Facteurs biologiques favorisant l’accessibilité et la dégradation des hydrocarbures pétroliers dans le sol

Adsorption

À défaut d’être biodégradés, les hydrocarbures pétroliers sont le plus souvent séquestrés par les molécules du sol ou du compost (Means et al., 1980; Wershaw et al., 1991; Nielsen et al., 1997). Liés au sol, ces contaminants sont plus résistants à l’attaque biologique que les contaminants en solution. L’adsorption est un procédé physico-chimique, naturel et passif d’accumulation des matières organiques, mettant en jeu des forces d’interactions qui retiennent l’adsorbat sur la surface de l’adsorbant. La formation de tels résidus nécessite la présence de groupes réactifs sur le contaminant et sur la matrice organique du sol (Boilag et al., 1983). Quant aux HAP, il n’existe pas de tels groupes. Dans leur cas, il a été supposé que l’humification, c’est-à-dire la formation de résidus liés à la matière humique, ne peut donc avoir lieu que si des métabolites réactifs dérivés des HAP sont formés (Mahro et al., 1994; Kâstner et al., 1995). Elle se fait préférentiellement au niveau de la fraction organique du sol (Ehlers et Loibner, 2006) ou sinon, au niveau de la fraction minérale (Schwarzenbach et Westall, 1981). C’est un phénomène qui peut être réversible (si adsorption physique) ou irréversible (si adsorption chimique) et dépend des conditions environnementales (température, pH, taux d’humidité, etc.), des caractéristiques du polluant (solubilité, masse moléculaire, âge du polluant, etc.), de la nature du sol (granulométrie, minéralogie, taux de matière organique, etc.) mais aussi de la synergie des phénomènes dynamiques du sol, comme vu précédemment. Pour certains auteurs comme Hogan (1997), les hydrocarbures pétroliers peuvent former avec la matière organique des complexes qui deviennent non extractibles et non disponibles. Ce phénomène de séquestration du polluant organique par le sol met en jeu les coefficients de partage sur la matière humique liée à la surface des particules de sol (Chiou, 1983) ou la diffusion à travers les micropores tridimensionnels. Cette présence de matières humiques dans le sol reste bénéfique dans la solubilisation, le transport et la sorption des hydrocarbures les plus hydrophobes (Magee et al., 1991; Johnson et al.,1995a et 1995b).

Biorémédiation par co-compostage des sols contaminés aux hydrocarbures pétroliers

Depuis des décennies, plusieurs techniques de bioremédiation de sols contaminés aux hydrocarbures pétroliers ont vu le jour. Et, parmi eux : le co-compostage. Les premiers travaux sur le co-compostage datent de la fin du 20e siècle. À cette époque, des auteurs tels que Lotter et al. (1990), Kâstner et al. (1995), Hupe et al. (1996), Kâstner et Mahro (1996), Laine et Jorgensen (1996), Lieu et Colet (1996), Rosenbrock et al. (1997), Wischmann et Steinhart (1997) ainsi que Kâstner et al. (1999) avaient tous rapporté un fait à savoir que l’addition du compost dans un sol contaminé améliorait la dégradation des contaminants organiques et augmentait le rendement du procédé de biorémédiation. D’autres scientifiques au contraire ont vu dans l’utilisation des biosurfactants (ou tensioactif), un moyen efficace d’augmenter la biodisponibilité des polluants organiques afin de permettre leur biodégradation. L’exemple de la cyclodextrine (biosurfactant naturel), issu de la dégradation de l’amidon par la souche bactérienne Bacillus macerans a été citée à plusieurs reprises par des auteurs comme West et Harwell (1992) ; Grimberg et al. (1996); Sabatini et al. (1996) et Deziel et al. (1996). Au 21e siècle, début des années 2000, les recherches ont mis en évidence la biorémédiation augmentée par ajouts des substrats organiques tels que les déchets verts ou le fumier de volailles.

Dans un tel processus, les auteurs comme Samanta et al., (2002), Atagana et al. (2003), Atagana, (2004b), Amir et al. (2005), Antizar-Ladislao et al. (2006) et Doyle et al., ( 2008) ont voulu agir spécifiquement sur la biostimulation (apport de nutriments) et/ou la bioaugmentation (apport de bactéries exogènes) de la flore microbienne indigène du sol pendant que d’autres étudiaient l’aération du sol contaminé en apportant des agents structurants et des éléments rigides favorables à sa porosité (Straube et al., 2003; Quantin et al., 2005). L’exemple qui a suscité le plus d’intérêt a été les travaux de recherche de Atagana (2004) lorsqu’il a démontré que le co-compostage des sols contaminés en hydrocarbures avec du fumier de volaille a contribué à l’élimination des fortes teneurs en HAP, de poids moléculaire élevé jusqu’à un niveau inférieur à 1 mg/kg et ce, sur une période de 19 mois. Cet auteur a également évoqué que le compost issus du fumier de volaille permet d’atteindre des températures plus élevées (voisinant les 75°C). Autre exemple concret est celui des travaux de Wong et al. (2002) qui ont constaté que le co-compostage du sol avec du lisier de porc (25 % poids sec) pouvait réduire le taux initial de certains HAP jusqu’à hauteur de 90 % de ses teneurs initiales. Par la suite, d’autres auteurs ont mis en évidence l’importance d’inoculer des cultures de souches microbiennes pour venir à bout des polluants organiques. L’exemple de Simon et al. (2008) est assez révélateur puisqu’ils ont pu enlever près 68 % de HAP lourds (5 à 6 cycles aromatiques) sur 16 semaines en ayant ajouté 10 % d’inoculum constitué de microorganismes. Suite à ces découvertes, des travaux portant sur des modèles mathématiques de prédiction sur le devenir des contaminants organiques au niveau du sol ou sur l’activité métabolique des microorganismes ont vu le jour (Vlyssides et al., 2009; Zhang et al., 2011; Oudart et al., 2013).

Description de l’unité pilote (bioréacteur)

L’unité pilote a été élaboré en utilisant un seau de la forme cylindrique de 18.9 litres (polyéthylène) équipé d’un couvercle (Figure 2.1). Afin de conserver la chaleur interne du bioréacteur, celui-ci est protégé d’une gaine d’isolation thermique faite en fibre de verre; maintenue par une sangle. Quatre ouvertures symétriques entre-elles de 7 cm de diamètre ont été créées sur les côtés du seau afin de permettre un échange d’air avec l’extérieur. Ces ouvertures sont recouvertes d’une feuille de grillage de revêtement plastique afin de retenir la matière à l’intérieur du bioréacteur. Quatre trous de 0.5 cm de diamètre ont été perforés au fond du seau afin de faciliter l’écoulement du lixiviat dans un autre récipient posé endessous. Un trou de 1 cm de diamètre situé au fond du seau permet l’insertion d’une sonde de mesure en continu de la température. Cette sonde de marque « Omega Wireless thermocouple » est relié à un ordinateur par un système sans fil. Celui-ci offre une lecture à temps réel et en continu de la température à tous les 5 min de l’essai de compostage. Trois trous linéaires ont également été perforés sur le couvercle. Le premier trou de 1 cm de diamètre, situé au centre, permet d’insérer la sonde de mesure de l’oxygène lacunaire. Les deux autres trous de 0.5 cm de diamètre, situés de part et d’autre du précédent, permet quant à eux la mesure des gaz d’émanation (CO2, NH3, CH4, H2S). Par ailleurs, un tambour rotatif a été utilisé pour assurer le mélange des bioréacteurs. Il est constitué d’un tube cylindrique de 2 m de long, ouvert de chaque côté à 30 cm de circonférence interne (Figure 2.2). Ce dispositif mécanique motorisé permet de recevoir un bioréacteur et d’assurer son mélange, à une vitesse contrôlée et à inclinaisons variables. Les ouvertures se trouvant de chaque côté du tambour rotatif permettent l’aération du mélange durant la phase de rotation des bioréacteurs.

Compostage des substrats organiques en absence de sol

Le compostage du fumier de poulet seul, des résidus organiques de restauration seul ou du mix (75 % de fumier + 25 % de résidus) des substrats organiques (en absence de sol), a permis de comprendre que le procédé peut se réaliser dans des conditions expérimentales telles qu’elles ont été définies et ce, pendant 42 jours de traitement. La phase de fermentation est marquée par des émanations de gaz. L’émission de l’ammoniac (NH3) est sept fois plus importante avec les résidus organiques qu’avec le fumier de poulet seul; alors que celle du méthane (CH4) est trois fois plus importante avec le fumier de poulet seul qu’avec les résidus organiques (Tableau 3.1). . Un autre fait observé qui explique la présence du NH3 en abondance est le changement de densité des résidus organiques; celui-ci ayant été fermenté voit sa densité augmentée. Sa densité augmentant, la matière organique devient à ce moment-ci plus compact et provoque l’asphyxie des microorganismes aérobies d’où l’émission du NH3.

À souligner, la présence du lixiviat émanant du compost des résidus organiques qui est en partie dû à ce changement de densité et à sa perte de masse de près de 50 % de son poids initial Le fumier de poulet, quant à lui, a généré une chaleur relativement élevée pendant toute la durée du cycle de traitement. Comme vu précédemment dans la revue de littérature, une telle chaleur, élevée et constante, est favorable à la solubilité des hydrocarbures pétroliers et à sa désorption de la fraction organique. La courbe d’évolution de la température du fumier de poulet présente à quelques endroits des variations pendant toute la durée du traitement, comparée à celle des résidus organiques. Celle-ci est due à la déshydratation régulière du fumier et à des manipulations de réajustement de son taux d’humidité. La figure 3.1 montre que l’activité microbienne a démarré assez rapidement dans les trois cas et ce, dans un délai de 24h. Une phase de fermentation (mésophile et thermophile) a ensuite été observée pour des durées moyennes d’une semaine avec les résidus organiques seuls et de plus de quatre semaines avec le fumier de poulet seul ou le mix (fumier + résidus). De plus, une température supérieure à 30°C, favorable au développement des microorganismes thermophile, a été enregistrée pendant toute la durée du cycle avec du fumier de poulet seul ou du mix (fumier + résidus).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 Cadre réglementaire
1.2 Systèmes dynamiques du sol
1.2.1 Définition
1.2.2 Phénomènes chimiques
1.2.3 Phénomènes physiques
1.2.4 Phénomènes physico-chimiques
1.3 Microbiologie du sol
1.3.1 Familles hétérotrophes
1.3.2 Bactéries
1.3.3 Actinomycètes
1.3.4 Champignons
1.4 Hydrocarbures pétroliers
1.4.1 Définition
1.4.2 Caractéristiques et conditions physico-chimiques de biodégradation des hydrocarbures pétroliers
1.4.3 Risque toxicologique
1.4.4 Devenir des hydrocarbures pétroliers dans le sol
1.4.4.1 Volatilisation
1.4.4.2 Biodégradation
1.4.4.3 Adsorption
1.5 Cinétiques de biodégradation des hydrocarbures pétroliers dans le sol
1.6 Facteurs biologiques favorisant l’accessibilité et la dégradation des hydrocarbures pétroliers dans le sol
1.7 Biorémédiation par co-compostage des sols contaminés aux hydrocarbures pétroliers
1.7.1 Généralités
1.7.2 Différentes techniques de biorémédiation
1.7.2.1 Bioaugmentation
1.7.2.2 Biostimulation
1.8 Co-compostage de sol contaminé
1.8.1 Définition
1.8.2 Rôle d’un substrat organique dans un processus de co-compostage de sol contaminé
1.8.3 Types de substrats organiques utilisés en co-compostage
1.8.4 Phases d’un processus de co-compostage
1.8.5 Paramètres influençant le processus de co-compostage
CHAPITRE 2 MATÉRIEL ET MÉTHODES
2.1 Approche générale
2.2 Matériels utilisés
2.2.1 Description de l’unité pilote (bioréacteur)
2.2.2 Intrants
2.2.2.1 Sol
2.2.2.2 Substrat organique
2.2.3 Suivi des variables et paramètres de l’étude
CHAPITRE 3 RÉSULTATS
3.1 Compostage des substrats organiques en absence de sol
3.2 Compostage des substrats organiques en présence de sol contaminé en hydrocarbures pétroliers
3.3 Détermination du taux d’humidité en fonction de l’apport en substrat organique
3.4 Influence du taux de substrat organique sur la biodégradation des hydrocarbures pétroliers
3.5 Influence du ratio C:N sur le taux de biodégradation des hydrocarbures pétroliers
3.6 Étude cinétique de biodégradation des hydrocarbures pétroliers
CHAPITRE 4 DISCUSSION
4.1 Compostage de substrat organique en présence de sol contaminé aux hydrocarbures pétroliers
4.2 Influence du taux de substrat organique sur la biodégradation des hydrocarbures pétroliers
4.3 Influence du ratio C:N sur la biodégradation des hydrocarbures pétroliers
4.4 Étude cinétique de biodégradation des hydrocarbures pétroliers
CONCLUSION
ANNEXE I CADRE LÉGISLATIF AU QUÉBEC ET AILLEURS
ANNEXE II CARACTÉRISTIQUES PHYSICOCHIMIQUES DU FUMIER DE POULET
ANNEXE III ANALYSE DE LA LISTE DES HAP DU SOL CONTAMINÉ
ANNEXE IV ANALYSE DES C10-C50 DU SOL CONTAMINÉ
ANNEXE V ÉTUDE GRANULOMÉTRIQUE DU SOL
ANNEXE VI ANALYSE DES MÉTAUX LOURDS DU SOL CONTAMINÉ
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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