La qualité des sols et le fonctionnement des écosystèmes terrestres

La qualité des sols : Définitions et facteurs déterminants 

Le sol est un milieu vivant très structuré (Gobat et al., 1998). La vie du sol est liée aux échanges entre le monde minéral, organique et vivant. Le sol est un milieu poreux constitué d’un ensemble de 5 fractions différentes : les minéraux solides, la matière organique, la fraction vivante, la phase gazeuse, et la phase liquide (Morel, 1989). Des transferts de matière et d’énergie ont lieu en permanence, non seulement entre ces divers compartiments, mais aussi entre chacun d’eux et le milieu extérieur : échanges gazeux, échanges de température, chutes de pluie, évaporation, drainage, apports de résidus animaux et végétaux… Ainsi, Le sol est, par son fonctionnement et son organisation, un véritable système écologique dynamique (di Castri, 1970 ; Lavelle, 1987). Il est le milieu commun à l’ensemble des écosystèmes terrestres (forestiers, prairiaux, agricoles…) et participe activement à leur fonctionnement.

Dans un sol qui fonctionne correctement, les échanges sont abondants et aisés. Les problèmes actuels concernant l’utilisation des sols (pollutions diverses, perte de structure, érosion, désertification…) traduisent le plus souvent des dysfonctionnements du système dans son intégralité et leur résolution nécessite de ce fait une approche écologique. O’Neill et al. (1986) considèrent que le bon fonctionnement d’un écosystème est caractérisé par l’intégrité des cycles des éléments et des flux d’énergie, par sa stabilité, et par la résilience des perturbations ou des stress. Les relations intimes que le sol crée avec les écosystèmes terrestres lui confère une grande importance dans la régulation des processus écologiques. Il est donc logique de considérer la « santé des sols » (soil health) comme une division essentielle de la « santé des écosystèmes » (ecosystem health) (Rapport et al., 1997 ; Van Bruggen et Semenov, 1999).

De très nombreuses activités humaines (agricoles, urbaines, industrielles…) utilisent le sol directement comme milieu récepteur (épandages de résidus agricoles, construction de routes…), ou l’affectent indirectement par exemple lors de transferts de contaminants aux abords d’une route ou par des pollutions atmosphériques. Le sol se trouve ainsi fortement exposé aux agressions anthropiques. Certaines de ces activités sont parfois non raisonnées et provoquent des détériorations pouvant être irréversibles. Les perturbations de ce milieu fragile peuvent alors affecter le fonctionnement des écosystèmes terrestres dans leur totalité. La constatation d’une dégradation permanente des sols a motivé une réflexion internationale sur la définition du concept de qualité des sols et sur les actions scientifiques concourant à la gestion durable de ce système écologique. Ce concept a été développé pour caractériser la valeur et le bon fonctionnement des sols. Les notions de fertilité, de productivité, de durabilité des ressources, et de qualité environnementale sont les principales bases des définitions actuelles de la qualité des sols. Le concept de qualité des sols est une notion subjective et très dynamique. Sa définition donne lieu à de nombreuses interprétations qui répondent toujours aux préoccupations sociales et scientifiques actuelles. En ce sens, les critères de qualité des sols peuvent évoluer selon les sociétés, de même que le niveau de qualité d’un sol défini peut évoluer dans le temps, sous l’influence de pratiques humaines ou de changements environnementaux.

L’évaluation de la qualité d’un sol nécessite l’utilisation d’indicateurs biologiques, physiques et/ou chimiques pertinents. Elle oblige également de prendre en compte l’utilisation actuelle du sol et la définition précise du type de perturbation susceptible de modifier la qualité du sol (naturelle ou anthropique, chimique ou physique…). Ces indicateurs deoivent permettre d’évaluer la qualité ponctuelle d’un sol mais également l’évolution de cette qualité dans le temps. La difficulté d’appréhender et de définir la qualité des sols réside dans la grande variabilité temporelle et spatiale de l’objet. Le sol est un système dynamique dont les propriétés intrinsèques évoluent constamment, plus ou moins rapidement, au court du temps. Les propriétés d’un sol donné varient également avec la profondeur (« zonation » horizontale). Les horizons formés peuvent être différents par leur teneur en matière organique, leur couleur, leur texture, leur structure, leur pH, leur capacité d’échange cationique (CEC), leur capacité de rétention de l’eau, et par beaucoup d’autres paramètres physico chimiques. Ces différences résultent de l’influence du climat, de l’action des plantes et de la transformation de la roche mère dans diverses positions topographiques. Ce constat nous permet de remarquer que la variabilité spatiale s’applique non seulement à l’échelle du profil de sol mais également à l’échelle de l’écosystème, du paysage et de l’unité géographique. Les propriétés qui serviront à caractériser la qualité des sols devront donc intégrer cette variabilité.

Rôle de la qualité du sol dans le fonctionnement des écosystèmes 

Le sol est un milieu vivant beaucoup plus complexe que l’air ou l’eau ; son rôle est essentiel dans la production de biomasse et dans le cycle biogéochimique des éléments, et ces caractéristiques fonctionnelles peuvent être altérées par les dégradations et les pollutions anthropiques. Les conséquences peuvent alors affecter les autres composantes des écosystèmes terrestres (plantes, animaux, hommes), mais également des écosystèmes aquatiques. L’eau est en effet un facteur important de la formation et du fonctionnement des sols. Ceux ci vont en retour déterminer la qualité des eaux de surface et des nappes phréatiques. Ce paragraphe introduit le concept de « santé des écosystèmes » et sa relation avec la santé des sols. Son objectif est de prendre conscience de l’enjeu environnemental majeur de la santé des sols dans les problèmes de fonctionnement des écosystèmes.

Les deux concepts d’ »écosystème » et de « santé » sont très ambigus. Le concept d’écosystème souffre du manque de limites concrètes et définitives. Le concept de santé souffre quant à lui de jugements de valeur implicites qui intègrent les intérêts de l’homme dans les schémas d’évaluation de l’état d’un système fonctionnel (Rapport et al., 1997). La dynamique complexe qui caractérise la plupart des écosystèmes (variabilité spatiale et temporelle) est une difficulté supplémentaire qui contribue à l’ambiguïté du problème. L’évaluation de la santé des écosystèmes doit tenir compte de trois considérations majeures (Rapport et al., 1985). Premièrement, l’écosystème doit être affranchi de tous signes de dysfonctionnement. Ces syndromes peuvent par exemple inclure pour un écosystème terrestre, une perte des nutriments du sol, une diminution de la diversité spécifique accompagnée ou non d’une modification de la composition des communautés au profit d’espèces opportunistes, une réduction de la productivité de l’écosystème (Rapport et al., 1985). Deuxièmement, les multiples interactions et transferts de flux (matière et énergie) qui définissent un écosystème doivent s’auto-réguler, et donc fonctionner sans l’intervention de l’homme. Troisièmement, l’écosystème ne doit pas être perturbé par les sous systèmes le composant (atmosphères, eau, sol). Le sol joue un rôle essentiel dans le cycle des éléments via les processus d’altération des roches et les processus de décomposition de la matière organique. Il est une matrice dans laquelle les plantes puissent leurs nutriments et conditionnent en retour sa formation et l’évolution de ses propriétés abiotiques et biotiques. Le sol peut ainsi être considéré comme une véritable interface dans l’environnement (Robert, 1996) et comme une composante majeure de la santé des écosystèmes. Ceci dans la mesure ou les perturbations affectant les propriétés édaphiques influencent nettement les conditions définies par Rapport (1985) et précisées plus haut. La santé des écosystèmes, basée sur leur aptitude à fonctionner naturellement, est donc fortement dépendante de la santé des sols. Il est dès lors essentiel de considérer les facteurs qui influencent l’évolution et la transformation des sols, dans les processus de fonctionnement des écosystèmes.

Santé et qualité des sols

Les termes « santé » et « qualité » des sols sont fréquemment utilisés pour définir le même concept (Singer et Warkentin, 1996). L’utilisation du concept de santé des sols est préférée au concept de qualité par les agriculteurs américains. Une enquête conduite par Romig et al. (1995) sur la perception de la santé des sols par des agriculteurs des grandes plaines agricoles du centre des Etats Unis, a permis de lister 97 propriétés édaphiques qui sont pour les agriculteurs du Wisconsin celles qui définissent le mieux la santé des sols. Les propriétés les plus fréquemment mentionnées sont les propriétés physiques et biologiques de l’horizon de surface (parmi lesquelles la matière organique, l’érosion, la structure, le pH, l’azote, le système racinaire, les lombrics…). En plus de ces propriétés, les agriculteurs ont fréquemment utilisé la santé des plantes, des animaux et des êtres humains, et les propriétés de l’eau pour apprécier la santé de leurs sols. Bien qu’un sol ne puisse pas être considéré en mauvaise santé s’il n’est pas apte naturellement à supporter une agriculture intensive, la santé des sols fait tout de même partie intégrante du concept d’agriculture durable (Reganold et al., 1990). D’après Carter et al. (1997), la santé d’un sol peut être considérée comme l’état de ce sol à un instant donné, équivalent à la dynamique des propriétés édaphiques susceptibles d’évoluer à court terme. A l’opposé, la qualité du sol peut être considérée, toujours d’après les mêmes auteurs, comme l’utilité du sol dans une fonction particulière et dans une échelle de temps beaucoup plus longue, équivalente à la qualité intrinsèque c’est à dire fonctionnelle du sol. Les exemples des propriétés dynamiques du sol citées par Carter et al. (1997) sont les teneurs en matière organique, le nombre et la diversité des organismes, ainsi que les constituants et les produits microbiens.

La santé d’un sol peut être évaluée en comparant son état actuel avec une série de points de référence ou des valeurs étalons qui reflètent la qualité globale des sols (Snakin et al., 1996 ; Boehn et Anderson, 1997 ; Seybold, 1997). Seybold et al. (1997) suggèrent trois points de référence : le sol initial, le sol intensivement exploité et les états altérés. Cependant ils ne précisent en aucun cas le niveau de référence pour déterminer d’un sol qu’il est en bonne santé. Or il est très difficile, voir impossible, de déterminer l’état initial d’un sol, pour le simple fait que la plupart des sols confrontés aux problèmes de leur santé sont des sols déjà dégradés depuis de nombreuses années. Par conséquent, les solutions appropriées pourraient être d’après Singer et Ewing (2001), l’utilisation de critères standards basés sur des rendements maximum dans les agrosystèmes, et l’utilisation de critères étalons précédant des pressions anthropiques pour les écosystèmes « naturels ».

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Table des matières

Introduction générale
Première partie : La qualité des sols et le fonctionnement des écosystèmes terrestres
Chapitre I – La qualité des sols : Définitions du concept et facteurs
I.1. Introduction
I.2. Rôle de la qualité du sol dans le fonctionnement des écosystèmes
I.3. Santé et qualité des sols
I.4. Le concept de qualité des sols
Chapitre II – Evaluation de la qualité des sols
II.1. Approche fonctionnelle et indicateurs
II.2. Indices mathématiques de la qualité des sols
II.3. Les formes d’hétérogénéité et leur importance dans l’évaluation de la qualité des sols
II.3.1. Hétérogénéité spatiale
II.3.2. Hétérogénéité temporelle
II.3.3. Hétérogénéité fonctionnelle
II.4. La qualité physique, chimique et biologique des sols
II.4.1. La qualité chimique
II.4.2. La qualité physique
II.4.3. La qualité biologique
Deuxième partie : Modifications des relations sol-microorganismes-plantes au cours du processus de restauration de prairies alpines dégradées
Introduction : problématique, contexte et objectifs des travaux
Chapitre I – Organisation physique et activités bactériennes de sols alpins naturels, dégradés puis reconstitués
I.1. Abstract
I.2. Introduction
I.3. Material and methods
I.3.1. Field situations
I.3.2. Soil sampling strategy
I.3.4. Soil analysis
I.3.5. Microbial analysis
I.3.6. Statistical analysis
I.4. Results
I.4.1. Soil texture
I.4.2. Soil structure
I.4.3. Soil chemistry (total carbon and nitrogen contents, CEC)
I.4.4. Microbial activities
I.5. Discussion
I.6. References
Chapitre II – Réponses des communautés bactériennes à des modifications de la structure physique d’un écosystème prairial alpin : influence de la localisation des bactéries
II.1. Abstract
II.2. Introduction
II.3. Material and Methods
II.3.1. Field sites and soil sampling
II.3.2. Soil fractionation
II.3.3. Rhizosphere and non rhizosphere soil collection and root biomass measurement
II.3.4. Soil texture and C and N content
II.3.5. Extraction and purification of DNA from soil and fraction samples
II.3.6. Automated intergenic spacer analysis (A-RISA): global soil microbial community
II.3.7. PCR-RFLP on the nifH gene pool: the community of nitrogen-fixing bacteria
II.3.8. Statistical analysis
II.4. Results
II.4.1. Multivariate analysis of bulk soils and microenvironments
II.4.2. Bacterial community structure analysis from F2000-250 and F50-2 aggregate-size fractions
II.4.3. Bacterial community structure analysis from rhizosphere soil
II.5. Discussion
II.6. References
Conclusions
Troisième partie : Réponses du sol, de la flore et de la microflore bactérienne à des perturbations chimiques complexes
Introduction : problématique, contexte et objectifs des travaux
Chapitre I – Perturbations des propriétés physico-chimiques d’un sol lessivé soumis à l’épandage d’effluents de déchets d’incinération
I.1. Summary
I.2. Introduction
I.3. Materials and methods
I.3.1. Soil, leachates and field experiment
I.3.3. Aggregate stability test
I.3.4. Grain size distribution in presence of MSWI-leachates
I.4. Results
I.4.1. Field impact assessments
I.4.2. Aggregates stability test
I.4.3. Effects of leachates on grain size distribution
I.5. Discussion
I.6. Conclusion
I.7. References
Chapitre II – Réponses à court terme des communautés bactériennes telluriques : empreintes génétiques et activité potentielles
II.1. Abstract
II.2. Introduction
II.3. Materials and methods
II.3.1. Soil and experimental design
II.3.2. Chemical analysis
II.3.3. Microbial activities
II.4. Results
II.4.1. Immobilization of MSWI ash leachate components in soil columns
II.4.2. Microbial activities on day 30
II.4.3. Structure of soil bacterial communities on day 30
II.5. Discussion
II.6. References
Chapitre III – Réponses des plantes et des communautés bactériennes des perturbations chimiques complexes
III.1. Abstract
III.2. Introduction
III.3. Materials and methods
III.3.1. Experimental design
III.3.2. Soil contamination measurements
III.3.3. Plant biomasses and carbon nitrogen contents
III.3.4. Microbial community structure by Automatised – Ribosomal Intergenic Spacer Analysis
III.4. Results and discussion
III.4.1. Soil contamination
III.4.2. Effects of leachates on vegetation
III.4.3. Effects of leachates on soil microbial community structure
III.5. Conclusion
III.6. References
Chapitre IV – Elaboration d’une batterie de tests de phytotoxicité: Essais de laboratoire
IV.1. Résumé
IV.2. Introduction
IV.3. Matériel et méthodes
IV.3.1. Préparation des cultures expérimentales
IV.3.2. Paramètres mesurés
IV.3.3.Analyses statistiques
IV.4. Résultats et discussion
IV.4.1. Biomasses foliaires et racinaires
IV.4.2. Croissance des racines
IV.4.3. Biosynthèse de la proline
IV.5. Conclusion
Synthèse et conclusion
Conclusions générales et perspectives
Références bibliographiques

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