Étude des leptospires dans les eaux de surface à Paris

L’expansion des activités aquatiques avec notamment la mise en place de zones de baignade suscite un intérêt tout particulier concernant la présence de différents pathogènes dans les eaux de surface. Dans le cadre de la réglementation sanitaire liée aux utilisations récréative et sportive de ces eaux, seuls deux paramètres bactériologiques sont surveillés (Escherichia coli et les entérocoques intestinaux) alors que de nombreux autres microorganismes pathogènes y sont également présents. Parmi ces bactéries pathogènes, les leptospires sont de plus en plus impliquées dans les infections humaines ayant lieu lors d’activités aquatiques (Guillois et al., 2018; Morgan et al., 2002; Pagès et al., 2016).

Avec plus d’un million de cas estimés chaque année, la leptospirose fait partie des zoonoses bactériennes les plus importantes au monde (Costa et al., 2015). L’incidence de cette infection bactérienne est plus forte dans les régions tropicales dans lesquelles les conditions climatiques et sanitairessont particulièrement favorables à la transmission (température et humidité), et notamment lors de fortes pluies. Pathologie émergente dans les bidonvilles des régions tropicales elle s’intensifie avec l’urbanisation, la surpopulation, les mauvaises conditions d’hygiène et la prolifération des rats, considérés comme le principal réservoir animal (Desvars Larrive et al., 2017; Fávero et al., 2017; Levett, 2001). L’homme se retrouve être un hôte accidentel dans un cycle impliquant les animaux domestiques et sauvages infectés par les leptospires, qui contaminent l’environnement via l’excrétion de leurs urines (Ricaldi et al., 2013).

L’incidence varie considérablement entre les régions tempérées et les régions tropicales et est parfois sous-estimée du fait de l’absence de diagnostic fiable, du manque de système de surveillance dans certains pays endémiques et de symptômes cliniques non spécifiques dans la leptospirose humaine (Izurieta et al., 2008). Cette maladie représentant un problème de santé publique majeur, des améliorations dans l’élaboration d’un vaccin optimal, d’outils rapides de diagnostic et de prise en charge des patients sont nécessaires.

L’épidémiologie de la leptospirose et l’écologie des leptospires sont particulièrement compliquées compte tenu de la diversité génétique du genre Leptospira. Les leptospires sont des bactéries ubiquitaires dont les espèces peuvent être saprophytes (isolées de l’environnement et ne provoquant pas de maladie) ou pathogènes (responsables d’infections) et réparties en 64 espèces et plus de 300 sérovars. La survie des leptospires pathogènes dans l’environnement joue un rôle essentiel pour la transmission à l’homme ou l’animal. Bien qu’elles soient plus fréquemment isolées dans des échantillons de sol, leur présence dans les eaux environnementales peut expliquer une partie des contaminations humaines (Barragan et al., 2016; Thibeaux et al., 2017a).

Leptospirose 

La leptospirose est une infection bactérienne zoonotique qui sévit dans le monde entier, à dominante tropicale et constituant un enjeu de santé publique (Picardeau, 2015a). En 1886, Adolf Weil décrit les premiers cas cliniques (formation d’ictères) de ce qui s’appellera plus tard, la maladie de Weil (1886). Dès les années 1900, de premières descriptions des spirochètes sont relatées par Stimson, après observation de tissus de patients atteints de fièvre jaune (1907). La responsabilité des leptospires dans la maladie de Weil ou leptospirose est relatée dans les publications de l’équipe de Inada (Inada and Kaneko, 1915) suivie par celle de Noguchi (Noguchi, 1919). Touchant plus d’un million de personnes par an dans le monde, elle entraine le décès d’environ 60 000 personnes (Costa et al., 2015; Ko et al., 2009). Le taux de mortalité peut varier d’un pays à l’autre et malgré qu’elle soit parfois sous-estimée du fait de la difficulté du diagnostic (Costa et al., 2015). La leptospirose est considérée comme une maladie émergente du fait du réchauffement climatique et de l’urbanisation grandissante notamment dans les pays tropicaux. L’ensemble des mammifères peuvent être porteurs de leptospires et principalement les rats, animaux ubiquitaires à travers le monde .

Epidémiologie

L’épidémiologie étudie les facteurs qui entrent en jeu dans l’apparition et le développement des maladies, que ces facteurs soient individuels ou environnementaux.

Situation mondiale
La leptospirose est l’une des zoonoses les plus répandues à travers le monde. Par manque d’informations des populations et de données locales sur sa morbidité et sa mortalité, elle reste également une maladie tropicale négligée dans certaines zones géographiques. Dans leur étude, Munoz-zanzi et son équipe ont établis une carte recensant les différentes épidémies de leptospirose relatées dans la littérature, entre 1970 et 2012 (Munoz-Zanzi et al., 2020).

Les zones géographiques ayant rapportés le plus grand nombre d’épidémies sont l’Amérique latine avec 35,8% (principalement au Brésil et à Cuba), l’Asie du Sud avec 12,9% et l’Amérique du Nord avec 10,7%. Même si cette étude ne mentionne pas les épidémies survenues depuis 2012, elle synthétise une quantité considérable d’informations relatives aux épidémies et donne un premier aperçu de la localisation de la plupart des études.  Il est important de faire la distinction entre les pays rapportant de nombreuses épidémies (Figure 1) et ceux dans lesquelles l’incidence est la plus élevée (Figure 2). Dans certaines régions, la littérature ne relate quasiment aucune épidémie de leptospirose par manque d’informations ou de méthodes de diagnostic, alors que l’incidence y est supposée très élevée comme en Afrique. Pour cela, Costa et ses collaborateurs ont mis en place une estimation mondiale de la morbidité liée à la leptospirose, ajustée en fonction de l’âge et du sexe (Costa et al., 2015).

Au niveau mondial, la morbidité et la mortalité annuelles incombant à la leptospirose sont respectivement estimées à 15 cas et 1 décès, pour 100 000 habitants. Les incidences les plus fortes (nombre de cas pour 100 000 habitants) sont retrouvés en Océanie (151), en Asie du SudEst (56), aux Caraïbes (51) et en Afrique subsaharienne orientale (26).

Situation en France métropolitaine

En France, l’estimation de la morbidité est de 4 et celle de la mortalité est inférieure à 1 (en nombre de cas pour 100 000 habitants) (Tableau 2). Les données de l’année 2020 ne seront disponibles qu’en fin d’année 2021, les résultats portent sur l’année précédente. En 2019 et à l’image de ces 6 dernières années, l’incidence réelle avoisine la valeur d’1 cas pour 100 000 habitants, en France métropolitaine. Sur cette année, 676 cas de leptospirose ont été recensé, cette valeur est la plus forte enregistrée depuis le suivie de la maladie (CNR de la leptospirose, 2019). Lors de l’identification sérologique par le test d’agglutination microscopique (MAT), le sérogroupe Icterohaemorrhagiae (ICT) est majoritairement identifié comme agent causant la maladie chez l’homme, et ce depuis plusieurs années (Figure 4) (CNR de la leptospirose, 2018).

L’identification de la souche incriminée n’est pas réalisable pour environ un quart des cas, à cause de réactions croisées ou de phénomènes de coagglutinations (COAGG). Le second groupe le plus représenté est Sejroe (SEJ) dont l’augmentation est visible ces dernières années. Les autres sérogroupes identifiés Panama (PAN), Grippotyphosa (GT) et Australis (AUS) ne représentent qu’un faible pourcentage. En 2018, les sérovars Canicola (CAN) et Pomona (POM) n’ont pas été identifiés. Certaines régions notent une augmentation du nombre de cas entre 2018 et 2019. La région Ile-DeFrance enregistre 153 cas (contre 82 en 2018). La Provence-Alpes-Côte d’Azur et la BourgogneFranche-Comté passent respectivement de 79 à 108 et de 25 à 40 sur la dernière année d’étude .

La surveillance de la maladie est variable selon les régions et peut entrainer une sous-estimation du nombre de cas réels. Dans les régions ayant subis de graves cas de leptospirose, le personnel de santé est plus sensibilisé à la maladie et permet une meilleure identification des cas. C’est pourquoi ces dernières années, le nombre de cas a augmenté dans les régions Bretagne et Aquitaine à la suite d’événements sportifs aquatiques ayant entrainé des cas groupés (Guillois et al., 2018). Dans les régions d’Outre-mer, l’incidence de la maladie est considérablement supérieure à celle en métropole et représente une priorité de santé publique : elle est multipliée par 12 en Guyane et jusqu’à 70 en Polynésie française .

Au total 805 cas ont été recensés dans ces régions en 2019 (835 en 2018), contre une valeur maximale de 866 cas atteinte en 2017. Il faut cependant noter que depuis septembre 2014, la technique de MAT n’est plus remboursée et les demandes de ce test sont en baisse, entraînant nécessairement une perte d’informations. Aujourd’hui, l’ELISA IgM et la PCR sont les deux techniques, toutes deux remboursées, les plus utilisées pour le diagnostic de la leptospirose. La sous-estimation ou la diminution du nombre de cas d’une année sur l’autre dépend également du système de surveillance mis en place et de la sensibilisation des médecins locaux à la maladie et sont influencés par la survenue de cas au sein de ces régions. De nombreuses études restent encore à mener dans les zones où la remontée des informations est partielle et les techniques de diagnostic ne sont pas encore mises en place. Ces travaux permettent de mieux appréhender les multiples facteurs influençant la prolifération de cette maladie.

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Table des matières

Introduction
1. Leptospirose
1.1. Epidémiologie
1.2. Réservoirs et cycle de transmission
1.3. Aspects cliniques
1.4. Traitement
2. Leptospires
2.1. Phylum
2.2. Taxonomie et classification
2.3. Caractéristiques morphologiques et métaboliques
3. Diagnostic et techniques de détection
3.1. Diagnostic humain
3.2. Détection-Isolement des leptospires dans l’environnement
4. Environnement et qualité de l’eau
4.1. Environnement
4.2. Résistance aux traitements
4.3. Qualité de l’eau
5. L’approche One Health
Objectifs de la thèse
Matériel et méthodes
1. Prélèvement d’échantillons et milieux de culture
1.1. Souches isolées
1.2. Prélèvements d’échantillons environnementaux
1.3. Milieu de culture et antibiotiques
2. Lyse et extraction
3. Mise en place de la qPCR multiplex
3.1. Design des amorces
3.2. Plasmides et contrôle interne
4. Traitement au propidium monoazide
5. Tests de persistance
5.1. Exposition à la chaleur
5.2. Exposition aux ultraviolets (UV)
5.3. Traitement au chlore
6. Analyse statistique avec le logiciel GraphPad
7. Etude de la diversité des leptospires par séquençage haut débit (NGS)
7.1. Préparation et contrôle de librairie
7.2. Normalisation et séquençage
7.3. Analyse des données
Chapitre 1 : Effets des traitements de désinfection et quantification des leptospires viables dans les eaux de surface par une qPCR d’intégrité de haute sensibilité
Introduction
Conclusion du chapitre 1
Chapitre 2 : Diversité des leptospires présentes dans les eaux de surface et chez les rongeurs à Paris : détection par une qPCR d’intégrité et comparaison par séquençage NGS
Introduction
Conclusion du chapitre 2
Discussion générale et conclusion
Les pathogènes du rat
Les adaptations anthropiques
Références

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