Explication du mécanisme de la ruse

Explication du mécanisme de la ruse

Si, dans toute situation, la motivation joue un rôle central, cela est d’autant plus le cas en contexte scolaire. En effet, dans ce contexte particulier, elle constitue le principal moteur de tout processus d’apprentissage. Il suffit qu’elle diminue pour influer négativement sur l’attention des élèves, leur envie d’apprendre ou encore leur assiduité à la réalisation des tâches scolaires. Dès ce moment, il incombe généralement à l’enseignant1 de faire réémerger la motivation chez les élèves. En ce sens, l’enseignant joue, comme nous le verrons dans notre partie théorique, un rôle de facteur externe relativement à la motivation de ses élèves. Dans un rôle que nous pourrions qualifier de « générateur de motivation », l’enseignant peut faire appel à bon nombre de stratégies, comme, par exemple, rendre la tâche plus attrayante en mobilisant le jeu ou encore réaliser un travail en groupe afin de permettre aux élèves de s’autoréguler entre eux. Cependant, l’enseignant peut également recourir à d’autres stratégies moins ordinaires, telle que faire appel à une ruse. Avoir recours à une ruse pourrait effectivement être une solution pertinente pour dénouer une situation compliquée et, ainsi, réenclencher le processus d’apprentissage en permettant aux élèves de se réengager dans les tâches scolaires.

C’est ainsi que, dans le cadre de ce travail, nous allons nous demander si la mobilisation d’une ruse éducative peut avoir pour effet de faire émerger la motivation des élèves. Nous supposons effectivement que tout enseignant s’est déjà retrouvé face à un élève démotivé, ne souhaitant plus s’engager dans une tâche. Ou alors qu’il a dû faire face à un climat de classe peu, voire pas propice aux apprentissages. Dans ces situations, il est, là encore, fort probable que bon nombre d’enseignants se soient sentis quelque peu démunis et en manque de solution afin de stimuler l’engagement de leurs élèves. Certes, il est possible de tenter, comme nous l’avons mentionné ci-dessus, de trouver une nouvelle forme d’animation de la classe. A l’inverse, l’enseignant peut également manifester son mécontentement envers l’élève ou les élèves peu motivés. Mais, la mobilisation d’une ruse éducative pourrait-elle aussi faire jaillir la motivation des élèves ? Du fait que, dans le cadre de ce travail, nous souhaitons fournir des réponses à cette question, nous nous proposons d’expérimenter pour les enseignants une telle piste alternative qui pourrait leur permettre de trouver peut-être un nouveau moyen pour réengager leurs élèves dans leurs activités scolaires.

En ce qui concerne la structure de ce travail, outre cette introduction et la conclusion qui achèvera notre étude, nous pouvons le diviser en quatre parties principales. Dans un premier temps, nous nous arrêterons sur trois éléments théoriques principaux, à savoir la motivation, la relation enseignant-élève ainsi que les principes généraux liés aux ruses. Puis, dans une partie intitulée « démarche », nous présenterons ce que nous avons réalisé pour tester notre ruse éducative. En ce sens, nous nous pencherons sur la ruse que nous avons décidé d’expérimenter, nous décrirons brièvement la population de notre expérience et nous exposerons également le matériel que nous avons utilisé pour recueillir nos données expérimentales. Enfin, pour en terminer avec cette partie autour de notre démarche, nous formulerons quelques hypothèses quant aux résultats que nous supposons recueillir. Notre troisième partie sera consacrée, pour sa part, à la présentation de nos résultats. Suite à cela, nous mènerons une discussion réflexive à propos de notre étude. Dans cette dernière partie, nous tenterons, d’une part, de mettre en lumière les aspects les plus intéressants à retenir de ce travail mais nous souhaitons également, d’autre part, dresser un bilan plus personnel de cette expérience.

La motivation scolaire

Dans cette partie, nous allons présenter la manière dont trois auteurs définissent le concept de « motivation » dans le cadre scolaire. Ces définitions nous permettront de souligner le rôle central que joue l’enseignant dans l’émergence de cette motivation. Commençons par la définition proposée par P. Rayou et A. Van Zanten (2001, p. 29). Ces auteurs considèrent que « … la motivation désigne l’ensemble des facteurs internes qui poussent une personne à s’engager dans un type d’activité ou de conduite et à y persister durablement ». Il ressort de cette définition, que la motivation à effectuer une tâche relève de facteurs propres à l’individu. Si nous nous penchons maintenant sur la définition que donne R. Viau (2009, p.12) dans son ouvrage intitulé « La motivation en contexte scolaire », celle-ci est « …un phénomène qui tire sa source dans des perceptions que l’élève a de lui-même et de son environnement, et qui a pour conséquence qu’il choisit de s’engager à accomplir l’activité pédagogique qu’on lui propose et de persévérer dans son accomplissement, et ce, dans le but d’apprendre ». Ce qui est intéressant dans cette deuxième définition, c’est qu’en plus de la dimension propre à l’individu, la motivation dépend également des représentations qu’il a tant de lui-même que de son environnement. Cela signifie donc que l’enseignant a pour rôle de valoriser les élèves afin qu’ils aient une perception idéale d’eux-mêmes. De plus, l’atmosphère de la classe doit leur être agréable dans le but de leur permettre de s’engager dans les tâches scolaires.

Relation enseignant-élève

Après avoir parlé de motivation et mis en évidence le rôle joué par l’enseignant à cet égard, nous désirons parler un instant de la relation pédagogique dans le but de souligner, par le biais de deux études, l’importance d’une relation enseignant-élève bienveillante. Ces deux études vont nous permettre de constater que le comportement de l’enseignant a un effet direct sur ses élèves, il est primordial que celui-ci adopte un comportement adéquat envers eux afin de leur offrir un climat de travail optimal.

La thématique de la relation pédagogique est étudiée depuis de nombreuses années. Ainsi, S. Tiedeman, dans une recherche réalisée en 1942, relevait déjà que certains comportements de l’enseignant, tels que le fait d’être dominateur, râleur ou encore menaçant, étaient mal perçus par les élèves. Il est intéressant de souligner qu’en revanche, les élèves se sont dits moins gênés par les comportements passifs du maître. Globalement, il ressort de cette étude que les élèves apprécient les enseignants amicaux, joviaux et disponibles. Ils aiment sentir que l’enseignant désir les aider. Autrement dit, un climat de classe agréable où l’atmosphère est détendue offre des conditions favorables à l’apprentissage. Inversement, un climat désagréable et une relation distante entre l’enseignant et les élèves risquent de contrarier ces derniers et d’affecter ainsi leurs intérêts et leur motivation dans les apprentissages. Par conséquent, un soin particulier doit être porté à la relation pédagogique. Par la suite, E. Skinner et M. Belmont (1993) ont, eux aussi, réalisé une recherche sur l’impact des comportements des enseignants sur l’engagement des élèves. Selon ces auteurs, l’engagement des élèves « … se réfère à l’intensité et à la qualité émotionnelle de leur [propre] participation dans l’introduction et l’exécution des activités d’apprentissage ». Ces propos mettent l’accent sur l’importance de l’affectivité dans la relation pédagogique. Les chercheurs ont alors établi un modèle de motivation qui décrit différents besoins des élèves afin de maintenir une relation propice aux apprentissages. Pour ce faire, les élèves doivent se sentir compétents, autonomes et liés aux autres personnes. Le premier besoin, être compétent, est satisfait lorsque la structure de la salle de classe est adaptée aux élèves et qu’elle leur plaît. Le second besoin, celui d’autonomie, est satisfait lorsque les élèves l’expérimentent. Les enseignants peuvent soutenir l’autonomie en faisant des rapprochements entre les activités scolaires et les intérêts des élèves. Enfin, le dernier besoin d’être lié est satisfait grâce à la participation et à l’engagement des élèves. C’est pourquoi les enseignants doivent consacrer du temps aux interactions.

Ainsi, le but de cette étude était de comparer différents comportements de l’enseignant et l’impact qu’ils produisent sur l’engagement des élèves. Les résultats soulignent le rôle essentiel de l’enseignant dans la mise en place d’une relation pédagogique de qualité. Il est également relevé que les élèves, par leur engagement, influencent le comportement de l’enseignant. C’est pourquoi un comportement bienveillant de l’enseignant et un engagement actif des élèves sont nécessaires, pour que chacun soit motivé et puisse travailler dans un climat de classe optimal.

L’usage des ruses dans le domaine de l’éducation 

Dans cette dernière partie, nous allons commencer par présenter deux représentations différentes des ruses dans la société. Puis, nous évoquerons quelques principes et limites relatifs aux ruses dans le domaine de l’éducation. Il est intéressant de relever que, dans la vie courante, l’usage de ruse n’est pas forcément bien vu. La ruse est effectivement associée à cette idée d’obtenir d’autrui, avec des moyens discutables, quelque chose qu’il ne produirait pas spontanément. Autrement dit, la représentation négative de la ruse provient de sa parenté avec les stratégies de manipulation, lesquelles seraient contraires à une forme de moralité. Or, d’après G. Vignaux (2003) : « … Il y a de tout dans la ruse, mais jamais de cette « fourberie » au sens de l’opinion commune d’aujourd’hui». Une ruse doit être bienveillante, elle « ne vise pas la puissance et le confort du maître, mais bien l’intérêt et la réussite de l’élève » (Guégan, 2008). Cette citation met en lumière le fait que la ruse n’a pas pour objectif de nuire à l’élève mais, bien au contraire, de se mettre à son service.

La ruse éducative présente deux limites. Premièrement, l’enseignant doit l’employer de manière occasionnelle afin que celle-ci ne soit jamais repérée par les élèves. La relation pédagogique doit être sincère et l’appel trop répété aux ruses peut altérer ce lien. Deuxièmement, « … il est important que l’enseignant reste vigilant pour ne pas privilégier ses satisfactions narcissiques, aux dépens de l’objectif éducatif » (Guégan, 2008). En effet, réussir à tromper l’autre au moyen d’une ruse peut flatter l’ego et faire ressentir une pointe de plaisir « diabolique », c’est pourquoi la vigilance est primordiale. L’école est une institution paradoxale au sein de laquelle l’enfant doit s’émanciper tout en respectant bon nombre de contraintes. La résistance à l’entrée dans les apprentissages, les malentendus ou encore les différences de cultures altèrent la communication entre le groupe classe et l’enseignant. La relation pédagogique peut alors se dégrader et face à ce type de situations, les enseignants peuvent avoir recours aux rituels de classe, à l’autorité, l’humour ou la ruse. Il s’agit encore de ruse, dite « … pédagogique » (Meirieu, 1995). Philippe Meirieu les définit comme des activités authentiques : le jeu, le projet, la vie de la classe. Yves Guégan complète cette déclaration en affirmant : « … une définition moins satanique la désigne comme une démarche indirecte pour obtenir un résultat » (Guéguan, 2008). Par exemple, la ruse permet d’éviter de brusquer les élèves par des propos trop autoritaires et peut leur faire croire à une certaine liberté d’engagement.

La ruse

Nous aborderons ici trois aspects de cette notion. Premièrement, nous décrirons la ruse choisie. Ensuite, nous expliquerons son fonctionnement. Enfin, nous évoquerons les raisons qui nous ont fait choisir cette ruse en particulier.

Description de la ruse choisie

La ruse que nous avons choisie de tester est la 96ème ruse présentée par Yves Guégan (2008). Elle s’intitule « Jouer à contre-emploi » et appartient à la catégorie des « Tactiques paradoxales » et elle prend appui sur le principe de l’inversion des rôles. Dans ce cas de figure, l’enseignant va être amené « … à jouer par surprise un rôle de rebelle, à la manière des élèves » (Guégan, 2008, p.176).

Explication du mécanisme de la ruse

Le principe de base de cette ruse éducative est d’inviter les enseignants à « … prescrire le non-travail » (ibid., p. 179). Yves Guégan propose cette ruse notamment lorsque le maître ne parvient plus à rétablir un climat de travail adéquat à l’entrée dans les apprentissages. D’après lui, la ruse doit se dérouler de la manière suivante. Au moment précis où l’enseignant ne parvient plus à obtenir ce qu’il désire, il doit annoncer aux élèves qu’il n’est pas en mesure de donner le cours, qu’il n’est pas bien. Il va alors leur demander de ne pas sortir leur matériel scolaire, ni aucun autre matériel distractif. L’enseignant reste ensuite à son pupitre, le regard vide et adopte une posture fatiguée. De leur côté, les élèves sont libres d’agir à leur guise. L’intérêt principal de cette ruse est la tension qui se crée dans l’esprit des élèves entre leur idée qu’à l’école on doit travailler, le refus de poursuivre de l’enseignant et la liberté qui leur est donnée. Dès lors, que va-t-il se passer ? Est-ce que l’élève va profiter de la situation pour faire encore plus de bruit ? Est-ce qu’à l’inverse, il va se réguler par lui-même et vouloir se remettre au travail ? Est ce que le comportement de l’enseignant va avoir pour effet d’insuffler une nouvelle forme de motivation, qui paraissait pourtant absente ? Si tel est le cas, cela pourrait signifier que, ressentant une certaine empathie envers leur enseignant, les élèves sont capables de mettre fin par eux-mêmes à leur comportement inadéquat et de s’engager à nouveau dans une dynamique propice au travail sans intervention autoritaire de l’enseignant.

Raisons de notre choix

Notre choix s’est dirigé sur cette ruse pour différentes raisons. La première est la profonde envie de l’appliquer. En effet, à la lecture de cette technique, nous avons très vite souhaité la mettre en pratique afin d’en vérifier la faisabilité. La seconde raison est notre souhait de faire émerger la motivation chez nos élèves. Donner envie d’apprendre est l’un des objectifs premiers de l’enseignant. En ce sens, cette expérience semble intéressante. Pour finir, nous avons été séduites par l’originalité de la ruse qui offre une valeur supplémentaire à notre travail. En effet, la particularité de mobiliser la démotivation afin de faire émerger la motivation suscite notre intérêt.

Discussion pour les élèves de la première population 

Comme les élèves de 1ère-2ème HarmoS ne sont pas en mesure de remplir un questionnaire, nous avons décidé de recueillir leurs impressions lors d’une discussion commune. Avec la première question que nous leur avons posée quelques heures après la réalisation de la ruse, nous désirions retracer avec eux le fil des évènements survenus le matin même et récolter leurs différentes réactions spontanées. Notre deuxième question porte, quant à elle, sur le comportement inhabituel de l’enseignante. Par cette question, nous désirons voir si les élèves ont perçu quelque chose de particulier et ainsi s’ils ont été sensibles à cette démarche. Enfin, nous demandons aux élèves d’exprimer les sentiments qu’ils ont pu ressentir tout au long de cette expérience.

Conclusion

Pour rappel, par le biais de ce travail, nous avons souhaité tester la faisabilité, ainsi que la pertinence, de recourir à une ruse éducative afin de faire émerger à nouveau le désir de travailler des élèves alors même que leur motivation semblait ne pas être très présente. Notre idée était effectivement de voir si, de cette façon, il était envisageable de remettre les élèves en activité. En plus de cela, il nous a semblé intéressant de tester notre procédure expérimentale sur deux publics d’âges différents, car nous nous demandions si les réactions des élèves allaient être identiques.

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Table des matières

1. Introduction
2. Cadre théorique
2.1 La motivation scolaire
2.2 Relation enseignant-élève
2.3 L’usage des ruses dans le domaine de l’éducation
3. Démarche
3.1 La ruse
3.1.1 Description de la ruse choisie
3.1.2 Explication du mécanisme de la ruse
3.1.3 Raisons de notre choix
3.2 Situation expérimentale
3.2.1 Populations testées
3.2.2 Description de l’opérationnalisation de la ruse
3.3 Récolte des données en lien avec notre situation expérimentale
3.3.1 Description du déroulement de la situation expérimentale
3.3.2 Discussion pour les élèves de la première population
3.3.3 Questionnaire pour les élèves de la deuxième population
3.3.4 Le bilan introspectif et rétrospectif
3.4 Hypothèses
4. Déroulement de la ruse dans les deux conditions d’expérience 
4.1 Classe de 1ère-2ème HarmoS
4.1.1 Déroulement
4.1.2 Entretien
4.1.3 Bilan introspectif et rétrospectif
4.2 Classe de 5ème HarmoS
4.2.1 Déroulement
4.2.2 Questionnaire et discussion
4.2.3 Bilan introspectif et rétrospectif
5. Discussion
5.1 Confrontation entre procédure attendue et réalisée
5.2 Commentaires et analyse des élèves face à la ruse
5.3 Pertinence et efficacité de la ruse
5.4 Et si c’était à refaire
6. Conclusion

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