Etude de la voie de biosynthèse des phlorotannins chez les algues brunes

De l’endosymbiose primaire, à l’émergence des macroalgues brunes

Phylogénie et classification des algues 

Les algues sont des organismes photosynthétiques, unicellulaires ou pluricellulaires, généralement aquatiques. Ces organismes sont considérés comme primitifs dans le sens où ils ont émergé il y a plus d’un milliard d’années en lignées évolutives indépendantes, bien avant l’apparition des végétaux verts terrestres. Fruits de différents évènements endosymbiotiques (Figure 1), les lignées rouges et vertes ont toutes pour point commun l’origine de la photosynthèse oxygénique chez les eucaryotes. Cette caractéristique a été acquise à partir d’une endosymbiose primaire entre une cellule eucaryote non photosynthétique et des bactéries (les cyanobactéries autrefois dénommées algues bleues). C’est à l’issue de cette endosymbiose primaire que vont émerger les algues rouges, les glaucophytes et les algues vertes (dont les ancêtres des plantes vertes terrestres) appartenant aux lignées d’eucaryotes du phylum des Archaeplastida (Figure 4). En revanche, les autres lignées d’algues représentées notamment par les cryptophytes, les haptophytes, les algues brun-doré et les dinophytes, sont des eucaryotes sans lien de parenté direct avec les plantes terrestres (Archibald and Keeling 2002). Ces lignées sont issues d’une endosymbiose secondaire entre un eucaryote primitif non photosynthétique et une algue unicellulaire rouge pour les lignées RAS (Rhizaria, Alvéolés, Stramenopiles) ou Chromeoalvéolés, ou avec une algue unicellulaire verte pour les euglénophycées et les chlorarachniophycées. Des endosymbioses multiples semblent aussi être très importantes dans l’évolution des dinophytes. Beaucoup de ces lignées sont représentées essentiellement par des organismes unicellulaires, mais la multicellularité est apparue par convergence évolutive dans les trois lignées vertes, rouges et brunes (Cock et al., 2013).

Les algues marines pluricellulaires: 

Les trois grandes lignées d’algues pluricellulaires, brunes, rouges et vertes, sont majoritairement présentes en milieu marin, mais certaines familles ont aussi conquis les eaux douces (De Reviers, 2001, 2013). Elles possèdent des chlorophylles ainsi que des pigments additionnels jaunes, rouges ou bleu, qui ont permis de les classer depuis des temps anciens en trois groupes différents: les macroalgues vertes (Chlorobiontes) qui possèdent des chlorophylles de type a et b, les macroalgues rouges (Rhodophycées) présentant de la chlorophylle a et des phycobilines rouges (phycoérythrine) et bleues (phycocyanine) et enfin les macroalgues brunes (Phéophycées) possédant de la chlorophylle c en plus de la chlorophylle a et de fortes teneurs en caroténoïdes (De Reviers, 2001, 2013).

Il existe une très grande diversité de morphologies chez toutes ces macroalgues allant du filament unisérié simple (Ectocarpus sp., Fig 2a), aux lanières des haricots de mer (Himanthalia elongata, Fig 2b), en passant par les thalles complexes des Laminaires (Fig 2c), ou encore par les tubes creux (Enteromorpha sp., Fig 2d) et les thalles incrustés sur les roches (Lithophyllum incrustans, Fig 2e).

Les thalles sont pour la plupart fixés au substrat par des rhizoïdes, un disque basal ou encore un crampon, afin de résister aux contraintes hydrodynamiques du milieu.

Les espèces de macroalgues se répartissent sur l’estran en fonction de gradients de conditions environnementales (Figure 3), notamment la durée moyenne d’émersion qui se traduit par des variations plus ou moins importantes d’intensité lumineuse, de salinité ou de température. Chacune des espèces va ainsi vivre dans un milieu auquel elle est adaptée en fonction de ses propres paramètres physiologiques, de ses capacités de résistance aux changements d’état du milieu notamment lors des marées basses, ou encore de son aptitude à se défendre face aux agressions biotiques comme la prédation ou à la compétition pour le substrat. Ces échanges avec l’environnement vont ainsi être au cœur des recherches en écologie chimique, afin de comprendre les mécanismes mis en jeu par les espèces pour survivre dans des environnements changeants, tels que les milieux côtiers, voire extrêmes comme les hauts d’estran.

Les macroalgues brunes dans l’Evolution: 

Les macroalgues brunes (Phéophycées), tout comme les oomycètes et les diatomées appartiennent au phylum des Stramenopiles (Figure 4). L’émergence du groupe des Eucaryotes Stramenopiles est datée de plus d’un milliard d’années et est la résultante d’une endosymbiose secondaire d’une algue rouge unicellulaire avec un protiste ancestral (Reyes-Prieto et al. 2007). Les algues brunes se sont ensuite développées il y a environ 200 millions d’années et se présentent comme la seule lignée de ce phylum ayant acquis la multicellularité complexe (Cock, et al. 2011). Elles ont évolué indépendamment des végétaux terrestres, et plus largement du phylum des Archaeplastida qui regroupe aussi les algues vertes et rouges. Ainsi, les algues brunes sont sur le plan phylogénétique aussi distantes des animaux que des algues vertes et rouges (Baldauf 2003). La position phylogénétique de ces algues brunes en fait des modèles d’étude particulièrement intéressants, notamment par la présence de métabolismes originaux tel que celui des polysaccharides anioniques, celui du mannitol, de l’iode, ou encore celui des phlorotannins (Cock et al. 2011).

Les macroalgues brunes : une richesse de composés originaux

Les algues brunes ont depuis très longtemps été exploitées à des fins agricoles pour l’amendement des sols, dans l’industrie du verre au 17ème siècle par la fabrication de pains de soude (carbonates) issue du brûlage des laminaires, elles ont également permis la découverte de l’iode à la fin du 18ème siècle qui sera très utilisé en tant que désinfectant (Arzel, 1987). Aujourd’hui, ces algues brunes sont toujours exploitées mais pour l’extraction de produits dit de haute valeur ajoutée.

Des métabolismes originaux: 

Les polysaccharides :
La paroi des algues brunes est principalement composée d’une partie cristalline, essentiellement de la cellulose et de polysaccharides anioniques : acide alginique, alginate (polysaccharides carboxylés, sels d’alginate) et fucanes, fucoïdanes (polysaccharides sulfatés) qui constituent plus de 40% du poids sec du thalle (Mabeau and Kloareg 1987). Les alginates sont utilisés dans l’industrie des hydrocolloïdes en tant que texturants retrouvés sous la dénomination E400 à E405. Etant dépourvues de propriétés rhéologiques, certains polysaccharides notamment les fucoïdanes, possédant un ou plusieurs groupements sulfates présentent des activités anti-oxydantes, anticoagulantes, antivirales, voire anti-tumorales (Nishino, & al, 1994 ; Senthilkumar & Kim, 2014).

Le mannitol
Le métabolisme du mannitol présente également un grand intérêt. Il est avec la laminarine la principale réserve carbonée chez les algues brunes (Michel et al., 2010). La synthèse du mannitol est effectuée à partir de fructose-6-phosphate directement issu de la photosynthèse. Ce photosynthétat a été montré comme pouvant être impliqué dans l’osmorégulation (Davison & Reed, 1985 ; Reed, et al. 1985) et permettant ainsi une tolérance importante des algues brunes aux variations de salinité.

Le métabolisme halogéné :
Un autre métabolisme important chez les algues brunes, est le métabolisme halogéné. Ce métabolisme est principalement retrouvé en milieu marin au vu des concentrations en halogènes plus importantes que celles retrouvées en milieu terrestre (Butler and Walker 1993). L’halogénation des composés organiques peut se faire de manière spontanée ou par l’intermédiaire d’haloperoxidases. Chez les algues brunes, ces enzymes sont dépendantes du vanadium qui est utilisé comme co-facteur d’où leur dénomination de vanadiumhalopéroxydases (La Barre et al. 2010). Ces enzymes participent à la détoxification des espèces réactives de l’oxygène par l’utilisation du peroxyde d’hydrogène (H2O2) afin d’oxyder les halogénures conduisant à la formation des composés organiques halogénés. L’halogénation de composés participe à l’augmentation de l’activité biologique de certains métabolites secondaires (La Barre et al. 2010). Les bromoperoxidases sont les enzymes les mieux caractérisées chez les algues brunes, ces enzymes agissent notamment sur les composés phénoliques pouvant former des bromophénols très actifs dans la défense face aux herbivores (Shibata et al. 2014) mais ces enzymes seraient aussi impliquées dans la construction des parois par la complexation des composés phénoliques aux alginates (Salgado et al. 2009a).

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Table des matières

Introduction Générale
I. De l’endosymbiose primaire, à l’émergence des macroalgues brunes
Phylogénie et classification des algues
Les algues marines pluricellulaires
Les macroalgues brunes dans l’Evolution
II. Les macroalgues brunes : une richesse de composés originaux
Des métabolismes originaux
Les polysaccharides
Le mannitol
Le métabolisme halogéné
Les phlorotannins : composés phénoliques des macroalgues brunes
Structures chimiques
Localisation cellulaire
Fonctions
III. Connaissances acquises sur la synthèse des composés phénoliques
Chez les plantes terrestres : Les flavonoïdes
Chez les angiospermes et algues vertes : Les tannins hydrolysables
Chez les algues brunes : Les phlorotannins
IV. Contexte et objectifs du projet de thèse
Partie I : Etude de la voie de biosynthèse des phlorotannins
Chapitre 1: Caractérisation de la Polyketide Synthase de type III d’Ectocarpus
Chapitre 2: Caractérisation biochimique et fonctionnelle de Chalcone Isomérases–like d’Ectocarpus.
Abstract
Introduction
Materials and Methods
Results and discussion
Conclusion and prospects
References
Chapitre 3: Etude préliminaire des aryl-sulfotransférases d’Ectocarpus: Surexpression des enzymes
recombinantes
Introduction
Matériel et Méthodes
Résultats
Discussion et Perspectives
Synthèse de la Partie I
Sommaire
Partie II: Ecophysiologie : étude de l’implication des phlorotannins dans la réponse aux stress biotiques et abiotiques chez Fucus vesiculosus
Contexte général
Chapitre 4 : Implication des phlorotannins dans la réponse à une irradiation chronique aux UV-B.
Constitutive or inducible protective mechanisms against UV-B radiation in the brown alga Fucus vesiculosus?
A study of gene expression and phlorotannin content responses.
Abstract
Introduction
Material and methods
Results
Discussion
Supporting information
References
Chapitre 5 : Effet du stress biotique du brouteur Littorina littorea sur la synthèse de phlorotannins chez Fucus vesisculosus
Short-term variations in the metabolism of phlorotannins in response to the herbivore Littorina littorea in the
brown alga Fucus vesiculosus
Introduction
Material and methods
Results:
Discussion
References
Chapitre 6: Essai biologique : test de molécules d’intérêt sur le comportement et l’attachement au substrat des
Littorines
Chemical cues of algal origin determine creeping behavior, escape and retraction in the herbivorous
periwinkle Littorina littorea
Introduction
Material and methods
Results
Discussion
Conclusion
Literature
Synthèse de la Partie 2
Conclusions

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