EVALUATION DES BESOINS EDUCATIFS DES PATIENTS DIABETIQUES DE TYPE 2

Maladies chroniques et diabète mondial

    Les maladies chroniques, aussi appelées maladies non transmissibles (MNT), sont des affections non contagieuses de longue durée qui en règle générale évoluent lentement. Il s’agit de toute une série de maladies qui ne sont pas transmises par un agent infectieux ou causées par un traumatisme. Le diabète, les maladies cardiovasculaires (telles que les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux), le cancer et les maladies respiratoires chroniques (telles que la pneumopathie chronique obstructive et l’asthme) sont les quatre MNT prioritaires identifiées par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). De par leur essor, les maladies chroniques représentent un nouveau défi de société à l’échelle mondiale. Elles sont la cause de 36 millions de morts par an et représentent plus de 60 % des décès dans le monde. Elles constituent donc la principale cause de décès dans la quasi-totalité des pays (1). Contrairement à l’opinion populaire, il est à présent bien établit qu’elles ne sont plus l’apanage des pays riches : 80 % des décès par maladies chroniques se produisent dans des pays à revenu faible et intermédiaire (1). On estime à 100 millions chaque année le nombre de personnes poussées à la pauvreté par le paiement des services de santé (1). Parmi ces maladies chroniques, la prévalence mondiale du diabète a quasiment quadruplé en 34 ans, passant de 108 millions de personnes atteintes en 1980 à 422 millions en 2014 (2) . Outre ces 422 millions d’adultes actuellement atteints de diabète, 318 millions d’adultes présentent une intolérance au glucose et donc un risque élevé de développer la maladie (3). D’après la Fédération Internationale du Diabète (FID), un adulte sur onze est à présent atteint de diabète. Si cette progression n’est pas arrêtée, 642 millions de personnes seront atteintes par cette maladie d’ici 2040, soit un adulte sur dix, avec une prévalence passant de 8,3 % actuellement, à 10,1 % de la population mondiale en 2040 (3).Ainsi, le diabète est actuellement considéré comme une des plus grandes crises de santé mondiale du XXIe siècle (3). Son expansion est qualifiée par les épidémiologistes de « première pandémie mondiale non infectieuse » (4). Le tribut à payer en terme de mortalité mondiale est catastrophique : en 2012, on estimait que 1,5 million de décès étaient directement dus au diabète et que 2,2 millions de décès supplémentaires pouvaient être attribués à l’hyperglycémie (2). En 2015, ce chiffre était estimé à 5 millions de décès dans le monde, soit un mort toutes les sept secondes, et les dépenses de soins de santé à 726 milliards d’euros par an (3 ; 5 ; 6).

Définition du diabète de type 2 (8)

    Le diabète est une maladie métabolique caractérisée par une hyperglycémie chronique (taux de glucose dans le sang trop élevé), résultant d’anomalies de l’action d’insuline appelée insulinorésistance et/ou d’une déficience de sécrétion d’insuline appelée insulinopénie. C’est une maladie d’installation progressive pouvant évoluer pendant de nombreuses années de manière asymptomatique. Le traitement repose sur des mesures hygiéno diététiques (alimentation et activité physique) qui peuvent être associées à des médicaments antidiabétiques oraux (ADO) et/ou à des médicaments injectables (insuline et/ou analogue du GLP-1). Le diabète de type 2 est défini par :
• une glycémie supérieure à 1,26 g/L (7 mmol/L) après un jeûne de huit heures et vérifiée à deux reprises ;
• la présence de symptômes de diabète (polyurie, polydipsie, amaigrissement) associée à une glycémie (sur plasma veineux) supérieure ou égale à 2 g/L (11,1 mmo/L) ;
• une glycémie (sur plasma veineux) supérieure ou égale à 2 g/L (11,1 mmol/L) deux heures après une charge orale de 75 grammes de glucose (critères proposés par l’OMS).
Le diabète de type 2 provoque des complications micro-vasculaires (rétinopathie, néphropathie et neuropathie) et macro-vasculaires (infarctus du myocarde, artérite et accident vasculaire cérébral). L’objectif du traitement du patient diabétique est d’obtenir un contrôle de la glycémie sur la durée afin de réduire la morbi-mortalité de cette pathologie.

Le contexte socio-économique

     Sur le plan social, la Guadeloupe est un département hors norme. D’après un rapport publié en 2017 par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la pauvreté concernait 81 300 individus en Guadeloupe en 2011, soit un taux de risque de pauvreté local de 20,1 %. Ce taux était le 3ème au niveau national, après la Guyane côtière (30,2 %) et la Martinique (20,6 %), il était plus élevé de 6 points que celui de la France hexagonale (16). Au dernier trimestre 2016, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) s’élève en moyenne annuelle à 24,4 %, soit la moyenne la plus haute au niveau national (17). Ce taux est largement plus élevé que celui observé dans l’Hexagone : 9,7 % à la même date (18). Au 31 décembre 2015, 86 300 personnes avaient recours aux minima sociaux, soit 21,8 % de la population guadeloupéenne (contre 5,7 % en métropole) (19). Au niveau éducatif, selon une étude du ministère de l’éducation, la part de jeunes de 18 ans en situation d’illettrisme définie selon les critères de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI) atteindrait 16,7 % en Guadeloupe en 2016 alors qu’il serait de 5,1 % pour l’ensemble de la France (DOM inclus) et de 4,3 % pour la France métropolitaine (20). Concernant la santé, le taux de bénéficiaires de la CMU-C en 2014 était de 24,3 % de la population pour 6,8 % en France métropolitaine (21).

L’éducation thérapeutique du patient

     Devant l’ampleur du problème de santé publique que représente le diabète, les réponses apportées par notre système de santé semblent encore insuffisantes. Pourtant la connaissance de cette maladie, de ses mécanismes physiopathologiques, des stratégies médicamenteuses à mettre en place aux différentes étapes de son évolution sont de mieux en mieux maitrisés. On peut donc s’interroger sur l’existence d’autres facteurs susceptibles d’interférer dans la gestion de cette maladie. En effet, il faut tenir compte du fait qu’une maladie ne se réduit pas à sa réalité organique : sa compréhension implique l’intégration de facteurs sociaux et psychologiques complexes. La démarche d’éducation thérapeutique apporte des éléments de réponse à ces préoccupations puisqu’elle consiste à écouter le patient, à prendre en compte ses représentations, ses connaissances, ses projets, puis à construire avec lui des solutions thérapeutiques qui lui soient adaptées. L’ETP a pour but de faire acquérir aux patients des compétences lui permettant de vivre le mieux possible sa vie avec sa maladie et son traitement. Elle change considérablement la relation soignant/patient dans la mesure où le malade devient un véritable acteur de son traitement et un partenaire des équipes soignantes. Il lui faut pour cela développer des compétences lui permettant de résoudre des problèmes quotidiens relativement complexes, sans tomber dans une routine démotivante ou la sensation de perte de liberté. L’acquisition et la mobilisation de ces compétences est possible avec l’aide pédagogique des soignants.

Le niveau de connaissance des patients sur le diabète

    Cette étude a mis en relief le très faible niveau de connaissance des patients diabétiques à propos de leur pathologie. Près d’un tiers des patients (30 %) a été incapable de répondre à la moindre question concernant le diabète et seulement quatre patients ont su le définir sans aucune aide de l’examinateur. Seuls six patients se sont vu attribuer un niveau jugé « bon » au score NCGD alors que 60 % n’ont pas eu la moyenne et que la médiane des réponses était à six, soit trois points en dessous de la moyenne. Deux tiers des patients ont déclaré n’avoir jamais entendu le terme « hémoglobine glyquée » ou « HbA1c » et seulement 37,1 % pouvaient citer en totalité leur traitement médicamenteux. Un tiers des patients présentant des complications cardio-vasculaires et ophtalmologiques en avaient conscience (certains patients ayant subi des amputations n’avaient pas fait de lien avec leur pathologie) alors que les complications neurologiques et rénales n’étaient quasiment jamais connues. Ce constat parait d’autant plus inquiétant que 47 % des patients de l’étude se considéraient comme suffisamment informés sur leur pathologie. Les différentes valeurs « médiocre, moyen, bon » du score NCGD n’ont pas pu être statistiquement corrélées à la fréquence des complications liées au diabète ni à l’équilibre glycémique des patients, probablement à cause du faible effectif de patients inclus dans notre étude, alors qu’une étude réalisée en 2013 par C. Fagour et al. a démontré le lien entre niveau de connaissance et équilibre glycémique : le score de connaissances sur le diabète étant inversement corrélé au taux de l’HbA1c (p=0,012) (45). Dans notre étude, le niveau de connaissance des patients évalué par le score NCGD était meilleur pour les patients ayant profité d’ETP, qui obtenaient une moyenne de 3,6 points supérieure à celle des patients n’en ayant pas bénéficié (p=0,049). Différentes études réalisées par S.Hamdi et al. ont souligné le fait qu’un faible niveau de connaissance de la pathologie diabétique pouvait être corrélé à un faible niveau d’instruction, ainsi qu’à une observance et une sensation de qualité de vie médiocres (46 ; 47). L’ETP a fait la preuve de son efficacité concernant le contrôle glycémique (réduction de l’HbA1c) et la gestion des traitements (48; 49), mais aussi, selon l’étude DESMOND, sur l’amélioration prolongée de la qualité des connaissances des patients, la prise de conscience du statut chronique de leur pathologie et du pouvoir du patient à intervenir pour effectuer les changements nécessaires à l’amélioration de son état de santé (50). Les résultats de notre étude tendent à montrer que cette capacité, ressentie par les patients, d’agir positivement sur leur diabète, est renforcée de manière parallèle à leur niveau d’étude, à leur niveau d’information et à la participation à un programme d’ETP. Ainsi, les trois patients ayant fait des études supérieures et deux tiers des patients ayant accédé au lycée se sentaient aptes à intervenir sur leur pathologie, contre un tiers seulement des patients ayant quitté l’école en primaire. Ce sentiment de pouvoir avoir un impact positif sur sa maladie était partagé par 78,8 % des patients se sentant suffisamment informés (versus 33,3 % se déclarant mal informés) et 71,4 % des patients ayant participé à un programme d’ETP (contre 45 % des patients n’en ayant pas bénéficié).

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Table des matières

INTRODUCTION
I. MALADIES CHRONIQUES ET DIABETE MONDIAL
II. MALADIES CHRONIQUES ET DIABETE EN FRANCE
A. MALADIES CHRONIQUES EN FRANCE (7)
B. DIABETE EN FRANCE
1. Définition du diabète de type 2 (8)
2. Epidémiologie du diabète en France
III. LE CONTEXTE GUADELOUPEEN
A. LE CONTEXTE DEMOGRAPHIQUE (15)
B. LE CONTEXTE SOCIO-ECONOMIQUE
C. DES FACTEURS COMPORTEMENTAUX PROPICES AU DEVELOPPEMENT DU DIABETE
D. EPIDEMIOLOGIE DU DIABETE EN GUADELOUPE
1. Une prévalence très élevée
2. Un sur-risque féminin
3. Une survenue plus précoce du diabète
4. Des facteurs de risques prépondérants
5. Une population diabétique moins favorisée économiquement
6. Le premier motif d’admission en affection de longue durée en Guadeloupe (26)
7. Un taux d’hospitalisation chez les diabétiques traités moins important (26)
8. Les complications
9. Une surmortalité liée au diabète (26)
E. LA DEMOGRAPHIE MEDICALE
IV. LE DIABETE AU CENTRE HOSPITALIER MAURICE SELBONNE
A. DESCRIPTION DE LA POPULATION DE PATIENTS DIABETIQUES AU CHMS
1. Méthode de recueil des données
2. Population des patients diabétiques au CHMS en 2016
V. L’EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT
A. DEFINITION, LEGISLATION, RECOMMANDATIONS
1. Définition
2. Cadre légal
3. Recommandations de la Haute Autorité de Santé (37)
B. LE PROTOCOLE GENERAL D’UN PROGRAMME D’ETP
1. Les compétences requises
2. Les niveaux d’éducation thérapeutique (34)
3. Le déroulement d’un programme d’ETP (34)
C. LES OBJECTIFS DE L’ETP (34)
1. L’acquisition des compétences d’auto-soins
2. L’acquisition des compétences d’adaptation
D. LES OFFRES D’EDUCATION THERAPEUTIQUE DES PATIENTS
1. En France
2. En région Antilles-Guyane
MATERIEL ET METHODE
I. OBJECTIFS DE L’ETUDE
II. METHODE
A. CONTENU DES QUESTIONNAIRES
1. Questionnaire patients (Annexe 1)
2. Questionnaires soignants (Annexe 2)
B. MODALITES D’ADMINISTRATION
C. LA POPULATION DE L’ETUDE
1. Les soignants
2. Les patients
D. METHODE D’ANALYSE
RESULTATS
I. QUESTIONNAIRE PATIENTS
A. DESCRIPTION DE L’ETUDE DU RECUEIL DE DONNEES SUR DOSSIER
1. La population de patients
B. DESCRIPTION DE LA SECONDE PARTIE DU QUESTIONNAIRE DEDIE AUX PATIENTS : RECUEIL PAR INTERROGATOIRE
1. Existence d’un suivi médical
2. Contexte socio-économique
3. Connaissances générales sur le diabète
4. Connaissances personnelles sur son diabète
C. UTILISATION DE LA VARIABLE « NIVEAU DE CONNAISSANCE GENERALE SUR LE DIABETE » (NCGD)
D. EVALUATION DU NIVEAU DE COHERENCE ENTRE LES DONNEES DU DOSSIER MEDICAL ET LES REPONSES DES PATIENTS
1. Les complications liées au diabète
2. Les comorbidités
3. Le critère biologique HbA1c
E. STATISTIQUES CROISEES
1. Capacité décisionnelle
2. Hémoglobine glyquée (HbA1c)
3. Le score NCGD
4. Le suivi médical
II. QUESTIONNAIRE SOIGNANTS
A. DESCRIPTION DE LA POPULATION
B. REPONSES AU QUESTIONNAIRE
1. Evaluation de la connaissance de l’ETP
2. Evaluation de la perception qu’ont les soignants des patients diabétiques
3. Evaluation de la faisabilité de l’ETP au CHMS
C. STATISTIQUES CROISEES
DISCUSSION
I. LA REALISATION DE L’ETUDE
A. LE CHOIX DE LA METHODE
B. ETENDUE ET TAUX DE REPONSE
C. LA FORME DES QUESTIONNAIRES
1. Le questionnaire patient
2. Le questionnaire soignant
D. LE CONTENU DU QUESTIONNAIRE
E. LE MODE D’ADMINISTRATION DES QUESTIONNAIRES
F. LES BIAIS DE L’ETUDE
G. L’ORIGINALITE DE L’ETUDE
II. LES RESULTATS DE L’ETUDE
A. REPRESENTATIVITE DES POPULATIONS INCLUSES DANS L’ETUDE
1. Représentativité des patients
2. Représentativité des soignants
B. LE NIVEAU DE CONNAISSANCE DES PATIENTS SUR LE DIABETE
C. BESOINS PERSONNELS EN EDUCATION THERAPEUTIQUE
D. CONNAISSANCE DES SOIGNANTS EN ETP
E. FAISABILITE DE L’ETP EN SERVICE DE MPR AU SEIN DU CHMS
F. PERSPECTIVES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
SERMENT D’HIPPOCRATE
ANNEXES

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