État des connaissances sur les rejets urbains de temps de pluie (RUTP) 

État des connaissances sur les rejets urbains de temps de pluie (RUTP) 

Définition des RUTP 

Plusieurs auteurs ont tenté de définir les rejets urbains de temps de pluie (RUTP). Pour Hémain (1987), les RUTP désignent « toutes les eaux qui, tombant sur un bassin versant urbanisé, rejoignent directement le milieu récepteur sans passer par un système d’épuration : eaux de pluie, eaux de ruissellement, rejets à l’exutoire des réseaux séparatifs pluviaux, surverses de réseaux unitaires ». De façon plus générale, Chocat et al. (2007) définissent les RUTP comme « l’ensemble des rejets urbains dus aux exutoires pluviaux, aux déversoirs d’orage et à la station d’épuration pendant les périodes pluvieuses. On parle parfois spécifiquement de rejets unitaires de temps de pluie pour désigner le mélange d’eaux usées et d’eaux pluviales rejeté par les déversoirs d’orage pendant les périodes de précipitation ».

Dans le cadre du présent projet de thèse, la définition proposée par Hémain (1987) a été adoptée, et les travaux concernent plus spécifiquement les rejets à l’exutoire des réseaux séparatifs pluviaux et des surverses de réseaux d’égouts unitaires avec emphase sur les dernières citées.

Repères historiques et cadre règlementaire dans l’assainissement urbain 

Jusqu’à la fin des années 1960, les eaux usées des villes étaient gérées quantitativement suivant des considérations plutôt sanitaires et selon le principe du « tout à l’égout » à travers des réseaux d’égouts unitaires collectant conjointement eaux pluviales et eaux usées d’origine domestique, industrielle ou commerciale. Trois études fondamentales menées aux États-Unis ont permis une prise de conscience générale du phénomène de pollution des eaux de ruissellement en milieu urbain (Lessard et Lavallée, 1985). Il s’agit des études de Weibel et al. (1964), de l’American Public Works Association (1969) et de Sartor et Boyd (1972) qui concernaient principalement les rejets des déversoirs d’orage de réseaux d’égouts unitaires.

Aux États-Unis, la première loi fédérale « Clean Water Act » (CWA), adoptée en 1972, définit une première liste de polluants prioritaires (métaux lourds, hydrocarbures, etc.) associés à des critères de qualité. Depuis, plusieurs études d’ampleur ont été menées pour définir les principaux facteurs de pollution liés au ruissellement urbain, estimer les charges de pollution véhiculées par les réseaux d’assainissement urbains : le National Urban Runoff Program (US-EPA, 1978-1983), la campagne française (1980-1982), la base de données Qastor (Saget, 1994) et le bassin versant expérimental « le Marais » (1994-2000). Pour ces campagnes et bien d’autres qui les ont suivies, les analyses physico-chimiques avaient une portée limitée en ne considérant, pour la plus que les paramètres de base. Cette prise de conscience du fait environnemental va s’exprimer à travers plusieurs conférences et sommets internationaux. La première conférence des Nations Unies sur l’eau de Mar Del Plata en 1977 (Argentine) constitue le point de référence dans le domaine de la gestion de l’eau et son développement (Biswas, 2004). L’eau y est alors définie comme un bien commun.

A l’échelle européenne, des directives présentent des listes de polluants analysés et fixent des valeurs limites d’émissions dans les milieux récepteurs (eau de surface ou souterraine). La Directive cadre sur l’eau (DCE) publiée en 2000 (Dir 2000/60/CE) et sa directive fille relative aux Normes de Qualité Environnementale (NQE) (Dir 2008/105/CE) constituent la référence européenne en terme d’exigences sur la qualité des milieux. L’émergence de la DCE a contribué aux travaux sur des micropolluants minéraux et organiques, dont la production et le rejet dans l’environnement sont liés aux activités anthropiques (Becouze, 2010; Birch, 2012; Dembélé, 2010; Gasperi et al., 2011; Zgheib et al., 2012).

À l’échelle du Canada, le CCME a élaboré en 2009 la SPGEM. Cette Stratégie expose le contenu de l’entente conclue par les 14 ministres de l’environnement du pays afin que les propriétaires d’ouvrages d’assainissement disposent d’une réglementation claire en matière de gestion des effluents d’eaux usées municipales, dans un cadre harmonisé qui assure la protection de la santé humaine et de l’environnement. Aux fins de la différenciation du risque que posent les différents niveaux d’eaux usées déversés dans les eaux de surface, la SPGEM a établi une liste de substances potentiellement préoccupantes (paramètres globaux, métaux lourds, hydrocarbures aromatiques, composés phénoliques, pesticides, etc.) pour respecter les objectifs environnementaux de rejets. Cette démarche vise ainsi à réduire la contamination bactériologique provenant des eaux usées domestiques et à diminuer les débordements d’égouts unitaires. Dans la foulée de l’adoption de la SPGEM (CCME, 2009), le gouvernement du Québec a adopté le 11 janvier 2014 son propre Règlement sur les ouvrages municipaux d’assainissement des eaux usées (ROMAEU) qui « permettra de poursuivre les efforts d’assainissement des eaux usées municipales entrepris depuis 1978 afin de redonner à la population québécoise des cours d’eau en santé ». Ce nouveu cadre réglementaire resserre et précise les exigences en matière de surveillance et de contrôle des rejets en prévoyant, notamment, des normes de rejet à l’émissaire, l’interdiction de débordement d’eaux usées non traitées par temps sec, l’obligation pour le personnel affecté à l’opération des stations d’épuration d’avoir une compétence reconnue ainsi que l’obligation pour l’exploitant d’un ouvrage municipal d’assainissement de faire un suivi minimal des rejets et des débordements, de tenir un registre et de produire des rapports et avis (MDDELCC, 2014).

Au Québec, l’assainissement qualitatif des villes reste relativement récent avec l’instauration en 1978 du programme d’assainissement des eaux du Québec (PAEQ, 1978). Ce programme, qui s’appuyait sur le cadre législatif définit par la loi sur la qualité de l’environnement de 1972 (LQE, 1972), visait à réduire entre autres les rejets de matières organiques (MO), de matières en suspension (MES) et de phosphore total (Ptot) provenant des eaux usées domestiques afin de redonner vie aux milieux récepteurs. Dans le cadre de ce programme, environ sept milliards de dollars ont été investis, sur une période de 20 ans, pour le développement des infrastructures de collecte et d’assainissement des eaux usées municipales. Désormais, 98 % de la population du Québec traite ses eaux usées, soit grâce à un système d’assainissement municipal, soit grâce à un système d’assainissement autonome. À l’automne 2002, le gouvernement du Québec s’est donné, une politique nationale de l’eau (PNE) (Gouvernement du Québec, 2002). Celle-ci découle de la catastrophe de Walkerton (Ontario, Canada) survenue le 12 mai 2000 avec le décès de sept personnes à la suite d’un violent orage qui frappa toute la région. Les eaux potables ont alors été contaminées par une souche mortelle de la batterie E. coli. La PNE est bâtie autour de cinq grandes orientations afin (i) d’assurer la protection de cette ressource unique, (ii) de gérer l’eau dans une perspective de développement durable et (iii) de s’assurer, ce faisant, de mieux protéger la santé publique et celle des écosystèmes. L’orientation 4 vise notamment à poursuivre l’assainissement de l’eau et à améliorer la gestion des services de l’eau dans la continuité du PAEQ (1978). Elle regroupe près de 30 engagements gouvernementaux dont l’engagement 43 qui incite l’ensemble des villes québécoises à s’assurer de la pérennité des réseaux municipaux d’eau potable et d’égout. Toutefois au Québec, très peu d’études ont été réalisées sur la caractérisation des RUTP. Les travaux de Lessard et Lavallée (1985) sur cinq BV unitaires de la Ville de Québec (Canada) restent les seules études d’intérêt dans la littérature scientifique. Ces travaux aboutissent à deux principales conclusions largement reprises dans les études subséquentes sur la caractérisation des eaux urbaines à savoir, d’une part, que la majorité de la charge de contaminants véhiculée en temps de pluie dans un réseau unitaire provient du ruissellement de surface et de l’entrainement des dépôts en conduite (Chebbo et Gromaire, 2004) et, d’autre part, que la qualité des eaux de débordements en temps de pluie ne semble pas varier de façon importante d’un bassin à l’autre, même si les occupations des sols sont différentes (Gasperi et al., 2008; Zgheib, 2009).

Sources, transferts et occurrences des polluants des RUTP

L’origine des substances contenues dans les RUTP est multiple et fonction de plusieurs facteurs: type de réseau (unitaire ou séparatif pluvial), origine des eaux (météorique, toiture, chaussée, etc), caractéristiques du BV (occupation des sols, pente, etc), caractéristiques de la pluie (durée, hauteur précipitée, intensité maximale), durée de temps sec précédent une pluie. Des études antérieures ont mis en évidence que les caractéristiques chimiques des RUTP dépendent de la nature des surfaces (chaussée, toitures, etc.) en contact lors du processus de ruissellement ainsi que des processus naturels et des activités anthropiques sur les BV (Eriksson et al., 2007; Gasperi, 2006). Ainsi, quatre principales sources des polluants des RUTP sont identifiées (Parent-Raoul et Boisson, 2007) :
• lessivage de l’atmosphère par les pluies entraînant des poussières et des gaz tels que les oxydes d’azote et de carbone, le dioxyde de soufre, les vapeurs d’hydrocarbures, les métaux lourds et les aérosols (Chocat et al., 2007; Sabin et al., 2005);
• précipitations sur les bâtiments qui entrainent le lessivage des polluants métalliques des toitures dont le cuivre, le zinc et le plomb (Gromaire, 1998);
• ruissellement des eaux de pluie sur les sols urbains ou les surfaces imperméabilisées, impliquant des polluants variés tels que les hydrocarbures, le plomb, les oxydes d’azote, le caoutchouc, le zinc, le cadmium, le cuivre, le titane, le chrome ou l’aluminium (Marsalek et al., 1992; Rule et al., 2006);
• lessivage des réseaux d’assainissement par une remise en suspension des particules sédimentées par temps sec (Gasperi et al., 2010; Gromaire et al., 2001; Gromaire et Chebbo, 2004).

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE 
CHAPITRE 1 ÉTAT DES CONNAISSANCES ET POSITIONNEMENT DE LA
RECHERCHE
1.1 État des connaissances sur les rejets urbains de temps de pluie (RUTP)
1.1.1 Définition des RUTP
1.1.2 Repères historiques et cadre règlementaire dans l’assainissement urbain
1.1.3 Sources, transferts et occurrences des polluants des RUTP
1.1.3.1 Paramètres globaux
1.1.3.2 Micropolluants
1.1.4 Modélisation statistique de la qualité des RUTP
1.1.5 Modèle hydrologique en milieu urbain et calage
1.1.6 Caractérisation écotoxicologique des RUTP et évaluation du risque
1.1.7 Impacts des RUTP sur le milieu récepteur
1.2 Article 1: Which rainfall for climate change impact studies in urban areas?.
1.2.1 Résumé
1.2.2 Abstract
1.2.3 Introduction
1.2.4 Concept and terminology
1.2.4.1 Downscaling
1.2.4.2 Periods of interest
1.2.4.3 Climate data
1.2.4.4 Extreme rainfall events – IDF curves
1.2.5 General downscaling approach
1.2.5.1 Dynamical downscaling
1.2.5.2 Statistical downscaling
1.2.6 Specific approaches of downscaling for urban watersheds
1.2.6.1 Change factor (or Delta change) approach
1.2.6.2 Bias correction approach
1.2.6.3 Empirical approach
1.2.6.4 Linear regression approach
1.2.7 Uncertainties and variability
1.2.8 Conclusions and future considerations
1.2.9 Acknowledgments
1.3 Conclusions et perspectives de l’état des connaissances
1.4 Positionnement du sujet de recherche
1.4.1 Problématique de recherche
1.4.2 Hypothèses de recherche
1.4.3 Objectif général et objectifs spécifiques
CHAPITRE 2 MATÉRIELS ET MÉTHODES 
2.1 Cadre expérimental
2.1.1 Cadre de l’étude, critères et choix des sites
2.1.2 Description des sites étudiés
2.1.3 Instrumentation des sites et protocoles d’échantillonnage
2.1.4 Caractéristiques des événements pluvieux suivis
2.1.5 Caractéristiques du milieu récepteur (Fleuve Saint-Laurent)
2.1.6 Paramètres de suivi et protocole d’analyse
2.1.7 Bioessais pour l’évaluation écotoxicologique des RUTP
2.2 Modélisation de l’impact du changement climatique
2.2.1 Modèles climatiques
2.2.2 Périodes d’intérêt visées
2.2.3 Scénarios de changements climatiques
2.2.4 Modèle d’impact et calage
2.3 Exploitation des données
2.3.1 Concentrations moyennes événementielles
2.3.2 Flux évènementiels
2.3.3 Analyse de corrélation linéaire
2.3.4 Évaluation écotoxicologique des RUTP
2.3.5 Évaluation quantitative et qualitative de l’impact des
changements climatiques
CHAPITRE 3 ARTICLE 2: ANALYSIS OF THE INFLUENCE OF RAINFALL
VARIABLES ON URBAN EFFLUENTS CONCENTRATIONS
AND FLUXES IN WET WEATHER 
3.1 Résumé
3.2 Abstract
3.3 Introduction
3.4 Materials and methods
3.4.1 Experimental framework: study sites, sampling procedure,
monitored parameters and rainfall events
3.4.2 Data Processing
3.5 Results and discussion
3.5.1 Concentrations and fluxes measured at both sites
3.5.2 Analysis of correlations between rainfall variables and EMC
and EF values
3.5.3 Distribution of EMC and EF values of COD, CBOD5, Ptot
and N-TKN as a function of TSS
3.5.4 Univariate analysis of correlation between VD and
conventional rainfall parameters
3.6 Conclusion
3.7 Acknowledgments
CHAPITRE 4 ARTICLE 3: ASSESSMENT OF THE ECOTOXICOLOGICAL RISK
OF SEWER OVERFLOWS FOR AN AQUATIC SYSTEM USING A
COUPLED « SUBSTANCES AND BIOESSAIS » APPROCH 
4.1 Résumé
4.2 Abstract
4.3 Introduction
4.4 Materials and methods
4.4.1 Experimental framework
4.4.1.1 Study site
4.4.1.2 Receiving water body
4.4.1.3 Rainfall monitoring and dilution factor
4.4.2 Ecotoxicological risk assessment methodology
4.4.2.1 Sources of substances and physicochemical
characterization of CSO discharges
4.4.2.2 Assessment of the ecotoxicity of waters
discharged at the CSO
4.4.2.3 Assessment of the overflow discharge hazard,
exposure and risk
4.5 Results and Discussion
4.5.1 Physicochemical characterization of CSOs
4.5.2 Assessment of the ecotoxicity of combined sewer overflows
4.5.3 Hazard assessment of combined sewer overflows
4.5.3.1 Assessing potential hazard using the substance
approach
4.5.3.2 Assessing effluent ecotoxicity hazard using the
bioassay approach
4.5.4 Risk assessment for overflow wastewaters
4.5.4.1 Substances approach
4.5.4.2 Bioassay approach
4.6 Complementary nature of the two ecotoxicological risk assessment approaches
4.7 Conclusions and future considerations
4.8 Acknowledgments
CHAPITRE 5 ARTICLE 4: QUANTITATIVE AND QUALITATIVE ASSESSMENT
OF THE IMPACT OF CLIMATE CHANGE ON A COMBINED
SEWER OVERFLOW AND ITS RECEIVING WATER BOBY
5.1 Résumé
5.2 Abstract
5.3 Introduction
5.4 Climate change scenario
5.4.1 Extreme precipitation events in southern Quebec, Canada
5.4.2 Flow in the St. Lawrence River at Montreal
5.5 Materials and methods
5.5.1 The “Rolland-Therrien” experimental catchment
5.5.2 Observational data
5.5.3 Impact model and calibration
5.5.4 Data analysis
5.6 Results and discussion
5.6.1 Quantitative assessment of the impact of climate change
5.6.1.1 Model calibration
5.6.1.2 Estimation of VD and Qcso
5.6.2 Qualitative assessment of the impact of climate change
5.6.2.1 Estimating EFs of pollutants discharged at CSO
5.6.2.2 Ecotoxicological risk assessment using the
substance approach
5.7 Conclusion and future consideration
5.8 Acknowledgments
CHAPITRE 6 DISCUSSION GÉNÉRALE 
6.1 Synthèse des principaux résultats
6.1.1 Caractérisation physico-chimique
6.1.2 Influence des caractéristiques de la pluie sur les indicateurs
de la qualité
6.1.3 Outils d’évaluation du risque écotoxicologique des effluents
sur le milieu récepteur
6.1.4 Influence de l’aménagement du territoire urbain sur la
génération des flux
6.1.5 Impact des changements climatiques et incertitudes
6.2 Contribution à l’avancement des connaissances et originalité de la recherche
6.2.1 État des connaissances sur l’impact des changements
climatiques sur les surverses d’égout unitaire
6.2.2 État des connaissances sur les outils de gestion de la
pollution des RUTP
6.2.3 État des connaissances sur la pollution en micropolluants
dans les RUTP
6.2.4 Originalité de la recherche
6.3 Perspectives de recherche
6.3.1 Caractérisation des MES et des dépôts en réseau unitaire
6.3.2 Gestion et maitrise à la source de la pollution urbaine
6.3.3 Évaluation du risque écotoxicologique de l’effluent urbain
non traité
6.3.4 Efficacité épuratoire des technologies de traitement vis-à-vis
des micropolluants
6.3.5 Efficacité des stratégies d’aménagement du territoire
urbain futur
6.4 Limites de la recherche
CONCLUSION GÉNÉRALE

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