Génération et manipulation de peignes de fréquences quantiques multimodes

La mécanique quantique a permis d’expliquer de manière extrêmement précise le comportement de la matière à l’échelle microscopique, introduisant pour cela des états de systèmes physiques non accessibles à la physique classique. Pour le champ électromagnétique, la lumière en particulier, le caractère non classique d’un état peut être une ressource privilégiée pour le traitement quantique de l’information [Cerf 07]. Elle peut par exemple assurer la sécurité de protocoles de partage de clé quantique (cryptographie quantique) entre deux parties [Ekert 91] ou être utilisée pour la téléportation quantique d’états du champ [Vaidman 94, Braunstein 98]. Les états non-classiques trouvent encore une importance dans le domaine de la métrologie quantique [Giovannetti 11].

En optique quantique des variables continues, les variables mesurées sont à spectre continu et correspondent généralement aux quadratures du champ. Dans ce régime, en opposition au régime de comptage de photons, le caractère non-classique du champ se manifeste à travers les propriétés de bruit et de corrélation des quadratures. Les sources de lumière lasers stables ont des fluctuations quantiques qui définissent une limite appelée « bruit quantique standard » (shot noise, en anglais), calculable à l’aide de la mécanique quantique, et qui s’applique également à l’état vide du champ. Les états dont toutes les quadratures sont au bruit quantique standard sont appelés cohérents [Glauber 63] .

De nombreuses expériences d’optique quantique, tirant partie de phénomènes nonlinéaires du deuxième ou du troisième ordre, ont pour but de manipuler les fluctuations quantiques des quadratures pour les emmener en dessous du shot noise, créant ainsi des états non-classiques dits comprimés (observés pour la première fois en 1985 avec de la lumière continue [Slusher 85] et en 1987 en régime impulsionnel [Slusher 87]). Les mêmes dispositifs permettent de créer des états intriqués, c’est-à-dire possédant de fortes corrélations d’origine quantique entre différents modes [Laurat 04]. Les modes de propagation de la lumière correspondent à des solutions des équations de Maxwell. D’une manière générale, un mode est défini par sa polarisation, son profil transverse et ses propriétés spectrales/temporelles. Certains états quantiques sont dits multimodes, car leur description complète implique nécessairement au moins deux modes orthogonaux (plus il faut des modes pour décrire un état plus il est dit multimode). Le traitement multimode de la lumière trouve un grand nombre d’applications. Il est par exemple nécessaire pour augmenter le nombre de canaux disponibles en information quantique et satisfaire la complexité croissante des algorithmes [Cerf 07]. Notre groupe a une histoire importante dans l’étude des propriétés quantiques des images (régime multimode spatial) [Treps 05, Chalopin 10] et s’intéresse depuis quelques années aux propriétés quantiques multimodes des OPO dans le régime impulsionnel, ce qui nous a emmené à l’étude des peignes de fréquences.

Les peignes de fréquences optiques, objets qui suscitent beaucoup d’intérêt aussi bien dans la recherche fondamentale qu’appliquée, ont attiré encore plus l’attention de la communauté scientifique mondiale lorsque le Prix Nobel de Physique a été décerné à Roy J. Glauber, John L. Hall et Theodor W. Hänsch en 2005. Glauber, « par ses contributions à la théorie quantique de la cohérence optique » ; Hall et Hänsch « par leurs contributions au développement de la spectroscopie de précision basée sur les lasers, y compris la technique du peigne de fréquences optiques ». En effet, ces objets constituent des outils très adaptés à des applications en métrologie de haute précision [Udem 02, Holzwarth 00], et l’extension de leurs propriétés extraordinaires au régime quantique peut mener à des progrès significatifs dans plusieurs domaines de la physique quantique, comme la métrologie quantique et l’estimation de paramètres [Lamine 08, Pinel 12b], mais aussi le calcul quantique dans le régime des variables continues [Lloyd 99, Menicucci 08].

Un des grands défis liés à l’implémentation des ordinateurs quantiques en variables continues, en ce qui concerne, par exemple, le calcul quantique avec des clusters states [Menicucci 06, Zhang 06], est la génération d’états non-classiques fortement multimodes de la lumière (et la « scalabilité » de cette génération). Une des solutions proposées pour ce problème est le mélange linéaire de faisceaux non-classiques provenant de différents sources [Yukawa 08, O’Brien 09]. Néanmoins, la difficulté à implémenter cette stratégie augmente avec le nombre de modes, et il semble plus intéressant, au contraire, d’utiliser une seule source fortement multimode qui génère directement des ressources non-classiques partagées par plusieurs modes dans le même faisceau. Dans cette perspective, les peignes de fréquences, qui peuvent s’étendre sur plusieurs milliers de modes longitudinaux monochromatiques, ont un potentiel gigantesque pour la génération extensible d’états quantiques multimodes (temporels ou spectraux).

La lumière quantique multimode a déjà été observée expérimentalement avec des faisceaux multimodes spatiaux produits par des Oscillateurs Paramétriques Optiques
(OPO) [Janousek 09, Chalopin 10] ou à travers le processus de mélange à quatre ondes [Boyer 08], mais aussi, plus récemment, avec les modes longitudinaux d’un OPO [Pysher 11]. Dans le domaine des modes temporels, la génération d’états comprimés monomodes a déjà été observée dans de nombreuses situations, la première en 1987, avec des impulsions nanosecondes en simple passage dans un cristal non-linéaire [Slusher 87]. Des états non-classiques d’impulsions femtosecondes uniques font l’objet également de plusieurs études récentes (par exemple, [Wenger 05]). Des solitons comprimés multimodes ont été générés dans une fibre optique [Spälter 98]. La réduction monomode du bruit quantique de peignes de fréquences picosecondes a été possible avec un OPO pompé en mode synchrone (SPOPO, de l’anglais Synchronously Pumped OPO) [Shelby 92], qui consiste en un OPO pompé par un train d’impulsions ultracourtes synchronisées avec les impulsions effectuant des tours dans la cavité optique [Cheung 90, Edelstein 89, van Driel 95].

Plusieurs travaux théoriques réalisés au sein de notre groupe [de Valcarcel 06, Patera 09, Jiang 12] ont démontré que les SPOPOs génèrent des peignes de fréquences comprimés et multimodes. En effet, ces dispositifs se comportent comme une assemblée d’OPOs qui compriment leurs modes-propres de façon indépendante les uns des autres. Ces différents modes comprimés sont en réalité des peignes de fréquences ayant différents profils spectraux ou, de manière équivalente, des trains d’impulsions avec différents profils temporels. Les états générés par ce genre de dispositif sont potentiellement très fortement multimodes et se présentent donc comme une solution possible au problème de la scalabilité de la génération d’états multimodes.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 Peignes de fréquences et cavités synchrones
1.1 Peignes de fréquences
1.1.1 Peignes de fréquences et impulsions ultracourtes
1.1.2 Propagation dans un milieu dispersif linéaire
1.2 Cavités synchrones
1.2.1 Généralités sur les cavités optiques
1.2.2 Déphasage d’un tour de cavité
1.2.3 Couplage d’un peigne de fréquences sans CEO à une cavité sans dispersion et sans phase de Gouy : effet du
chemin optique
1.2.4 Couplage d’un peigne de fréquences avec CEO à une cavité avec phase de Gouy et dispersion linéaire
1.2.5 Couplage d’un peigne de fréquences à une cavité avec GDD
1.2.6 Cavités synchrones à longueur réduite
2 Optique non-linéaire du second ordre
2.1 Champs électromagnétiques réel et complexe
2.2 Équations de propagation pour l’optique non-linéaire
2.3 Effets non-linéaires avec des impulsions ultra-rapides : généralités
2.3.1 La polarisation d’ordre deux
2.3.2 Le nombre d’onde autour de la fréquence centrale
2.4 Doublage d’un peigne de fréquences
2.4.1 Solution de l’équation de propagation
2.4.2 L’accord de phase .
2.4.3 Doublage avec un cristal BIBO
2.5 Conversion paramétrique « descendante »
2.5.1 L’équation de propagation
2.5.2 Solution simplifiée : hypothèse de l’enveloppe réelle
2.5.3 L’accord de phase
2.5.4 Conversion paramétrique vs. Doublage de fréquence
2.5.5 Modes propres de la conversion paramétrique
2.5.6 Solution générale de l’équation de propagation via développement de Magnus
CONCLUSION

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