Généralités sur les Endocardites infectieuses

L’endocardite infectieuse (EI) désigne la prolifération au niveau de l’endocarde, lésé ou sain, de microorganismes véhiculés par la circulation sanguine. Les conséquences de cette infection sont des atteintes majoritairement valvulaires, responsables d’une mortalité élevée, liée aux risques d’insuffisance cardiaque (IC), de manifestations emboliques secondaires, et de mécanismes immunologiques induits. Malgré une stabilisation globale du taux d’incidence de l’EI en France et l’amélioration de sa prise en charge thérapeutique à la fois médicamenteuse et chirurgicale, la difficulté diagnostique et la gravité de la pathologie persistent. Puisque la végétation d’endocardite est principalement constituée de fibrine et de plaquettes, dans laquelle vient ensuite se loger le germe pathogène, inhiber l’agrégation plaquettaire pourrait permettre de réduire la taille de la végétation, et donc diminuer le risque embolique, principale complication de l’EI. Parmi l’ensemble des germes décrits comme étant responsables d’EI, Staphylococcus aureus (SA) représente le principal germe incriminé puisqu’il représente entre 20 et 30 % des EI totales. Plusieurs études ont démontré la pathogénicité du SA, notamment sa capacité à interagir avec les fonctions plaquettaires, et d’induire l’agrégation plaquettaire.

Généralités sur les Endocardites infectieuses

Définition et historique 

Endocardite signifie « inflammation de l’endocarde », c’est-à-dire inflammation de l’endothélium tapissant la face interne du cœur, notamment au niveau des cavités et des valves cardiaques. L’endocardite infectieuse résulte du passage dans le sang de microorganismes et leur fixation au niveau de l’endocarde lésé ou non, induisant ainsi des lésions destructrices et des végétations à fort risque de dissémination embolique. Au XVIIème siècle, Lazare Rivière, médecin du roi Louis XIII, fait une première observation des lésions cardiaques de l’EI. La présence de bactéries au sein de végétations cardiaques a été mise en évidence en 1869 par Wenge et Heiberg, mais c’est William Osler, père de la médecine moderne, qui donnera son nom à la pathologie dans sa forme subaiguë, en isolant les micro-organismes incriminés en 1885 (Osler W, Malignant endocarditis, The Lancet, 7 mars 1885). En 1903, Il découvrira l’importance de l’hémoculture dans le diagnostic de l’EI.

Point épidémiologique 

Taux d’incidence et mortalité 

L’endocardite infectieuse est une pathologie rare. Auparavant, son incidence annuelle était estimée entre 1,5 et 6 cas pour 100 000 habitants (1). Aux Etats-Unis, l’incidence des EI évaluée entre 2000 et 2011 a montré une augmentation de 11 cas pour 100 000 habitants à 15 cas pour 100 000. En France, en 2012, l’incidence annuelle a été évaluée à 33,8 cas par million d’habitants, ce qui représente environ 2200 cas par an, et 27% des EI sont associées aux soins (2). Il semble difficile d’évaluer l’évolution de l’incidence des EI sur de longues périodes car les critères diagnostiques et les pratiques ont aussi évolué. Pour exemple, en 2007 l’American Heart Association (AHA) publie de nouvelles recommandations portant notamment sur l’antibioprophylaxie des EI (3), révisant ainsi ses recommandations de 1997 et leur mise à jour en 2005 (4) Récemment, l’American College of Cardiology (ACC) et l’AHA publient en 2017 une mise à jour des recommandations de 2014 avec laquelle l’European Society of Cardiology (ESC) est concordante dans sa publication de 2015 (5). Il existe ainsi un certain biais dans les études d’incidence des EI, qui peut expliquer en partie des chiffres différents selon les études épidémiologiques. L’endocardite infectieuse (EI) est une pathologie de l’adulte avec un âge moyen de 50 ans, dont la fréquence augmente avec l’âge, et touchant davantage les hommes (60-70% des cas) que les femmes (2,6), avec un pic vers 75-80 ans. Les endocardites chez l’enfant sont quant à elles très rares. Ces deux facteurs se maintiennent depuis ces dernières années, avec cependant un âge moyen d’incidence d’EI plus élevé depuis 1990, autour de 60 ans (6).

Bien que rare, l’EI montre un intérêt multiple en épidémiologie en raison de la difficulté diagnostique et de prise en charge du patient, du coût sociétal qu’elle implique par conséquent, et de son taux élevé de mortalité. En effet, malgré les progrès en matière de diagnostic et de traitement, la mortalité s’élève autour de 20 % (7–9). La mortalité hospitalière est aussi de 20 % et reste stable depuis ces dernières années (6). Dans la prise en charge des patients atteints d’EI, la chirurgie valvulaire a montré une diminution significative de la mortalité à 5 ans, alors que la mortalité hospitalière s’est maintenue (8).

Facteurs de risque 

L’EI se développe préférentiellement sur un cœur lésé (cardiopathie préexistante valvulaire, prothèse, cardiopathie congénitale), mais peut aussi se déclarer chez le sujet à cœur sain. La part des EI à cœur sain s’élèverait à environ 47% selon l’enquête française de Hoen et al. menée en 1999.

Plusieurs types d’EI doivent être distingués selon le profil « à risque » ou non des patients :
– EI sur valve native lésée : valvulopathie congénitale, ou antécédent d’EI, insuffisance valvulaire ; atteinte généralement du cœur gauche
– EI sur valve native « saine » : cœur apparemment sain, bien que l’EI peut révéler une anomalie jusque là non diagnostiquée
– EI sur prothèse valvulaire : dans les premiers mois suite à l’opération, par introduction d’un inoculum bactérien, ou plus tard, le risque augmentant avec le temps ; la prothèse valvulaire est en soi le plus grand facteur de risque d’EI Le contexte d’une cardiopathie préexistante est indispensable car le risque d’EI est différent selon sa nature. En effet, les antécédents d’EI, les cardiopathies congénitales cyanogènes et prothèses valvulaires sont considérés comme des terrains à haut risque d’EI, tandis que les valvulopathies, bicuspidie aortique, prolapsus mitral sont à risque moins élevé (10). Par ailleurs, d’autres facteurs de risque viennent s’ajouter, tels que les soins dentaires, la toxicomanie intraveineuse et les dispositifs de soins invasifs : dialyse, pose de cathéters…Ces facteurs s’expliquent par le fait qu’ils constituent de nouvelles portes d’entrée dans, souvent, des contextes de baisse d’immunité, favorisant ainsi des bactériémies.

Place du Staphylococcus aureus dans les EI 

Les Streptocoques oraux ont longtemps occupé la première place, mais les études récentes en France montrent que Staphylococcus aureus représente désormais la première cause d’EI. En effet, les EI à SA sont prédominantes dans les pays industrialisés (1). Sa grande virulence bactérienne et forte capacité de résistance aux antibiothérapies font du SA le germe le plus redouté dans les EI. L’étude de Slipczuk et al. (6) recensant les EI entre 1960 et 2010 révèle une évolution dans la microbiologie des EI dans le monde : une augmentation croissante du nombre d’EI à SA s’observe au fil des années, tandis que la part de Streptococcus viridans diminue. La diminution de l’implication des Streptocoques s’explique en grande partie par l’éradication du Rhumatisme Articulaire Aigu, principale complication de l’angine à Streptococcus pyogenes (Streptocoque de groupe A) non traitée, associée aux valvulopathies rhumatismales, et à l’apparition de nouveaux facteurs favorisants comme la toxicomanie intraveineuse, les prothèses valvulaires (11,12), l’hémodialyse et les immunosuppresseurs (13). L’augmentation de la part des EI à SA est à relier notamment à la multiplication des portes d’entrées nosocomiales et associées aux soins, ainsi qu’à l’apparition du port de prothèses valvulaires. Il n’y a ainsi donc pas de diminution de l’incidence des EI mais une modification du profil microbiologique, puisque les effets se compensent ; à cela peut également s’ajouter l’augmentation de l’âge moyen des EI et des comorbidités associées.

L’évaluation du taux d’incidence des EI réalisée en Europe et aux Etats-Unis entre 1970 et 2000 montre que SA représente entre 16 et 34% des EI totales (12). Des études plus récentes montrent cependant de grands changements épidémiologiques, suggérant une part plus élevée des EI à SA. Par exemple, l’étude de Murdoch et al. entre 2000 et 2005 sur 2781 patients place le SA en chef de file des agents responsables avec 31% des EI (7). L’étude de 2012 de Selton-Suty et al. révèle que le SA représente 26,6 % des EI totales répertoriées sur un an dans plusieurs régions de France, bien devant les Staphylocoques coagulase négative (9,7%) (2).

La comparaison entre les continents révèle une augmentation nette du pourcentage de SA dans les EI aux Etats-Unis (de 25% dans les années 1960 à 52% en 2000), alors qu’il reste stable en Europe depuis 1970. Aux Etats-Unis, les trois grands facteurs majeurs d’EI sont l’hémodialyse, le diabète et les dispositifs implantables (9). Quoiqu’il en soit, SA demeure la première cause bactérienne sur la quasi totalité des continents, les Streptocoques semblant rester en première position en Asie (1).

Plus récemment, l’étude de Murdoch et al. réalisée en 2009 présente des chiffres différents : si le SA demeure en tête avec 43 % des EI aux Etats-Unis, il talonne les Streptocoques (31 %) avec 28 % en Europe. Partout ailleurs, on observe les même pourcentages entre SA et Streptocoques (32 %), mais les Streptocoques restent majoritaires en Amérique du Sud (39 %) (7).

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Table des matières

INTRODUCTION
Partie I : Endocardites infectieuses à Staphylococcus aureus et interaction Staphylococcus aureus – plaquettes
1. Généralités sur les Endocardites infectieuses
1.1. Définition et historique
1.2. Point épidémiologique
1.2.1. Taux d’incidence et mortalité
1.2.2. Facteurs de risque
1.3. Place du Staphylococcus aureus dans les EI
1.4. Conclusion
2. Interaction SA- Plaquettes dans les EI
2.1. Physiopathologie de l’EI à SA
2.1.1. Adhérence bactérienne
2.1.2. Prolifération bactérienne et dissémination
2.1.2.1. Destruction valvulaire cardiaque et insuffisance cardiaque
2.1.2.2. Atteintes systémiques
2.2. Mécanismes d’interaction Staphylococcus aureus – plaquettes
2.2.1. Internalisation de SA au sein des plaquettes
2.2.2. Agrégation plaquettaire
2.2.2.1. Interaction avec le récepteur GPIIb/IIIa plaquettaire
2.2.2.2. Interaction avec le récepteur GPIb plaquettaire
2.2.2.3.. Autres mécanismes d’interaction SA – plaquettes et agrégation plaquettaire
2.2.2.3.1. Toxines staphylococciques
2.2.2.3.2. Système du complément
2.2.2.4. Conclusion
2.2.3. Activité antibactérienne plaquettaire
2.2.3.1. Place des plaquettes dans la réponse immunitaire cellulaire
2.2.3.2. Activation du système du complément
2.2.3.3. Libération des tPMP
2.2.4. Conclusion
Partie II : Aspirine et endocardites infectieuses à Staphylococcus aureus
1. Impact de l’aspirine au long cours dans les EI à SA : état de la littérature
1.1. Etudes expérimentales sur modèles animaux
1.2. Etudes rétrospectives et prospectives de cohortes
2. Travail personnel: étude rétrospective sur 141 patients de l’hôpital la Timone à Marseille
2.1. Objectifs de l’étude
2.2. Matériel et Méthodes
2.2.1 Sélection des Patients
2.2.2. Critères de jugement
2.2.3. Tests statistiques
2.3. Résultats
2.3.1 Caractéristiques des patients à l’entrée en hospitalisation
2.3.1.1. Caractéristiques générales et antécédents médicaux
2.3.1.2. Statut valvulaire
2.3.1.3. Traitement
2.3.1.4. Résultats biologiques
2.3.1.5. Anatomo-pathologie
2.3.2. Manifestations emboliques totales, avant, et sous traitement antibiotique
2.3.2.1. Embolies totales
2.3.2.2. Embolies avant traitement antibiotique
2.3.2.3. Embolies après traitement antibiotique
2.3.3. Hémorragies cérébrales sous aspirine
2.3.4. Mortalité hospitalière et mortalité à long terme
2.3.4.1. Mortalité hospitalière
2.3.4.2. Survie à long terme
2.4. Discussion et perspectives
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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