Hémorragies obstétricales graves

L’hémorragie obstétricale grave se définit par une perte sanguine supérieure à 1000ml (accouchement par voie basse) et 1500ml (césarienne). Elle se définit aussi par une perte de 4 points d’hémoglobine ; nécessitant une transfusion sanguine, un geste chirurgical d’hémostase (capitonnage utérin, ligature vasculaire, l’hystérectomie) ou l’embolisation [1,2]. Ces définitions sont en réalité délicates à appliquer car l’hémorragie d’origine obstétricale est toujours difficile à quantifier : mélange avec le liquide amniotique, saignement sous-estimé, soit du fait de son caractère insidieux, soit au contraire du fait de sa brutalité. De plus, le saignement est longtemps bien toléré dans cette population de femmes jeunes, le plus souvent en bonne santé.

L’OMS a estimé qu’au moins 585 000 femmes décèdent chaque année de suites de complications liées à la grossesse et/ou de l’accouchement; l’HPP est la première cause de décès maternel dans le monde [3]. La majorité de ces décès surviennent dans les pays en développement notamment en Asie et en Afrique sub-saharienne [4]. Le quart de tous ces décès est dû aux hémorragies graves au cours du post-partum soit 25% dans le monde [5;6]. Pendant l’accouchement ou le plus souvent au moment de la délivrance une anesthésie en urgence peut être nécessaire. Aux États-Unis les complications anesthésiques représentent la sixième cause de mortalité maternelle du peripartum et 80 % surviennent dans des situations d’urgence [7] En France, les hémorragies obstétricales représentent la première cause de morbi mortalité au décours de la grossesse et 20 % des admissions en réanimation obstétricale. La mortalité globale est de l’ordre de 6 à 10 %. La survenue d’une hémorragie pendant l’accouchement peut menacer le pronostic maternel et fœtal [8]. En Afrique les urgences gynéco-obstétricales seraient responsables de 30 à 98% de la mortalité maternelle globale avec comme chef de fil les hémorragies. Il a été démontré que 69% de ces décès sont évitables grâce aux mesures d’anesthésie et de réanimation [9]. Au Mali d’après l’enquête démographique et de santé du Mali (2012-2013) le taux de mortalité maternelle est élevé; ainsi le décès maternelle représente 32% de tous les décès de femmes de 15-49 ans et couraient un risque de 1 sur 42 de décéder de cause maternelle pendant les âges de procréation. De plus, le rapport de mortalité maternelle est estimé à 368 décès pour 100 000 naissances vivantes au cours de la période de sept ans précédant l’enquête [10]. Le Mali à l’instar des autres pays sub-sahariens, paye un lourd tribut pour les hémorragies obstétricales soit 58,5% en milieu de réanimation [11]. L’hémorragie représente le principal motif de référence 43,07 % au CHU du Point G [12] et constitue la première cause de mortalité 3,74% en milieu de réanimation [13].

La mortalité anesthésique des césariennes est de 17 fois supérieure sous anesthésie générale que sous anesthésie locorégionale [14]. Les effets hémodynamiques de l’anesthésie locorégionale et leur risque d’aggravation du choc hémorragique font préférer l’anesthésie générale [15]. Cependant d’autres contestent ce point de vue en observant que parmi 46 hystérectomies d’hémostase analysées prospectivement pendant 3 ans [16], 12 avaient été effectuées sous anesthésie péridurale sans majoration du saignement ni du remplissage vasculaire indiquant que l’anesthésie péridurale n’est pas nécessairement contre-indiquée pour ce type de chirurgie. De même, dans une étude portant sur 180 patientes ayant subi une césarienne ou une hystérectomie d’hémostase lors de placenta prævia ou accreta, le saignement per opératoire était diminué chez les 3/7 patientes opérées sous anesthésie péridurale [17]. La plupart des auteurs [16,17] s’accordent pour considérer qu’une hémorragie obstétricale bien contrôlée par le traitement et pour laquelle une reprise soudaine, massive et brutale du saignement n’est pas à craindre, l’utilisation du cathéter de péridurale ou même l’installation d’une anesthésie locorégionale n’est pas contre-indiquée. Par contre une hypotension mal contrôlée avec la persistance d’un saignement abondant, ou l’anticipation d’un saignement brutal (placenta percreta) justifie l’emploi d’une technique d’anesthésie générale dont les risques propres (intubation difficile, syndrome de Mendelson) doivent avoir été évalués avant de prendre cette décision.

Le traitement des hémorragies obstétricales nécessite la mise en place d’une équipe coordonnée et pluridisciplinaire constituée d’anesthésistes réanimateurs, de médecins biologistes, et de gynéco-obstétriciens afin d’éviter ce cycle infernal: état de choc, trouble de l’hémostase, des actes qui pourront être préjudiciables pour l’avenir obstétrical de la femme. A travers cette étude rétrospective nous comptons tracer le profil épidémiologique des patientes, les modalités anesthésiques et thérapeutiques; les aspects évolutifs.

Généralités 

Définitions

L’hémorragie obstétricale grave se définit par une perte sanguine supérieure à 1000ml lors d’un accouchement par voie basse et 1500 ml au cours d’une césarienne ou une perte de 4points d’hémoglobine nécessitant une transfusion sanguine, un geste chirurgical d’hémostase (capitonnage utérin, ligature vasculaire, l’hystérectomie) ou l’embolisation. Cette définition de l’hémorragie obstétricale suppose une quantification précise des pertes sanguines, ce qui n’est pas chose aisée. Le repérage exact des hémorragies obstétricales graves est également délicat, en effet des gestes d’hémostase, notamment d’embolisation, peuvent être réalisés alors même que l’état de la patiente n’a jamais été préoccupant [18]. L’hémorragie intéressant la vulve, le clitoris, les petites et grandes lèvres, le vagin, l’utérus et les vaisseaux dont l’étiologie reste dominée par la pathologie de la délivrance, l’atonie utérine, les lésions génitales et les troubles de la coagulation [19].

Modifications physiologiques de la grossesse

Les modifications observées sont secondaires aux modifications hormonales et au développement fœtal.

Modifications métaboliques

Pendant la grossesse, on observe une élévation progressive de la consommation en oxygène (VO2), reflet du métabolisme maternel, avec un maximum de +20 à  +30 % à l’approche du terme. Cette augmentation de la VO2 est principalement secondaire aux besoins métaboliques croissant de la mère et de son fœtus, ainsi qu’au développement utero placentaire. Cette augmentation de la VO2 nécessite une adaptation des fonctions cardiaque et pulmonaire chez la femme enceinte.

Adaptation cardiovasculaire 

Modifications cardiovasculaires
La volémie maternelle augmente significativement durant la grossesse atteignant sa valeur maximale vers la 32e SA : le volume plasmatique s’élève de 40 à 50 % à l’approche du terme, cette augmentation étant proportionnelle au poids fœtal. Le volume globulaire s’élève également progressivement de 20 %. L’élévation plus importante du compartiment plasmatique par rapport à la masse globulaire a pour conséquence une hémodilution physiologique. L’augmentation de la volémie maternelle est encore plus importante en cas de grossesse multiple. Après accouchement, la volémie maternelle se normalise en 1 à 3 semaines.

L’hémodilution explique que les taux d’hématocrite et d’hémoglobine atteignent leur valeur la plus basse vers 32 SA, lorsque l’expansion plasmatique est à son maximum. Le taux de polynucléaires neutrophiles augmente de la 6e à la 30e SA puis se stabilise jusqu’à l’accouchement. A l’inverse, le nombre de lymphocytes n’est pas modifié au cours de la grossesse, mais leurs fonctions immunitaires sont diminuées. Cette baisse des fonctions lymphocytaires serait nécessaire à la survie et au développement du fœtus qui constitue, pour la moitié de son capital génétique, un organisme étranger à sa mère. Enfin, l’hémodilution entraine une baisse de la viscosité sanguine, accroissant le débit cardiaque (DC). Le DC augmente dès la 8e SA et pendant les deux premiers trimestres de la grossesse, de 35 à 50 %. A partir de 28 SA, le DC reste stable. Cette augmentation résulte de l’élévation de la fréquence cardiaque (+ 15 %), mais surtout de l’augmentation du volume d’éjection systolique (+ 35 %), secondaire à l’élévation de la volémie et à une diminution des résistances artérielles systémiques très précoce au cours de la grossesse. La variation du DC s’accompagne d’une augmentation de la compliance myocardique et d’une dilatation des cavités cardiaques. Malgré l’augmentation globale du DC et de la volémie, on observe chez la femme enceinte une diminution de la pression artérielle (PA) par baisse plus marquée des résistances vasculaires périphériques dès la 7e SA et jusqu’à la 24- 28e SA. Au-delà de 28 SA, les résistances vasculaires remontent et la PA retourne aux valeurs antérieures à la grossesse. Ces modifications des résistances sont secondaires au développement de la circulation utero placentaire et à des facteurs hormonaux (œstrogène, progestérone, et prostaglandines locales). La réponse rénale et vasculaire à l’angiotensine II est abolie malgré une stimulation élevée du système rénine-angiotensine-aldostérone. Ces profondes modifications du tonus vasculaire expliquent en grande partie la diminution de la réponse pressive des vaisseaux (veines et artères) à l’administration des vasoconstricteurs comme la phényléphrine. Il existe des variations posturales de la PA et du DC. En décubitus dorsal, on observe une baisse du DC et une susceptibilité accrue à l’hypotension artérielle conduisant parfois jusqu’au malaise, par compression de la veine cave inférieureet par l’utérus gravide, entrainant une diminution du retour veineux. L’hypotension artérielle et la baisse du DC peuvent provoquer une baisse du débit de perfusion utéro placentaire avec un risque de souffrance fœtale. Le développement d’une circulation collatérale au niveau des veines para vertébrales et épidurales se jetant dans la veine azygos au niveau de la veine cave supérieure, et une augmentation secondaire du tonus sympathique tendent à compenser cette baisse du retour veineux. Ces phénomènes posturaux sont accentués en cas de grossesse multiple ou de macrosomes, mais peuvent être partiellement limités par la mise en décubitus latéral gauche. Enfin, la gêne au retour veineux associée à une diminution de la pression oncotique par hémodilution peut avoir pour conséquence la formation de varices, d’hémorroïdes ou d’œdèmes des membres inférieurs, présent chez 80% des femmes enceintes et parfaitement bénins en absence de protéinurie et/ou d’hypertension artérielle. Au cours du travail, le DC et la PA augmentent, surtout en l’absence d’analgésie efficace, avec des pics au moment des contractions utérines, ce qui peut être mal toléré par les patientes en cas de pathologie cardiaque préexistante. Immédiatement après l’accouchement, le DC augmente encore en raison de la levée de la compression cave, de la diminution de la pression veineuse dans les membres inférieurs et de la disparition du lit vasculaire placentaire. Dans les heures et les jours qui suivent l’accouchement, le DC diminue ensuite progressivement pour rejoindre les valeurs antérieures à la grossesse en 2 semaines environ. Malgré l’anémie de dilution, le transport en oxygène est augmenté pendant la grossesse grâce à la vasodilatation, la baisse de la viscosité sanguine, l’augmentation du DC et l’hyperventilation alvéolaire. La courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine est déviée vers la droite, traduisant l’augmentation de la P50, qui permet une plus grande délivrance tissulaire d’oxygène.

Modifications respiratoires 

Le système respiratoire subit également des changements anatomiques, mécaniques et fonctionnels, conséquences de l’imprégnation hormonale et de l’augmentation du volume utérin.

Modifications anatomiques et mécaniques
Il existe un œdème des voies aériennes supérieures, secondaire à la rétention hydrosodée globale observée chez la femme enceinte. L’ascension du diaphragme liée au développement utéroplacentaire est compensée partiellement par un élargissement des diamètres thoraciques antéropostérieur et transverse, avec ouverture de l’angle sous-sternal. La compliance thoracopulmonaire diminue du fait de la majoration des contraintes mécaniques. Bien que la mobilité diaphragmatique soit conservée, la composante thoracique de la respiration devient progressivement prépondérante par rapport à la composante abdominale au cours de la grossesse, avec mise en jeu des muscles intercostaux.

Modifications des volumes pulmonaires
Le volume courant (VT) augmente dès la 10e SA de 25 à 40 % par rapport à sa valeur de base. En revanche, le volume résiduel et le volume de réserve expiratoire diminuent progressivement de 15 à 20 %, en partie du fait de l’élévation du diaphragme contemporaine de l’augmentation de taille de l’utérus et de son ascension dans la cavité abdominale. Ceci est responsable d’une diminution de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) qui explique la survenue plus rapide d’une hypoxémie en cas d’apnée (induction de l’anesthésie). En fin de grossesse, la CRF en décubitus dorsal peut être inférieure à la capacité de fermeture, ce qui expose à un risque d’atélectasie et d’hypoxémie par effet shunt. En revanche, le volume de réserve inspiratoire n’est pas modifié et l’espace mort physiologique augmente de 45%. Ainsi, la capacité vitale reste inchangée et la capacité pulmonaire totale n’est que très peu modifiée. Les volumes pulmonaires se normalisent en 1 à 3 semaines après l’accouchement.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1. INTRODUCTION
2. OBJECTIFS
2-1. Objectif général
2-2 Objectifs spécifiques
3. GENERALITES
3-1. Définitions
3-2. Modifications physiologiques de la grossesse
3-3 Particularités du choc hémorragique en obstétrique
3-4. Etiologies
3-5. Diagnostic et évaluation de la gravité
3-6. Bilan et mise en condition
3-7. Prise en charge obstétricale initiale
3-8. Traitement pharmacologique de l’atonie utérine
3-9. Chirurgie d’hémostase
3-10. Anesthésie pour gestes obstétricaux
3-11. Prise en charge hémodynamique
3-12. Identification et prise en charge la coagulopathie
4. METHODOLOGIE
4-1. Cadre d’étude
4-2. Période et type d’étude
4-3. Population d’étude
4-4. Critères d’inclusion
4-5. Critères de non inclusion
4-6. Variables étudiées
4-7. Collecte des données
4-8. Aspects éthiques
4-9. Analyse des données
5. RESULTATS
6. COMMENTAIRES ET DISCUSSION
6-1. Limites de notre étude
6-2. Aspects épidémiologiques
6-3. Paramètres cliniques
6-4. Prise en charge anesthésique
6-5.Traitement
6-6. Aspects évolutifs
7. CONCLUSION  
BIBLIOGRAPHIE

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *