la fibula. Cette dernière était encastrée dans le fût fémoral, l’allogreffe venant en étai.
Pour ce qui est des greffes osseuses conventionnelles associées, nous avons recherché uniquement un prélèvement à distance de la fibula (RIA ou crête iliaque), la réalisation d’un greffon à l’aide du fragment réséqué de fibula n’était pas considérée comme tel.
Le type d’ostéosynthèse a également été analysé. Celle-ci pouvait être réalisée par fixateur externe, lame plaque, plaque externe verrouillée, double plaque ou clou centro-médullaire.

Données post‐opératoires

Les données post-opératoires ont été recueillies par l’analyse des dossiers et par revue systématique des patients, avec un recul minimal de deux ans.
Les complications post-opératoires immédiates au site donneur, à type de paresthésies dans le territoire du nerf fibulaire superficiel, de déficit d’extension ou de flexion de l’hallux ont été rapportées. Au site receveur, les complications immédiates telles que la survenue d’un hématome, d’une désunion cicatricielle ou d’un écoulement suspect (par les fiches d’un fixateur externe ou par la cicatrice) imposant une reprise chirurgicale précoce ont également été recherchées. Par ailleurs, une antibiothérapie probabiliste était administrée en post-opératoire puis secondairement adaptée aux germes retrouvés dans les prélèvements bactériologiques osseux per opératoires, à défaut, à ceux retrouvés en pré-opératoire. Cette antibiothérapie post-opératoire était mise en place de manière systématique, en revanche, celle-ci était maintenue pendant une durée variable.
Au cours du suivi post-opératoire, nous avons évalué le délai avant autorisation d’une reprise d’appui contact, dépendant du mode d’ostéosynthèse, et d’appui total en fonction de l’évolution radiologique. A distance de l’intervention, le périmètre de marche, la nécessité d’un recours à une aide technique à la marche, les amplitudes articulaires au niveau du genou du membre reconstruit et de la cheville du membre prélevé étaient également analysés.
D’un point de vue radiologique, des clichés du fémur reconstruit de face et de profil, réalisés de manière systématique au cours du suivi des patients permettaient d’évaluer le délai de consolidation. De même, l’hypertrophie du greffon, calculée selon la formule de De Boer et Wood49, reprise par El-Gammal50, était systématiquement mesurée à 1 et 2 ans.
Formule de De Boer et Wood, reprise par El-Gammal :
Pourcentage d’hypertrophie = (B2/A2 – B1/A1) / (B1/A1).
Où :
– B2 correspond au diamètre de la fibula à un temps t de la reconstruction par fibula libre (en millimètre).
– A2 correspond au diamètre du fémur receveur à un temps t de la reconstruction par fibula libre (en millimètre).
– B1 correspond au diamètre de la fibula transférée en post-opératoire immédiat (en millimètre).
– A1 correspond au diamètre du fémur receveur en post-opératoire immédiat (en millimètre).
Enfin, les complications plus tardives, à type de récidive infectieuse, de débricolage de l’ostéosynthèse ou de fracture de stress du greffon étaient recherchées, et leur prise en charge précisée. La fracture de fatigue, ou de stress, se définit par la survenue d’une fracture en plein corps de la fibula après obtention d’une consolidation aux deux extrémités de la greffe.

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Table des matières

Partie 1 : Généralités
1. Anatomie de la fibula
1.1. Le corps
1.1.1. La face latérale
1.1.2. La face postérieure
1.1.3. La face médiale
1.2. L’extrémité proximale ou tête de la fibula
1.3. L’extrémité distale ou malléole externe
2. Vascularisation de la fibula
3. Techniques de prélèvement
3.1. Transfert osseux isolé
3.2. Transferts composites
3.2.1. Lambeaux ostéocutanés
3.2.2. Lambeaux ostéomusculaires
4. Imagerie pré‐opératoire et surveillance post-opératoire
4.1. Bilan pré‐opératoire
4.1.1. Artériographie
4.1.2. Angioscanner
4.1.3. Echographie‐Doppler
4.1.4. Angio-IRM
4.2. Surveillance post‐opératoire
5. Caractéristiques des pertes de substances osseuses
Partie 2 : Matériel et Méthode
1. Critères d’inclusion et d’exclusion
2. Données pré‐opératoires
3. Données per‐opératoires
4. Données post‐opératoires
Partie 3 : Résultats
1. Données pré‐opératoires (Annexe 2)
2. Données per‐opératoires (Annexe 3)
3. Données post‐opératoires (Annexes 4‐5‐6)
Partie 4 : Discussion
1. Propriétés des greffes osseuses
1.1. Propriétés biologiques
1.1.1. Capacité ostéogénique :
1.1.2. Capacité d’ostéoconduction
1.1.3. Capacité d’ostéo‐induction
1.2. Propriétés mécaniques
1.3. Consolidation des greffes osseuses vascularisées.
2. Choix de l’Ostéosynthèse
2.1. Enclouage centro‐médullaire
2.2. Fixateur externe
2.3. Lame plaque
2.4. Plaque externe verrouillée
2.5. Double plaque
3. Choix du type de montage et de greffe
3.1. Perte de substance médio‐diaphysaire
3.2. Perte de substance supra‐condylienne
4. Fracture de fatigue
5. Alternative au transfert osseux vascularisé
Conclusion
Bibliographie 

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