Etude des phénomènes de dépôt et post-dépôt de la neige andine sur un site tropical d’altitude

Par les émissions de polluants, le changement climatique et la pression anthropique sur les écosystèmes, les activités de l’homme ont un impact de plus en plus grand sur l’environnement. D’après Crutzen (2002) nous serions entrés dans une nouvelle ère, l’ « anthropocène ». Localement, les changements de la composition chimique de l’atmosphère se traduisent par des phénomènes comme les « smog » de pollution, les pluies acides ou le « trou » de la couche d’ozone stratosphérique (Finlayson-Pitts and Pitts, 2000). Face à ce bilan alarmant (Berger, 2000 ; IPCC, 2001), les études sur les climats et les environnements anciens permettent de mieux documenter la variabilité du système climatique naturel. Les carottes de glace sont l’un des moyens utilisés pour documenter le passé à l’échelle des derniers millénaires.

Si la glaciologie est née sur les glaciers de montagne avec les premiers alpinistes du XVIIIème siècle et les explorateurs de l’Amérique du Sud (Lliboutry, 1964, 1965), c’est aux pôles que cette discipline a révélé son immense potentiel scientifique comme témoin des modifications climatiques et environnementales (Lorius et al., 1989), en particulier grâce au LGGE (Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l’Environnement) du CNRS. Il était normal qu’un jour ou l’autre, la glaciologie retourne à ses origines sud-américaines. Dans les années 1990, l’ORSTOM (devenu par la suite IRD, Institut de Recherche pour le Développement) s’est implanté dans les Andes tropicales et a lancé des programmes de recherche en hydrologie et glaciologie intitulés NGT (Neiges et Glaciers Tropicaux) puis GREAT ICE (Glaciers et Ressources en Eau dans les Andes Tropicales : Indicateurs Climatiques et Environnementaux). L’une des réalisations importantes de ce projet a été le carottage de 1999 au glacier de l’Illimani (Bolivie), à 6340 m d’altitude, en collaboration avec le PSI (Paul Scherrer Institute).

Introduction des recherches environnementales en zone tropicale

L’astronome voit dans les tropiques la région de la terre où le Soleil passe deux fois par an au zénith. En effet, compte tenu de l’inclinaison de la Terre, la zone située entre les tropiques du Cancer (23° 26′ N) et du Capricorne (23° 26′ S) est une zone où le Soleil n’est au zénith que le jour du solstice. D’autres définitions de la zone tropicale existent pour les climatologues, basées sur ses caractéristiques thermiques ou atmosphériques (voir par exemple la discussion faite par Wagnon, 1999). Dans ce paragraphe, nous allons voir l’importance de la zone tropicale et son rôle dans la dynamique globale, ce qui justifie qu’on s’y intéresse dans cette étude.

Peuplement et intérêt économique

Si la zone tropicale ne représente que 40% de la surface totale de la planète, elle regroupe par contre les deux tiers de sa population. C’est une zone actuellement soumise à l’explosion démographique et au développement économique. Dans ces régions fragiles, l’évolution du climat peut avoir des répercutions drastiques sur le cycle hydrologique, les rendements agricoles et la pêche. Dans les Andes en particulier, les glaciers, en rapide évolution (Francou et al., 1997), constituent une ressource en eau et en énergie hydroélectrique importante. Leur évolution conditionne l’avenir des pays de la région. Le terme de « glaciers tropicaux » peut apparaître paradoxal et un peu exotique. Avec leur 2.5 10³ km² , (Kaser et al., 1996), ces glaciers ne représentent que 0,16 % de la surface totale englacée du globe et 5 % de la glace continentale. A elles seules les Andes représentent 99 % des glaciers tropicaux dont la majeure partie se trouve au Pérou (70%) et en Bolivie (20%) (Francou et al., 1997). En Bolivie, des compagnies comme la COBEE (Compania Boliviana de Energia Electrica) et Aguas del Illimani gèrent les ressources locales. L’implantation de l’IRD dans ces régions a aussi pour objectif de former des scientifiques locaux et des responsables capables de peser sur les politiques environnementales à l’échelle internationale.

Rôle de l’océan et l’atmosphère tropicaux 

Rôle moteur du climat
Les scientifiques ont mis en évidence au cours du Quaternaire des grands cycles glaciaires- interglaciaires naturels et des changements climatiques abrupts (Alley et al., 2003). Parmi les mécanismes déclencheurs reconnus, de légères modifications des paramètres orbitaux de la Terre décrite par la théorie de Milankovitch (Berger, 1994) peuvent jouer sur l’insolation et induire des changements climatiques. Les enregistrements d’un pôle à l’autre montrent que les variations climatiques sont parfois asynchrones, décalées (Blunier and Brook, 2001). La zone tropicale, de par sa position à cheval sur deux hémisphères, permet de documenter les couplages Nord- Sud. Dans le but de comprendre le système climatique et connaître sa variabilité naturelle, le recueil de données paléo-climatologiques le long des transects pôle-équateur-pôle est l’un des projets de l’IGBP (International Geosphere Biosphere Program) (Alverson et al., 2003).

Phénomènes ENSO
Des échanges Est-Ouest ont aussi lieu par les alizés dont la force régule, en particulier, le phénomène ENSO (El Niño Southern Oscillation), qui prend son origine au dessus du Pacifique tropical puis se répercute dans d’autres régions du monde grâce à des téléconnexions. Cette oscillation apériodique se produit tous les 2 à 7 ans et se manifeste en général pendant l’été austral, entre décembre et février. Elle comprend deux situations extrêmes, El Niño et La Niña .

Importance de la végétation tropicale

L’occupation des sols dans la zone tropicale se décline en déserts, savanes et forêts. Chacun de ces biomes va être une source plus ou moins importante d’aérosols (Prospero et al., 2002) : des aérosols continentaux primaires pour les zones désertiques et des aérosols biogéniques secondaires pour les zones recouvertes de végétation. En raison de leur effet climatique direct par rétro-diffusion de la lumière et indirect via la formation de nuages (Bergin, 2000 ; Penner et al., 2001), les aérosols jouent un rôle important dans le système climatique. En ce qui concerne la chimie atmosphérique, la forte intensité des radiations solaires dans les basses latitudes favorise la formation de radicaux hydroxyles. Ces derniers, fortement réactifs, sont responsables de l’épuration de l’atmosphère en déclenchant l’oxydation des composés chimiques atmosphériques (Crutzen, 1994).

Ces régions subissent une pression anthropique croissante. Dans la dernière décade, plus de 16 millions d’hectares de forêt en moyenne ont disparu chaque année dont plus de 90 % dans la zone tropicale (FAO, 2001). Les feux de biomasse sont une source majeure de particules dans l’atmosphère ayant un impact direct sur la chimie atmosphérique et les cycles biogéochimiques (Crutzen and Andreae, 1990). La mise à nu des sols a pour conséquences un albédo de surface plus important, des capacités d’évapo-transpirantion et une rugosité réduites, ce qui peut entraîner selon certains modèles, un réchauffement et un assèchement local (Brovkin, 2002). De nombreux auteurs ont estimé la nature et la quantité de gaz trace (CO2, CO, hydrocarbures volatiles, espèces azotées et sulfurées) et particules de suie (« Black Carbon ») émis par les feux de biomasse selon la végétation brûlée et le type de combustion (Delmas, 1994; Andreae and Merlet, 2001). Pendant ces événements, les émissions de gaz et de particules au dessus des valeurs naturelles contribuent à la formation d’ozone troposphérique, avec comme corollaire une modification possible de la capacité oxydante de l’atmosphère (Longo et al., 1999 ; Jöckel et al., 2003). L’augmentation des aérosols servant de noyaux de condensation, entraîne la diminution du rayon moyen des gouttelettes. Les nuages formés dans ces conditions ont donc une durée de vie plus longue, ce qui est susceptible de modifier le cycle hydrologique local (Andreae et al., 2004). En Amérique du Sud, la forêt amazonienne fait l’objet de nombreux programmes de recherche sur son évolution actuelle : LBA (Large-Scale Biosphere-Atmosphere Experiment in Amazonia, SCAR-B (Smoke, Clouds and Radiation- Brazil), ABLE (Amazon Boundary Layer Experiments), D2W (« Dry-to-Wet »).

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Table des matières

Introduction
I Etudier les phénomènes de dépôt et post-dépôt de la neige pour mieux interpréter les enregistrements glaciologiques
I.1- Introduction des recherches environnementales en zone tropicale
I.1.1- Peuplement et intérêt économique
I.1.2- Rôle de l’océan et l’atmosphère tropicaux dans la dynamique globale
I.1.3- Importance de la végétation tropicale
I.2- Les carottes de glace andines et leur interprétationde
I.2.1- Historique des carottages andins
I.2.2- Intérêts des carottes de glace andines
I.2.3- Difficultés de leur interprétation
I.3- L’objectif de cette étude : les phénomènes de dépôt et post-dépôt sur le glacier de l’Illimani
I.3.1- Les questions qu’on se pose
I.5.2- Stratégie adoptée
I.3.3- Présentation détaillée de la région d’étude
II Mesures, prélèvements et protocoles expérimentaux
II.1- Le dispositif météorologique
II.1.1- Les mesures en continu à Plataforma Zongo
II.2.2- Le matériel portable sur l’Illimani
II.2- Les missions de prélèvements de neige sur l’Illimani
II.2.1- Déroulement type d’une mission de prélèvements
II.2.2- Prélèvements de neige dans les puits profonds
II.2.3- Prélèvements de neige de surface
II.3- Les prélèvements d’aérosols atmosphériques à Plataforma Zongo
II.3.1- Choix du site de Plataforma Zongo
II.3.2- Dispositif expérimental de prélèvements d’aérosols
II.3.3- Protocoles détaillés et contraintes expérimentales
II.4- L’analyse chimique au laboratoire par Chromatographie Ionique
II.4.1- Fonctionnement des appareils
II.4.2- Mode opératoire pour les échantillons de neige
II.4.3- Mode opératoire pour les échantillons d’aérosols
III Présentation des résultats
III.1- Données météorologiques
III.1.1- Objectifs des données météorologiques
III.1.2- Données de Plataforma Zongo
III.1.3- Mesures ponctuelles de la SAMA sur l’Illimani
III.1.4- Bilan sur les données météorologiques
III.2- Profils de concentrations le long des puits profonds
III2.1- Objectifs des prélèvements dans les puits profonds
III.2.2- Datation des puits profonds et calage par les profils chimiques du calcium
III.2.3- Présentation de la base de données
III.2.4- Bilan sur les puits profonds
III.3- Composition chimique de la neige de surface
III3.1- Objectifs des prélèvements de neige de surface
III.3.2- Résultats du suivi journalier de mai 2001
III.3.3- Précipitations des précipitations de février 2002
III.3.4- Résultats du séjour long de mai 2002
III.3.5- Evolution de la neige de surface de mai à juin 2002
III.3.6- Etat de la neige de surface en juillet 2003
III.3.7- Bilan sur la neige de surface
III.4- Résultats de la chimie des aérosols à Plataforma Zongo
III4.1- Objectifs des prélèvements d’aérosols
III.4.2- Présentation de la base de données
III.4.3- Discussion de la représentativité des mesures
III.4.5- Bilan sur les aérosols de Plataforma Zongo
IV Synthèse, réponses aux questions qu’on s’était posées et nouvelles questions
IV.1- La modification de la neige après son dépôt
IV.1.1- La sublimation
IV.1.2- Les espèces non-conservatives
IV.1.3- Le vent
IV.1.4- Bilan sur les phénomènes post-dépôt
IV.2- Le dépôt des espèces chimiques sur le glacier
IV.2.1- Saisonnalité des dépôts chimiques
IV.2.2- Régime des précipitations et signal chimique
IV.2.3- Le dépôt humide
IV.2.4- Le dépôt sec
IV.2.5- Bilan sur les phénomènes de dépôt
IV.3- Sources des espèces chimiques mesurées
IV.3.1- Dans les aérosols à Plataforma Zongo
IV.3.2- Dans la neige de l’Illimani
IV.3.3- Lien entre la composition chimique de la neige et des aérosols
IV.3.4- Bilan sur les sources des espèces chimiques
Conclusion

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