Etude et développement de sources laser XUV

Les lasers à électrons libres

   Le « Laser à Electrons Libres » (LEL) [3, 4], ou synchrotron de quatrième génération se distingue du laser traditionnel par son milieu amplificateur. Celui-ci est composé d’une suite de paquets d’électrons relativistes produits par un accélérateur de particules. Les électrons arrivent ensuite dans une structure magnétique périodique permanente appelée « onduleur ». Sous l’effet du champ magnétique, ils acquièrent une vitesse transverse et émettent alors spontanément un rayonnement appelé rayonnement synchrotron. Durant l’interaction entre le faisceau d’électrons et l’onde électromagnétique ainsi obtenue, le paquet d’électrons est modulé longitudinalement de façon à mettre en phase les trains d’onde émis par chaque électron, créant ainsi la cohérence de la source. L’échange d’énergie s’accompagne finalement d’une amplification conduisant à l’effet laser. L’intérêt du LEL réside dans le fait que toute longueur d’onde peut être, en principe, amplifiée, contrairement aux lasers traditionnels dont la longueur d’onde est fixée par les niveaux atomiques du milieu amplificateur. Un tel dispositif présente donc l’avantage d’offrir une large accordabilité en longueur d’onde, typiquement de une à deux décades avec une même installation et la possibilité d’atteindre des longueurs d’onde allant de l’infrarouge aux rayons X, performances difficilement réalisables avec un laser traditionnel. Le LEL permet aussi de produire de fortes puissances crêtes, des impulsions femtosecondes avec des taux de répétition variés. Le LEL est donc un outil remarquable pour réaliser un grand nombre d’expériences dans des domaines très variés, tels que, l’étude des cinétiques rapides et des phénomènes non linéaires. La largeur spectrale relative, de l’ordre de 10-2 à 10-4, permet de réaliser des expériences de spectroscopie non linéaire. L’inconvénient majeur d’un LEL réside dans son prix et sa taille. En effet, il nécessite l’installation d’un accélérateur de particules, des blindages de protection contre les rayonnements ionisants, des salles aménagées pour les utilisateurs et fonctionne entièrement sous vide; sa mise en place en laboratoire n’en est rendue que plus difficile. De plus, le gain du processus d’amplification étant inversement proportionnel au cube de l’énergie des électrons, l’obtention de l’effet laser présente plus de difficultés dans le domaine de l’ultra violet et encore davantage dans le domaine des X que pour les grandes longueurs d’onde.

Les lasers dans le domaine XUV

   Le principe de fonctionnement des lasers dans le domaine de l’XUV repose, comme celui des lasers émettant dans le visible et dans l’infrarouge, sur une inversion de population. Ici, elle aura lieu entre deux niveaux excités d’un ion d’un plasma créé par laser. Ainsi, le plasma va émettre en amplifiant son propre rayonnement. Nous disons alors que ce type de source fonctionne en régime d’amplification (par émission stimulée) de l’émission spontanée. Ce régime plus couramment appelé ASE pour « amplification of spontaneous émission » est historiquement le mode de fonctionnement des lasers XUV pompés par laser. Dans ce manuscrit, nous considérons le plasma créé en inversion de population, non pas comme la source elle-même, mais comme un amplificateur XUV, comme nous en trouvons sur les chaînes lasers de puissance dans la gamme infrarouge. Cet amplificateur aura pour mission d’amplifier, non pas « son propre bruit » comme c’est le cas en mode ASE, mais une source cohérente externe dite « d’injection » qui sera ici une source d’harmonique d’ordre élevé. Avant de rentrer dans le détail, nous présenterons les différents schémas d’inversion de population dans les plasma-lasers qui ont permis expérimentalement d’obtenir des inversions de population dans le domaine XUV

Etat de l’art des lasers XUV par excitation collisionnelle

   Les premières expériences sur les lasers XUV ont commencé sur des installations lasers à longue durée d’impulsion (nanoseconde). Ces lasers XUV sont plus communément appelés lasers XUV quasi-stationnaires (QSS). Ce type de laser est produit par la focalisation d’un laser infrarouge, d’une énergie de plusieurs centaines de joules et d’une durée d’impulsion de quelques centaines de picosecondes, sur une cible solide en une ligne de quelques centimètres de long (voir Figure 1.6). L’émission laser XUV est émise de part et d’autre des extrémités de la colonne de plasma. Ce type de laser a été utilisé pour de nombreuses applications [30, 31, 32] et a permis d’atteindre la plus courte longueur d’onde en régime saturé [33]. Pour augmenter les performances des lasers XUV quasi-stationnaires, la présence d’une pré-impulsion de plus faible énergie peut être utilisée. Cette pré-impulsion crée un plasma faiblement ionisé permettant d’obtenir un gradient de densité électronique plus faible [34] et ainsi améliore l’absorption de l’impulsion principale et réduit la réfraction du rayonnement amplifié. Le seul laser XUV QSS en fonctionnement aujourd’hui est celui du PALS (Prague Asterix Laser System) en République Tchèque. C’est un laser à zinc néonoïde qui émet à 21,2 nm et fonctionne avec une demi-cavité XUV [35]. Le miroir utilisé pour cette demi-cavité est un miroir multicouche placé à une extrémité de la colonne de plasma. Cette configuration a permis d’augmenter considérablement l’énergie du laser mais aussi d’améliorer les qualités optiques du faisceau [36]. Le laser XUV ainsi obtenu délivre quelques mJ par tir pour une durée d’impulsion d’environ 100 ps. Les lasers XUV QSS sont actuellement les sources XUV cohérentes les plus énergétiques. Cependant, ils nécessitent des installations laser de très grande taille à cause de l’énergie nécessaire pour créer le plasma. De plus, ils fonctionnent avec une cadence très faible (1 tir toutes les 30 minutes). Avec l’émergence des lasers de puissances capable de délivrer des impulsions brèves ultra-intenses, les lasers XUV à pompage transitoire sont apparus.

Injection d’harmoniques dans un LEL

   Le succès de l’injection d’harmoniques sur plasma-laser a fortement inspiré et motivé la transposition de ce schéma sur le LEL. En effet, l’émission des LELs, bien que présentant de fortes brillances, ne possède qu’une cohérence longitudinale partielle. Les profils temporel et spectral sont composés d’une série de pics, appelés « spikes » qui présentent d’importantes fluctuations. L’injection dans un LEL de la 5ème harmonique (160 nm) d’un laser Ti: Sa (800 nm, 10 Hz, 100 fs) produite dans une cellule de gaz à montré une forte amplification cohérente. Ce phénomène spectaculaire s’accompagne de la génération d’Harmoniques Non Linéaires LELs (HNL) intenses et cohérentes à 54 nm et 32 nm [5]. L’expérience a été réalisée sur le prototype de l’accélérateur SCSS (source SASE compacte de SPring-8, Japon). Cette installation est principalement constituée d’un canon à électrons à cathode thermo-ionique, d’un LINAC et d’un onduleur sous vide (2 sections de 4,5 m de long), sur lequel la source externe harmonique est superposée transversalement, spectralement et temporellement avec le faisceau d’électrons (150 MeV, 10 Hz, 1 ps). Avec une seule section d’onduleur, le rayonnement à 160 nm en mode injecté atteint une intensité de trois ordres de grandeur supérieure à celle obtenue sans injection, et présente une distribution spectrale quasi-Gaussienne. De plus, la longueur de saturation du LEL est deux fois plus courte. Vu le faible niveau d’injection requis, une telle amplification couplée à des schémas HNL permettrait de générer des rayonnements X totalement cohérents jusqu’à la « fenêtre de l’eau ».

Simulations numériques de la propagation du laser de pompe

   Nous venons de voir que la propagation linéaire d’impulsions femtosecondes peut être décrite de façon analytique. L’introduction d’effets non-linéaires telle que la dispersion électronique due à l’ionisation, ne permet plus de résolution analytique. Par conséquent, nous avons eu recours à une résolution numérique de l’équation de propagation. Nous avons utilisé pour cela un code de propagation nommé OFI-PROP et développé par G. Maynard du LPGP [63]. Dans ce code inspiré des travaux de S. C. Rae [64] et qui constitue une partie du code COFIXE, le calcul du transport du faisceau IR est utilisé pour déterminer une table d’intensité Imax(r, z) qui sera utilisée par la suite par un code collisionnel-radiatif. Le transport du faisceau IR étant étroitement lié au processus d’ionisation par le champ laser, les atomes de krypton deviennent de plus en plus ionisés au fur et à mesure que le faisceau laser se propage dans le milieu gazeux. Comme la probabilité d’ionisation dépend de l’éclairement laser, le laser interagit avec un plasma inhomogène dans les deux directions (transverse et longitudinale). Dans la gamme de pression considérée ici, les pertes d’énergie dues à l’ionisation ont été négligées. De plus, l’éclairement du laser (dans le plasma) étant inférieur à 1018 W.cm-2, les effets non linéaires relativistes ont aussi été négligés. Dans le code OFI-PROP [65], le transport du laser IR dans le krypton est calculé dans l’approximation paraxiale, en géométrie cylindrique, en résolvant l’équation (24). Le front montant de l’impulsion laser n(r, z, τ) croît avec le temps du fait de l’ionisation séquentielle des atomes de krypton mais reste, dans la gamme de densité étudiée ici, toujours inférieur à nc. L’ionisation est ici considérée dans l’approximation tunnel en utilisant les taux ADK moyennés pour calculer les probabilités d’ionisation [cf § 2.1.2]. Les paramètres d’entrée sont la densité atomique, le waist du faisceau, la polarisation, la position du point de focalisation, l’éclairement maximal et la durée de l’impulsion laser. De plus, il est possible de définir les profils temporel et spatial de l’impulsion laser. La Figure 2.8 montre une série de carte d’ionisation calculée par OFI-PROP pour différentes densités de krypton comprises entre 5 et 50 mbar. L’éclairement maximal du laser infrarouge est ici de 8.1017 W.cm-2, la polarisation du laser est circulaire et le laser est focalisé 3,5 mm après la face d’entrée de la cellule. Nous observons très clairement que les effets de réfraction prennent de l’importance quand nous augmentons la densité atomique. Ceci occasionne un déplacement du foyer vers la face d’entrée de la cellule de gaz. En conséquence, la zone amplificatrice, ici en rouge, raccourcit quand nous augmentons la pression du gaz dans la cellule, laissant la place à une zone moins ionisée qui peut devenir absorbante pour le laser à 32,8 nm (37,8 eV). Cette zone plasma (ici en bleue) est essentiellement peuplée d’ions Kr neutre, Kr1+, Kr2+, Kr3+. Compte tenu des potentiels d’ionisation de ces états de charge présentés dans le Tableau 2-1, ils sont absorbants à la longueur d’onde qui nous intéresse. Nous tiendrons compte de cette zone absorbante quand nous confronterons les résultats expérimentaux aux calculs dans le chapitre suivant. Cependant, ce code ne permet pas de suivre l’évolution hydrodynamique du plasma en fonction du temps. Il nous renseigne seulement sur l’état du plasma juste après le passage du laser. Comme nous le verrons par la suite, les moments de forte amplification se produisent 3 ps après la création du plasma et nous pouvons considérer, que dans cette échelle de temps, l’état du plasma est stationnaire.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : PRESENTATION GENERALE DES SOURCES XUV
1.1 LES LASERS A ELECTRONS LIBRES
1.2 LES EFFETS NON LINEAIRES : LE RAYONNEMENT HARMONIQUE
1.3 LES LASERS DANS LE DOMAINE XUV
1.3.1 Mécanisme de pompage
1.3.1.1 Schéma par recombinaison
1.3.1.2 Schéma collisionnel
1.3.2 Etat de l’art des lasers XUV par excitation collisionnelle
1.4 LES SOURCES XUV INJECTEES PAR HARMONIQUE
1.4.1 Injection d’harmonique dans un laser XUV
1.4.2 Injection d’harmoniques dans un LEL
CHAPITRE 2 : PHYSIQUE DES LASERS XUV OFI EN MODE INJECTE
2.1 INTERACTION LASER-GAZ EN CHAMP FORT
2.1.1 Atomes en champ intense
2.1.2 Ionisation
2.1.2.1 Les différents types d’ionisation
2.1.2.2 Paramètre de Keldysh
2.1.2.3 Taux d’ionisation tunnel
2.1.3 Influence de la polarisation sur la distribution énergétique des électrons
2.1.4 Propagation et réfraction d’un laser intense dans un milieu gazeux
2.1.4.1 Propagation du faisceau gaussien dans le vide
2.1.4.2 Propagation du faisceau gaussien dans le milieu gazeux
2.1.4.3 Réfraction
2.1.4.4 Effet de la réfraction sur la propagation
2.1.4.5 Simulations numériques de la propagation du laser de pompe
2.2 LA PHYSIQUE DES HARMONIQUES D’ORDRE ELEVE
2.2.1 Le principe
2.2.1.1 Réponse de l’atome unique
2.2.1.2 Réponse macroscopique
2.2.2 Propriétés des harmoniques d’ordre élevé
2.3 L’AMPLIFICATEUR A 32,8 NM DANS LE KRYPTON NICKELOÏDE 
2.3.1 Pompage collisionnel dans le krypton nickeloïde
2.3.2 Emissivité et coefficient de gain
2.3.3 Transfert radiatif
2.3.4 Régime de saturation
2.3.5 Largeur spectrale
CHAPITRE 3 : CARACTERISATION D’UN AMPLIFICATEUR XUV OFI PAR AMPLIFICATION D’HARMONIQUE
3.1 DISPOSITIF EXPERIMENTAL
3.1.1 La chaîne laser infrarouge
3.1.2 Chaîne laser XUV
3.1.2.1 Description du dispositif expérimental
3.1.2.2 Ajustement du couplage injecteur-amplificateur
3.1.2.3 Le spectrographe d’analyse
3.2 ETUDE DU LASER XUV INJECTE EN FONCTION DES PARAMETRES DE GENERATION
3.2.1 Mesure de l’amplification à 32,8 nm
3.2.2 Influence de la longueur d’amplification
3.2.3 Influence de la densité sur l’amplification de la raie 4d-4p à 32,8 nm
3.2.4 Influence de la polarisation du laser de pompe sur l’amplification à 32,8 nm
CONCLUSION
CHAPITRE 4 : CARACTERISATION SPECTRO-TEMPORELLE DU LASER XUV OFI INJECTE PAR HARMONIQUE
4.1 DISPOSITIF EXPERIMENTAL
4.2 MESURES DE LA COHERENCE TEMPORELLE
4.2.1 Le cas optimal
4.2.1.1 Modélisation
4.2.1.2 Effet de la longueur du milieu amplificateur
CONCLUSION
CHAPITRE 5 : CARACTERISATION SPATIALE DU LASER XUV INJECTE
5.1 MESURE DE LA DISTRIBUTION D’ENERGIE DU LASER XUV INJECTE
5.1.1 Dispositif expérimental
5.1.2 Résultats expérimentaux
5.1.2.1 Sans injection
5.1.2.2 Profils injectés
5.1.3 Influence de la densité de l’amplificateur
5.1.4 Influence de la longueur de la cellule amplificatrice
5.1.5 Estimation par impulsion de l’énergie du laser XUV injecté
5.1.6 Stabilité du laser injecté à 32,8 nm
5.2 MESURE DE LA COHERENCE SPATIALE DU LASER XUV INJECTE
5.2.1 Expérience des fentes d’Young : principe et montage expérimental
5.2.1.1 Principe
5.2.1.2 Montage expérimental
5.2.2 Résultats expérimentaux
5.3 MESURE DU FRONT D’ONDE DU LASER A 32,8 NM
5.3.1 Principe du senseur de front d’onde de type Hartmann
5.3.2 Montage expérimental
5.3.3 Mesure de la distorsion du front d’onde
5.4 MODELISATION SIMPLE DU FILTRAGE SPATIAL PAR LE GAIN
5.4.1 Reconstruction de la source
5.4.2 Filtrage par le gain
CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
CONCLUSION GENERALE
PERSPECTIVES
ANNEXES
ANNEXE A : RAPPELS SUR LA NOTION DE COHERENCE
ANNEXE B : RAPPELS SUR LA NOTION FRONT D’ONDE
ANNEXE C : PUBLICATIONS
BIBLIOGRAPHIE

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