Généralités sur la caléfaction

Généralités sur la caléfaction

L’effet Leidenfrost

Lorsqu’une goutte est posée sur une plaque dont la température est très élevée par rapport à la température d’ébullition du liquide (par exemple de l’eau sur une plaque à 400 ◦C), on observe un phénomène assez inattendu : au lieu de bouillir violemment et de se vaporiser, la goutte reste étonnamment calme, prend une forme très arrondie et devient ultra-mobile. La goutte peut rester ainsi pendant un temps de l’ordre de la minute. Cet effet est appelé caléfaction ou encore effet Leidenfrost .

Ces différentes observations sont la conséquence de la formation d’un film de vapeur entre la goutte et le solide , grâce à un éclairage par l’arrière. Au dessus d’une température critique appelée température de Leidenfrost (généralement supérieure à la température d’ébullition de 50%), la goutte n’est plus en contact avec le solide mais est soutenue par un film de sa propre vapeur. Ce film a une épaisseur de l’ordre de 100 microns et a pour conséquence première d’isoler thermiquement la goutte de son support, ce qui explique pourquoi elle ne disparaît pas en une fraction de seconde. En effet, la phase vapeur d’une espèce chimique a, d’une manière générale, une conductivité thermique inférieure typiquement d’un ordre de grandeur à celle de la phase liquide (pour l’eau liquide la conductivité thermique est de 6.8 mW · cm−1 · K−1 , et de 0.25 mW · cm−1 · K−1 pour la vapeur). Par ailleurs, l’absence de contact avec le solide, autrement dit de sites de nucléation de bulles de vapeur, empêche l’ébullition du liquide. La perte de masse de la goutte ne se fait donc que par évaporation, ce qui explique son aspect lisse. On peut ainsi mettre toutes sortes de liquides en caléfaction, pourvu que le solide soit à la bonne température. Pour des liquides cryogéniques – gazeux à température ambiante et possédant une température d’ébullition très basse – tels que l’azote (Teb = −196 ◦C) ou l’oxygène liquide (Teb = −183 ◦C), on observe l’effet Leidenfrost sur des surfaces à température ambiante.

Le temps nécessaire à l’évaporation totale d’une goutte de volume donné en fonction de la température du substrat passe par un maximum, qui est de l’ordre de la minute, et qui définit la température de Leidenfrost (proche de 150◦ pour l’eau). Connaître la température de Leidenfrost d’un liquide est d’une importance cruciale dans tous les procédés de transfert thermique ou de refroidissement, omniprésents dans l’industrie. Pour des températures inférieures à la température d’ébullition, le liquide est en contact direct avec le substrat et le transfert de chaleur est dominé par la convection. En augmentant la température, le liquide entre en ébullition : comme dans une casserole sur le feu, on observe à la surface du solide la formation de bulles de vapeur qui grandissent, finissent par se détacher et agitent grandement le liquide. Le transfert thermique est alors bien plus efficace – c’est le mode de transfert utilisé en particulier dans les centrales électriques thermiques. Cependant, pour des températures trop élevées (au dessus de la température de Leidenfrost), les bulles se connectent avant de s’être détachées et le solide se retrouve complètement recouvert de vapeur : c’est ce que l’on appelle la crise d’ébullition [18]. Cela a des conséquences dramatiques sur le transfert de chaleur, qui ne peut plus être assuré de manière efficace à travers la vapeur.

Mobilité des gouttes en caléfaction

Une autre conséquence de la présence de ce film qui va nous intéresser est l’extrême mobilité des gouttes en caléfaction, qui sont littéralement sur coussin de vapeur. De très faibles forces suffisent à les mettre en mouvement, la friction sur de tels objets étant quasi-nulle : lorsqu’on les fait glisser sur une surface plane, la décélération mesurée est très faible.

Formes de gouttes

Parmi les nombreuses particularités des gouttes en caléfaction, leur forme est l’une des plus frappantes. Contrairement aux gouttes de pluie qui s’étalent et mouillent les surfaces qu’elles rencontrent, un liquide caléfié adopte des formes très arrondies comme le ferait l’eau sur une surface superhydrophobe. De ce point de vue, la caléfaction est une situation de non-mouillage idéale, où la goutte ne touche jamais son support.

D’une manière générale, en l’absence de contact avec un solide, une goutte va tendre à minimiser sa surface en prenant une forme sphérique, sous l’action des forces de tension de surface  . Une goutte de pluie en chute libre dans l’air prend ainsi une forme proche de la sphère parfaite . Lorsque la goutte est au repos (en caléfaction ou bien posée sur substrat superhydrophobe) la forme n’est plus une sphère parfaite car elle résulte désormais d’une compétition entre gravité et tension de surface.

Si R est le rayon de la goutte, l’ordre de grandeur de l’énergie de surface est γR2 où γ est la tension de surface du liquide. La valeur de γ est directement liée à l’intensité des interactions entre molécules (70 mN/m pour l’eau, 20 mN/m pour l’huile, 480 mN/m pour le mercure). À ceci s’oppose l’énergie potentielle de gravité, de l’ordre de ρgR (ou ρ est la masse volumique du liquide et g l’accélération de la gravité) qui va avoir tendance à étaler la goutte.

Cette forme peut être décrite de manière plus quantitative en écrivant un équilibre des pressions dans la goutte. Pour cela, on considère la goutte comme un objet symétrique par rotation suivant l’axe vertical h et défini par la génératrice r(h) donnant son rayon en fonction de la hauteur  . On nomme s l’abscisse curviligne le long de r(h) et α l’angle entre la tangente à la génératrice et l’horizontale. La forme de la goutte est fixée par un équilibre entre pression hydrostatique et pression de Laplace.

L’oxygène : un liquide paramagnétique

Nous avons choisi de nous intéresser plus particulièrement à l’oxygène liquide. En dessous de −183 ◦C et à pression atmosphérique, cet élément que nous connaissons bien sous sa forme gazeuse change de phase et devient un liquide transparent, dont la densité est proche de celle de l’eau (ρ = 1140 kg · m−3 ) et dont la tension de surface γ vaut 13 mN/m, du même ordre de grandeur que d’autres liquides cryogéniques (l’azote à -196 ◦C a une tension de surface γ = 8.8 mN/m). Du fait de sa très basse température d’ébullition, l’oxygène liquide est en caléfaction sur n’importe quelle surface à température ambiante. Mais ce qui fait la particularité des gouttes d’oxygène par rapport aux autres liquides est leur sensibilité au champ magnétique. On peut ainsi utiliser des aimants pour manipuler ces gouttes et influer sur leur dynamique.

Un peu d’histoire

Sir James Dewar, un physicien et chimiste britannique de la fin du XIXe siècle, pionnier de la recherche sur la liquéfaction des gaz et qui laissa son nom à un vase conçu pour fournir une très bonne isolation thermique (l’ancêtre du Thermos), fut le premier à constater et à étudier les propriétés magnétiques de l’oxygène liquide. Dans une lettre de décembre 1891 adressée à Lord Kelvin, alors président de la Royal Society de Londres, Dewar relate ses observations.

En plaçant de l’oxygène sous l’entrefer d’un électroaimant et en mettant ce dernier en marche, Dewar observe que le liquide bondit littéralement et vient se placer entre les pôles en formant un pont liquide,  La forme symétrique du liquide suggère que la gravité n’agit plus que très peu sur lui. Comme le mentionne Dewar dans sa lettre, les propriétés paramagnétiques de l’oxygène gazeux étaient déjà connues depuis les travaux d’Edmond Becquerel  sur l’action du magnétisme sur les corps en 1849 [23]. Mais à cette époque, personne n’avait encore réussi à liquéfier l’oxygène. Ce mérite revient aux physiciens Raoul Pictet (suisse) et Louis-Paul Cailletet (français) qui, au même moment, mais de manière indépendante et par des procédés différents, furent les premiers en 1877 à liquéfier de petites quantités d’oxygène [24, 25]. Ils furent suivis de près par Wroblewski et Olszewski en Pologne [26]. Par la suite, les travaux de William Hampson, Carl von Linde et James Dewar permirent la mis au point de machines pouvant produire l’oxygène liquide en grande quantité ansi que des récipients permettant son stockage à long terme [27]. Au début du XXe siècle, la Grande-Bretagne produisait 120 tonnes d’oxygène liquide par jour, dont la moitié était utilisée pour la découpe et la soudure de métaux [22].

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Table des matières

Introduction
I Caléfaction magnétique
1 L’oxygène caléfié
1.1 Généralités sur la caléfaction
1.1.1 L’effet Leidenfrost
1.1.2 Mobilité des gouttes en caléfaction
1.1.3 Formes de gouttes
1.2 L’oxygène : un liquide paramagnétique
1.2.1 Un peu d’histoire
1.2.2 Origine du magnétisme de l’oxygène
1.2.3 Production d’oxygène liquide
1.2.4 Une première expérience
1.3 Forme de gouttes en présence de champ
1.3.1 Champ magnétique et propriétés du liquide
1.3.2 Force et énergie magnétique
1.3.3 Formes de gouttes dans un gradient de champ
1.4 Conclusion
2 Mouvement d’une goutte d’oxygène dans un champ magnétique
2.1 Introduction
2.2 Expériences
2.3 Mouvement à force centrale
2.3.1 Énergie potentielle magnétique
2.3.2 Équations du mouvement
2.4 Interprétation des résultats
2.4.1 Péricentre de la trajectoire
2.4.2 Angle de déflexion
2.4.3 Capture de gouttes sans dissipation d’énergie
2.5 Discussion sur la forme du potentiel
2.6 Fronde magnétique
2.6.1 Expérience avec un aimant mobile
2.6.2 Vitesse de sortie pour un choc frontal
2.6.3 Vitesse de sortie pour un choc latéral
2.7 Conclusion
3 Mécanismes d’échange d’énergie
3.1 Introduction
3.2 Expériences
3.2.1 Expériences préliminaires
3.2.2 Expériences avec un barreau aimanté
3.3 Vitesse critique de capture
3.3.1 Perte de vitesse en l’absence de friction
3.3.2 Variation de la vitesse critique avec la distance à l’aimant
3.3.3 Déformation de la goutte
3.4 Dissipation d’énergie dans le film de vapeur
3.4.1 Épaisseur du film de vapeur
3.4.2 Friction dans le film de vapeur
3.5 Expériences préliminaires avec un solide en caléfaction
3.6 Conclusion
Transition
II Propulsion dans un tube
4 Détergence
4.1 Généralités sur les tensioactifs
4.1.1 Définition
4.1.2 Effet sur la tension de surface
4.1.3 Utilisations des tensioactifs
4.1.4 Conséquences sur l’hydrodynamique
4.1.5 Propulsion au savon
4.2 Détergence dans un tube
4.2.1 Expériences
4.2.2 Force de propulsion
4.2.3 Vitesse de la goutte dans le cas non-mouillant
4.3 Conclusion
5 Dynamique à temps long
5.1 Observations
5.2 Dynamique diffusive
5.2.1 Tension de surface dynamique en l’absence d’écoulements
5.2.2 Situation à l’arrière de la goutte
5.2.3 Bilan de quantité de tensioactifs
5.2.4 Différence de tension de surface dynamique
5.3 Profil d’écoulement à l’arrière de la goutte
5.3.1 Lignes de courant
5.3.2 Effet des tensioactifs
5.3.3 Mécanismes possibles pour l’intermittence
5.4 Conclusion
6 Extraction capillaire
6.1 Introduction
6.2 Force d’extraction
6.2.1 Expériences
6.2.2 Origine géométrique
6.3 Dynamique
6.4 Bulles d’air
6.4.1 Extraction de bulles
6.4.2 Effets de la gravité
6.5 Conclusion
Conclusion

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