Hydratation des argiles gonflantes

Les déchets radioactifs

   Les déchets radioactifs peuvent être classés selon deux critères : la durée de vie (temps au bout duquel la radioactivité disparaît) et la radiotoxicité ou activité, qui traduit son impact potentiellement toxique sur la biosphère. Les déchets hautement radioactifs et à durée de vie longue, sont essentiellement constitués par les combustibles usés et les déchets vitrifiés et représentent seulement 1% du volume des déchets radioactifs. La Loi du 30 Décembre 1991 ou Loi Bataille a été promulguée et constitue le cadre législatif au sein duquel sont abordés les modes de gestion possibles pour les déchets les plus actifs (ANDRA, 2001). Dans le cadre de la loi Bataille, trois axes de recherche étaient imposés pour les déchets à Haute Activité et Vie Longue (HAVL). L’objet des recherches sur la gestion des déchets radioactifs HAVL est de définir les possibilités permettant soit de réduire le volume et l’activité des déchets, soit de les isoler de tout contact avec l’environnement, pour de très longues périodes de temps. Les trois axes de recherche sont les suivants:
• La recherche de solutions permettant la séparation et la transmutation d’éléments à vie longue.
• L’étude des possibilités de stockage réversible ou irréversible dans les formations géologiques profondes, notamment grâce à la réalisation de laboratoires souterrains.
• L’étude de procédés de conditionnement et d’entreposage de longue durée en surface.
Cette loi a servi de base aux études réalisées jusqu’en 2006. Il en résulte essentiellement la nécessité de continuer à travailler sur les différents concepts, même si le stockage en formation géologique profonde apparaît comme incontournable (ASN, 2006 ; ANDRA, 2005). Les premières études ont montré que le site choisi présentait des propriétés favorables pour le stockage en formation argileuse (argilite du Callovo-Oxfordien du site de Bure), notamment en transfert d’eau (faible perméabilité) et pour la migration des radionucléides (forte capacité de rétention des radionucléides), il apparaît encore nécessaire d’étudier et de caractériser l’argilite du Callovo-Oxfordien, pour bien comprendre tous les mécanismes et les interactions et déterminer les paramètres pertinents pour une modélisation réaliste. Pour cela, il est nécessaire entre autre de confirmer la cinétique très lente de la migration des radionucléides contrôlée par la diffusion (processus extrêmement lent), d’estimer la variabilité des coefficients de diffusion et de la perméabilité et de suivre le comportement thermique/hydrique/mécanique du stockage (CNE, 2006). Il est également nécessaire d’étudier les perturbations chimiques apportées par le béton, les composants métalliques et les déchets et leurs produits de dégradation. Des progrès significatifs ont été obtenus sur l’inventaire des déchets, la connaissance de la formation du Callovo-Oxfordien de la région de Bure, l’architecture du stockage, les barrières ouvragées et, d’une manière générale, sur les questions essentielles du point de vue de la sûreté, mais des questions plus générales restent encore en suspens, comme la réversibilité du stockage et l’extrapolation des observations et des résultats d’expériences à des périodes très longues. De toutes les recherches, celles portant sur la migration des radionucléides, l’impact de la formation de gaz (notamment H2) sur le stockage et l’efficacité des scellements sont considérées comme prioritaires (ASN, 2006).

L’eau et l’argile dans le stockage géologique

    Sur les longues périodes envisagées pour le stockage géologique, le transport des radionucléides est contrôlé par les flux d’eau présents dans les barrières ouvragée et géologique. Il est donc nécessaire de quantifier les différents flux d’eau présents dans le site de stockage, pour prévoir comment les radioéléments peuvent se déplacer et migrer dans l’eau de la couche argileuse et comment l’eau modifie les propriétés de l’argile. Un élément dissous peut être transporté par deux mécanismes : par diffusion due à une différence de concentration en ion (ou plus généralement à une différence de potentiel chimique) et/ou par advection en étant emporté par le mouvement de l’eau. Ainsi la disponibilité et la mobilité de l’eau dans les argiles sont des données essentielles. Ces informations sont liées à l’état de l’eau dans les milieux poreux et hydrophiles, comme les smectites. Pour répondre aux préoccupations liées à la diffusion des polluants ou de radionucléides à travers des milieux  poreux, il est fondamental de décrire correctement les états de l’eau, moteur des transports, ainsi que la localisation et l’organisation des molécules d’eau dans l’espace interfoliaire notamment. L’eau joue un rôle majeur dans l’évolution à long terme du stockage. Dans les matériaux argileux et notamment la bentonite MX 80, il est nécessaire de mieux cerner les propriétés de l’eau confinée dans les différentes porosités des argiles peu hydratées ou compactées, a priori assez différentes de celles de l’eau non confinée. Comment peut-on faire le lien entre une eau fortement liée à la structure de l’argile et une eau non confinée ? Il est également nécessaire de mieux comprendre les phénomènes de transport dans l’espace poreux d’un point de vue spécifique à l’argile et aux ions présents dans la structure : les coefficients de diffusion et les mobilités en surface des feuillets changent-ils lorsqu’on modifie la structure de l’argile ? Quelle est l’influence du degré d’hydratation sur ces paramètres de transport ?

Montmorillonite (TOT M+)

   La présentation générale des argiles nous a permis de replacer les smectites par rapport à leurs structures dans la gamme des argiles. Les smectites et notamment la montmorillonite présentent un comportement différent d’autres argiles : sa structure se modifie au cours de son hydratation. La montmorillonite, décrite par Mauduyt (1847), dans la localité de Montmorillon (dans la Vienne, en France) (Bailey, 1991 ; Deer et al., 1965), fait partie de la classe chimique des phyllosilicates. Les feuillets sont composés essentiellement des atomes de silicium, oxygène, aluminium et magnésium. Les subtitutions peuvent se produire aléatoirement dans les feuillets : on remplace certains aluminiums par des atomes de charge inférieure (comme par exemple le magnésium pour la montmorillonite contenue dans MX80). Un déficit de charge du feuillet apparaît et il est nécessaire d’insérer des cations compensateurs dans la structure, pour obtenir un composé neutre (Figure 1.9.). Les cations compensateurs les plus communs pour la montmorillonite naturelle sont le sodium (Na+) et le calcium (Ca2+). Certaines impuretés, telles que du potassium, peuvent se trouver sous forme de traces dans ce composé. Le groupe d’appartenance est le groupe des smectites (composés ayant un fort pouvoir absorbant d’eau et des capacités d’échange de cation). De fait, en présence d’eau, la montmorillonite est « gonflante », c’est à dire qu’elle absorbe l’eau dans l’espace entre les feuillets, appelé espace interfoliaire, et dans toute autre porosité accessible. En présence d’eau, les cations sont à l’état hydraté. Cet état modifie les forces électriques et provoque un éloignement des feuillets les uns des autres, d’où le gonflement. L’influence de l’état d’hydratation de l’argile sur le gonflement de la structure peut être compris qualitativement en considérant les forces électrostatiques existant entre le cation interfoliaire et la surface. Ces forces diminuent lorsque des molécules d’eau viennent écranter les interactions électrostatiques. On peut donc relier les notions d’hydratation des argiles et de gonflement avec les interactions électrostatiques.

Hydratation des surfaces externes des mésopores

   Les espaces mésoporeux sont les premiers à s’hydrater. En effet, l’étude des courbes DRX et des isothermes d’adsorption montrent que l’argile s’hydrate alors que l’espacement interfoliaire ne s’ouvre pas (Bérend, 1991). Il en est de même pour l’argile saturée par des cations Li. En plus, l’exploitation des isothermes d’adsorption par la méthode BET montre que les constantes BET déterminées pour les mésopores des argiles sodiques et lithiques sont plus fortes que celles déterminées pour les espaces interfoliaires (cf Annexe III sur les isothermes d’adsorption). Cette observation, en accord avec la littérature (Berend, 1991 ;Gailhanou, 2005) signifie que l’espace mésoporeux s’hydrate plus facilement et apporte une certaine stabilité au niveau énergétique. L’hydratation de l’espace mésoporeux permet un abaissement énergétique du système « argile ». Cette première étape semble être en désaccord avec le fait que les composants les plus réactifs de l’argile vis-à-vis de l’eau sont les cations compensateurs contenus en grande majorité dans l’espace interfoliaire. Comment comprendre cette apparente contradiction ? Le premier point à souligner est que les cations compensateurs qui sont présents essentiellement dans l’espace interfoliaire ne sont pas facilement accessibles au départ de l’hydratation, i.e. quand les espaces interfoliaires sont fermés. Une partie de ces cations reste toutefois accessible, car ils se trouvent soit proches de l’embouchure de l’espace interfoliaire, soit en surface des mésopores. On se trouve alors dans un cas proche de celui de l’espace interfoliaire, mais où la quantité de cations est beaucoup plus faible, comme le montre les mesures de CEC réalisées sur des illites, dont les cations compensateurs interfoliaires sont inaccessibles et non échangeables (Deer et al., 1965 ; Bailey, 1991). Ainsi les espaces mésoporeux présentent une structure quasi-similaire avec les espaces interfoliaires (toutes proportions gardées quant à la teneur en cations), mais présentent l’avantage de ne pas nécessiter un gonflement (donc une perte en énergie comme c’est le cas pour l’espace interfoliaire). Il est donc normal de considérer que la première étape de l’hydratation se produise dans les mésopores et que l’eau s’adsorbe sur les surfaces externes des particules. Dans les expériences que nous avons menées en thermoporométrie, l’aspect dynamique de l’hydratation n’est pas abordé, alors que l’hydratation suivie par les expériences d’isothermes d’adsorption prend en compte cet aspect dynamique. Ainsi lors de l’hydratation et en prenant en compte la structure de la porosité de l’argile (macroscopiquemésoscopique et microscopique), il apparaît possible que les premières surfaces rencontrées par les molécules d’eau soient les surfaces des macropores. On observerait alors une séquence d’hydratation différente. La séquence que nous proposons est une séquence qui décrit l’hydratation des argiles pour les états d’équilibre. Pour notre séquence, la première étape correspond donc à l’hydratation des surfaces externes des particules et des cations (en très faible quantité) qui peuvent se retrouver en surface des particules. Quel est le mécanisme qui contrôle cette première étape ? Compte tenu des pressions relatives considérées, on peut penser que les molécules d’eau qui se déposent sur la surface des mésopores sont des molécules gazeuses. Pour atteindre les mésopores, dont les rayons de pores n’imposent pas la condensation des molécules comme dans l’interfoliaire, les molécules pour atteindre les mésopores peuvent diffuser et s’adsorber physiquement. On a donc un abaissement énergétique faible : peu de cations contribuent à fournir un dégagement de chaleur important et l’adsorption des surfaces des particules doit fournir une énergie supérieure à celle fournie par l’adsorption sur les surfaces des espaces interfoliaires.

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Table des matières

1 Introduction Générale et Synthèse Bibliographique
1.1 Contexte de l’étude : le stockage des déchets radioactifs
1.1.1 Les déchets radioactifs
1.1.2 Confinement multi-barrières
1.1.3 Propriétés des argiles
1.1.4 L’eau et l’argile dans le stockage géologique
1.2 Description des argiles
1.2.1 Présentation générale
1.2.2 Les smectites à l’échelle microscopique
1.2.3 L’aspect multi-échelle
1.3 Séquence d’Hydratation et Gonflement
1.3.1 Description de la séquence d’hydratation
1.3.2 Facteurs influençant l’hydratation
1.3.3 Les différents types d’eau dans l’argile
2 Objectifs, Matériel et Méthode
2.1 Questions clés et démarche expérimentale
2.2 Choix d’un matériau de référence : la bentonite MX80
2.3 La thermoporométrie
2.4 Modèle électrostatique
2.5 Conductivité électrique et mobilité cationique
3 Séquence d’hydratation : gonflement et mobilité des cations
3.1 Application de la thermoporometrie à l’étude du gonflement mésoscopique
3.1.1 Validation et application de la méthode aux smectites
3.1.2 Hydratation simultanée de l’espace interfoliaire et de la porosité mésoscopique : mise en évidence du gonflement mésoscopique
3.1.3 Autres cations : le rôle de l’interfoliaire
3.1.4 Cas du composé mixte Na/Ca
3.1.5 Interprétation des résultats
3.2 Mobilite des cations et hydratation parmesures de conductivité électrique
3.2.1 Validation de la méthode pour les matériaux gonflants
3.2.2 Etat sec
3.2.3 Etat saturé
3.2.4 Etats intermédiaires
3.2.5 Influence du gonflement, de la position et de la charge du cation : interpretations
3.3 Etablissement de la sequence d’hydratation
3.3.1 Séquence d’hydratation pour Li et Na
3.3.2 Séquence d’hydratation pour les autres cations étudiés (K, Cs et Ca)
3.3.3 Conclusions
4 Modèle énergétique pour l’hydratation
4.1 Détermination théorique des énergies de surface à l’état sec
4.1.1 Détermination théorique des énergies de surface
4.1.2 Détermination des charges partielles dans le cas de la smectite
4.1.3 Notion de surface spécifique et thermodynamique de l’adsorption et de l’immersion
4.1.4 Energies de surface pour les cations alcalins
4.1.5 Comparaison avec les chaleurs d’immersion
4.2 Determination theorique des energies d’hydratation des surfaces et des cations
4.2.1 Rôle de l’hydratation des cations dans les smectites pour l’immersion
4.2.2 Décomposition de l’immersion en processus d’hydratation élémentaires
4.2.3 Estimation théorique de l’énergie de gonflement
4.2.4 Evaluation théorique de l’énergie d’hydratation des ions à partir de l’immersion
4.2.5 Spécificité du comportement des cations dans les smectites
4.2.6 Discussion sur les moteurs de l’hydratation
4.2.7 Détermination des énergies d’hydratation des cations par la conductivité électrique
5 Conclusions et Perspectives

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