Les troubles spécifiques du langage oral et écrit

Les troubles spécifiques du langage oral et écrit représentent un handicap important pour les enfants durant leurs apprentissages et dans leur quotidien. Pour ces patients présentant une dysphasie ou une dyslexie, les difficultés mises en évidence s’avèrent spécifiques, sévères, persistantes et résistantes malgré la rééducation (Boutard, 2013). Le bilan orthophonique initial permet de mettre en évidence les troubles du langage existants et d’initier la prise en charge nécessaire. Afin d’affirmer la spécificité du trouble, les orthophonistes peuvent s’appuyer sur un bilan neuropsychologique : le WISC (Wechsler Intelligence Scale for Children). Cette échelle psychométrique permet de mettre en évidence les compétences cognitives déficitaires et préservées chez les enfants de 6 ans à 16 ans 11 mois. L’évaluation pluridisciplinaire de ces enfants permet à l’orthophoniste de renforcer ses hypothèses diagnostiques et de préciser les axes de leur rééducation.

Au fil des versions du WISC, de nombreuses études ont cherché à définir des profils cognitifs récurrents et spécifiques des enfants dysphasiques et dyslexiques à partir des scores d’indices que ces enfants obtenaient. Ainsi, au WISC-IV, l’étude de Zourou (2010) a mis en évidence des spécificités propres à chacun de ces troubles du langage.

Avec la sortie en 2016 de la cinquième et dernière édition du WISC, la structure de l’échelle a été profondément modifiée : elle est, désormais, composée de cinq indices correspondant à certaines aptitudes de « la théorie hiérarchique de l’intelligence » établie par Cattel, Horn et Caroll (CHC) (Jumel, 2017, p.4). Ainsi, même si les scores aux différentes épreuves du WISC ne peuvent suffire à établir le diagnostic d’un trouble des apprentissages, ils ont un réel intérêt pour les orthophonistes. Cette refonte laisse envisager l’extraction de profils au WISC encore plus spécifiques et actualisés pour les enfants dysphasiques et dyslexiques. Cela permettrait un étayage encore plus solide des hypothèses diagnostiques ainsi qu’une orientation toujours plus pertinente et efficace des prises en charge orthophoniques (Leloup, 2018).

MÉTHODE

Revue systématique

Une recherche bibliographique a été effectuée grâce aux bases de données ScienceDirect, Pubmed et EM Premium avec les mots-clés « WISC-IV », « WISC-V», « dysphasie » et « dyslexie ». Sur trente-sept références extraites, quinze ont été retenues. Pour cela, la méthode de sélection a été la suivante : Premièrement, les articles et livres consultés devaient avoir été publiés dans les cinq à dix dernières années lorsqu’ils définissaient les troubles spécifiques du langage ou décrivaient les performances aux épreuves orthophoniques des enfants présentant ces troubles. Cela permet de garantir une connaissance actualisée de ce que sont les troubles spécifiques du langage, les bilans orthophoniques adaptés à leur évaluation et les critères diagnostiques reliés. Parmi cette littérature récente, nous n’avons gardé que les références anglophones et francophones traitant des enfants de 6 ans à 16 ans 11 mois, et avons donc exclu toutes celles qui traitaient des adultes dysphasiques ou dyslexiques ou bien des enfants évalués avant 6 ans. Quant aux références traitant du WISC, il a été déterminé qu’elles ne devaient pas être parues avant 2010 lorsqu’il y était question du WISC-IV. Par ailleurs, le support de cette étude étant le WISC-V, sorti en 2016, il était nécessaire de ne se concentrer que sur la période post publication. Nous avons donc choisi de ne prendre en compte que les publications postérieures à la date d’édition. Cela avait pour but de recenser les potentielles études de profils menées depuis et de relever la présence ou non de conclusions récurrentes au sujet de la dysphasie et de la dyslexie entre ces études.

À la fin de cette sélection, les articles restants ont permis d’extraire plusieurs informations pertinentes et essentielles pour mener à bien cette étude telles que les critères diagnostiques de bilan orthophonique nécessaires pour parler de dysphasie ou de dyslexie, mais aussi les scores obtenus par les enfants dysphasiques et dyslexiques aux différents indices du WISC-IV et les conclusions déjà émises, à l’aide de ces résultats, sur les profils de ces patients au WISC-IV. Les articles sélectionnés nous ont également permis de nous rendre compte de l’absence de consensus sur de potentiels profils au WISC-V pour ces mêmes enfants, du fait d’analyses des scores d’indices encore peu nombreuses et disparates. Enfin, à partir de cette revue, nous avons pu définir deux éléments essentiels à notre étude. Premièrement, nous avons pu déterminer les critères d’inclusion et d’exclusion des sujets dans notre étude. Deuxièmement, ces données nous ont permis d’émettre les hypothèses suivantes quant aux profils au WISC-V des enfants présentant une dyslexie ou une dysphasie : l’Indice de Mémoire de Travail est l’indice ayant la valeur la plus basse parmi les cinq chez les enfants dyslexiques (1) ; le score à l’Indice de Vitesse de Traitement est inférieur aux scores des Indices Visuo-Spatial, Compréhension Verbale et Raisonnement Fluide chez les enfants dyslexiques (2) ; l’Indice de Mémoire de Travail est l’indice ayant la valeur la plus basse parmi les cinq chez les enfants dysphasiques (3) ; le score à l’Indice de Vitesse de Traitement est inférieur aux scores des Indices Visuo-Spatial et Raisonnement Fluide chez les enfants dysphasiques (4) ; le score à l’Indice de Compréhension Verbale des patients dysphasiques est inférieur aux scores des indices Visuo-Spatial et Raisonnement Fluide (5).

Recueil et sélection des sujets

Pour réaliser cette étude, une collecte de corpus de sujets dysphasiques ou dyslexiques a été menée dans un premier temps. Il s’agit, en effet, d’une étude rétrospective sur des sujets âgés de 6 ans à 16 ans 11, âges de passation du WISC, et suivis en orthophonie dans le cadre d’une prise en charge d’une dysphasie ou d’une dyslexie. Ces données correspondaient ainsi au premier critère d’inclusion de ces corpus. De surcroît, chacun d’entre eux devait être composé, pour un même patient, d’un compte-rendu de bilan d’examen neuropsychologique comprenant le WISC-V et d’un compte-rendu de bilan orthophonique incluant, non seulement un diagnostic orthophonique de dyslexie ou de dysphasie, mais également des critères quantitatifs et linguistiques. Les bilans orthophoniques de ces corpus ont tous été recueillis auprès d’orthophonistes universitaires et/ou ayant travaillé dans des centres de référence des troubles des apprentissages. Tous ont été réalisés sous coordination d’un médecin hospitalier et effectués dans le cadre d’une évaluation pluridisciplinaire.

Pour être inclus dans cette étude, ces deux bilans devaient répondre à des critères d’inclusion définis à l’aide de notre revue de littérature. Ainsi, pour être sélectionnés, les bilans neuropsychologiques devaient comprendre les scores à chaque indice qui composent le WISC-V (Annexe A) : Indice de Compréhension Verbale (ICV), Indice Visuo-Spatial (IVS), Indice de Raisonnement Fluide (IRF), Indice de Mémoire de Travail (IMT) et Indice de Vitesse de Traitement (IVT). Tous ces indices devaient eux-mêmes être évalués à partir de deux subtests principaux : Similitudes et Vocabulaire pour l’ICV, Cubes et Puzzles visuels pour l’IVS, Matrices et Balances pour l’IRF, Mémoire des chiffres et Mémoire des images pour l’IMT et Code et Symboles pour l’IVT (Jumel, 2017). Ainsi, les scores de toutes ces épreuves devaient figurer au sein de ce bilan. Les bilans orthophoniques devaient eux aussi répondre à certains critères d’inclusion. Si un diagnostic orthophonique de dysphasie ou de dyslexie était nécessaire, des données quantitatives et qualitatives devaient également être notifiées dans ce bilan pour que ce dernier soit compris dans l’étude. Ainsi, chaque bilan de dysphasiques devait comprendre des scores inférieurs ou égaux à -1,65 DS (Ramus et al., 2003, dans Zourou, 2010) ou à P5 (Biotteau et al., 2016; Poletti, 2014) dans au moins deux des domaines suivants : la phonologie, le lexique, la syntaxe, la compréhension et/ou la rétention de phrases (Mazeau & Pouhet, 2014). Les bilans de dyslexiques devaient, quant à eux, inclure les mêmes scores dans au moins deux des domaines suivants également : la lecture de pseudo-mots, l’identification de mots isolés et/ou la vitesse de lecture (Mazeau & Pouhet, 2014). Ont donc été exclus tous les bilans orthophoniques et neuropsychologiques incomplets mais également tous ceux contenant des données allant dans le sens contraire d’un trouble spécifique du langage telles que la présence d’une pathologie sensorielle, d’une déficience intellectuelle ou de troubles du spectre de l’autisme (Mazeau & Pouhet, 2014).

Par ailleurs, tous les corpus d’enfants présentant plusieurs troubles ont également été exclus. L’objectif de l’étude est, en effet, de mettre en évidence des scores spécifiques à chaque pathologie. Exclure les corpus dits « multidys » permet de mettre en évidence les scores aux différents subtests du WISC-V qui relèvent uniquement d’un trouble spécifique et non d’une association de troubles, cela semble donc plus pertinent pour déterminer des profils. Enfin, toujours dans cet objectif de la spécificité des résultats obtenus, les corpus d’enfants présentant un Trouble de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDA/H) associé ont, eux aussi, été exclus. Lorsqu’un TDA/H est associé à un trouble du langage ou des apprentissages, celui ci peut, en effet, accentuer la sévérité du trouble langagier et le pronostic fonctionnel, en gênant la mise en œuvre des processus compensatoires. De surcroît, les enfants qui présentent un TDA/H ont généralement des troubles liés à leurs compétences verbales : troubles de la pragmatique, de la syntaxe, de la compréhension et un lexique moins riche (Touzin, 2015). Un trouble du langage écrit est, par ailleurs, très fréquemment retrouvé chez ces enfants, avec une symptomatologie pouvant s’apparenter à une dyslexie (Leloup, 2018). Du fait de toutes les expressions communes du TDA/H et des troubles spécifiques du langage ici étudiés, faire la part des scores déficitaires aux épreuves du WISC dus à l’un ou à l’autre est apparu comme un biais qu’il a semblé plus pertinent d’écarter dans le cadre de notre étude. Une fois l’ensemble de ces critères de sélection appliqués, le nombre de corpus obtenus s’élève à quinze pour les dyslexiques et à quatorze pour les dysphasiques. Pour l’ensemble de ces corpus, nous avons ainsi pu procéder à une analyse statistique des scores aux cinq indices du WISC-V que nous détaillons ci-après.

Analyses statistiques

Durant la collecte des corpus, toutes ces données recueillies au sein du bilan du WISC-V, ont été retranscrites dans une table de données (Annexe B) sur le logiciel Microsoft Excel. Une fois finalisée, cette dernière a été transférée sur le logiciel JMP Trial (version 15) qui a permis, par la suite, d’effectuer l’ensemble des analyses statistiques. Dans un premier temps, une analyse descriptive des différents paramètres statistiques des scores obtenus à chaque indice a été menée selon la pathologie. Celle-ci a donné lieu à une première visualisation des dissociations de score entre les indices, existantes au WISCV pour la dysphasie et la dyslexie. Afin d’appuyer ces premières observations, un test de Wilcoxon a été appliqué à nos données. Ce test de rang permet de comparer chaque paire d’indices, afin d’observer ou non une différence significative entre les scores, pour la population des dyslexiques et celle des dysphasiques. Le choix de ce test non paramétrique semblait plus pertinent pour répondre à nos hypothèses, du fait du nombre de sujets, qui ne permettait pas d’affirmer que tous les scores recueillis répondaient à une loi normale. Les résultats issus de ce test statistique sont considérés comme significatifs lorsque la p-value est inférieure à 0,005 et suggestifs, lorsque la p-value est inférieure à 0,05. En effet, d’après Laccourreye et al. (2019) et Ioannidis (2018), il apparaît plus pertinent à ce jour de parler de résultats significatifs lorsque la pvalue est inférieure à 0,005, afin de réduire davantage le risque d’erreur de l’étude. On parlera donc de résultats suggestifs pour décrire des résultats compris entre ce nouveau seuil de significativité recommandé et celui qui était utilisé jusqu’alors.

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Table des matières

I)INTRODUCTION
II) GENERALITES
III) METHODOLOGIE
IV) RESULTATS
V) COMMENTAIRES ET DISCUSSION
VI) CONCLUSION  
VII) REFERENCES
ANNEXES
RESUME

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