Etude par photoémission résolue en angle et en spin de Mn5Ge3/Ge(111) en couches minces

Electronique de spin : électronique et magnétisme

   L’électronique traditionnelle est basée sur l’utilisation des semi conducteurs et repose essentiellement sur une propriété de l’électron, sa charge. Dans les dispositifs électroniques classiques, la charge des électrons est utilisée pour capter, transmettre et exploiter les informations. Mais au-delà de sa charge, chaque électron possède un moment magnétique, le spin. Cette caractéristique qui était totalement ignorée dans la microélectronique classique donne lieu à des phénomènes physiques qui offrent des perspectives intéressantes dans la réalisation d’une nouvelle classe de composants beaucoup plus performants, que cela soit au niveau de la fonction, de la rapidité et de la consommation d’énergie. C’est en ce sens que la « spintronique » suscite un grand intérêt dans la communauté scientifique, comme évolution de l’électronique traditionnelle. Ces innovations reposent sur la capacité de mesurer et de contrôler la dynamique des spins individuels dans un dispositif électronique. Les origines de la spintronique remontent à la découverte du couplage d’échange entre deux couches ferromagnétiques séparées par une couche non magnétique [Gruenberg86] et à la découverte de la magnétorésistance géante dans des multicouches Fe/Cr en 1988 par deux équipes indépendantes, celle d’Albert Fert del’Université de Paris Sud – Orsay, et celle de Peter Gruenberg du centre de recherche de Juelich en Allemagne [Baibich88, Binash89]). Neuf ans plus tard, IBM commercialise lepremier disque dur utilisant cette technologie permettant un formidable bond en avant en termes de capacité de stockage (multipliée par un facteur 1000 en trois ans). L’application industrielle la plus utilisée de la spintronique est ce qu’on appelle une vanne de spin. Ce dispositif utilise les propriétés de la magnétorésistance géante d’un empilement de certains matériaux, et constitue un bon exemple de l’utilisation du spin des électrons. Cependant d’autres applications ont vu le jour et sont en voie de commercialisation. Par exemple les composantes tels que des mémoires MRAM (pour Magnetic Random Access Memory) permettent de stocker de l’information de manière non volatile grâce au même type d’empilement, mais en remplaçant la couche non magnétique par une couche d’isolant. On obtient alors une jonction tunnel magnétique dont l’état permet de stocker un bit d’information. L’intégration de la spintronique à la technologie des semi-conducteurs suscite depuis ces dernières années une vive activité de recherche. Cela a ouvert un champ de possibilités bien plus vaste, comme par exemple la réalisation de transistors à spin tels que la SpinLED (SpinLight Emitting Diode). Il y a bien d’autres applications imaginables lorsqu’on associe la spintronique à la technologie des semi-conducteurs, par exemple la proposition théorique du composant SpinFET (Spin Field Effect Transistor) par Datta et Das [Datta90]. La réalisation de telles structures nécessite de surmonter certains problèmes physiques importants. Il faut donc établir quels sont les composés les plus prometteurs pour la réalisation de dispositifs spintroniques.

Les semi-conducteurs magnétiques

   Un semi-conducteur magnétique idéal serait un matériau qui aurait une température de Curie Tc élevée, une polarisation de spin de 100% et pourrait être directement épitaxiable sur le silicium. Deux approches différentes peuvent permettre l’élaboration de ce genre de matériaux. La première consiste à utiliser des alliages qui ont ce genre de propriété, comme par exemple les chalcogénures de chrome (CdCr2Se4, CuCr2S4) ou d’europium (EuS, EuSe) et certaines manganites, qui comportent un nombre important d’atomes magnétiques, ce qui fait d’eux des semi-conducteurs magnétiques « concentrés ». Cette catégorie de matériaux est intéressante car elle est constituée de composés stables. Cependant, ils sont difficilement intégrables à la filière des semi-conducteurs actuels dominée par le silicium. La deuxième voie est orientée vers l’utilisation des semi-conducteurs magnétiques dilués (DMS), c’est-à-dire un semi-conducteur dans lequel on a substitué une fraction des atomes originaux par des atomes magnétiques. Cette opération conduit à la formation d’un nouveau matériau combinant des propriétés à la fois semi-conductrices et magnétiques. Un matériau DMS susceptible de donner lieu à des applications doit être ferromagnétique à température ambiante. Les premiers travaux sur les DMS ont porté sur les composés de type II VI à base de Mn tels ZnMnS, ZnMnSe, ZnMnTe, …). Dans ces composés, les métaux de transition présentent une propriété de bonne solubilité dans la matrice semi-conductrice. En effet, des valeurs de solubilité de 80% [Hwang94] ont été prédites pour la dissolution de Mn dans la matrice de ZnTe et CdTe. Cependant, ces composés présentent des couplages antiferromagnétiques. La recherche s’est ensuite orientée vers d’autres classes de DMS de type III-V comme GaMnAS, InMnAs, etc., matériaux dans lesquels la solubilité de l’élément magnétique est plus faible. Ces composés présentent une température de Curie pouvant atteindre 150 K [Ku03], donc bien inférieure à la température ambiante. Des prédictions théoriques [Dietl01], basées sur le modèle de Zener, ont permis d’orienter la recherche vers certains composés

Structure électronique de Mn5G3

   Dans la littérature, peu d’études théoriques ont été menées sur les propriétés électroniques du Mn5Ge3. Le groupe de Picozzi a effectué des calculs de structure de bandes détaillés en utilisant la DFT [Picozzi04]. Ces calculs ont permis une meilleure compréhension de la structure électronique et des interactions magnétiques de ce système. D’après l’analyse des pics des différents atomes qui sont situés aux mêmes énergies, Picozzi et al. ont déterminé un certain nombre de correspondances :
– les caractéristiques de Mn1 à -0,7 eV et entre -2 et -3 eV sont dues aux interactions Mn1- Mn1
– les structures entre -1 et -2 eV sont attribuées aux interactions Mn1- Mn2
– les caractéristiques du Mn2 situés entre -3,5 et -2,5eV sont dues aux interactions Mn2 -Mn2. Pour les énergies de liaison élevées (< -3,5 eV), c’est l’hybridation des atomes de Mn et des atomes de Ge qui prédomine. De la même manière, les états minoritaires à haute énergie de liaison (< -1,3 eV) présentent des caractéristiques communes à Mn1, Mn2 et Ge alors que les structures entre -1 et -0,5 eV résultent de l’hybridation Mn1-Mn2. Pour les états inoccupés, c’est la contribution des spins minoritaires qui prédomine. La différence entre Mn1 et Mn2 est faible pour ces états. Dans notre groupe de recherche, d’importantes études ont déjà été faites sur le DMS Mn1-xGex et sur des nanocristaux Mn5Ge3 dans la matrice du DMS Mn0,06Ge0,94.

Magnétisme de Mn5Ge3

   Bien que les orientations et les valeurs des moments magnétiques des atomes dans des positions définies n’étaient pas connues, quelques suggestions étaient faites concernant la structure magnétique de Mn5Ge3. Entre 400 K à plus de 1000 K, Fontaine et Pauthenet [Fontaine62] ont obtenu une courbe représentant l’inverse de la susceptibilité magnétique en fonction de la température qui est caractéristique d’une substance paramagnétique ayant un seul type de moment magnétique. De la non-linéarité de cette fonction au voisinage du point de Curie, ils déduisent que deux types de moments peuvent exister, ce qui est également soutenu par l’existence de deux sous-réseaux cristallins. Ils pensent que le résultat obtenu peut être expliqué par l’alignement parallèle ainsi que l’alignement antiparallèle des moments. Un moment ferromagnétique moyen de 1,85 µB par atome de manganèse était déduit de l’aimantation à saturation à 0 K. Leurs mesures ont donné un point de Curie de 293 K. Kanematsu [Kanematsu62] a montré que Mn5Ge3 présente un ferromagnétisme fort avec un point de Curie à 304 K et un moment ferromagnétique par atome de manganèse de 2,49 mB (le moment calculé à 0 K étant 2,4 mB). De la forme de la courbe représentant l’inverse de la susceptibilité en fonction de la température Kanematsu concluait que les spins de manganèse dans les deux sous-réseaux peuvent être parallèles. Castelliz [Castelliz55] trouvait pour ce moment la valeur de 2,5 mB et pour la température de Curie 320 K, alors que les valeurs mesurées par Ciszewski [Ciszewski63] sont 2,35 mB et 300 K respectivement. Le moment ferromagnétique moyen de saturation correspond à 2,6 µB/atome de Mn. Les moments magnétiques individuels des atomes Mn1 et Mn2 ont été déterminés par diffraction de neutrons [Forsyth 90] et sont respectivement de 1,96 µB et 3,23 µB. La valeur faible du moment magnétique porté par le Mn1 est attribuée aux interactions directes Mn1-Mn1 qui apparaissent à courte distance [Picozzi04, Stroppa06]. En outre, il a été montré par l’expérience et la théorie que tous les moments des atomes de Mn sont orientés le long de l’axe cristallographique c [Forsyth90, Picozzi04]. Pour une couche mince de Mn5Ge3 déposée sur Ge(111) et sur GaAs(111) Panguluri et al. ont trouvé une polarisation de spin de (42 ± 5) % avec des mesures de Point-Contact Andreev Reflection (PCAR) et (35 ± 5) % par des calculs DFT [Panguluri05]. Une polarisation de (15±5) % a été mesurée au niveau de Fermi avec une ouverture angulaire de détection de 12°, par Dedkov et al. en SRPES. La Fig. I-12 montre les spectres de la bande de valence obtenus par Dedkov et al. Des résultats expérimentaux et théoriques récents indiquent que Mn5Ge3 possède un comportement ferromagnétique et métallique avec des spins non-colinéaires [Zeng03, Stroppa 06]. Il est important à ce stade de rappeler que pour le composé Mn5Si3 massif, une transition magnétique d’un état de spin antiferromagnétique non-colinéaire à basse température à un état de spin colinéaire à haute température apparait à une température de 66 K [Forsyth92]. Cette transition est accompagnée d’un désordre partiel des moments magnétiques portés par Mn1 et Mn2. Un scénario identique permettrait d’expliquer le comportement non-colinéaire des spins portés par le Mn1 et Mn2 dans le composé de Mn5Ge3.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction et motivation
1 Electronique de spin : électronique et magnétisme
2 Les semi-conducteurs magnétiques
I :Structure atomique, électronique et magnétique de Mn5Ge3
1.1 Structure cristallines de Mn5Ge3
1.2 Couche mince de Mn5Ge3 sur Ge(111)
1.3 Structure électronique de Mn5Ge3
1.4 Magnétisme de Mn5Ge3
II: Techniques expérimentales
2.1 Configuration expérimentale
2.2 Diffraction d’électrons lents
2.3 Spectroscopie Auger
2.4 La photoémission
2.4.1 Introduction historique
2.4.2 Principe
2.4.3 Le libre parcours moyen du photoélectron
2.4.4 Approche à une étape
2.4.5 Modèle à trois étapes
2.4.6 Influence de la surface
2.4.7 Détermination de k^
2.4.8 Approche à N électrons
2.5 Photoémission résolue en spin
2.5.1 Principe de fonctionnement d’un détecteur de Mott
2.5.2 Méthode pratique de détermination de la polarisation
2.6 Spectroscopie d’absorption des rayons X
2.6.1 Principe
2.6.2 Formalisme de l’EXAFS
2.6.3 Dichroisme circulaire magnétique des rayons X
2.6.4 Effet d’atténuation du signal magnétique
III: Calculs de bande et simulations de la photoémission
3.1 Calcul de structure électronique
3.1.1 Approche générale
3.1.2 Théorie de la fonctionnelle de la densité
3.1.2.2 L’approximation de la densité locale
3.1.2.3 L’approximation du gradient généralisé
3.1.2.4 Energie d’échange-corrélation
3.1.2.5 L’approche des pseudo-potentiels
3.2 Structure électronique de Mn5Ge3
3.3 Simulation des spectres de photoémission
IV: Elaboration et caractérisation des échantillons
4.1 Solid Phase Epitaxy
4.2 Elaboration des films de Mn5Ge3
4.2.1 Préparation du substrat
4.2.2 Dépôt
4.3 Microscopie électronique en transmission
4.4 Spectroscopie des niveaux de cœur du germanium
4.4.1 Déplacement chimique des niveaux de cœur
4.4.2 Photoémission des niveaux internes Ge 3d
4.5 Spectroscopie de photoélectron des niveaux de cœur Mn 3s
4.6 Spectroscopie d’absorption
4.6.1 EXAFS
4.6.1.1 Rappel de la structure de Mn5Ge3
4.6.1.2 Utilisation de la polarisation de la lumière
4.6.1.3 Soustraction du signal et transformée de Fourier
4.6.1.4 Simulation, ajustement et discussion
4.6.2 Caractérisation magnétique du Mn5Ge3
4.6.2.1 XMCD
4.6.2.2 Cycle d’hystérésis et aimantation à saturation
4.6.2.3 Effet de la température
V: Analyse des résultats d’ARPES
5.1 Discussion qualitative des spectres
-Résonances
-Pics du second ordre
-Comparaison avec la littérature
-Première comparaison avec la théorie
5.2 Emission normale : détermination du potentiel interne
5.3 Comparaison avec des spectres simulés
-Point de haute symétrie G et A
-Ligne de haute symétrie GM et AL
-ARPES dans le plan GAHK
-Surface iso-énergie
-Conclusion
VI: Photoémission angulaire résolue en spin
6.1 Détails expérimentaux
6.2 Emission normale
6.3 Emission hors normale
Conclusion

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *