COMPORTEMENT EN FLUAGE ANISOTHERME ET PLASTICITE DE TRANSFORMATION

Le zirconium fit son apparition dans l’industrie nucléaire en 1947 pour la construction du premier sous-marin nucléaire américain. A partir de cette date, et grâce à sa grande transparence aux neutrons, ses bonnes propriétés mécaniques et son excellente tenue à la corrosion, dans l’eau et sa vapeur, les applications du zirconium et de ses alliages se sont généralisées dans l’industrie nucléaire. Les principaux alliages développés et utilisés dans les réacteurs nucléaires peuvent être classés selon deux familles :
– les alliages de type Zircaloy (Zy-2 et Zy-4) contenant principalement de l’étain (environ 1.5 %) avec de faibles additions de fer, chrome et/ou nickel ;
– les alliages de type Zr-Nb contenant 1 à 2.5 %Nb, avec éventuellement des additions d’étain et de fer.

En France, les alliages base Zr sont principalement développés et étudiés à cause de leur application pour la fabrication des assemblages combustibles des Réacteurs  à Eau Pressurisée (R.E.P). Le sujet de cette thèse s’inscrit dans la démarche d’une meilleure évaluation de la sécurité (simulation de certains scénarios accidentels hypothétiques) et d’une meilleure compréhension des effets d’élaboration à haute température (laminage à chaud, filage à chaud) des alliages Zr-1%NbO. On s’intéresse essentiellement à l’étude du comportement mécanique à haute température de la gaine de combustible en Zr-1%NbO dans un R.E.P (figure I.1).

Il est particulièrement important de connaître le comportement mécanique à haute température de ces alliages. Peu de données existent dans la littérature. En effet, le comportement du matériau de gainage (Zr-1%NbO) dépend fortement de la température. L’alliage présente une transformation de phase α (hexagonale compacte) → β (cubique centrée) à haute température (typiquement entre 750 °C et 1000 °C). Il importe ainsi de connaître les propriétés mécaniques de l’alliage non seulement dans les deux domaines monophasés (α et β), mais également dans le domaine de température où l’alliage est biphasé. Par ailleurs comme la microstructure de la phase α dépend beaucoup de celle de la phase β dont elle issue, il est également nécessaire d’étudier l’influence d’un traitement en phase β sur le comportement de la phase α après trempe. On s’intéressera ici également à l’incidence d’une modification métallurgique induite par la seule température, c’est àdire par les transformations de phase α→β lors des cycles thermiques, hors irradiation et hors effet d’oxydation (sous vide secondaire).

Contexte historique 

Découvert en 1789 par le chimiste prussien Martin Heinrich Klaproth, le zirconium a été isolé trente-cinq ans plus tard par le Suédois Jöns Jacob Berzelius. Le métal alors obtenu était très impur et fragile. Ce n’est qu’en 1924 que A. E. Van Arkel et J. H. de Boer ont mis au point un procédé basé sur l’instabilité à haute température de l’iodure de zirconium et permettant d’obtenir un métal très pur. Dès lors, ses principales caractéristiques ont pu être mesurées et montrèrent que ce métal était ductile et résistant à la corrosion [TRI94, DEC89]. En 1946, les Etats-Unis décident de réaliser le réacteur de propulsion de leur premier sousmarin nucléaire. Le zirconium non allié est choisi en décembre 1947 de préférence à l’acier inoxydable. En effet, ce dernier conduit à un bilan neutronique défavorable et, de plus, est perméable au tritium. C’est également à cette époque que l’on s’est aperçu que le zirconium avait une faible section de capture des neutrons à condition que sa teneur en hafnium soit faible (≤ 50 ppm) [TRI94, DEC89]. Les procédés d’extraction de zirconium pur (sans hafnium et avec une teneur en oxygène contrôlée) se développent et, parallèlement, diverses études sont menées pour améliorer les propriétés de tenue mécanique et de corrosion par l’ajout d’éléments d’alliage. L’étain apparaît très vite comme un élément bénéfique. Mais c’est suite à une pollution accidentelle d’un lingot de zirconium par de l’acier inoxydable que l’on découvre l’intérêt de l’apport du fer, du chrome et du nickel. Ainsi naissent les diverses générations d’alliages à base zirconium dits zircaloys 1, 2, et 4 et Zr-Nb [ARM77]. Aujourd’hui, les alliages de zirconium sont les seuls utilisés comme gainage de combustible dans l’industrie nucléaire. En France, le Zircaloy 4 (Sn, Fe, Cr, O) et le Zr1%Nb équipent les réacteurs à eau sous pression. La filière canadienne CANDU (Canadian Deuterium Uranium) travaille avec l’alliage Zr 2.5%Nb et les réacteurs russes (à eau bouillante et utilisant le graphite comme modérateur) utilisent l’alliage Zr-1%Nb [LEM94, LEL98].

TECHNIQUES EXPERIMENTALES 

Machine d’essais

Les schémas des différentes parties qui constituent l’ensemble de la machine d’essais sont illustrés sur les figures II.1 à II.3 [FRE01]. Il s’agit d’une machine à vérin électromécanique que l’on peut notamment piloter à effort axial imposé. Le chauffage est assuré par un four à radiations d’une puissance maximale de 6kW. Le four à radiations et l’éprouvette sont placés dans une enceinte sous vide, dans laquelle un système de pompage (pompe à palettes et pompe turbomoléculaire) permet d’obtenir un vide allant de 10-3 à 10-4 Pa. Au cours d’un essai, les mesures suivantes sont assurées :

– le pilotage thermique est assuré par un thermocouple de consigne platine/platine rhodié, soudé par point au milieu de l’éprouvette. La lecture, la programmation et la régulation des rampes thermiques sont assurées par un eurotherm série 900 ;
– comme illustré sur la figure II-3, le suivi de résistivité est assuré par un système 4 fils, comportant deux amenées de courant continu (1A) et deux fils de prise de potentiel en platine. Ces derniers sont soudés par point directement sur l’éprouvette. La distance entre les prises de potentiel est d’environ 20 mm. L’intensité est limitée à 1A pour éviter de perturber la mesure de la température. La différence de potentiel initiale est de 200 mV. Au cours d’un essai, on mesure en continu la différence de potentiel entre les deux prises en platine ;
– l’allongement axial de l’éprouvette est mesuré par un extensomètre laser grâce à deux drapeaux d’alumine collés sur l’éprouvette d’essai et maintenus par deux fils en platine. La distance initiale entre les deux drapeaux représente la base de mesure du laser (de l’ordre de 25 à 30 mm). Trois échelles peuvent être utilisées pour suivre la déformation de l’éprouvette :
– échelle 1 : 10 mV = 0.1 µm
– échelle 2 : 10 mV = 1 µm
– échelle 3 : 10 mV = 10 µm

Seules les échelles 2 et 3 ont été utilisées lors de nos essais. Au cours d’un essai, on mesure en continu l’allongement de l’éprouvette . A signaler que pour des déformations supérieures à 10 %, on a une influence des drapeaux, ce qui conduit à une légère sous évaluation de la déformation ;

– la charge est mesurée à l’aide d’une cellule de 200 daN située à l’intérieur de l’enceinte. Cette cellule est différente de celle utilisée par Stéphane Fréchinet [FRE01].

Dès l’installation de cette nouvelle cellule, nous avons constaté qu’elle dérivait et ce, parce qu’elle chauffait (sa température pouvait atteindre 150 °C). Pour remédier à ce problème, nous avons été amenés à réaliser et installer une boîte à eau pour assurer le refroidissement de la cellule. Cette modification nous a permis de résoudre ce problème de dérive thermique.

D’autres modifications ont été apportées :
– mise en place d’un filtre optique nous permettant de maintenir la qualité du signal laser à haute température ;
– réalisation et mise en place d’un système de guidage pour le vérin pour bien aligner l’ensemble éprouvette-vérin ;
– mise en place de deux systèmes de refroidissement séparés de la cellule et du four pour éviter toute charge parasite sur la cellule.

Lors des essais de dilatométrie et de résistivité sans ou sous charge ainsi que des essais de fluage, quatre vitesses de chauffage (refroidissement) ont été utilisées : 10 °C/min, 50 °C/min, 200 °C/min, et 300 °C/min (vitesse maximale accessible sur la machine). La validation de ces choix sera indiquée par la suite lors de la description de chaque campagne d’essais.

Observations métallographiques 

• Attaques chimiques

Lors des observations métallographiques des échantillons traités après ou sans fluage, trois attaques chimiques à base d’acide fluorhydrique ont été utilisées :

− Glycérol 50 ml
− Acide nitrique 45 ml Attaque 1.
− Acide fluorhydrique 5 ml

et :
− Glycérol 45 ml
− Acide sulfurique 45 ml Attaque 2.
− Acide fluorhydrique 10 ml

Ainsi qu’une attaque acide fluorhydrique OPS (CEA) (Attaque 3).

Les échantillons sont attaqués à température ambiante pendant une durée allant de 30 secondes à 2 minutes selon la nature du traitement.

• Microscopie optique et électronique à balayage 

Les échantillons traités après ou sans fluage ont été observés en microscopie optique en lumière standard et polarisée, les grandissements pouvant aller de × 50 à × 1000. Les observations en microscopie électronique à balayage ont été réalisées en mode électrons secondaires. La tension appliquée varie de 15 à 20 kV. 3 microscopes électroniques ont été utilisés tout au long de cette étude (2 au CDM et 1 au CEA).
– Un LEO 1450 VP
– Un GEMINI DSM 9082
– Un JEOL 6400.

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Table des matières

CHAPITRE I. INTRODUCTION ET MATERIAU D’ETUDE
I.1 Introduction
I.2 Contexte historique
I.3 Matériau d’étude
CHAPITRE II. TECHNIQUES EXPERIMENTALES
II.1 Machine d’essais
II.2 Observations métallographiques
II.3 Dissolution anodique sélective
II.4 Répliques extractives
II.5 Suivi expérimental de la transformation de phase du Zr-1%NbO
CHAPITRE III. TRANSFORMATIONS DE PHASE α ↔ β DANS LA GAINE DE COMBUSTIBLE EN Zr-1%NbO
III.1 Introduction
III.2 Les transformations de phase dans les alliages de zirconium : état de l’art
III.2.1 Généralités
III.2.2 Cas des alliages zirconium-niobium
III.3 Changements de phase dans le Zr-1%NbO
III.3.1 Expériences et résultats
III.3.1.1 Essais de résistivité
III.3.1.2 Essais de calorimétrie
III.3.1.3 Analyse d’images
III.3.1.4 Comparaison des résultats
III.3.1.5 Essais de dilatométrie
III.3.2 Conclusions
CHAPITRE IV. COMPORTEMENT EN FLUAGE ISOTHERME
IV.1 Comportement mécanique des alliages Zr-Nb : étude bibliographique
IV.2 Mise en œuvre des essais de fluage
IV.2.1 Description et conduite des essais
IV.2.2 Dépouillement des résultats
IV.3 Comportement en fluage isotherme au chauffage
IV.3.1 Comportement en fluage en phase α au chauffage
IV.3.1.1 Résultats expérimentaux
IV.3.1.2 Analyse micrographique
IV.3.2 Comportement en fluage en phase β au chauffage
IV.3.2.1 Résultats expérimentaux
IV.3.2.2 Analyse micrographique
IV.3.3 Comportement en fluage dans le domaine biphasé (α + β) au chauffage
IV.3.3.1 Résultats expérimentaux
IV.3.3.2 Analyse micrographique
IV.3.4 Carte de déformation
IV.4 Comportement mécanique en fluage α après traitement thermique en phase β ou (α + β)
IV.4.1 Description des essais
IV.4.2 Résultats et interprétations
IV.4.2.1 Traitement thermique à 1050 °C (100 %β)
IV.4.2.1.1 Fluage à 650 °C
IV.4.2.1.2 Fluage à 700 °C et 760 °C
IV.4.2.2 Traitement thermique à 50 %β
IV.4.2.2.1 Fluage à 650 °C
IV.4.2.2.2 Fluage à 700 °C et 760 °C
IV.4.3 Détermination de la température limite de traitement en phase β à partir de laquelle le matériau flue moins vite après retour en phase α
IV.4.3.1 Influence du temps de maintien à 50 %β sur le comportement en fluage du matériau à 700 °C (phase α)
IV.4.3.2 Influence du taux de phase β sur le comportement en fluage α du matériau
IV.5 Comportement en fluage biphasé (α + β) isotherme après refroidissement
IV.5.1 Courbes de fluage
IV.5.2 Analyse micrographique
CHAPITRE V. COMPORTEMENT EN FLUAGE ANISOTHERME ET PLASTICITE DE TRANSFORMATION
V.1 Introduction
V.2 Mise en œuvre des essais de rampe sous charge
V.2.1 Description et conduite des essais
V.2.2 Résultats du comportement dilatométrique de l’alliage
V.2.2.1 Comportement dilatométrique à charge nulle
V.2.2.2 Comportement dilatométrique sous charge
V.2.3 Cinétiques de transformation de phase sous charge
V.2.3.1 Effet de la charge appliquée sur les cinétiques de transformation
V.2.3.2 Effet de la vitesse de chauffage sur les cinétiques de transformation
V.3 Plasticité de transformation
V.3.1 Rappels sur la plasticité de transformation
V.3.2 Résultats et interprétation
CHAPITRE VI. CONCLUSION

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