Transition des patients entre le milieu de soins et le milieu de travail

ÉVALUATION DE L’ACTIVITÉ DE TRAVAIL 

DISCUSSION

Les résultats de notre enquête réalisée auprès d’un large échantillon de centres de MPR français montrent que les difficultés de maintien en emploi concernent la majorité des patients participant aux programmes de RAE. Cependant, les patients inclus dans ces programmes sont probablement adressés lorsque la situation professionnelle devient préoccupante, suite à des arrêts de travail de longue durée ou répétés; ce qui pourrait expliquer que la majorité des patients participant aux programmes rencontrent des difficultés de maintien en emploi. Le recueil des données relatives à la situation professionnelle des patients lombalgiques chroniques inclus dans ce type de programme est, le plus souvent, réalisé lors d’un entretien individuel, au moment de l’inclusion dans le programme, par le médecin de MPR ou l’assistante sociale de l’équipe. Les informations concernant les tentatives de retour au travail, les aménagements de poste et les éventuels obstacles au maintien/retour en emploi sont abordées avec le patient au cours de cet entretien ou pendant le programme. Pourtant, peu de centres adaptent le contenu du programme après analyse de ces données professionnelles.

En effet, un peu moins d’un tiers des centres proposent un programme de réadaptation au travail, malgré le partenariat de certaines structures avec l’association Comète France et ce, par manque de temps ou de moyens humains. Les principales actions mises en place dans les programmes en vue du retour au travail se font par l’intermédiaire du patient (adressage vers le médecin du travail ou une assistante sociale, envoi d’un courrier au médecin du travail) sans contact direct avec le milieu professionnel. Enfin, très peu de centres proposent une visite du poste de travail en vue d’une action concertée sur le lieu de travail. Les échanges avec la médecine du travail pour les questions relatives à la situation professionnelle des patients-travailleurs sont jugés difficiles par plus de la moitié des professionnels des centres qui mettent en avant des obstacles médico-légaux ou le manque de disponibilité. Parallèlement, presque la moitié des enquêtés estime que les informations données par le médecin du travail, lorsqu’il adresse un patient, sont insuffisantes, par manque de précisions sur les contraintes de travail ou sur les éléments du contexte social. Aussi, afin de favoriser la transition entre le milieu de soins et le milieu de travail, les référents interrogés proposent une collaboration plus étroite avec les services de médecine du travail des entreprises. La complexité du processus de désinsertion professionnelle des patients-travailleurs lombalgiques chroniques nécessite une prise en charge pluriprofessionnelle pour un retour au travail réussi et durable au sein de l’entreprise (19,20). La collaboration des acteurs du retour en emploi favorise le processus de réadaptation.

Concernant le bénéfice d’avoir un médecin ou un ergonome dans l’équipe de prise en charge afin de faciliter les échanges avec la médecine du travail en entreprise, les résultats sont proches de la significativité. Aussi, on peut imaginer que la puissance du test aurait été plus grande avec un nombre de centres plus important et qu’un lien aurait pu être mis en évidence entre la facilité de l’échange avec la médecine du travail et la présence d’un médecin du travail ou d’un ergonome dans l’équipe de prise en charge rééducative. En effet, d’une part, la présence d’un médecin du travail ou d’un ergonome dans l’équipe pluridisciplinaire implique très probablement une meilleure considération des facteurs professionnels favorisant la chronicité et l’incapacité prolongée liés à la lombalgie; la prise en compte de ces éléments étant indispensable pour favoriser un retour au travail efficace et durable (21). Et d’autre part, la formation initiale et les réseaux collaboratifs des médecins du travail et des ergonomes facilitent sûrement l’initiative et la démarche de mise en relation avec le médecin du travail du patient pour l’échange de ce type d’informations.

Finalement, notre étude met en évidence que le temps consacré à la mise en place d’une action en milieu professionnel reste limité dans le cadre du programme de RAE et ce, même si les questions relatives au travail sont abordées précocement. Or, l’intérêt de la mise en place d’une intervention ergonomique sur le lieu du travail a largement été démontré pour favoriser le processus de retour au travail (14,22-25). Ainsi, le modèle de Sherbrooke qui fait référence pour la prise en charge préventive de l’incapacité au travail, propose avec l’accord des entreprises, un repérage précoce des salariés en arrêt de travail du fait de lombalgies. Une intervention d’ergonomie participative sur le lieu du travail est alors débutée. L’équipe d’intervention est composée du salarié, d’un ergonome, d’un collègue de travail et du supérieur hiérarchique du travailleur. Après concertation, les aménagements de poste sont alors proposés à l’employeur qui décide de suivre partiellement, totalement ou de ne pas suivre les recommandations. L’efficacité du modèle de Sherbrooke a été démontrée et l’importance de l’implication de tous les acteurs du retour au travail a été soulignée (5,14,22). Par ailleurs, notre enquête met en évidence un consensus entre les référents des programmes de RAE sur la nécessité d’une prise en charge plus précoce des patients lombalgiques chroniques. Ce principe est également un des piliers du modèle de Sherbrooke (26).

La majorité des patients pris en charge dans les programmes de RAE ne sont pas adressés par le médecin du travail, mais plutôt par le médecin traitant ou un médecin spécialiste du rachis. Il est pourtant recommandé au médecin du travail d’évaluer les facteurs pronostiques d’une incapacité prolongée en cas de lombalgie persistante ou récidivante, lors des différentes visites avec le salarié (27), permettant ainsi d’identifier des sous-groupes de personnes à risques de chronicisation et d’incapacité prolongée (28-30)et de proposer une prise en charge adaptée. En effet, pour la plupart des soignants, le retour au travail est perçu comme le résultat de la prise en charge médicale et fonctionnelle. C’est pourquoi les soignants sont considérés comme des acteurs importants de la préparation au retour au travail d’un travailleur blessé.

D’une manière générale, les soignants ont pour objectif la reprise d’activité (y compris professionnelle) de leurs patients, mais ils souhaitent que cela puisse se faire sans compromettre leur santé ni réduire leurs droits aux soins (31). Les professionnels de santé au travail bénéficient d’une formation spécifique sur l’incapacité au travail et peuvent avoir un objectif explicite de retour au travail pour leurs patients(32). Ainsi, à l’instar du modèle de Sherbrooke au Québec, on pourrait imaginer un parcours formalisé pour les travailleurs lombalgiques en France afin d’éviter un délai trop important, et potentiellement délétère, avant la prise en charge dans les programmes de RAE pour ces patients (33). Une étude de Fassier et al. montre que l’implantation en France d’un programme équivalent au modèle de Sherbrooke serait envisageable sous couvert de certaines adaptations du système français (34). Il faut cependant rester prudent quant à la généralisation d’un tel programme qui peut ne pas être adapté à toutes les situations (35). Le questionnaire de notre enquête a été réalisé par un groupe pluriprofessionnel sensibilisé au travail en réseau interdisciplinaire, incluant les professionnels du milieu de travail.

Cette particularité a pu constituer un biais pour le sondage de centres n’ayant pas ce type de pratique en routine. De plus, afin de faciliter le recueil de l’ensemble des données concernant les programmes de RAE, notre questionnaire s’adressait aux personnes référentes des programmes qui sont, dans la majorité des cas, des médecins rééducateurs. De ce fait, on peut s’interroger sur l’exhaustivité des éléments concernant les échanges avec le milieu de travail qui est régulièrement réalisé par d’autres intervenants. Des résultats complémentaires auraient sans doute pu être obtenus par le sondage des différents intervenants des programmes de RAE. Cependant, il est à supposer que les référents des programmes qui ont répondu à l’enquête étaient au fait des actions menées par leurs collaborateurs. De même, nous avons principalement évoqué l’échange avec l’entreprise par l’intermédiaire du médecin du travail. Or, le contact avec le monde du travail peut également avoir lieu avec d’autres acteurs.

CONCLUSION-PERSPECTIVES

Les résultats de ce travail soulignent que l’analyse de la situation professionnelle et des obstacles au retour au travail se fait majoritairement sans contact direct avec le monde de l’entreprise. Or, le succès des interventions de retour au travail repose notamment sur la coordination des prises en charge par les professionnels du champ médical et socioprofessionnel dont les objectifs doivent être partagés avec le travailleur lui-même et l’entreprise. Ce manque de coopération et d’échange d’informations est probablement lié à des divergences de « représentations » de la situation du patient-travailleur par les différents acteurs du retour au travail qui le perçoivent comme un patient ou un salarié. La construction d’un référentiel commun entre les acteurs du champ médico-social et de l’entreprise concernant les capacités fonctionnelles du travailleur, la situation de travail « réelle » dans l’entreprise, ainsi que les obstacles et facilitateurs au retour au travail permettrait d’améliorer la cohérence des pratiques et de potentialiser leur efficacité dans un objectif commun.

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Table des matières

LISTE DES ABREVIATIONS
RESUME
INTRODUCTION
MÉTHODES
RÉSULTATS
Programmes de réadaptation à l’effort
Recueil des données relatives à la situation professionnelle
Echange entre les centres de MPR et la médecine du travail
Transition des patients entre le milieu de soins et le milieu de travail
DISCUSSION ET CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
TABLE DES MATIERES
ANNEXES

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