Hétérogénéité au sein des systèmes lacustres

Sources de matière organique

La matière organique particulaire (MOP), issue de la production primaire dans la colonne d’ eau ou de la bande riveraine (i.e. subside allochtone), représente un apport de matière non négligeable pour l’habitat benthique (Strayer & Likens 1986; Olafsson et al. 1999). Cette matière organique, très hétérogène, peut se trouver sous forme vivante (microhétérotrophes, microalgues benthiques) ou sous forme morte (détritus d’origine autochtone et allochtone à différents stades de dégradation). Elle peut par ailleurs être remise en suspension, minéralisée, incorporée au réseau trophique ou bien enfouie dans le sédiment. La matière organique autochthone est synthétisée au sem du lac (Wetzel 2001). Les sources de matière organique autochtones utilisées par les macroinvertébrés benthiques sont les algues (phytoplancton, épilithon, périphyton) et les plantes vasculaires, tels que les macrophytes (Talbot & Ward 1987; Giani & Laville 1995; Wetzel 2001; Solomon et al. 2007). De plus, des tissus d’organismes vivants seraient consommés par des carnivores (Giani & Laville 1995). Des travaux récents, mettant en oeuvre la technique de traçage isotopique (i .e., 813C et 815N), ont montré que les subsides, tels que la matière organique provenant d’environnements terrestres, pouvaient alimenter les réseaux trophiques des lacs oligotrophes et atteindre, voire même excéder, les niveaux de production primaire autochtone (Caraco & Cole 2004; Carpenter et al. 2005). Les impacts des apports de subsides allochtones sur les réseaux trophiques lacustres dépendraient par ailleurs de leur forme (dissoute ou particulaire), de la voie d’entrée dans le réseau trophique et des types de consommateurs présents dans le système (Cole et al. 2006).

En effet, les entrées de matière organique en provenance des forêts riveraines représentent une importante source d’énergie (Nakano & Murakami 2001; Wetzel 2001), puisque la matière organique allochtone viendrait augmenter le nombre de sources pouvant être utilisées par les invertébrés (Riera et al. 1999): La majeure partie de la matière organique allochtone qui se retrouve dans les écosystèmes aquatiques provient principalement des plantes terrestres (Wetzel 2001). Une modification des apports de végétation terrestre au milieu aquatique pourrait avoir comme effet potentiel d’affecter la quantité de macroinvertébrés disponibles pour les espèces de poissons résidentes (France 1995a). En effet, des résultats obtenus par France (1995a) démontrent que la communauté de macroinvertébrés littoraux est probablement plus influencée, de même que plus dépendante, de la quantité de végétation terrestre plutôt qu ‘ aquatique. Bref, l’apport en subsides de matière organique allochtone peut être particulièrement important pour les lacs des régions tempérées, où les deux principaux déterminants de la productivité primaire, soient la température et la lumière, changent drastiquement suivant les saisons (Nakano & Murakami 2001). De plus, il semble que les lacs des régions nordiques tempérées reçoivent annuellement un apport important de carbone par le biais de contributions allochthones (France 1995a), particulièrement dans les systèmes oligotrophes où l’activité autochthone est moins importante étant donné la moins grande quantité de nutriments présents (Cole et al. 2006).

Approche de l’analyse en isotopes stables (AIS)

L’analyse des contenus stomacaux de même que les mesures de taux d ‘ ingestion par utilisation d ‘ isotopes radioactifs sont deux méthodes couramment utilisées pour caractériser les sources de nourriture utilisées par les organismes et donc pour identifier les transferts de la matière organique particulaire au sein des réseaux trophiques. Or, une des limitations de ces méthodes tient à la relative incertitude de faire la part entre ce qui a été simplement ingéré et ce qui a été effectivement assimilé par l’animal. L’une des façons d’identifier Je type de nourriture assimilée consiste à analyser la composition en isotopes stables naturels des différentes composantes étudiées (James et al. 2000). En effet, les isotopes stables témoignent de l’ assimi lation intégrée sur une certaine période de temps, celle-ci correspondant au taux de renouvellement du tissu d’un organisme (Kling et al. 1992). Cette approche est basée sur J’ existence d’une relation étroite entre les compositions isotopiques du consommateur et celles des sources qui composent sa diète (Eggers & Jones 2000). Les rapports d ‘ isotopes stables du carbone (Ô l3C) et de l’ azote (ÔI5N) fournissent ainsi des informations sur l’ origine et la transformation de la matière (Eggers & Jones 2000). Alors que le ratio 13C/12C donne une idée du type de nourriture assimilé par un organisme, le ratio 15N/14N permet l’évaluation du niveau trophique d ‘ un organisme (Peterson & Fry 1987).

C’est ainsi que cette technique permet, d’une part, d’évaluer les sources et les flux de matière organique dans les écosystèmes et, d ‘ autre part, d ‘ identifier la composition du régime alimentaire d’un consommateur donné. En comparant les variations spatiales et temporelles des signatures isotopiques des sources de matière organique avec celles des macroinvertébrés benthiques, il est possible d ‘ identifier les sources de nourriture utilisées par les organismes (James et al. 2000). Puisque les lacs sont des écosystèmes complexes, les mesures d’abondances naturelles d’isotopes stables ont grandement contribué à la compréhension des réseaux trophiques et des flux d’énergie dans ces systèmes (Schindler & Scheuerell 2002). L ‘analyse d ‘isotopes stables (AIS) est devenue au cours des 25 dernières années une technique privilégiée pour examiner les relations trophiques et élucider les flux d’énergie au sein des écosystèmes (Sarakinos et al. 2002). L’utilisation d’isotopes stables a permis de mieux percevoir le rôle des productions de matière organique allochtone (production terrestre) et de la production primaire autochtone (production benthique) dans les réseaux trophiques lacustres (Hershey et al. 2006).

L’analyse en isotopes stables a été utilisée à quelques reprises dans le cadre d’études portant sur des macroinvertébrés benthiques afin d’évaluer les variations spatiales des signatures isotopiques en carbone (I3C) et en azote (15N). De la variation spatiale a été observée au niveau des signatures isotopiques de macroinvertébrés benthiques présents dans différents habitats (i.e littoral, pélagique et/ou profond), pour les isotopes stables de carbone et/ou d’azote (France 1995b, Van der Zan den & Rasmussen 1999, James et al. 2000, Beaudoin et al. 2001, Hershey et al. 2006). D’autres études ont observé de la variation temporelle au niveau des signatures isotopiques, mais seulement pour certains types de macroinvertébrés benthiques, tels les oligochètes (Yoshioka et al. 1994), les larves de chironomides (Grey et al. 2004), ou encore les différents stades de développement d’insectes lacustres (Solomon et al. 2007). Dans une étude récente, Syvaranta et al. (2006) se sont intéressés aux variations spatiotemporelles des signatures isotopiques en carbone (I3C) et en azote (15N) de macroinvertébrés benthiques de même que de certaines autres composantes, telles que la matière organique particulaire (MOP), le zooplancton, le périphyton, les macrophytes et les poissons en milieu littoral. Cependant, tous les sites littoraux étudiés ne possèdent pas des caractéristiques similaires, certains subissant une pressIOn anthropique plus importante que d’autres , ce qui fait que la variabilité observée au sein du lac étudié pouvait être attendue. Dans le cadre de la présente étude, le lac Des Baies, situé au sein d’une réserve faunique, est un lac qui subit peu de pression anthropique.

Projet à l’étude Cette étude, réalisée suivant une approche faisant intervenir des traceurs d ‘origine de la mati ère organique que sont les rapports d’isotopes stables naturels du carbone (13C) et de l’azote (,sN), vise donc à améliorer notre compréhension des transferts de matière et d’énergie au sein des réseaux trophiques benthiques littoraux et profonds lacustres, en considérant la dimension temporelle, puisque les habitats benthiques restent à ce jour peu connus comparativement aux habitats pélagiques. Le lac Des Baies (48 °10′ N , 68°40′ W) est un lac oligotrophe situé en région Appalachienne au sein de la réserve Duchénier (Est du Québec, Canada). Ce lac a une aire de 6,14 km2 , une profondeur moyenne de 20 m et une profondeur maximale de 48 m. Un premier objectif à l’étude est de mesurer les différentes signatures isotopiques en Ô’3C et Ô,sN des macroinvertébrés benthiques et de sources de nourriture potentielles pour ces organIsmes. Suivant la théorie de l’ analyse en isotopes stables, il est possible de croire qu ‘ une similarité au niveau des signatures isotopiques pourra être observée entre un macroinvertébré benthique et sa principale source de nourriture.

Ensuite, il s’agit de documenter la variabilité au niveau des signatures isotopiques entre les habitats littoral et profond (découplage) et entre les sites. Selon plusieurs auteurs (France 1995b; Van der Zanden & Rasmussen 1999; James et al. 2000; Post et al. 2000; Beaudoin et al. 2001; Syvaranta et al. 2006), des différences au niveau des signatures isotopiques devraient être observées entre les habitats littoral et profond. De plus, comme le système lacustre est un système hétérogène (Shumway et al. 2007), des variations entre les signatures isotopiques rencontrées entre les sites devraient être notées. Finalement, il serait intéressant d’évaluer les changements de flux de matière organIque au cours du temps, en utilisant les macroinvertébrés benthiques. Puisque le lac à l’étude est un lac oligotrophe situé en région tempérée, le régime de lumière varie probablement au cours du temps et donc la disponibilité de sources de nourriture autochtones pourrait varier: Un changement dans la source de nourriture principale des macroinvertébrés benthiques pourrait être observé.

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Table des matières

REMER ClEMENTS
AVANT-PROPOS
Contribution des auteurs
RESUME
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Macroinvertébrés benthiques
Sources de matière organique
Couplages en milieu lacustre
Hétérogénéité au sein des systèmes lacustres
Approche de l’analyse en isotopes stables (AIS)
Projet à l’étude
SPATIAL AND TEMPORAL VARIABILITY IN ISOTOPIC SIGNATURES OF BENTHIC MACROINVERTEBRATES OF A BOREAL LAKE: INFERENCES FROM CARBON (Ôl3C) AND NITROGEN (Ô15N) STABLE ISOTOPES
Summary
Introduction
·Methods
Study area
Sampling
Sample preparation and analysis
Statistical analyses and linear mixing models
Results
Between habitat variability in isotopie signatures
Link between isotopie signatures of benthie macroinvertebrates andfood sources
Between sites variability in isotopie signatures
Organie matter fluxes and temporal variability
Discussion
Spatial variability: Deeoupling between littoral and profundal habitats
Spatial variability: Variations of isotopie signatures at a larger seale
The use of linear mixing models
Temporal variability: Looking at organie matter fluxes
Conclusions
Acknowledgements
CONCLUSION GÉNÉRALE ET PERSPECTIVES
BIBLIOGRAPHIE

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