Généralités sur le comportement de terrain poussant

Le terme de comportement poussant (« squeezing behavior ») fait référence au phénomène de grande déformation différée et souvent anisotrope observé lors de l‟excavation d‟un tunnel dans un terrain de faible résistance et de forte déformabilité, souvent en combinaison avec une grande hauteur de couverture. Cette réponse du terrain conduit à des convergences inacceptables des parois, à des problèmes de stabilité et à un chargement excessif des soutènements, ce qui exige une adaptation de la méthode de creusement et de la conception des soutènements.

Comportement poussant

Le terme de « comportement poussant » remonte à l‟époque du développement des infrastructures de transport sous les Alpes entre 1860 et 1910 où de nombreux tunnels à grande profondeur ont été construits. Ce phénomène a d’abord été décrit de façon phénoménologique, par l’observation des désordres et des solutions constructives développées pour y remédier. Les principes sous-jacents sont aujourd’hui encore insuffisamment compris. La définition du comportement poussant publiée par la Société Internationale de Mécanique des Roches (ISRM), (Barla 1995), est la suivante : « Squeezing of rock is the time dependent large deformation which occurs around the tunnel and is essentially associated with creep caused by exceeding a limiting shear stress. Deformation may terminate during construction or continue over a long time period ». On peut également trouver des descriptions de ce phénomène chez différents auteurs parmi lesquels on peut citer Terzaghi (1946), Gioda (1982), O’Rourke (1984), Jethwa (1986), Kovari (1988), Singh (1988), Einstein (1990), Aydan (1993) et Panet (1996). À partir des définitions trouvées chez ces auteurs, les aspects principaux sont résumés comme suit :

– Les roches manifestant des phénomènes de terrain poussant sont de natures géologiques/pétrographiques variées : roches magmatiques ou métamorphiques altérées (gneiss micacés, phyllades, schistes), roches sédimentaires altérées (argilite, tuf, certains flysch, mudstone), minéraux prépondérants (micas, chlorite, serpentine, minéraux argileux) ;
– Le phénomène de terrain poussant fait référence aux grandes déformations différées pendant le creusement des tunnels. La prédominance des effets différés sur la réponse du terrain pendant l’excavation sous-entend : (1) soit un phénomène de fluage ou de rupture progressive surtout observé pour les ouvrages sous forte contrainte, dans les roches médiocres fortement déformables et faiblement résistantes ; (2) soit un phénomène de consolidation : observé dans le cas des tunnels en terrain aquifère peu perméable ;
– Le phénomène de terrain poussant est également souvent caractérisé par une anisotropie liée à l’état de contrainte préexistant ou à la structure du matériau, sans que l’on parvienne dans beaucoup de cas à distinguer clairement les deux effets qui peuvent se combiner ;
– L‟amplitude et la vitesse de la convergence ainsi que l’extension de la zone décomprimée associées au comportement poussant dépendent des conditions géologiques et géotechniques, de la contrainte in-situ par rapport à la résistance du massif rocheux, de la présence d’eau, des pressions interstitielles et des propriétés du massif rocheux ;
– Le phénomène du terrain poussant est étroitement liée à la méthode d’excavation et à la technique de soutènement adoptées ;
– L’extrême variabilité de l’intensité du phénomène pour une même méthode, un même soutènement, une même couverture, une même lithologie, sur de courtes distances ;
– Dans les roches présentant une résistance à la compression élevée sous un état de contrainte également élevé, et en cas de comportement fragile, on assiste plutôt à des phénomènes d’écaillage et de décompression brutale en paroi (« rock bursting»);
– Il est bien souvent difficile de séparer les phénomènes de comportement poussant et de gonflement  : dans un rocher de faible résistance contenant des minéraux argileux, le processus d‟endommagement et de rupture s’accompagne de gonflement (dépendant lui aussi du temps).

Identification du comportement poussant

L‟identification du comportement poussant est très importante pour le dimensionnement et la construction des tunnels. Différentes approches basées sur des retours d‟expérience sont proposées pour identifier le phénomène de terrain poussant. D‟un point de vue empirique, Terzaghi (1946) a proposé une première identification en termes de charge sur le support initial. A partir de la qualité du massif rocheux et de la hauteur de couverture H, Singh et al. (1992) et Goel et al. (1995) ont tracé des abaques différenciant les cas « squeezing » et « non-squeezing». Ces deux méthodes sont basées sur la classification géotechnique de Barton (« Rock mass quality Qsystem »), Goel et al. utilisent plus précisément le paramètre « Rock mass number –  N = Q SFR=1 » et considèrent également l‟influence de la portée de l‟ouvrage B. Les approches semi-empiriques donnent non seulement une indication pour identifier le phénomène mais également une estimation de la déformation autour du tunnel en utilisant les solutions analytiques établies pour un tunnel circulaire. Jeahwa et al. (1984) utilisent le « nombre de stabilité » Nc qui est le rapport de la résistance à la compression uniaxiale du massif rocheux cm σ de la roche et de l‟état de contrainte initiale. Le seuil Nc = 2 est mis en évidence pour l‟apparition du comportement poussant du terrain.

Méthode d’excavation prenant en compte le comportement poussant du terrain

L‟excavation des tunnels en terrain poussant connaît souvent de sérieuses difficultés qui entraînent des coûts et des délais de construction importants. Le tracé du tunnel doit être optimisé pour réduire la longueur traversée dans la zone de terrain poussant. Il n‟existe pas de méthode de construction universelle applicable pour tous les terrains poussants. Les méthodes utilisées doivent être adaptées aux conditions géologiques locales et de contrainte in situ (Schubert et al. 2000). Pour les ouvrages souterrains, on distingue deux types de méthodes de creusement : (1) la méthode d‟excavation conventionnelle pour laquelle sont réalisés successivement le creusement, le marinage des déblais, puis la pose du soutènement et (2) la méthode mécanisée basée sur l’utilisation d’un tunnelier.

Méthode conventionnelle

Avec la méthode conventionnelle, deux techniques de creusement peuvent être appliquées : (1) creusement en pleine section où la totalité de la section est ouverte dans un pas d‟excavation et (2) creusement en section divisée où la construction est réalisée en deux ou plusieurs phases d‟excavation permettant de réduire les dimensions du front de taille et donc d‟assurer une meilleure stabilité. Un creusement en pleine section permet un degré élevé de mécanisation (utilisation de matériels lourds) et de poser le soutènement au plus près du front. Cependant, un prétraitement du terrain et un renforcement du front sont souvent nécessaires pour assurer la stabilité du front de taille et de la paroi. La stabilité d‟un tunnel excavé en section divisée est plus facile à contrôler. Toutefois, plus le nombre de phases est élevé et plus le coût de l’ouvrage devient conséquent. Le choix de la technique de creusement est souvent influencé par les préférences régionales (Schubert et al. 2000). Par exemple, les tunnels en Italie sont effectués de façon prédominante en pleine section, tandis que dans les pays germanophones le creusement en section divisée prévaut. Il ne fait aucun doute que le succès d’une excavation souterraine est souvent principalement lié à l’expérience des entrepreneurs (Hoek 2001). On distingue deux approches pour le système de soutènement des tunnels en terrain poussant : l‟approche active utilisant des soutènements rigides (« heavy method » ou « resistance method ») et l’approche passive utilisant des soutènements souples (« light method » ou « yielding method ») (Barla 2001). Dans l’approche active, les fortes déformations sont empêchées par un soutènement rigide posé près du front de taille. En conséquence, le soutènement est souvent trop chargé et donc risque de se rompre dans des tunnels sous forte couverture. Cette approche est mal adaptée au terrain poussant. Au contraire, le principe de l’approche passive consiste à autoriser le déplacement et à appliquer une faible pression de confinement en paroi ce qui permet d‟attendre un état d‟équilibre sans rupture des soutènements. Une sur-excavation est nécessaire pour obtenir la section transversale souhaitée compte tenu de la déformation attendue de la paroi. L‟approche passive est largement utilisée aujourd‟hui. Il s’agit d’un soutènement souple qui constitué de béton projeté et de cintres coulissants. Le profil des cintres le plus couramment utilisé est le profil TH (Toussaint-Heintzmann). Les éléments des cintres sont assemblés par l‟intermédiaire d‟un système d‟étrier. La valeur d‟effort normal, qui déclenche le coulissement, est contrôlée par le couple de serrage des boulons des étriers. Chaque boulon peut donner une résistance de coulissement de 150 kN (Cantieni et Anagnostou 2007). Le béton projeté en association avec des boulons est efficace pour contrôler le processus de déformation. Une simple coque continue de béton projeté se fissure lorsque les déformations excèdent 10-3 , puis se rompt pour des convergences plus fortes. La solution consistant à diviser la coque de béton par des saignées en associant avec des cintres coulissants (Fig. 1.1a) a été testée dans les tunnels autrichiens du Tauern et de l’Arlberg (Schubert 1993). Diviser la coque en segments, séparés par du vide et associés à des cintres coulissants pour s’accommoder des déformations sans rompre le soutènement, est l’illustration typique du principe de soutènement déformable par opposition aux systèmes de soutènements rigides.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

SOMMAIRE
INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1 GÉNÉRALITÉS SUR LE COMPORTEMENT DE TERRAIN POUSSANT
1.1 Introduction
1.2 Comportement poussant
1.3 Identification du comportement poussant
1.4 Méthode d‟excavation prenant en compte le comportement poussant du terrain
1.5 Méthode d‟auscultation
1.6 Prise en compte du comportement différé dans la modélisation des tunnels
1.7 Prise en compte de l‟effet anisotrope dans la modélisation des tunnels
1.8 Conclusion
CHAPITRE 2 DESCENDERIE DE SAINT-MARTIN-LA-PORTE
2.1 Introduction du projet
2.2 Contexte géologique
2.3 Méthode d‟excavation et soutènements mis en œuvre
2.4 Programme d‟auscultation
2.5 Données géologiques
2.6 Comportement du terrain
2.7 Réponse du soutènement
2.8 Conclusion
CHAPITRE 3 APPROCHES ANALYTIQUES POUR PRENDRE EN COMPTE LE COMPORTEMENT ANISOTROPE DU TERRAIN
3.1 Introduction
3.2 Interaction terrain-soutènement : Méthode convergence-confinement appliquée au cas d‟un terrain anisotrope
3.3 Tunnel de section non-circulaire
3.4 Interaction entre deux tunnels parallèles
3.5 Solution analytique en grande déformation pour un comportement anisotrope nonlinéaire
3.6 Conclusion
CHAPITRE 4 APPROCHES NUMÉRIQUES POUR LA MODÉLISATION DES TERRAINS POUSSANTS
4.1 Approches numériques pour la modélisation des tunnels
4.2 Modélisation par la méthode des différences finies
4.3 Comportement différé anisotrope des tunnels creusés en terrain poussant
4.4 Effet d‟anisotropie sur la réponse du soutènement déformable
4.5 Conclusion
CONCLUSIONS 

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *