Généralités au sujet des enrobés bitumineux

Généralités au sujet des enrobés bitumineux

L’enrobé bitumineux est un mélange de granulats et de liant bitumineux. Une fois bien mis en place, l’enrobé offre une rigidité appréciable et peut être utilisé comme revêtement dans les structures de chaussée bitumineuse. Les granulats de différentes dimensions, représentés souvent sous la forme d’une courbe granulométrique, forment le squelette solide de l’enrobé, lequel est choisi en fonction des caractéristiques mécaniques et fonctionnelles recherchées. Le liant et les fines forment ce qui est appelé le mastic bitumineux. Le mastic est donc un amalgame de bitume et de particules fines, dispersées idéalement de façon homogène dans le bitume, agissant comme interface d’adhésion entre les plus grosses particules. C’est le mastic qui est en quelque sorte le véritable liant assurant l’intégrité de l’enrobé en lui permettant d’avoir de la cohésion (Olard, 2003). Tout comme le liant bitumineux qui le compose, l’enrobé bitumineux est un matériau thermosusceptible puisque ses propriétés dépendent fortement de sa température. Pour une température élevée, le module de rigidité de l’enrobé est faible et ce dernier est plus facilement déformable. Pour une basse température, le module de rigidité est élevé et le matériau devient fragile (Di Benedetto et al., 2005). Un enrobé bitumineux pour couche de base joint à la couche de fondation représente l’essentiel de la rigidité d’une structure de chaussée. Le passage répété des essieux sur la chaussée se traduit par des efforts en traction dans le bas de la couche d’enrobé de base, ce qui peut initier une fissuration par fatigue. Les principales caractéristiques mécaniques recherchées pour une couche d’enrobé de base sont : un bon module de rigidité, une haute résistance à l’orniérage et une bonne résistance en fatigue (Di Benedetto et al., 2005). C’est donc principalement dans cette optique que l’EBHP est ici formulé.

Maximisation du contact gros-sur-gros d’un squelette granulaire 

Une structure de chaussée bitumineuse sert de médium entre les charges d’essieux de véhicule et l’infrastructure, de manière à répartir le mieux possible les contraintes admissibles à l’infrastructure. Sous l’action des charges, la structure de chaussée fléchit, induisant des déformations au bas des couches liées du revêtement. Pour une même épaisseur de revêtement à couche unique, ces déformations seront moindres avec un enrobé plus rigide. Or, ces déformations répétées induisent de la fatigue au sein du matériau, altérant ainsi sa cohésion et par conséquent le module de rigidité de l’enrobé. Notons que le fait de maintenir ces déformations le plus faible possible aide à prolonger grandement la durée de vie du revêtement d’une chaussée bitumineuse. En plus d’être rigide, l’enrobé bitumineux doit rester stable vis-à-vis les déformations permanentes dû au contraintes imposées. Dans certains cas, l’enrobé peut devenir instable aux températures chaudes d’utilisation dû notamment aux caractéristiques spécifiques du bitume. On peut obtenir un enrobé bitumineux à la fois rigide et stable en optimisant les caractéristiques du squelette granulaire. La méthode d’optimisation du squelette granulaire proposée dans ce projet permet d’atteindre ces objectifs. L’idée générale est de toujours maximiser le contact entre les plus grosses particules tout en remplissant les vides avec de plus petites particules. De cette façon, une bonne rigidité est assurée par la densité du squelette de l’enrobé et la stabilité de ce dernier est assurée par le contact entre les grosses particules. La présente section traite des principes et bénéfices de la méthode d’optimisation granulométrique utilisée pour maximiser le contact gros-sur-gros, laquelle est ici associée au concept de formulation d’un Enrobé Bitumineux Hautes Performances (EBHP).

Historique 

Les premiers travaux sur l’optimisation des arrangements granulaires discontinus datent du 3ème siècle avant J-C. Ils ont été développés par un grec astronome et géomètre du nom d’Apollonios de Perga (Guyone et Troadec, 1994). Le concept développé, tel que schématisé à la Figure 1.1, est constitué d’un ensemble de sphères de même taille toutes tangentes les unes par rapport aux autres. Tous les vides ainsi formés sont ensuite comblés par une sphère plus petite. L’exercice se répète de façon séquentielle jusqu’à l’infiniment petit.

De façon générale, le tétraèdre régulier formé par un vide est d’un diamètre de 0,225 fois celui des sphères formant ce tétraèdre. La géométrie fractale de cet empilement de sphères a été décrite beaucoup plus tard, soit au 20e siècle, par un physicien français nommé Gilles de Gennes (Guyone et Troadec, 1994). Les applications expérimentales de ce concept ont beaucoup été étudiées pour les bétons hydrauliques, notamment dans les travaux de Caquot (Caquot, 1937) ou Baron et Sauterey (Baron et Sauterey, 1995) dans le domaine des bétons à hautes performances. Il y a eu toutefois des innovations depuis quelques années dans le domaine des enrobés bitumineux suite à l’application de ce concept comme la formulation du du SMA Cpack développée à l’ÉTS (Coarse aggregate packing) et celle du GB5 (Olard et al., 2010) développée en France (Graves-bitume). La méthode d’optimisation granulométrique présentée dans ce chapitre est celle développée pour la formulation de l’enrobé SMA Cpack (Perraton, Meunier et Carter, 2007). Cette formulation a été développée en 2007 par Mathieu Meunier dans le cadre de son projet de maitrise sous la supervision du professeur Perraton.

Principes de la méthode d’optimisation granulaire maximisant le contact gros-sur-gros 

La méthode d’optimisation granulométrique discontinue, présentée ici, part du principe qu’un agencement granulométrique uniforme qu’on peut associer aux grosses sphères de même taille, peut atteindre sa compacité maximale très rapidement même si celle-ci n’est pas optimale. De plus, un squelette granulaire constitué ainsi offre une très bonne stabilité à l’orniérage puisque le contact “gros sur-gros” des granulats permet un transfert plus direct des contraintes dans le matériau tout en empêchant le mouvement relatif des grosses particules par un effet autobloquant. Les vides résiduels entre les grosses particules doivent être comblés par des fractions de particules intermédiaires et fines tout en s’assurant de remplir un maximum de vides sans toutefois interférer sur l’agencement des grosses particules. Sur ce principe, une nouvelle méthode de formulation des enrobés bitumineux a été proposée au LCMB en considérant les interactions entre les différentes fractions de particules du squelette granulaire et ce, en vue de maximiser le contact entre les grosses particules dans l’enrobé (Perraton, Meunier et Carter, 2007). Les sous sections qui suivent décrivent plus en détail les notions de base associées à cette méthode d’optimisation granulométrique.

Effets d’interaction entre les particules 

Des travaux de Caquot (Caquot, 1937) ont porté sur l’étude de combiné binaire de granulats unidimensionnels en attachant un intérêt particulier sur l’indice des vides (e) de ces mélanges. Ces travaux ont permis d’apporter des précisions sur deux types d’interactions entre les granulats, soit :
1. l’effet de paroi
2. l’effet d’interférence

L’effet de paroi est associé à l’interaction entre les particules et tout type de paroi pouvant perturber leur agencement. Cette perturbation peut être visualisée si on pense à l’impact qu’aurait l’ajout d’une grosse particule sphérique dans un volume infini de petites particules unidimensionnelles. La grosse particule perturbera localement l’agencement des petites particules augmentant ainsi l’indice des vides à proximité de la paroi de cette grosse particule puisque les petites particules ne seront plus à même de se positionner de façon optimale : il y a effet de paroi. L’effet de paroi est ainsi présenté sur la droite à la Figure 1.2 sous la forme d’une surface triangulaire jaune (Perraton, Meunier et Carter, 2007).

En poussant un peu plus loin l’exemple précédent, l’augmentation de la proportion de grosses particules devient suffisamment importante pour qu’il se forme des interstices entre les grosses particules et ces dernières sont remplies de particules plus fines. Il y a apparition de l’effet d’interférence où l’agencement des grosses particules interfère sur l’agencement des plus petites, augmentant ainsi l’indice des vides. Certes, l’agencement des plus petites particules dépend de l’aire de paroi des plus grosses (effet de paroi), mais également de la disposition propre des grosses particules au sein du squelette granulaire. La notion d’interférence peut également être illustrée en prenant pour exemple un volume infini de grosses particules dans lequel on augmente progressivement le volume de petites particules qui viennent se loger au sein des interstices des grosses. L’ajout progressif des petites permet de diminuer graduellement l’indice des vides du combiné. Or, à un certain point, l’augmentation du volume des petites provoquera un desserrement des grosses, marquant ainsi un changement dans l’évolution de l’indice des vides du combiné, qu’on peut associer à un seuil minimal de vides. L’effet d’interférence est ainsi présenté à la Figure 1.2 sous forme d’une surface triangulaire du côté droit (Perraton, Meunier et Carter, 2007).

Impact des dimensions moyennes des particules sur l’indice des vides (e) 

Toujours dans le cas des mélanges binaires unidimensionnels, il est intéressant d’étudier l’évolution de l’indice des vides en fonction de la proportion de gros granulats, en faisant varier les écarts de diamètre des particules pour chacun des mélanges à l’étude. Les travaux de Powers (Powers, 1969) ont en effet mis en évidence que l’évolution de l’indice des vides en fonction de la proportion de gros granulats, pour un combiné binaire unidimensionnel, varie selon le rapport des dimensions moyennes des particules. Ainsi, l’indice des vides est plus faible lorsque l’écart du diamètre des petites et des grosses particules est élevé. Il est donc recommandé dans la littérature de limiter le diamètre des plus petites particules à 10% de celui des plus grosses (dpetites ≤ 0.10 dgrosses) dans le but de mitiger l’effet de paroi et d’interférence (Perraton, Meunier et Carter, 2007). Il a aussi été démontré expérimentalement que le volume minimal des vides dans une combinaison granulaire quelconque varie surtout en fonction du rapport entre les grosseurs minimales et maximales des granulats. Les grosseurs intermédiaires ont donc moins d’influence (Baron et Sauterey, 1995).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE
1.1 Généralités au sujet des enrobés bitumineux
1.2 Maximisation du contact gros-sur-gros d’un squelette granulaire
1.2.1 Historique
1.2.2 Principes de la méthode d’optimisation granulaire maximisant le contact gros-sur-gros
1.2.2.1 Effets d’interaction entre les particules
1.2.2.2 Impact des dimensions moyennes des particules sur l’indice des vides (e)
1.2.2.3 Analyse proposée par Baron
1.2.3 Bénéfices apportés par cette nouvelle méthode d’optimisation granulométrique maximisant les contacts gros-sur-gros
1.3 Paramètres de composition pouvant influencer la rigidité de l’enrobé
1.3.1 Les paramètres de composition plus généraux
1.3.2 La chaux hydratée
1.3.2.1 Composition de la chaux hydratée
1.3.2.2 Bénéfices de la chaux hydratée sur l’enrobé
1.3.2.3 Dosages recommandés et méthodes d’application de la chaux hydratée
1.3.3 Interaction bitume-fines
1.3.3.1 Concept d’adsorption
1.3.3.2 Modèle conceptuel de l’effet rigidifiant des particules fines dans le bitume
1.4 Utilisation du verre concassé dans les enrobés bitumineux
1.4.1 Propriétés du verre concassé
1.4.2 Performances des enrobés contenant du verre concassé
1.4.2.1 Résistance au désenrobage
1.4.2.2 Résistance à l’orniérage
1.4.2.3 Réflexion de la lumière
1.4.2.4 Mise en oeuvre
CHAPITRE 2 MÉTHODOLOGIE, PROGRAMME DE RECHERCHE ET PLAN DE TRAVAIL
2.1 Méthodologie proposée pour la formulation du EBHP et formulation de référence
2.1.1 Optimisation granulométrique : interaction des particules grosses et intermédiaires
2.1.2 Optimisation granulométrique : interaction du combiné de particules grosses-intermédiaires et des particules fines
2.1.3 Synthèse des étapes de formulation de l’EBHP
2.1.4 Formulation de base
2.1.4.1 Squelette granulaire de l’EBHP formulé
2.1.4.2 Utilisation de particules de verre
2.2 Programme de recherche et plan de travail
2.2.1 Programme de recherche et stratégies – Phase I
2.2.1.1 L’influence de l’utilisation de nanoparticules remplaçant un volume du filler
2.2.1.2 L’influence de la nature des granulats (comparaison verre et calcaire)
2.2.1.3 L’influence de l’utilisation de chaux hydratée remplaçant un volume des fines
2.2.1.4 L’influence de la nature du liant utilisé
2.2.1.5 Plan de travail – Phase I
2.2.2 Programme de recherche et stratégies – Phase II
2.2.2.1 Plan de travail – Phase II
CHAPITRE 3 DESCRIPTION DES MATÉRIAUX, DES ENROBÉS BITUMINEUX CONFECTIONNÉS ET DES PRINCIPALES MÉTHODES D’ESSAIS
3.1 Matériaux granulaires
3.1.1 Grosses particules
3.1.2 Particules intermédiaires
3.1.3 Particules fines
3.2 Liant
3.3 Description des enrobés bitumineux testés
3.3.1 Formulation du mélange de référence
3.3.1.1 Détermination des proportions granulaires
3.3.1.2 Détermination du volume de bitume effectif (Vbe)
3.3.2 Formulation des mélanges comparatifs
3.4 Principales méthodes d’essai
3.4.1 Essai d’aptitude au compactage
3.4.2 Essai de module complexe
3.4.2.1 Équipements et norme utilisés pour la détermination du module complexe
3.4.2.2 Le principe d’équivalence temps et température (PETT)
3.4.2.3 Modélisation 2S2P1D
3.4.3 Essai de retrait thermique empêché (TSRST)
3.4.4 Essai de fatigue
3.4.4.1 Critères de rupture
3.4.5 Essai d’orniérage
3.4.6 Récapitulatif des essais
CHAPITRE 4 RÉSULTATS ET ANALYSES – PHASE I DU PROJET
4.1 Essais d’aptitude au compactage
4.1.1 Densité maximale (dmm) pour l’essai de PCG
4.1.2 Calcul de la teneur en vides
4.1.3 Comportement à la PCG de l’enrobé de référence
4.1.4 Résultats et analyses pour les différents paramètres de formulation évalués à l’essai de PCG
4.1.4.1 Analyse de l’influence de l’ajout de fumée de silice sur la maniabilité (PCG)
4.1.4.2 Analyse de l’influence de la nature des granulats sur la maniabilité (PCG)
4.1.4.3 Analyse de l’influence de l’ajout de chaux hydratée sur la maniabilité (PCG)
4.1.4.4 Analyse de l’influence de la nature du liant sur la maniabilité (PCG)
4.2 Essais de module complexe
4.2.1 Confection des corps d’épreuve
4.2.2 Résultats de module complexe pour l’enrobé de référence
4.2.3 Résultats et analyses comparative du module complexe des formulations testées
4.2.3.1 Analyse de l’influence de l’ajout de fumée de silice sur le module complexe
4.2.3.2 Analyse de l’influence de la nature minéralogie des granulats sur le module complexe
4.2.3.3 Influence de la chaux hydratée sur le module complexe
4.2.3.4 Influence de la nature du liant sur le module complexe
4.3 Conclusion de la phase I
CHAPITRE 5 CARACTÉRISATION DE L’ENROBÉ SÉLECTIONNÉ : EBHP (CHAUX-H)
5.1 Confection et présentation des corps d’épreuve testés
5.2 Essais de retrait thermique empêché (TSRST)
5.2.1 Présentation des résultats d’essais TSRST
5.2.2 Données d’essais TSRST analysées
5.3 Essais de fatigue
5.3.1 Présentation des essais réalisés
5.3.2 Présentation des résultats types d’un essai de fatigue
5.3.2.1 Introduction
5.3.2.2 Évolution de la température et de l’échauffement en surface de l’éprouvette
5.3.2.3 Évolution de l’indice de qualité des signaux
5.3.2.4 Évolution de la déformation
5.3.2.5 Évolution de la contrainte
5.3.2.6 Évolution de l’angle de phase
5.3.2.7 Évolution de la norme du module complexe
5.3.2.8 Évolution de l’énergie dissipée
5.3.3 Durée de vie des éprouvettes de fatigue et critères de rupture
5.3.3.1 Correction des durées de vie en fonction de la température
5.3.3.2 Droite de Wöhler et durée de vie pour 1 000 000 de cycles (ε6)
5.3.4 Méthodes DGCB d’analyse de l’endommagement par fatigue
5.3.4.1 Modules de rigidité initiaux
5.3.4.2 Calcul du dommage et correction
5.3.4.3 Résultats des valeurs de DIIIc et prédiction
5.4 Essais d’orniérage
5.5 Essais de module complexe
5.5.1 Résultats et calibration pour le module complexe de l’EBHP (Chaux-H)
5.6 Comparaison des performances évaluées avec un enrobé de type ESG14
5.6.1 Comparaison des constituants
5.6.2 Comparaison des résultats d’essais
5.6.3 Comparaison en termes de structure de chaussée
5.6.3.1 Logiciel de dimensionnement OPECC©
5.6.3.2 Intrants du logiciel OPECC©
5.6.3.3 Résultats de l’analyse des deux structures de chaussée
CONCLUSION

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