Etat de l’art sur les machefers d’incineration : synthese et focus en interaction cimentaire

Les mâchefers d’incinération de déchets non dangereux (MIDND) : de leur génèse aux filières de valorisation

Origine, chiffres-clés et spécificité de la matière première secondaire 

L’incinération est un mode de traitement des déchets non dangereux qui consiste à les brûler à haute température. L’incinération permet la réduction du volume (90%) et du poids (70%) des déchets entrants[3][4]. Ce mode de traitement conduit à :
– une minéralisation de ces déchets avec la production de MIDND (Mâchefers d’Incinération de déchets non dangereux) ;
– une concentration des principaux polluants, présents dans les déchets entrants ou issus de la combustion, dans les REFIOM (Résidus d’Épuration des Fumées d’Incinération des Ordures Ménagères) ;
– une valorisation énergétique sous forme de chaleur et/ou d’électricité ;
– au traitement des déchets non sélectionnés contrairement à d’autres modes de valorisation (tri, compostage, etc.). Des refus de tri peuvent cependant être incinérés.

Une usine d’incinération d’ordures ménagères se compose d’une fosse de réception des déchets, d’un four-chaudière (récupération de vapeur pour la valorisation énergétique des déchets sous forme de chaleur et/ou d’électricité), d’une unité de traitement des fumées, d’une unité d’entreposage des REFIOM (déchets dangereux) avant évacuation et d’une unité d’entreposage des MIDND (déchets non dangereux) avant évacuation. La température au cœur du foyer est supérieure à 850°C sans qu’il soit possible de la connaître directement (l’étude minéralogique des MIDND permet d’y accéder). Elle varie selon le fonctionnement du four, sa charge et le Pouvoir Calorifique Inférieur (PCI) des ordures.

Les MIDND sont des résidus solides, dits « scories », récupérés en fin combustion dans des fours d’usine d’incinération, issus de la fraction collectée des ordures ménagères et en général plus ou moins mélangée à d’autres déchets issus des entreprises, commerces et administrations. Les mâchefers d’incinération de déchets non dangereux (MIDND) proviennent des Unités d’Incinération de Déchets non Dangereux (UIDND) ; certaines d’entre elles sont des Centres de Valorisation Énergétique (CVE)[6][7].

Chaque année, près de 3 millions de tonnes de mâchefers sont produites par les 126 installations françaises de traitement thermique de déchets non dangereux qui traitent plus de 14 millions de tonnes de déchets[6]. Les MIDND représentent 20% des déchets incinérés en poids et 10% en volume. Deux millions de tonnes de graves de mâchefers sont recyclées chaque année après une phase de maturation et de préparation spécifique dans les 75 Installations de Maturation et d’Elaboration (IME) présentes en France en 2016[6].

Plusieurs paramètres majeurs influent sur les propriétés physiques, chimiques et minéralogiques des MIDND : provenance/composition variable et tri sélectif des ordures ménagères en amont, choix du type d’incinérateur (technologie du four), paramètres de conduite (temps de séjour, excès d’air, etc.), mode de refroidissement, processus de maturation et type de séparateurs magnétiques utilisés [9][10][11]. En sortie de four, les MIDND sont généralement refroidis à l’eau ; ils contiennent 15 à 25 % d’eau et 6 à 10% de métaux récupérables, métaux ferreux (MF) de l’ordre de 6-9 % et métaux non ferreux (MNF) de l’ordre de 0.5- 2%. Les MIDND sont des matériaux alcalins ; leur composition chimique est principalement minérale (silice-calcium-alumine), avec la présence de sels chlorures et sulfates, d’imbrûlés et de métaux lourds.

Opérations de préparation et d’élaboration des mâchefers 

Avant leur sortie de l’usine d’incinération, les MIDND bruts peuvent subir un certain nombre d’opérations d’homogénéisation. Ces opérations seront plus poussées ensuite dans des Installation de Maturation et en Installation de Maturation et d’Elaboration (IME)[7]. Les opérations pouvant être réalisées sur les MIDND dès leur sortie de four sont le criblage (opération permettant de débarrasser les MIDND des déchets les plus volumineux, notamment des déchets métalliques, et de briser d’éventuels blocs MIDND-déchets métalliques creux), le retrait des métaux ferreux par over-band et le retrait des métaux non-ferreux par machine séparatrice à courant de Foucault [14]. Les métaux séparés sont dirigés vers des filières de valorisation « matière », quel que soit le devenir envisagé pour les MIDND. Ces derniers peuvent être entreposés momentanément avant leur envoi vers une IME (connexe à l’installation soit externe au site de l’unité de traitement thermique) ou un centre de stockage de déchets non dangereux (ou ISDND).

Les IME récupèrent les mâchefers issus des unités de traitement thermique pour les transformer en graves dans l’objectif de les recycler principalement en technique routière. L’opération d’élaboration repose sur une combinaison de traitements physiques et de traitements physico-chimiques avec pour objectif de produire un matériau granulaire alternatif à partir de mâchefers [15]. Les opérations qui sont le plus souvent réalisées sur les IME sont la maturation, le criblage, les opérations de concassage, l’extraction des imbrulés de grandes tailles et l’extraction des métaux ferreux (MF) et des métaux non-ferreux (MNF). L’élaboration a lieu au cours de la maturation ou après.

Phase de maturation

Au cours de la maturation des mâchefers à l’air libre, un ensemble de réactions physico-chimiques ont lieu et reposent essentiellement sur une carbonatation de la chaux par le dioxyde de carbone atmosphérique, ainsi qu’une minéralisation des composés chimiques instables en sortie de l’incinération. Ces mécanismes de maturation conduisent à une diminution du potentiel d’hydrogène (pH) du mâchefer, ce qui a pour effet de réduire son potentiel polluant en rendant insolubles les hydroxydes de la plus grande partie des métaux lourds. Ils permettent également d’assurer une stabilité des caractéristiques géotechniques et environnementales des mâchefers en fin de maturation[16],[17]. Plus finement, diverses études ont permis de mieux comprendre ce processus physico-chimique [18], [19],[20], [21],. En sus du phénomène de lessivage des chlorures suite à la dissolution des sels (NaCl, KCl), la trempe des MIDND en sortie de four a pour effet la dissolution de la portlandite Ca(OH)2 qui constitue une réaction majeure de la phase de maturation. L’hydratation de la chaux CaO lors de la trempe est fortement exothermique. La dissolution de la portlandite libère du calcium et des ions OH- conduisant à des pH très alcalins (> 12) favorisant la diffusion du CO2 atmosphérique dans l’eau d’hydratation des MIDND sous-forme CO3 2- , entraînant la précipitation de carbonates et notamment de la calcite CaCO3. La dissolution de CO2 dans l’eau se traduit par une neutralisation progressive des ions OH-. La baisse de pH induite par la carbonatation et la diminution des quantités de calcium libéré par la portlandite favorise la solubilisation du gypse CaSO4 et le lessivage des sulfates. La baisse du pH conduit également à la diminution de la solubilité d’un certain nombre de métaux amphotères (notamment Pb et Cr) qui précipitent sous forme d’hydroxydes. Des métaux (Pb, Zn) peuvent aussi se trouver inclus dans la calcite néoformée.

Phase d’élaboration (« MIDND élaborés »)

Les opérations d’homogénéisation et de criblage réalisées sur les IME sont plus poussées que celles réalisées en sortie de four. Toutefois, elles ne se limitent pas forcément au criblage et au déferaillage. Aussi, l’arrêté du 18/11/2011 [22] indique que « la phase d’élaboration au sein de l’IME comprend a minima un tri permettant d’extraire les matières indésirables dans le matériau routier, en particulier les métaux et les imbrûlés de grande taille ».

Pour être homogène du point de vue terminologique, on dira que les matériaux issus d’une IME sont des « MIDND élaborés ». Les opérations visant à améliorer l’homogénéité et la qualité des MIDND en vue de leur utilisation en technique routière (principale filière de valorisation) sont :
✽ le criblage ou scalpage, éventuellement complété par un concassage, en vue de faire rentrer le matériau dans un fuseau granulométrique de grave non traitée ;
✽ le retrait des métaux ferreux par over-band ;
✽ le retrait des métaux non-ferreux par machine à courant de Foucault ;
✽ le retrait des imbrûlés résiduels par soufflage (papiers, cartons et plastiques).

Ces opérations peuvent être réalisées une ou plusieurs fois pour améliorer le résultat final et être conduites sur différentes fractions granulométriques des MIDND. Les matériaux extraits rejoignent des filières de valorisation matière.

A la sortie de l’IME, la grave de mâchefer est un matériau alternatif classé F61 selon la norme AFNOR « Classification des matériaux utilisables dans la construction des remblais et des couches de forme d’infrastructures routière »[24]. Une fois les opérations d’élaboration terminées, les graves de mâchefer sont analysées afin de déterminer leur conformité à la réglementation [22]. Les graves de mâchefer conformes sont destinées à être recyclées, tandis que les mâchefers non conformes doivent être stockés en installations de stockage.

Au sein d’une IME, après maturation, les MIDND élaborés doivent vérifier les critères de recyclage liés notamment à leur usage routier, à leur comportement à la lixiviation et à leur teneur intrinsèque en éléments polluants. Les résultats des essais de lixiviation et d’analyse du contenu total doivent être conformes aux paramètres et seuils introduits par l’arrêté du 18/11/2011[22]. Les MIDND élaborés doivent remplir au minimum les conditions des usages routiers de type 1 ou 2 définis par l’arrêté. L’appartenance des MIDND élaborés à ces types d’usage est déterminée par des analyses périodiques au stade de leur production. Les MIDND élaborés ne répondant pas aux seuils de ces usages routiers de type 1 ou 2 doivent rejoindre directement une Installation de Stockage de Déchets Non Dangereux (ISDND). L’arrêté du 18/11/2011 fixe la durée de stockage en IME à trois ans maximum. Passé ce délai, les lots de MIDND élaborés doivent être évacués vers une ISDND.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
1 CHAPITRE 1 – ETAT DE L’ART SUR LES MACHEFERS D’INCINERATION : SYNTHESE ET FOCUS EN INTERACTION CIMENTAIRE
1.1 INTRODUCTION
1.2 LES MACHEFERS D’INCINERATION DE DECHETS NON DANGEREUX (MIDND) : DE LEUR GENESE AUX FILIERES DE VALORISATION
1.2.1 ORIGINE, CHIFFRES-CLES ET SPECIFICITE DE LA MATIERE PREMIERE SECONDAIRE
1.2.2 OPERATIONS DE PREPARATION ET D’ELABORATION DES MACHEFERS
1.2.2.1 Phase de maturation
1.2.2.2 Phase d’élaboration (« MIDND élaborés »)
1.2.2.3 Traitements complémentaires des MIDND en sortie d’IME
1.2.2.4 Techniques de traitements avancés des granulats de mâchefers
1.2.3 CADRES REGLEMENTAIRES
1.2.3.1 Cadre réglementaire en France
1.2.3.2 Cadre réglementaire en Europe
1.2.4 CARACTERISATION DES MIND : ASPECTS PHYSIQUES-CHIMIQUES, MINERALOGIQUES ET ENVIRONNEMENTALES
1.2.4.1 Caractérisation physico-chimique
1.2.4.2 Caractérisation minéralogique
1.2.4.3 Caractérisation physique-géotechnique
1.2.4.4 Caractérisation environnementale
1.2.5 FILIERES DE VALORISATION DES MIDND
1.2.5.1 Valorisation en technique routière
1.2.5.2 Valorisation dans les matériaux cimentaires
1.3 ETAT DE L’ART SUR LES MACHEFERS MIDND EN INTERACTION CIMENTAIRE
1.3.1 PATHOLOGIES EN INTERACTION CIMENTAIRE
1.3.1.1 Formation des hydroxydes d’aluminium et des aluminates
1.3.1.2 Réaction alcali-silice
1.3.1.3 Formation d’ettringite secondaire
1.3.1.4 Hydratation de la chaux et des oxydes de magnésium
1.3.1.5 Conclusions sur la pathologie de gonflement en interaction mâchefer
1.3.2 ETAT DE L’ART SUR L’HYDRATATION ET LA MICROSTRUCTURE DES PATES DE CIMENT A BASE DE CIMENTS PORTLAND ET SULFO-ALUMINEUX
1.3.2.1 Introduction
1.3.2.2 Microstructure du mortier
1.3.2.3 Le ciment Portland (OPC)
1.3.2.4 Le ciment Sulfo-Alumineux (CSA)
1.3.2.5 La réactivité des ciments
1.3.2.6 L’hydratation du ciment Portland
1.3.2.7 L’hydratation du ciment sulfo-alumineux
1.4 CONCLUSIONS
2 CHAPITRE 2 – PRESENTATION DU MATERIAU « MACHEFER » DE L’ETUDE : PROVENANCE, ELABORATION ET CARACTERISTIQUES
2.1 INTRODUCTION
2.2 PROVENANCE ET ELABORATION CLASSIQUE DES MACHEFERS 0/20 MM
2.3 ELABORATION DE GRANULATS DE MACHEFERS 0/2 MM : TECHNIQUE DE TRANSFORMATION ET APPLICATION A UN MACHEFER 0/20 MM
2.3.1 TRANSFORMATION DU MACHEFER GROSSIER 0/20 MM EN SABLE DE MACHEFER 0/2 MM
2.3.2 APPLICATION A UN MACHEFER 0/20 MM POUR ELABORATION DES SABLES DE MACHEFERS DE L’ETUDE
2.4 CARACTERISTIQUES PHYSIQUES DES MACHEFERS 0/2 MM
2.4.1 MASSES VOLUMIQUES
2.4.2 COEFFICIENT D’ABSORPTION D’EAU
2.4.3 PERTE AU FEU
2.4.4 CARACTERISTIQUES GRANULOMETRIQUES
2.4.5 ANGULARITE DES SABLES DE MACHEFERS 0/2 MM ELABORES
2.5 CARACTERISTIQUES CHIMIQUES ET MINERALOGIQUES DES MACHEFERS 0/2 MM ELABORES
2.6 CARACTERISTIQUES ENVIRONNEMENTALES DES MACHEFERS 0/2 MM
2.7 CONCLUSIONS
3 CHAPITRE 3 – COMPORTEMENT DES SABLES DE MACHEFERS ELABORES EN INTERACTION CIMENTAIRE
3.1 INTRODUCTION
3.2 MATERIAUX DE L’ETUDE
3.2.1 CHOIX DES CIMENTS
3.2.2 CHOIX DES SABLES DE MORTIERS
3.3 METHODOLOGIE DE FORMULATION DES MORTIERS
3.3.1 CONFECTION EXPERIMENTALE ET COMPOSITION DES MORTIERS
3.4 EVALUATION DE L’IMPACT DE L’INCORPORATION DE SABLES DE MACHEFERS SUR L’HYDRATATION : ASPECTS COMPARATIFS MORTIERS OPC / CSA
3.5 CARACTERISATION MECANIQUE DES MORTIERS OPC ET CSA
3.5.1 ECHEANCES DE CURE DES MORTIERS
3.5.2 EVALUATION DES PERFORMANCES MECANIQUES
3.5.2.1 Résistances à la flexion des mortiers OPC et CSA
3.5.2.2 Résistances à la compression monoaxiale des mortiers OPC et CSA
3.6 CARACTERISATION DU RESEAU POREUX DES MORTIERS OPC ET CSA A 90 JOURS
3.6.1.1 Préparation des échantillons
3.6.1.2 Porosité globale des mortiers OPC et CSA à 28 jours et 90 jours
3.6.1.3 Porosité nanométrique fractionnée des mortiers OPC et CSA à 90 jours
3.6.2 PHENOMENE DE DEGAGEMENT D’HYDROGENE : IMPACT SUR LA POROSITE DES MATRICES
3.7 CARACTERISATION ENVIRONNEMENTALE DES MORTIERS OPC ET CSA
3.8 PERSPECTIVE : CAS DE L’ADJUVANTATION DES MORTIERS OPC ET CSA
3.8.1 CHOIX DE L’ADJUVANT ET DOSAGE A SATURATION DES CIMENTS OPC ET CSA
3.8.2 PREPARATION ET COMPOSITION DES MORTIERS
3.8.3 CARACTERISATION MECANIQUE DES MORTIERS ADJUVANTES OPCADJ ET CSAADJ
3.8.3.1 Résistance à la flexion des mortiers OPCadj et CSAadj
3.1.1.1 Résistance à la compression monoaxiale des mortiers OPCadj et CSAadj
3.9 CONCLUSIONS
CONCLUSION GENERALE

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