Généralités sur la Warm Dense Matter

Généralités sur la Warm Dense Matter 

Régime de la WDM : intérêts et défis

Maintenant que nous avons défini les paramètres permettant de caractériser un plasma, nous allons localiser la WDM dans le plan densité – température. La WDM se définit par une densité comprise entre 0.1 et 10 ρ0, avec ρ0 la densité du solide, et une température entre 0.1 et 100 eV. Nous notons que ceci correspond à l’interface entre ces différents régimes bien définis. Le domaine de la WDM est délimité vers les basses températures par les solides et les liquides. A plus haute température et pour des densités plus basses, nous trouvons les plasmas classiques idéaux. A plus haute densité, nous avons les liquides de Fermi idéaux et vers les basses températures et les faibles densités, les plasmas fortement non-idéaux. On commence alors à comprendre la complexité de cet état de la matière autant d’un point de vue expérimental que théorique.

Modèles pour décrire la WDM

Modèle atome moyen

Les modèles dits « atome moyen » ont été développés dans le but de calculer des équations d’état dans une large gamme de densité et de température. Ils sont particulièrement adaptés pour décrire le régime intermédiaire entre les modèles de plasmas de basse densité idéaux (DebyeHückel) et haute densité (Thomas-Fermi). Dans ces modèles, la structure électronique moyenne par atome est calculée en adoptant une représentation simplifiée de l’environnement. Les calculs sont effectués en faisant l’hypothèse que le problème est à symétrie sphérique.

De nombreuses variations de cette approche ont été élaborées au cours des années mettant en place des approximations d’une complexité croissante [81] [38] [71] [17] [111]. Cette approche peut être illustrée en s’appuyant sur un modèle récent, le modèle de Johnson, qui est une version quantique du modèle généralisé de Thomas-Fermi [58]. Le plasma est ici composé de cellules électriquement neutres qui contiennent chacune Z électrons autour d’un noyau de charge Z au centre de la cellule.

Dynamique moléculaire quantique

La dynamique moléculaire quantique est une méthode permettant de simuler la dynamique d’un système d’électrons et d’ions qui sont traités respectivement quantiquement et classiquement. Cette méthode bénéficie des avancées de la théorie de la structure électronique développée en physique du solide. Les premières implémentations de cette méthode, très coûteuse en temps de calcul, sont dues à Car et Parinello [26]. Le problème de la structure électronique y était traité en même temps que celui du mouvement des ions afin de rendre le calcul réalisable. Avec le développement du calcul intensif, l’utilisation de cette méthode s’est généralisée à de nombreux domaines allant de la chimie quantique à la physique du solide et des matériaux. Celle-ci a permis de nombreuses avancées en incluant notamment l’étude des liquides, des plasmas denses et des solides au-delà de l’approximation harmonique. Elle permet également d’étudier des problèmes divers et complexes comme les transitions de phase, les réactions chimiques impliquant des molécules complexes.

Dans cette approche, on considère N atomes de coordonnées Ri dans une boîte de simulation périodique. Les trajectoires Ri des atomes sont évaluées en intégrant les équations du mouvement de Newton à l’aide des forces évaluées à chaque pas de temps. La différence essentielle entre la dynamique moléculaire quantique et la dynamique moléculaire classique réside dans le fait que les forces sont évaluées à partir d’un traitement quantique des électrons. Cela permet de décrire les phénomènes complexes, par exemple l’ionisation, la polarisation, la formation ou la rupture de liaison, qui ont lieu dans les plasmas typiques rencontrés dans le régime de WDM. Cette méthode est donc particulièrement adaptée à l’étude de la WDM car elle ne nécessite pas de prédéfinir les espèces chimiques ou ioniques ainsi que leur abondance pour des conditions de densité et de température données. Celle-ci permet au contraire de caractériser sans approximation au préalable l’état de la matière aux conditions étudiées. C’est cette méthode de simulation que nous allons utiliser dans ce travail. Nous n’entrons donc pas ici plus dans le détail. Une description détaillée sera donnée dans le chapitre concernant les calculs ab initio.

Différents codes de calcul permettent de simuler un plasma en utilisant la dynamique moléculaire quantique. Dans notre étude, nous avons utilisé le code ouvert Abinit [45]. Nous avons donc vu que la WDM se situe à la frontière entre la physique du solide et la physique des plasmas denses ce qui rend particulièrement difficile sa modélisation. Il apparait alors nécessaire de collecter des données expérimentales pour contraindre ces modèles et les raffiner. Nous allons donc nous intéresser à présent aux techniques expérimentales pour générer la WDM.

Générer la WDM en laboratoire

L’étude expérimentale de la WDM est difficile car il est nécessaire d’atteindre des températures allant d’une fraction d’eV (1eV = 11604 K) à une dizaine d’eV et d’autre part d’avoir des densités proches ou supérieures à celle du solide. Ceci peut être fait de manière statique en utilisant des cellules à enclume diamant chauffées par laser [56]. Cette technique est limitée à des pressions allant jusqu’à quelques Mbar et des températures allant jusqu’à 5000K. Pour atteindre des pressions plus importantes, il faut faire appel à des techniques dynamiques basées sur la génération d’une onde de choc. Au fil des années, les techniques se sont sophistiquées partant de l’utilisation d’explosifs [39] [11] [19] ou de canons à gaz [98] sur des échantillons de taille macroscopique, à l’utilisation de lasers ou de pression magnétique dans les Z pinch [63] pour les applications les plus récentes. Les chocs créés par laser sont aujourd’hui le seul moyen permettant d’atteindre des pressions allant jusqu’à 100 Mbar [16]. Par ailleurs il est possible d’atteindre le régime de la WDM en utilisant des lasers sans produire de choc mais en faisant appel au chauffage par protons ou à l’illumination directe. Nous allons présenter brièvement ces techniques comme celles-ci ont été utilisées lors des premières expériences XANES sur l’aluminium dans le régime de la WDM.

Chauffage isochore Chauffer de manière isochore, c’est-à-dire à densité constante et proche de celle du solide, permet d’atteindre le régime de la WDM si la température est élevée, quelques eV, avant que la détente hydrodynamique n’ait lieu. Ceci peut être atteint soit par illumination laser directe soit en utilisant un faisceau de protons.
– chauffage par protons : une impulsion laser très intense (I >1018 W/cm2 ) est focalisée sur une cible solide. Des protons sont alors produits et accélérés en face arrière. Le faisceau de protons créé est très intense (environ 1013 protons [144]) et appartient à une gamme d’énergie large, allant de quelques centaines d’eV à plusieurs MeV [40] [2]. Ces faisceaux intenses ont une durée qui peut aller jusqu’à environ 20 ps. Les protons présentent l’avantage de déposer leur énergie de manière uniforme dans l’échantillon.

Cela permet d’atteindre des températures allant jusqu’à environ 20 eV [5] [101].

– chauffage par laser : la matière peut également être chauffée en utilisant une impulsion laser ultra brève, sub-picoseconde. La durée du dépôt de l’énergie laser est du même ordre de grandeur que celle de l’impulsion laser, c’est-à-dire quelques dizaines de femtosecondes. Le temps caractéristique de la détente hydrodynamique est de quelques picosecondes à quelques dizaines de picosecondes. Cependant, la zone chauffée pouvant être considérée comme homogène correspond à l’épaisseur dite de peau. Cette zone est très réduite et mesure quelques dizaines d’angström. Pour des cibles de taille supérieure à cette épaisseur de peau, il existera alors un gradient de température dans l’échantillon. Ceci peut être évité avec des cibles de quelques dizaines d’angström d’épaisseur [142] [33].

Dans ces deux techniques, le chauffage se traduit par un transfert de l’énergie aux électrons. Le laser ou les protons interagissent en effet avec ces derniers. Aux premiers instants, le système est donc fortement hors équilibre avec des électrons dont la température s’élève à quelques eV tandis que les ions restent à leur température initiale et dans leur position cristalline. Les électrons transfèrent ensuite leur énergie aux ions jusqu’à atteindre un état d’équilibre en quelques picosecondes ou dizaines de picosecondes suivant les matériaux. Lorsque ce transfert est rapide tel que pour l’aluminium, quelques picosecondes, cet état d’équilibre peut être associé au régime de la WDM. Enfin, la matière se détend hydrodynamiquement. Pour l’étude de la WDM, il faut donc sonder la matière pendant ce temps court où la matière est à l’équilibre et avant sa détente hydrodynamique.

Choc laser Une autre technique, largement plus répandue, est utilisée pour générer et étudier la WDM expérimentalement, il s’agit de la compression par choc créé par laser. A la suite de l’interaction entre une cible solide et un laser intense (I > 10¹²W/cm2 ), d’impulsion longue (d’environ 100 ps à quelques ns) et de forte énergie (100 J à 1 kJ), un plasma en face avant de la cible est créé et va commencer à se détendre. Par effet fusée, une onde de choc commence alors à se propager vers l’intérieur de la cible. La matière est soumise à de fortes pressions et voit sa température et sa densité augmenter sensiblement. Nous verrons par la suite qu’une température proche de 10 eV et une densité environ égale à trois fois la densité du solide ont été atteintes lors de notre expérience mettant en œuvre un choc généré par laser.

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Table des matières

Introduction
1 Généralités sur la Warm Dense Matter
1.1 La Warm Dense Matter .
1.1.1 Définition et paramètres
1.1.2 Modèles pour décrire la WDM
1.2 Générer la WDM en laboratoire
1.2.1 Interaction laser – matière
1.2.2 Onde de choc
1.3 Comment sonder la WDM ?
1.3.1 Etude par les équations d’état
1.3.2 Diagnostics X
1.3.3 La spectroscopie d’absorption X
1.4 Conclusion
2 Dispositif expérimental et résultats
2.1 Objectifs
2.2 Présentation générale du dispositif expérimental
2.2.1 Présentation de l’installation laser LULI 2000 / PICO 2000
2.2.2 Dispositif expérimental général
2.2.3 Cibles
2.2.4 Conditions laser pour la compression de la cible principale
2.2.5 Création de la source X
2.3 Les diagnostics
2.3.1 VISAR
2.3.2 Le diagnostic SOP
2.3.3 Présentation des résultats
2.3.4 Diagnostic X : le spectromètre d’absorption
2.4 Conclusion
3 Description d’un plasma dense par la dynamique moléculaire ab initio
3.1 Description d’un plasma dense
3.1.1 Description du problème
3.1.2 Approximation de Born-Oppenheimer
3.1.3 Théorie de la Fonctionnelle de la Densité
3.2 Résolution numérique
3.2.1 Les bases d’ondes planes
3.2.2 La dynamique moléculaire quantique
3.2.3 L’ensemble isocinétique
3.3 Les pseudopotentiels
3.3.1 Généralités
3.3.2 Formulation d’un pseudopotentiel
3.3.3 La méthode PAW
3.3.4 Construction d’un pseudopotentiel
3.4 Calcul ab initio de spectres d’absorption XANES
3.4.1 La théorie de la réponse linéaire et la formule de Kubo-Greenwood
3.4.2 Propriétés de transport
3.4.3 XANES dans le formalisme PAW
3.4.4 Modèle d’impureté
4 Résultats en conditions extrêmes
4.1 Introduction
4.2 Description des résultats
4.2.1 Domaine ρ, T exploré
4.2.2 Spectres d’absorption le long de l’Hugoniot rechoquée
4.2.3 Description qualitative des spectres XANES
4.2.4 Comparaison qualitative des spectres XANES théoriques et expérimentaux
4.3 Méthodologie de l’analyse
4.3.1 Fit linéaire
4.3.2 Méthode TH
4.3.3 Méthode du spectre dérivé
4.3.4 Sources d’incertitudes
4.4 Comparaison théorie et expérience
4.4.1 Interpolation des données ab initio
4.4.2 Analyse de la pente du flanc-K
4.4.3 Analyse du shift : dépendance en densité et en température
4.4.4 Conclusions
4.5 Pente du flanc K : diagnostic simple de la température ?
4.5.1 Modèle de Fermi-Dirac
4.5.2 Analyse des spectres
4.5.3 Validité du modèle
4.5.4 Conclusions sur l’utilisation du modèle de Fermi Dirac
5 Résultats dans le régime de la transition métal – non métal
5.1 Généralités sur la transition métal – non métal
5.2 Eléments de théorie sur la transition métal – non métal
5.2.1 Transition de Mott à température nulle
5.2.2 Transition de Mott à température finie
5.3 La conductivité le long de la transition métal – non métal
5.3.1 Mesures expérimentales
5.3.2 Description théorique
5.4 Les spectres XANES le long de la transition métal – non métal
5.4.1 Expérience effectuée et comparaison avec les calculs
5.4.2 Interprétation .
5.4.3 Limites de la modélisation ab initio
5.5 Conclusions
Conclusion 

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