Etude de la complexité de l’espace halieutique en zone littorale

La pêche une activité vitale pour les populations côtières

   L’exploitation des ressources halieutiques apparaît comme l’une des plus vieilles exploitations des ressources naturelles par l’homme. Elle est aussi ancienne que la chasse et la cueillette et remonterait au paléolithique (-300 000 ans) (Cleyet, Merle, 1990). La découverte sur les côtes érythréennes de la Mer Rouge d’harpons vieux de 125000 ans suggère l’adaptation des hommes à un environnement marin côtier dès la dernière période interglaciaire (Walter et al 2000), cité par (Chassot 2005 :25). A cette époque, elle servait à l’alimentation des populations pour leur survie. De nos jours, cette dépendance alimentaire, vis-à-vis des ressources marines existe toujours dans de nombreuses parties du monde, où la pêche contribue grandement à l’alimentation des populations côtières (FAO 2002). Cette dépendance vis-à-vis de la production halieutique se fait beaucoup plus sentir dans les pays en voie de développement. Sur le plan mondial, 75% de la production issue de la pêche et de l’aquaculture, soit environ 100 millions de tonnes, ont été destinés à la consommation humaine en 2001, le reste étant majoritairement utilisé comme aliments pour les élevages aquacoles et agricoles (FAO 2002). Plus d’un milliard de personnes dépendaient entièrement en 2001 du poisson comme source de protéines animales, c’est-à-dire qu’il représentait au moins 30% de leurs apports protéiques journaliers. A côté de son importance pour la consommation humaine, l’activité de pêche joue également un rôle important à la fois en termes d’emploi et d’organisation au sein des communautés de pêcheurs. Plus de 35 millions de personnes dans le monde étaient directement employées dans la pêche et de l’aquaculture en 2000 contre 28 millions en 1990 (FAO 2002). Ainsi, face à une demande croissante en produits de la mer, la nécessité de gérer au mieux et de préserver les ressources halieutiques renouvelables apparaît comme une condition indispensable pour résoudre les problèmes de la sécurité alimentaire.

L’anchois du Pérou : de l’abondance à la pénurie

      Le Pérou par exemple dispose de facteurs naturels favorables au développement de la pêche. La côte péruvienne est bordée par des eaux particulièrement poissonneuses par suite d’un phénomène d’upwelling, qui ont d’ailleurs attiré les grandes bandes d’oiseaux de mer venant s’établir dans les îlots rocheux (Doumenge 1965). Si le poisson était resté un aliment de base pour la population aussi bien indienne qu’espagnole, la pêche ne pouvait pas sortir du cadre d’un artisanat misérable faute de moyens de production et surtout de conservation. Les circuits intérieurs restent encore déficients et seuls les produits séchés et salés peuvent gagner les villes et les villages de la Cordillère et des plateaux andins (ibidem). Cependant, l’augmentation de la consommation des grandes villes littorales, allait ouvrir un débouché au poisson frais. Tout ceci n’intéressait qu’un petit artisanat ayant des barques de moins de 10 mètres et utilisant le harpon pour les grosses pièces, les lignes de fond et de traîne et les filets fixes pour les migrateurs pélagiques en particulier les bonites. La grande richesse péruvienne semblait être surtout représentée par les thonidés, alors que les bancs d’anchois du Pérou n’avaient pas une très grande importance. C’est le développement de la pêche lointaine des thonidés à l’appât vivant pratiquée par les pêcheurs californiens qui fut la première à montrer le parti que l’on pouvait tirer de ces ressources. La production de thonidés a connu une importante progression au Pérou. La pêche pélagique aussi a connu aussi un fort développement. Cependant, devant le développement de la grande pêche à l’anchois, les autres pêches ne tiennent plus qu’une place secondaire. Il apparut très vite que l’on pouvait capturer d’énormes tonnages d’anchois, et que l’huile de poisson pouvait être obtenue à des coûts très inférieurs au prix du marché mondial. La taille et la puissance des embarcations ont augmenté ainsi que les usines. En 1957, il y avait 40 usines de farine de poisson. La production doublait en 1958, et les premières grandes usines entraient en service. En 1959, il y avait 83 fabriques de farine. En bref, les investissements dépassaient 45 millions de dollars dans les usines et 25 millions dans la pêche. En 1963, on assista à la réduction sensible de la pêcherie de l’anchois. L’année 1963 a enregistré une production de 1 160 000 tonnes et 1964 a battu les records avec 1 552 000 tonnes. De 1964 à 1970 la production augmente jusqu’à près de 13 millions de tonnes. A partir de 1964, la tendance à la progression se poursuit jusque dans les années 1973, où la pêche de l’anchois connut une chute brutale. Le facteur déclenchant est un phénomène El Niño particulièrement prononcé. L’impact immédiat fut une concentration importante de la ressource à la côte qui permit des prises très importantes (170 000 t par jour en mars 1972 : record historique). Les bancs de poisson se raréfièrent ensuite rapidement jusqu’à la fermeture de la pêcherie en juin (Thompson, 1981). Jusqu’en 1985, les captures d’anchois ne dépasseront jamais 5 millions de tonnes. On a pu craindre jusqu’au milieu des années 80 que le déclin de la pêcherie d’anchois serait irréversible. Or depuis 1985 on assiste à un nouvel accroissement des mises à terre qui ont atteint 10 millions de tonnes en 1994. Une forte pression de pêche et des conditions écologiques très défavorables ont été ces dernières années à l’origine du brusque déclin de cette espèce du Pacifique Sud-Est. Les stocks d’anchois du Pérou ont donné des signes de reprise et, à l’heure actuelle, ils sont très probablement pleinement exploités ou surexploités, avec des captures de l’ordre de 7 à 11 millions de tonnes par an (FAO 2005, après le creux de 1,7million de tonnes, enregistré en 1998.

Les causes de la surexploitation des ressources halieutiques

       Le pillage des ressources halieutiques s’est beaucoup accentué depuis les années 1960, avec le chalutage intense et le recours aux filets à maillages serrés qui contribuent à ce que, semble t-il, plus du quart des prises soit rejeté à la mer pour leur taille insuffisante, leur mauvais état ou leur manque d’intérêt économique. Les pêcheurs n’ont cessé d’améliorer leur productivité, d’armer des bateaux toujours plus grands, de développer des techniques de plus en plus performantes. La surcapacité de très nombreuses flottes est évidente et atteindrait 40% pour l’ensemble des pays de l’Union Européenne. Entre 1970 et 1992, la taille des flottilles industrielles a doublé à l’échelle mondiale, tant pour ce qui est du tonnage total que du nombre de bateaux. Selon Nixon (1997), on comptait 3,5 millions de bateaux de pêche représentant 26 millions de tonneaux de jauge nette enregistrée. Maintenant, du fait du taux de croissance équivalent au double du rythme d’augmentation des prises, les flottilles de pêche disposent de deux fois la capacité nécessaire pour tirer un rendement maximal durable des océans. Avec 42% de la flottille mondiale, l’Asie vient en première position, suivie de l’Union soviétique (30%). Viennent ensuite l’Europe de l’ouest (12%), l’Amérique du Nord (10%). Loin derrière on retrouve l’Afrique et l’Amérique du Sud avec 3% chacune. Avec 0,5% l’Océanie arrive en dernière position. Avec l’évolution de la technologie, les bâtiments de pêche se modernisent, les expéditions sont de plus en plus lointaines et la transformation des produits se fait à bord des navires usines disposant d’une grande autonomie en mer. Les nouveaux moyens électroniques jouent également un rôle important dans la pression sur la ressource. Par exemple, les sonars permettent aux capitaines des bateaux de repérer les bancs de poisson et de les suivre avec plus d’efficacité. Des appareils de navigation comme le GPS (Global Positioning System) et le radar permettent aux bateaux de revenir de façon précise sur les meilleures zones de pêche. Souvent aussi les ressources font l’objet d’un gaspillage, surtout du à des prises accidentelles ou captures accessoires. En effet, afin de satisfaire aux exigences du marché et de maximiser les bénéfices, les flottilles de pêche commerciale ciblent les espèces et les tailles les plus prisées. Les espèces qui n’ont pas de valeur commerciale sont ainsi rejetées à l’eau. La FAO (1995) a évalué récemment les prises accidentelles et les rejets entre 27 et 39,5 millions de tonnes par année. Aux Etats Unis par exemple, les rejets globaux de la pêche aux crevettes s’élèveraient à 175 000 tonnes de juvéniles. Ce phénomène a contribué à une baisse de 85% de la population de poissons démersaux de grande valeur marchande, notamment les mérous et les vivaneaux, au cours des 20 dernières années (Safina, 1994). En Mauritanie, le taux de prises accessoires en poissons est estimé à environ 90 % (Diop, 1996). La même situation est observée au Sénégal (Caverivière et Thiam, 2002). Diop (1996) évalue également les prises accessoires des merluttiers opérant dans la ZEE mauritanienne à plus de 35 % composées de juvéniles, de poissons démersaux nobles. Dans les pays en voie de développement, la modernisation de la pêche artisanale a entraîné aussi une augmentation de l’effort de pêche. Dans les pays du tiers monde, la pêche artisanale est nécessaire pour l’alimentation puisqu’elle fournit les 4/5e des protéines animales consommées dans ces pays et elle constitue une ressource économique non négligeable, donc assure des revenus considérables. Cependant, au cours de ces dernières années, la pêche artisanale s’est extravertie et s’est tournée vers le marché international qui offre les meilleurs prix. Cette recherche de profit entraîne ainsi un accroissement de la pression de pêche sur les ressources halieutiques, ce qui contribue, avec la pêche industrielle, à la sur exploitation des ressources halieutiques. De façon générale, la forte demande du marché international est en partie, à l’origine de la surexploitation des ressources en Afrique de l’Ouest. Par exemple en Guinée Conakry, les bateaux de pêche sous accords de l’Union Européenne et de la Chine, ainsi que les navires à licences hors accords, ciblent principalement les poissons démersaux. C’est la raison pour laquelle ces stocks principalement le bossu (Pseudolithus elongatus), subissent une forte pression de pêche. Ce constat est valable pour la Mauritanie ainsi que pour les autres pays de la sous région, car l’orientation de l’effort de pêche de la plupart des unités de pêche industrielle et artisanale vers des espèces à haute valeur commerciale destinées à l’exportation, participe au détournement du flux de poisson au détriment du marché local, occasionnant ainsi un phénomène de rareté du poisson combiné à celui d’augmentation des prix (Enda Diapol, 2005). En faisant une analyse de la mécanisation poussée des bateaux de pêche, on peut également faire ressortir des causes profondes de la surpêche. Quand les pêcheurs augmentent la puissance de leurs engins, la taille de leurs bateaux, ils sont obligés de récupérer les dépenses qu’ils ont effectuées pour acquérir ce matériel de pêche. Dans ce cas, ils sont donc incités à accroître au maximum l’effort de pêche, ce qui conduit à la pêche excessive. Ainsi selon Nixon (1997) « Les pêcheurs doivent capturer davantage de poisson pour rentabiliser leurs investissements mais lorsque le rendement maximum des stocks de poisson est atteint, ils doivent pêcher avec plus d’ardeur et plus longtemps, ne serait ce que pour maintenir le niveau de capture; par conséquent, les coûts d’exploitation augmentent et les marges de profit diminuent. Finalement les pêcheurs ne pratiquent plus la pêche pour faire des profits mais simplement pour survivre ». Souvent, surpêche et surcapacité font baisser les profits et poussent les pêcheurs à la faillite. Pour garder la paix sociale et éviter de mettre les pêcheurs au chômage, les Etats aident les flottilles en offrant des subventions ou des avantages fiscaux (comme par exemple la détaxe du carburant) qui permettent aux pêcheurs de subsister et de continuer à surpêcher. Ces subventions sont offertes non seulement à l’industrie de la pêche, mais aussi aux constructeurs de navires. Selon Nixon (1997), entre 1983 et 1990, l’appui offert par l’Union européenne au secteur de la pêche est passé de 80 à 850 milliards de dollars. Une grande partie de cette aide a été destinée à la fabrication de nouveaux bateaux, à la modernisation de vieux navires. Aussi, la majeure partie des gouvernements utilisent la pêche et la transformation du poisson pour créer des emplois. Les organismes d’aide internationale comme la Banque Mondiale et la FAO, ont également contribué à l’augmentation des flottilles de pêche industrielles en encourageant les pays en développement à construire de telles flottilles dans le but d’accroître leurs recettes en devises étrangères, (Fairlie, in Nixon 1997). De cette façon, l’industrie de la pêche augmente, jusqu’à dépasser le rendement soutenable de la ressource.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET POLITIQUES PUBLIQUES DES PECHE EN AFRIQUE DE L’OUEST 
CHAPITRE 1 : La gestion des pêches dans le monde et en Afrique de l’Ouest
CHAPITRE 2: La gestion classique des pêches : caractéristiques, objectifs et limites
CHAPITRE 3 : Les différentes mesures de gestion pour des pêches durables
DEUXIEME PARTIE : LES FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX DE LA PECHE AU SENEGAL ET LEURS VARIABILITES 
CHAPITRE 1 : La côte sénégalaise, un littoral caractérisé par la variabilité des conditions physiques et biologiques
CHAPITRE 2 : La variabilité des facteurs humains et logistiques : Croissance démographique, infrastructures existantes et flux migratoires des pêcheurs
CHAPITRE 3 : L’influence des facteurs économiques : la dynamique spatio-temporelle de la commercialisation, dynamique de prix et pouvoir de marché
TROISIEME PARTIE : CARACTERISATION DES PECHERIES ET ALTERNATIVES DE GESTION DES PECHES SENEGALAISES 
CHAPITRE 1 : Les pêcheries du littoral sénégalais caractérisées par une très grande diversité de par ses usages et ses ressources
CHAPITRE 2 : Les modes d’organisation actuels au niveau local : l’exemple des comités locaux de gestion
CHAPITRE3 : Quel usage peut on faire de cette diversité des stratégies locales et d’appropriation de l’espace halieutique ? Le regard sur la décentralisation et la gouvernance locale
CONCLUSION GENERALE
REMERCIEMENTS

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