Etat des surfaces superhydrophobes, élastomères, anisotropes et magnétiquement modifiables

La superhydrophobie provient d’une interaction subtile entre solide et liquide, que nous proposons de détailler dans ce chapitre. Nous allons tout d’abord définir les caractéristiques d’une surface superhydrophobe, et les deux états de stabilité de la goutte sur une telle surface. Nous résumerons ensuite la littérature traitant du mouillage d’une surface modèle avec des piliers superhydrophobes rigides ou élastiques, puis nous aborderons le thème des surfaces douées de propriétés de mouillage modulables. Nous présenterons en premier lieu les différents types de stimuli externes permettant d’obtenir un mouillage modulable, puis nous nous focaliserons sur le stimulus utilisé dans notre projet qui est le champ magnétique. Après avoir détaillé les caractéristiques des élastomères magnétiques, nous résumerons enfin la littérature traitant des surfaces de piliers élastomères magnétiques permettant de moduler le mouillage de la surface.

Caractéristiques de la superhydrophobie

Energie de surface

Dans une goutte d’eau comme dans n’importe quelle autre phase condensée (solide ou liquide), les molécules sont soumises à des interactions avec leurs voisines. Ces interactions sont cohésives, cependant, à l’interface avec l’air ou un solide, une partie de cette énergie de cohésion est perdue pour former cette interface. La tension de surface est définie comme l’énergie par unité de surface qu’il faut apporter au système (ici la goutte d’eau) pour créer l’interface.

Angle d’Young

Lorsque l’on pose une goutte d’eau sur une surface solide plane et lisse, la goutte adopte un angle de contact d’équilibre avec le solide qui minimise l’énergie du système substrat-goutte. Lorsque la ligne triple, c’est-à-dire la ligne de contact entre la goutte d’eau, la surface solide et l’air, se déplace sur la surface, la variation d’énergie dE mise en jeu lors de ce déplacement dx pour une extension latérale par unité de largeur de la ligne de contact est donnée par l’équation :

dE = (γSL − γSV ) dx + γ cos θ dx (1.1)

Avec γSL, γSV et γ les tensions interfaciales solide-liquide, solide vapeur et liquidevapeur respectivement, et θ l’angle de contact entre la goutte et la surface solide.

Cependant, la loi d’Young n’est valable que dans le cas d’une surface lisse, et non dans le cas d’une surface rugueuse ou présentant des hétérogénéités physiques ou chimiques. Sur une surface rugueuse ou présentant des hétérogénéités physiques, deux types de mouillage sont définis : un état où la goutte est empalée dans les aspérités de la surface (l’état Wenzel), et un état où la goutte repose au sommet des aspérités (l’état Cassie).

Stabilité de l’état Cassie : Transition vers Wenzel

L’état de stabilité Cassie ou Wenzel et la transition de l’état Cassie vers l’état Wenzel ont été beaucoup étudiés dans la littérature [46]. Le groupe de Bico et Quéré s’est penché sur la détermination de l’angle critique de transition entre les états Wenzel et Cassie [47–51].

McHale [56] s’est intéressé aussi à la validité des équations de Cassie-Baxter et de Wenzel pour des surfaces hétérogènes chimiquement ou avec des défauts. Il en a déduit que les propriétés de la surface Φ et r doivent être considérées comme des propriétés globales de la surface, et non comme des propriétés définies par l’aire de contact de la goutte. Cependant, ceci est faux si on a des défauts en surface, auquel cas les lois ne sont plus applicables. De plus, il a démontré que sur une surface superhydrophobe dans un état Cassie-Baxter, le périmètre de la goutte n’est pas équivalent à la longueur de la ligne triple.

Erbil et Cansoy [57] ont quant à eux calculé les déviations entre les angles mesurés cités dans différents articles [58–64] et l’angle calculé par les équations de Cassie et de Wenzel pour une surface de piliers carrés ou cylindriques. Ils ont conclu que la loi de Wenzel ne peut pas être utilisée pour calculer un angle de contact sur une surface à réseau de piliers, car la déviation est trop importante. De plus, le seul cas où la déviation est minimale, et donc où le calcul est valable avec la loi de Cassie Baxter, correspond à une fraction de surface ΦS = 10 %. D’autres groupes de recherche se sont intéressés au calcul de l’angle de contact pour obtenir un modèle en accord avec les résultats expérimentaux différents des modèles de Wenzel et Cassie, comme Suzuki et Ueno [65]. De même, Gao et al. [66] ont montré que le comportement de l’angle de contact est déterminé par les interactions entre la goutte et la surface solide à la ligne triple seulement, et non sur l’aire interfaciale globale. Ainsi, les modèles de Cassie et de Wenzel peuvent être utilisés pour caractériser le mouillage de la surface, mais avec précaution.

L’équipe de Marmur s’est aussi intéressée à la validité des équations de Cassie et Wenzel [67–69]. Elle a montré qu’en faisant vibrer la surface, il était possible de mesurer l’angle de contact à l’équilibre entre la goutte et la surface [70]. De plus, ils ont mis en évidence que l’angle de contact calculé était différent si on prend en compte des considérations locales ou globales. En effet, l’angle de contact, calculé à l’échelle locale en considérant l’énergie de Gibbs [71], donc au niveau de la ligne triple, donne la valeur de l’angle de contact réel. En revanche, en regardant globalement l’interface solide-liquide, l’angle de contact, calculé par la loi de Wenzel ou Cassie suivant le modèle, nous donne l’angle de contact apparent à l’équilibre [72].

Bico et al. [73] ont mesuré les angles de contact sur des surfaces texturées par des piliers et ont montré en comparant leurs mesures avec celles de Shibuichi et al. [74, 75] que, bien que la rugosité de leurs surfaces soit inférieure à celle des surfaces fractales de Shibuichi et al., elle était suffisante pour obtenir des surfaces superhydrophobes, car le paramètre le plus important à contrôler était la fraction de surface et non la rugosité. Ils ont aussi remarqué que l’application d’une pression sur la goutte posée sur une surface superhydrophobe provoquait une diminution brutale de l’angle de contact, synonyme de transition vers l’empalement de la goutte dans la  surface à piliers. Il est possible d’observer la transition entre les deux états de différentes façons. Wang et al. [76] ont utilisé une microbalance à cristal de quartz pour détecter la profondeur de pénétration de la goutte entre les aspérités de la surface. En effet, ils observent une modification du décalage de la fréquence de réponse de la microbalance, qui diminue lorsque le mouillage passe de l’état Cassie à l’état Wenzel. He et al. [77] utilisent, eux, la microfluidique pour observer le ménisque entre les structures pour la transition de mouillage. Ils ont ainsi différencié sept phases intervenant pendant la transition, comportant des phases de dépiégeage, d’affaissement et d’effondrement.

Toujours en s’intéressant à la transition entre les deux états, Bormashenko et al. [78–80] ont démontré que la transition intervient quand la condition pR = constante est remplie, où p est la pression totale dans la goutte et R le rayon de la goutte. Cette transition apparaît donc lorsque le seuil d’une force par unité de longueur de ligne triple est franchi. Ils ont également montré que sous vibration de la goutte, le comportement de la ligne triple était responsable de la transition Cassie-Wenzel. En effet, le déplacement de la ligne triple menant à la transition de mouillage est dû à l’augmentation de la pression de Laplace lors de la résonance de la goutte ou est dû à la force d’inertie quand la fréquence est loin de la résonance.

Dorrer et al. [81] ont montré que, bien que l’état Wenzel demande moins d’énergie que l’état Cassie dans le cas général, il apparaît lors de la condensation que des transitions de goutte d’un état Wenzel vers un état Cassie sont possibles. En effet, la coalescence d’une goutte microscopique en Wenzel avec une goutte en Cassie située au-dessus confère de l’énergie cinétique au système grâce à l’élimination de la zone interfaciale liquide-air, énergie qui est utilisée pour franchir la barrière d’énergie de la transition de l’état Wenzel vers l’état Cassie.

Mouillage de rugosités modèles

Nous allons tout d’abord faire un état de l’art du mouillage de surfaces modèles superhydrophobes composées de forêts de piliers en état Cassie dans le cas de piliers rigides (1.3.1), puis nous introduirons le cas des piliers élastiques (1.3.2).

Cas des piliers rigides

L’évolution du mouillage en fonction de la géométrie de surface est un sujet très répandu dans la littérature [83–86], que ce soit par l’étude des angles de contact ou par la force d’adhésion (équation 1.10) exprimée par la goutte sur la surface.

Force de rétention et angles de contact
Hisler et al. [87] ont décrit le mouillage de réseaux de piliers par le calcul, et montré que l’énergie de l’hystérèse (énergie de dépiégeage de la ligne triple ou énergie de rétention) dépend de la distance interpiliers et du diamètre des piliers, autrement dit de la fraction de surface, et que cette énergie reste constante quelle que soit la taille des piliers (diamètre et hauteur), tant que la fraction de surface demeure constante. Qiao et al. [88] ont quant à eux observé que la force de rétention exercée par la goutte sur la surface augmente avec la fraction de surface, bien que pour une fraction de surface proche de 1 (surface plate), cette force diminue brutalement. Elle est, de plus, fortement affectée par la dimension des microstructures, car elle augmente avec la largeur de ces dernières.

Chen et al. [42] se sont intéressés à la direction de la force d’adhésion sur des surfaces texturées par simulation et à la détermination de cette force en fonction de sa direction.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1 Etat des surfaces superhydrophobes, élastomères, anisotropes et magnétiquement modifiables
1.1 Caractéristiques de la superhydrophobie
1.1.1 Energie de surface
1.1.2 Angle d’Young
1.1.3 Etat Wenzel
1.1.4 Etat Cassie
1.2 Stabilité de l’état Cassie : Transition vers Wenzel
1.3 Mouillage de rugosités modèles
1.3.1 Cas des piliers rigides
1.3.2 Cas des piliers élastiques
1.4 Mouillage de surfaces modulables
1.4.1 Techniques de fabrication de surfaces modulables
1.4.2 Propriétés des piliers élastomères et magnétiques
1.4.3 Mouillage de réseaux de piliers magnétiquement modulables
2 Conception des échantillons et caractérisations
2.1 Réalisation de réseaux de piliers par photolithographie
2.1.1 Etat de l’art sur la photolithographie à fort rapport d’aspect
2.1.2 Optimisation des paramètres de photolithographie
2.2 Réalisation des contre-moules en PDMS
2.3 Réalisation des réseaux de piliers en PDMS avec différents taux de particules magnétiques
2.3.1 Choix des matériaux
2.3.2 Fabrication de la surface
2.4 Géométries créées
2.5 Etude des propriétés visco-élastiques des matériaux utilisés
2.6 Etude des propriétés magnétiques des matériaux utilisés
2.7 Etude de la déflexion des piliers
2.7.1 Impact de la géométrie de surface
2.7.2 Cas original : piliers chaînés
2.7.3 Impact de la formulation du matériau
2.8 Mouillage de surfaces planes
3 Etude du mouillage de piliers élastomères
3.1 Mouillage et géométrie
3.1.1 Effet de la fraction de surface sur le mouillage
3.1.2 Stabilité de l’état Cassie-Baxter
3.2 Mouillage et élasticité
3.2.1 Mesure des angles de contact
3.2.2 Mesure de l’angle de glissement
3.2.3 Etude de l’effet de l’élasticité de pilier sur le déplacement de la ligne triple lors du démouillage
3.2.4 Cas original : interaction des piliers lors du démouillage
4 Etude du mouillage de surfaces magnétiques reconfigurables
4.1 Impact de l’inclinaison des piliers sur l’angle de glissement de goutte
4.2 Impact de l’inclinaison des piliers sur l’aire de contact
4.3 Transition Cassie-Wenzel sur une surface dynamique
4.4 Démouillage sous champ magnétique
4.5 Glissement de goutte contrôlé par le champ magnétique
Conclusion

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *