FACTEURS PRONOSTIQUES DES CARCINOSES PERITONEALES D’ORIGINE COLO-RECTALE

Généralités

   La carcinose péritonéale (CP) est définie comme une atteinte du péritoine par une tumeur maligne, quelle qu’en soit l’origine [1]. La carcinose péritonéale peut être soit primitive, liée au développement tumoral des cellules péritonéales, soit secondaire par extension loco-régionale ou métastatique de tumeurs de la cavité abdominale. Longtemps considérée comme une extension métastatique des cancers abdominaux, la carcinose péritonéale représentait une contre-indication définitive à toute chirurgie à visée curative. Depuis une vingtaine d’années, sous l’impulsion de Spratt et développée par Sugarbaker, la carcinose péritonéale est considérée comme une extension loco-régionale de ces cancers [2]. Les patients bénéficient d’une prise en charge médico-chirurgicale plus agressive, plus efficace, associant une cytoréduction tumorale chirurgicale avec une chimiothérapie per ou péri-opératoire chauffée : c’est le principe de la CHIP (ChimioHyperthermie Intra-Péritonéale) [3-6]. La CHIP a ainsi fortement amélioré l’espérance de vie des patients atteints de CP et constitue actuellement une recommandation grade B pour les CP d’origine colorectale [7]. Ce traitement multimodal est assez lourd avec une morbidité proche de 30% et une mortalité entre 3 et 4% en fonction de l’expérience des opérateurs et des centres [8-10]. Les CP des tumeurs colorectales avancées représentent la première indication de CHIP pour les tumeurs digestives ou primitives du péritoine [10]. Dans notre centre, la première indication de CHIP est représentée par les tumeurs ovariennes avec 49% des procédures puis le CCR avec 20% des procédures [8].La carcinose d’origine colorectale pose à la fois un problème diagnostique et thérapeutique. Le problème diagnostique est critique car la méconnaissance d’une carcinose péritonéale peut induire une mauvaise stratégie thérapeutique et donc une perte de chance pour le patient. L’objectif est de faire le diagnostic en pré-opératoire, avec une évaluation précise de la charge tumorale et non pas de découvrir la CP en per-opératoire. Les examens d’imagerie fonctionnels et nucléaires comme la TEP (Tomographie par Emission de Positons) semblent prometteurs, avec une sensibilité de 80%, supérieure à l’IRM (Imagerie par Résonnance Magnétique) et à la tomodensitométrie (TDM) [11,12] ; tomodensitométrie qui possède une sensibilité et une spécificité inférieures à l’IRM, surtout dans les stades localisés [13]

Histoire naturelle

   La muqueuse colorectale est de type glandulaire, dotée de cellules polarisées permettant une absorption de l’eau intra-luminale. La séquence de tumorigénèse de cette muqueuse débute par un stade de métaplasie proliférative glandulaire, c’est l’adénome. Les cancers colorectaux se développent à partir d’un adénome dans 60 à 80 % des cas, généralement sous la forme d’un polype pédiculé, ou plus rarement sous une forme plane, plus difficile à détecter lors de l’endoscopie digestive. La séquence se poursuit par une dysplasie avec présence d’atypies cellulaires, puis transformation tumorale : c’est la séquence « adénome-cancer ». Le risque de transformation d’un adénome en cancer varie en fonction de la taille, de l’importance de la composante villeuse au sein de l’adénome et du degré de dysplasie. La CP d’origine colorectale se développe par contiguïté pour les tumeurs volumineuses ou localement avancées, ou par voie systémique [8]. Les cellules tumorales d’origine colique s’implantent sur le péritoine autour de la tumeur primitive en priorité, puis migrent en suivant les courants usuels des liquides péritonéaux, vers le cul-de-sac de Douglas et le diaphragme thoraco abdominal. Elles respectent longtemps les parois du grêle (phénomène dit de « redistribution ») en raison probablement de son péristaltisme. Comme toutes les cellules libres dans le péritoine, elles ont une très grande affinité pour la surface des ovaires qui sont le siège de cicatrices mensuelles dues aux ovulations. Cette affinité prioritaire pour les ovaires donne naissance à des masses volumineuses qui sont considérées à tord comme étant la tumeur primitive. Ces cellules colonisent progressivement et à bas bruit l’ensemble de la cavité péritonéale [21].

Chimiothérapie intra-péritonéale

   Différents protocoles sont utilisés dans le monde, avec des différences en terme de survie mais également de morbidité. L’enquête de l’AFC sur la CP [10], a recensé plus de 500 CHIP pour CP d’origine colorectale avec 2 types de protocole : ï à base de Mitomycine C à la dose de 30 à 50 mg/m2 avec ou sans cisplatine (dose de 50 à 100 mg/m2 ) pour une durée de CHIP de 60 à 120 min à la température de 41 à 42,5°C ï à base d’oxaliplatine à la dose de 360 à 460 mg/m2 avec ou sans irinotécan (dose de 100 à 200 mg/m2 ) par voie intraveineuse associé ou non à du 5- fluorouracile et leucovorine pour une durée de CHIP de plus de 30 min à 43°C. L’utilisation de mitomycine C intra-péritonéale a permis un gain de survie à longterme par rapport à la chimiothérapie systémique [18, 20, 56]. La mitomycine C serait responsable de toxicité hématologique pour environ 20% des patients [56]. Ce taux peut être réduit par l’administration de facteurs hématopoïétiques comme le G CSF. La mitomycine C est également responsable d’une toxicité rénale, qui peut être diminuée en conservant une diurèse forcée per-opératoire [57]. La morbidité est également modifiée par le volume de solution utilisé pour la CHIP : ainsi Sugarbaker recommande l’utilisation d’un volume de 1,5l/m2 à 2l/m2 pour une dose de mitomycine C de 12,5mg/m2 de surface corporelle [58] : c’est le « protocole de Sugarbaker ». L’administration d’oxaliplatine permet également d’augmenter la médiane de survie et la survie à 3 ans par rapport à une chimiothérapie systémique [10]. Toutefois, devant une grande hétérogénéité de protocoles (étude multicentrique avec participation de 25 centres) il n’a pas été possible de comparer les doses, températures et protocoles entre eux. L’association d’oxaliplatine intra-péritonéale et de 5-FU systémique per-opératoire augmente la médiane de survie [19]. Dans une étude bicentrique publiée en 2011, l’administration d’une CHIP à base d’oxaliplatine seule conduit à une médiane de survie et une survie sans récidive identique à l’administration d’une CHIP à base d’oxaliplatine et irinotécan. De plus l’ajout d’irinotécan fait progresser la morbidité totale de 38 à 52% (p=0,05) principalement par augmentation de la toxicité hématologique qui passe de 2,33% pour l’oxaliplatine seul à 37,86% pour l’association oxaliplatine+irinotécan [34]. Une publication italienne du S.I.T.I.L.O [9] a comparé la survie entre deux protocoles de CHIP : cisplatine+/mitomycine C (no-LOHP – 127 procédures) vs oxaliplatine (LOHP – 11 procédures). Le groupe oxaliplatine possédait une meilleure médiane de survie (figure 2). Une dose per-opératoire supérieure à 240mg de cisplatine est associée à une hausse de la morbidité [59]. Une étude allemande [60] a comparé, au sein d’une série rétrospective avec CHIP à « ventre fermé », un protocole par Mitomycine C (20 mg/m2) associée à la doxorubicine (15 mg/m2) pendant 60 minutes et un protocole d’Oxaliplatine (300mg/m2) pendant 30 minutes, avec 5-FU et acide folinique en administration systémique) : la morbi-mortalité de ces 2 deux protocoles était identique. La survie n’était pas étudiée. La toxicité hématologique de ces procédures est présente pour plus de 20% des patients mais ne semble toutefois pas être significativement différente entre les protocoles oxaliplatine ou mitomycine C [61]. Une étude de faisabilité sur l’animal a été conduite avec un bain de chimiothérapie intra-péritonéale par bevacizumab (anticorps monoclonal anti-VEGF, cf paragraphe KRAS). Le bevacizumab n’est pas responsable d’une morbi-mortalité supplémentaire [62]. Dans notre centre le protocole de chimiothérapie des CHIP comprenait de la Mitomycine C à la dose de 10mg/m2 de surface corporelle pour les femmes et 12mg/m2 pour les hommes, associée à un solution de 2l/m2 de surface corporelle.

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Table des matières

Résumé
Préambule
Généralités
Epidémiologie et survie
Histoire naturelle
Formes histologiques
Facteur de risque de carcinose péritonéale
Diagnostic
Rationnel de la CHIP
Chimiothérapie intra-péritonéale
Pharmacocinétique et intérêt de l’hyperthermie
Quand réaliser la CHIP ?
Sélection des patients
Les scores
Charge tumorale : le PCI
Résécabilité : le CCs
Technique chirurgicale
La cytoréduction
La CHIP
Chimiothérapie péri-opératoire
Facteurs influençant la survie
Cliniques
Biologiques
Histologiques et cytogénétiques
Introduction et objectif
Matériel et méthodes
Critères d’inclusion
Critères de non-inclusion
Procédure chirurgicale
Protocole de CHIP
Recueil de données
Méthodes histologiques
Méthodes cytogénétiques
Analyse statistique
Résultats
Données démographiques et cliniques
Données histologiques et cytogénétiques
Etude de la survie
Analyse univariée
Analyse multivariée
Discussion
Conclusion
Annexes
Références

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