Hydrogel et Adhésion : Au Fil de l’Eau

L’élaboration d’hydrogels adhésifs, constitue un enjeu majeur en recherche biomédicale pour la conception de dispositifs novateurs utilisés en environnement humide, tels que les patches transdermiques ou les pansements cicatriciels.

En raison de leurs nombreuses propriétés, parmi lesquelles la biocompatibilité, la déformabilité ou encore leur capacité à absorber de grandes quantités d’eau, les hydrogels font l’objet d’une abondante littérature. La première partie de ce chapitre permettra de définir leurs caractéristiques et leurs modes de synthèse. Compte-tenu de leur forte teneur en eau, l’organisation structurelle du solvant dans les hydrogels et son influence sur les interactions polymère/polymère seront également décrites.

Par ailleurs, l’étude des propriétés adhésives des hydrogels nécessite au préalable une bonne connaissance des mécanismes et des interactions responsables de manière générale de l’adhésion macroscopique, décrits dans la deuxième partie. Nous aborderons les raisons des difficultés à concevoir un système polymère collant en présence d’eau. Un certain nombre de dispositifs expérimentaux permettent de quantifier l’adhésion sous l’eau. Cependant les difficultés liées à une mesure en solution sur un matériau mou justifient le nombre restreint de références relatives à l’adhésion immergée d’hydrogels. Nous présenterons les résultats de la thèse de Guillaume Sudre qui serviront de point de départ à notre travail pour répondre aux objectifs fixés.

Hydrogels de polymères

Définition, synthèse et caractéristiques générales

Un hydrogel est un réseau macromoléculaire tridimensionnel composé de chaînes de polymères hydrophiles, interconnectées entre elles par des nœuds de réticulation de nature chimique ou physique. Il est gonflé dans l’eau, qui représente généralement plus de 80 % de la masse totale du gel, ce qui lui confère des propriétés de biocompatibilité [1].

La synthèse des hydrogels peut être envisagée selon deux voies principales. La première consiste en la polymérisation et la réticulation simultanées d’un monomère de fonctionnalité égale à 2 et d’un réticulant de fonctionnalité au moins égale à 3 (Figure 1.1-a). Cette méthode, en une seule étape, permet une grande liberté dans le choix de la composition de l’hydrogel (nature chimique, concentration en monomère et densité de réticulant). Elle présente en revanche l’inconvénient de donner au gel une structure assez hétérogène aussi bien en surface qu’en volume. Le gel peut également être préparé par réticulation de macromolécules linéaires préformées, éventuellement fonctionnalisées lors d’une première étape de synthèse par des fonctions chimiques réactives (Figure 1.1-b). La structure obtenue est plus homogène mais la méthode est moins versatile et en particulier plus délicate à mettre en œuvre dans le cas de la synthèse de copolymères.

Dans les deux cas, la structure de l’hydrogel obtenue après synthèse (Figure 1.2) varie avec la nature du polymère, la densité de réticulation, la taille de la maille ou encore la présence de défauts éventuels (boucles, chaînes pendantes, enchevêtrements,…). Ces divers paramètres contribuent directement aux propriétés de gonflement thermodynamique et cinétique des hydrogels .

Dans le cas de la réticulation des gels physiques, les interactions mises en jeu sont réversibles et susceptibles d’être modifiées en changeant les conditions expérimentales (pH, température, force ionique) [3]. Il peut s’agir d’interactions faibles comme les liaisons hydrogène [4, 5], les interactions hydrophobes [6-8] ou les interactions ioniques [9-11] pour lesquelles le temps de vie est court en comparaison des temps caractéristiques d’observation. Bien que ces interactions élémentaires soient intrinsèquement faibles, leur coopérativité sur des séquences interactionnelles plus ou moins longues permet de générer des interactions fortes à l’origine de la réticulation des gels physiques (cristallites dans les gels de poly(vinyl alcool) (PVA), obtenus par congélation/décongélation successives [12], triples hélices dans les gels de gélatine [13]). Aux temps d’observation longs, les interactions sont stables.

La réticulation par formation de liaisons covalentes est quant à elle irréversible en l’absence de toute dégradation chimique. Elle est responsable d’un certain nombre de propriétés remarquables des hydrogels, en particulier leur comportement de solides élastiques insolubles [14]. Cependant comparés aux élastomères, les hydrogels sont des matériaux fragiles, en raison de la grande quantité d’eau qu’ils contiennent.

Pour élaborer un mimétique de matrice extracellulaire utilisable en ingénierie tissulaire [15], les performances mécaniques des gels ont dû être améliorées [16]. Les différentes stratégies envisagées ont conduit à l’élaboration des gels contenant des charges inorganiques telles que des nanoparticules de silice [17] ou de Laponite [18], des ions jouant le rôle de nœuds de réticulation physiques supplémentaires dans un gel chimique à base d’alginate et de PVA [19] ou des nanofibres de Chitosan [20]. Gong et al. ont envisagé quant à eux la synthèse de doubles réseaux interpénétrés d’hydrogels, dans lesquels le deuxième réseau sert de réseau sacrificiel [21]. Ces modifications ont permis d’améliorer considérablement la contrainte à rupture des matériaux, atteignant plusieurs dizaines de MPa.

De manière plus générale, l’ensemble des caractéristiques des hydrogels explique leur présence dans de nombreux domaines d’application. Si leur biocompatibilité et leur transparence sont notamment utilisées pour la correction visuelle à l’aide de lentilles de contact [22, 23], leur grande capacité d’absorption leur vaut le statut de matériaux super-absorbants [24, 25]. Ils peuvent servir de support à la croissance cellulaire [26] ou à des dispositifs d’administration contrôlée de médicaments [27], être synthétisés pour l’encapsulation de principes actifs [28, 29] ou pour la conception de systèmes microfluidiques [30, 31].

En revanche, le caractère naturellement peu collant des hydrogels, dû à leur grande teneur en eau, en particulier lorsqu’ils sont gonflés à l’équilibre, freine encore leur développement en tant que bioadhésifs.

Gonflement des hydrogels

Lorsqu’un gel à l’état de préparation est immergé en solution, les interactions polymère/solvant sont responsables de son gonflement plus ou moins important, voire dans certains cas de son dégonflement. La détermination de la variation volumique de l’échantillon permet de caractériser d’une part l’architecture macromoléculaire du réseau, figée durant la synthèse, qui dépend des concentrations initiales en monomère et en réticulant, et d’autre part l’affinité du gel avec le solvant.

Aspect cinétique 

Au-delà des valeurs limites à l’état de préparation et à l’état d’équilibre, la connaissance de la cinétique d’absorption d’eau par le gel au cours du gonflement est un résultat complémentaire, caractéristique des phénomènes de diffusion dans le réseau. Lorsqu’un gel est immergé en solution, les molécules d’eau commencent par gonfler la surface de l’échantillon puis diffusent vers le centre du gel, créant ainsi un gradient de concentration. Il s’agit de données importantes dans le domaine médical pour l’optimisation du transport de nutriments ou d’oxygène facilitant la cicatrisation de plaies [35, 36].

D’après la classification de Bajpai, la cinétique d’absorption d’eau, mise en évidence par la mesure de la quantité d’eau absorbée par l’hydrogel au cours du temps d’immersion, dépend de la vitesse de relaxation des chaînes de polymères par rapport à la vitesse de diffusion du solvant [37]. Lorsque la température de transition vitreuse est nettement en dessous de la température du milieu (Cas I), la grande mobilité des chaînes de polymères facilite la pénétration de l’eau dans le réseau. La vitesse de diffusion 𝑉𝑑𝑖𝑓𝑓 est très faible devant la vitesse de relaxation des chaînes 𝑉𝑟𝑒𝑙𝑎𝑥. La diffusion suit la loi de Fick.

Si au contraire la température du milieu est inférieure à la température de transition vitreuse, les chaînes de polymères ne sont pas suffisamment mobiles pour permettre une pénétration immédiate de l’eau dans le gel. Cette situation correspond à une diffusion non-Fickienne. Le cas où 𝑉𝑑𝑖𝑓𝑓 ≫ 𝑉𝑟𝑒𝑙𝑎𝑥 est décrit comme le Cas II. Si 𝑉𝑑𝑖𝑓𝑓~ 𝑉𝑟𝑒𝑙𝑎𝑥, la diffusion est dite anormale.

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Table des matières

Introduction Générale
Chapitre 1 – Hydrogel et Adhésion : Au Fil de l’Eau
Introduction
1. Hydrogels de polymères
1.1. Définition, synthèse et caractéristiques générales
1.2. Gonflement des hydrogels
1.2.1. Aspect thermodynamique
1.2.2. Aspect cinétique
1.3. Structure de l’eau dans les hydrogels
2. Interactions et mécanismes responsables de l’adhésion
2.1. Interactions moléculaires
2.2. Mécanismes physiques à l’origine de l’adhésion
3. Comment mesurer l’adhésion d’un hydrogel sous l’eau ?
3.1. Mesure par Microscopie à Force Atomique (AFM)
3.2. Détermination macroscopique de l’adhésion
3.3. Dispositif expérimental de Sudre et al.
3.3.1. Description détaillée
3.3.2. Hétérogénéités de concentration en surface
3.3.3. Réversibilité de l’adhésion en fonction du pH
3.4. Adhésion et gonflement : un effet de concentration ?
4. Objectifs de la thèse
Bibliographie
Chapitre 2 – Systèmes et Protocoles Expérimentaux
Introduction
1. Physico-chimie du système
1.1. Brosses et films minces de polymères
1.2. Hydrogels macroscopiques
1.2.1. Synthèse à partir de monomères
1.2.2. Caractérisation mécanique de la structure des gels
1.3. Caractérisation de la cinétique de gonflement des hydrogels
1.3.1. Gonflement des gels neutres de PDMA
1.3.2. Gonflement des gels ioniques de P(MAETAC-co-AAm)
1.3.3. Conséquences sur la topographie de la surface du gel
1.4. Conclusion
2. Test de Probe-Tack
2.1. Principe de la mesure
2.2. Modifications apportées au dispositif de maintien
2.3. Critère d’alignement des surfaces
2.4. Influence des paramètres de mesure
2.4.1. Vitesse d’enfoncement en compression
2.4.2. Force de compression
2.4.3. Temps de contact
2.4.4. Vitesse de décollement
2.5. Définition des paramètres de référence
3. Conclusion
Bibliograhie
Chapitre 3 – De l’État de Préparation à l’Équilibre de Gonflement
Introduction
1. Adhésion et gonflement
1.1. Principe de test d’adhésion
1.2. Résultats et Discussion
2. Suivi cinétique d’adhésion de PDMA_P10-R2
2.1. Principe du test cinétique
2.2. Résultats
2.3. Discussion
2.3.1. Conséquences du maintien par plaque
2.3.2. Concentration et perte d’adhésion
2.4. Conclusion
3. Adhésion et réversibilité
4. Comparaison à d’autres hydrogels neutres
5. Adhésion en conditions physiologiques
5.1. Propriétés de gonflement
5.2. Principe de test d’adhésion
5.3. Résultats et Discussion
6. Conclusion
Bibliographie
Chapitre 4 – Adhésion et Mécanismes
Introduction
1. Influence du taux de réticulation sur l’adhésion immergée
2. Influence de la concentration en polymère sur l’adhésion
2.1. Suivis cinétiques d’adhésion de PDMA_P𝒙-R3
2.2. Adhésion et hydratation
2.3. Adhésion et dégonflement
2.4. Conclusion
3. Interprétations moléculaires
4. Conclusion
Bibliographie
Conclusion Générale

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