Etude et réalisation d’un spectromètre compact en optique intégrée sur verre

Le 2 février 1891, Gabriel Lippmann présentait une invention révolutionnaire pour l’époque, la photographie en couleurs par la méthode interférentielle [1]. Cette invention allait lui valoir, en 1908, l’obtention du prix Nobel de physique pour avoir démontré expérimentalement le caractère ondulatoire de la lumière [2]. Pour montrer ce phénomène, Lippmann a travaillé pendant 5 ans sur la réalisation d’un appareil composé d’une plaque photosensible, composée de sels d’argent, associée à un miroir afin de former des ondes stationnaires. Il a choisi un miroir de mercure pour éviter les réactions possibles qu’il y aurait eu avec un miroir en argent. L’observation de la photographie se faisait ensuite en noircissant le dos de la plaque et en l’éclairant avec une lumière blanche. Les différentes couleurs, ou longueurs d’onde, présentes initialement dans l’objet photographié étaient alors réfléchies par la plaque alors que les autres la traversaient. En 1892, Lippmann fait sensation à l’exposition internationale de Paris, où il montre différentes photographies en couleur représentant un vitrail, un perroquet empaillé, un groupe de drapeaux et un plat d’oranges. Toutefois ses plaques présentent un inconvénient majeur : on ne peut les regarder que sous un certain angle. Un autre inconvénient de taille est la très faible sensibilité de sa plaque. Le temps de pose est d’environ une heure, ce qui n’autorise à faire que des natures mortes. Lippmann doit donc travailler pour améliorer ce point. Il réussira à améliorer son invention en réduisant les temps de pose à une minute, mais cela reste toutefois long pour réaliser des photographies. Le procédé est complexe et coûteux et il est impossible de faire des copies, rendant une industrialisation très difficile.

Ainsi en 1908, au moment où il reçoit la plus haute distinction scientifique, Lippmann sait que son procédé est condamné, même si sa théorie physique reste une des grandes et élégantes découvertes du XIXème siècle. Il ne se doutait pourtant pas qu’un siècle plus tard, ses travaux seraient repris dans le domaine de la spectrométrie… En effet, le projet SWIFTS (Stationary Waves Integrated Fourier Transform Spectrometer), initié par Etienne le Coarer et Pierre Benech, a pour but de développer un spectromètre intégré en utilisant le procédé de Lippmann. Pour développer ce dispositif innovant, un consortium du nom de SWIFTS 400-1000 a été créé par Floralis. Il regroupe plusieurs acteurs qui mettent en commun leur savoir faire. Ainsi le LAOG (Laboratoire d’Astrophysique de l’Observatoire de Grenoble) apporte ses compétences en matière de caractérisation expérimentale et réduction de données. L’IMEP-LAHC et le LNIO s’occupent principalement de la modélisation du dispositif. La fabrication des dispositifs est confiée à Teem Photonics, qui fabrique des guides d’onde optiques sur verre, et au LTM (Laboratoire des Technologies de la Microélectronique) qui réalise des nanotraits sur les guides d’onde. Enfin l’entreprise E2V fabrique des capteurs CCD et les colle sur les puces optiques.

Spectromètres à réseaux

Il existe de nombreuses configurations utilisant des réseaux en optique intégrée. Le principe de base de ces spectromètres est d’envoyer la lumière à analyser sur un réseau. Elle va ainsi diffracter dans des directions bien précises qui dépendent de la longueur d’onde et de l’angle incident. Nous allons dans un premier temps décrire le principe général des spectromètres à réseau avant de regarder quelques exemples de spectromètres intégrés.

Principe du spectromètre à réseau

Un réseau est constitué d’un ensemble d’éléments dispersifs identiques et équidistants. La distance entre deux éléments voisins est la période (ou pas) du réseau que l’on notera a. Le nombre total d’éléments éclairés (noté N) est une autre caractéristique importante du réseau. En supposant que le réseau est éclairé par un faisceau parallèle faisant un angle i0 avec la normale au réseau  , la lumière diffractée interfère constructivement dans des directions bien particulières, faisant un angle i avec la normale.

Réseau en transmission 

D. Sander et J. Müller [4] ont développé un spectromètre en SiON fonctionnant dans la gamme 350-650nm. La lumière, injectée dans un guide plan, se réfléchit sur des miroirs diélectriques avant d’être diffractée par un réseau. La figure de diffraction est récupérée par une barrette de photodétecteurs dans l’ordre 1. La résolution de ce spectromètre est limitée par la largeur de la fente d’entrée et atteint ici 10nm.

Réseau en réflexion 

Certains spectromètres intégrés fonctionnent avec un réseau utilisé en réflexion, comme celui développé par J. Mohr, B. Anderer et W. Ehrfeld [5]. Ici la lumière est amenée par fibre optique dans un guide d’ondes plan. Celle-ci se disperse sur un réseau se situant à l’autre extrémité du guide. La lumière réfléchie est alors recueillie par une nappe de fibres, chaque fibre guidant une longueur d’onde particulière déterminée par la diffraction du réseau. La lumière collectée par les fibres est ensuite envoyée sur des photodétecteurs. Ce spectromètre mesure 18×6,4mm² et fonctionne dans la gamme de longueurs d’onde 720-900nm. La résolution, ici limitée par le nombre de fibres de sortie utilisé, est de 10, soit une erreur sur la longueur d’onde variant de 72 à 90nm.

Grabarnik a proposé d’associer deux réseaux pour concevoir un microspectromètre [6]. Ces deux réseaux sont gravés à la surface d’un substrat de verre, et un système de miroirs permet d’acheminer la lumière vers un photodétecteur de type CCD . Le rôle du premier réseau est de disperser les différentes composantes spectrales de la lumière, le deuxième réseau permet d’imager la lumière sur le CCD, supprimant ainsi le besoin d’éléments optiques. Ce spectromètre très compact, mesurant 3x3x11 mm, est monté directement sur le capteur CCD. Il est conçu pour mesurer des spectres dont les longueurs d’onde sont comprises entre 450 et 750 nm et atteint une résolution de 3nm, ce qui en fait un appareil performant pour sa taille.

Enfin on peut citer les microspectromètres commerciaux. Prenons par exemple le cas du MS series C10988MA conçu par Hamamatsu. Celui-ci est extrêmement compact, avec des dimensions valant 27,6x13x7,8 mm3 pour une masse de seulement 9 grammes. Sur ce modèle, le réseau de diffraction est gravé par nanoimpression [7] sur une lentille. La lumière, entrant par une fente, est ensuite dispersée sur un capteur CMOS. Ce microspectromètre permet une résolution spectrale de 12 nm sur la gamme de longueurs d’onde allant de 340 à 750 nm.

Réseau en diffraction 

Certains microspectromètres présentent des réseaux gravés dans le substrat ou le superstrat. C’est par exemple le cas du spectromètre développé par I. Avrutsky, K. Chaganti, I. Salakhutdinov et G. Auner [8]. La lumière, après avoir traversé un échantillon à analyser, est injectée dans un guide plan sur verre à l’aide d’une lentille. Un réseau est gravé dans une couche de silice constituant le superstrat. La lumière diffractée est alors collectée par une lentille collée au système de manière à être imagée sur une caméra. Cet appareil, long d’environ 2cm, atteint une résolution maximale de 0,2nm à une longueur d’onde de 640nm, pour une gamme de longueur d’onde de 200nm. Ici le facteur limitant la résolution est la lentille qui récupère la lumière diffractée, dont les aberrations fixent la largeur des raies observées. La résolution atteinte est supérieure aux dispositifs vus précédemment. Toutefois la compacité du spectromètre est moindre, puisque la mesure est déportée sur une caméra.

Un autre exemple, mis au point par D. Goldman, P. White et N. Anheier [9], utilise un réseau disposé cette fois-ci dans le substrat du guide. Ce spectromètre a également été conçu pour des analyses chimiques. La lumière est injectée dans un guide plan à l’aide d’un réseau. La solution à analyser sert de superstrat. Cette solution va influencer les paramètres de guidage de la lumière, notamment son indice effectif de propagation. Un réseau similaire au premier se trouve à la sortie. La lumière va ainsi diffracter dans le substrat jusqu’à un détecteur, et la position des raies obtenues permet de remonter à l’indice de réfraction de la solution inconnue. Les indices de réfraction mesurés ont une grande précision de l’ordre de 4.10⁻⁶.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 L’optique intégrée et la spectrométrie
1.1 Spectromètres à réseaux
1.1.1 Principe du spectromètre à réseau
1.1.2 Réseau en transmission
1.1.3 Réseau en réflexion
1.1.4 Réseau en diffraction
1.2 Spectromètres à transformée de Fourier
1.2.1 Principe de base
1.2.2 Spectromètre de Michelson intégré
1.2.3 Utilisation de la technologie MEMS
1.2.4 Utilisation de l’optique intégrée
1.3 Vers un spectromètre compact à haute résolution : le SWIFTS
1.3.1 Effet Lippmann
1.3.2 Configuration de type Lippmann
1.3.3 Configuration de type Gabor
1.3.4 Détection par supraconducteurs
1.3.5 Utilisation de plots diffractants
1.3.6 Reconstitution du spectre par transformée de Fourier et résolution
1.3.7 Echantillonnage de l’onde stationnaire
1.3.8 Technologies possibles
1.4 Comparaisons avec les spectromètres existants
1.4.1 Spectromètres à réseau
1.4.2 Spectromètres à transformée de Fourier
1.4.3 Comparaison globale avec les autres spectromètres
1.5 Conclusion
Chapitre 2 Modélisation du SWIFTS
2.1 Aperçu des méthodes numériques existantes
2.1.1 Différences finies dans le domaine temporel
2.1.2 Méthode de propagation d’ondes
2.1.3 Méthode modale de Fourier
2.2 Description de l’AFMM
2.2.1 Etablissement de l’équation de propagation
2.2.2 Résolution dans l’espace de Fourier
2.2.3 Les PML à transformée de coordonnées complexes
2.2.4 Modélisation de la propagation
2.2.5 Convergence de la méthode
2.3 Etude de la diffraction d’un plot
2.3.1 Quantité d’énergie à prélever
2.3.2 Choix du matériau pour le plot
2.4 Modélisation de la cascade des plots
2.4.1 Etablissement de la matrice S relative à un plot
2.4.2 Transformation de la matrice S en matrice cascadable
2.4.3 Prise en compte du miroir
2.4.4 Etablissement de la matrice S relative à la structure globale
2.4.5 Comparaison entre l’algorithme S et l’AFMM
2.4.6 Reconstitution de spectre
2.4.7 Optimisation de la structure
2.5 Conclusion
Chapitre 3 Validation expérimentale
3.1 Description du banc de caractérisation
3.2 Mesures monochromatiques
3.2.1 Traitement des données
3.2.2 Interférogrammes et spectres reconstruits
3.2.3 Etude de reproductibilité
3.3 Mesures en sous-échantillonnage
3.3.1 Mesures à longueur d’onde constante
3.3.2 Mesures d’une source accordable
3.4 Mesure d’un spectre large bande
3.5 Conclusion
Conclusion  
Perspectives
Annexe A. Matrice de passage entre sections adjacentes
Annexe B. Matrice de passage entre sections d’entrée et de sortie

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