État de l’art de la mise en forme de composites à matrice PEEK

Actuellement, les procédés de thermoformage sont les procédés les plus utilisés pour la mise en forme de composites thermoplastiques aéronautiques à matrice PPS (polysulfure de phénylène) et PEEK (polyétheréthercétone). Cependant, ces méthodes sont peu adaptées à la réalisation de pièces épaisses, d’où la nécessité de proposer une autre démarche de mise en œuvre. Les procédés de thermoformages seront la base support du développement de nouvelles idées de mise en œuvre. Une bonne compréhension de ceux-ci est donc nécessaire.

Généralités sur la constitution d’un composite à matrice thermoplastique et à fibres continues 

Les matrices thermoplastiques 

Les matrices thermoplastiques sont constituées de longues chaines macromoléculaires linéaires ou ramifiées. Les chaines, enchevêtrées à l’état fondu, peuvent lors d’un refroidissement s’organiser ou rester en l’état. La capacité des chaines macromoléculaires à s’organiser dépend de plusieurs facteurs structuraux. L’organisation des macromolécules est nommée cristallisation. Ces deux comportements distincts, organisation ou absence d’organisation, sont caractéristiques, respectivement, d’un thermoplastique semi-cristallin et d’un thermoplastique amorphe.

Les matrices thermoplastiques amorphes
Les matériaux thermoplastiques amorphes ont la propriété d’être dépourvus d’ordre macromoléculaire. Cette caractéristique est expliquée par l’absence de stéréorégularité empêchant une organisation locale des macromolécules. Étant dans l’incapacité de cristalliser, les thermoplastiques amorphes ne présentent qu’une seule transition thermique : la température de transition vitreuse, notée Tg. Au passage de cette température, les propriétés des polymères amorphes sont fortement impactées. La variation du volume spécifique au passage de la Tg est par exemple . En-dessous de celle-ci, le matériau amorphe est hors état d’équilibre empêchant les groupements chimiques les plus volumineux de bouger. Au-dessus de Tg, il est dans un état d’équilibre métastable apparentant son comportement à celui d’un liquide surfondu. Cette transition fait intervenir le phénomène de relaxation.

Son caractère amorphe lui confère une bonne tenue au choc mais lui attribue une faible résistance au solvant, qui s’explique par la facilité de diffusion des petites molécules à travers les chaines enchevêtrées. Différentes matrices thermoplastiques amorphes sont utilisées dans les composites telles que : les polycarbonates (PC), le polyétherimide (PEI), le polyamide-imide (PAI), le polyimide (TPI) et le polyéthersulfone (PES).

Les matrices thermoplastiques semi-cristallines

Les matériaux thermoplastiques semi-cristallins présentent une phase amorphe et une phase cristalline. Le taux de chaque phase dépend de facteurs structuraux (principalement la longueur des chaines, la présence de ramifications, la présence de groupements volumineux comme les groupements aromatiques) et de l’histoire thermique du matériau dans le cas statique, c’est à dire sans déformation. La cristallisation est généralement obtenue à partir de l’état fondu. Cependant pour un semi-cristallin trempé, la cristallisation peut être aussi envisagée à partir de l’état caoutchoutique, ce cas est nommé « cristallisation à froid ». En effet, le procédé de trempe permet de rendre le matériau amorphe, lui conférant ainsi, après la transition vitreuse, une mobilité suffisante pour pouvoir cristalliser dans l’état métastable.

Microstructure de la phase cristalline
Dans les deux conditions de cristallisation, à partir du fondu ou à froid, les chaines macromoléculaires vont pouvoir s’arranger parallèlement les unes aux autres, formant ainsi les lamelles cristallines. Une chaine peut appartenir à plusieurs lamelles adjacentes, celles-ci sont alors séparées par des zones interlamellaires amorphes. Les longueurs caractéristiques de ces lamelles sont de l’ordre de 10 à 20 nanomètres. L’agglomération importante des lamelles forme un amas sphérique tronqué appelé sphérolite.

Un polymère semi-cristallin présente plusieurs températures de transition thermiques.  Ce thermogramme est obtenu par DSC (Differential Scanning Calorimetry) sur du PEEK quasi-amorphe. Cet état du matériau permet la visualisation de toutes les températures de transition d’un thermoplastique semi-cristallin : la température de la transition vitreuse (Tg), la température de cristallisation (Tc) et la température de fusion (Tf ).

Le saut athermique (1) défini la transition vitreuse, cette transition est commune avec les thermoplastiques amorphes. Elle est interprétée mécaniquement par une relaxation désignée α, qui correspond à des mouvements généralisés et à longue distance de la chaine de polymère. Pour un semi-cristallin cela se traduit par la relaxation des parties de la phase amorphe « libre », contrairement aux fractions de la phase amorphe dite « rigide » présente à l’interface cristaux/zone amorphe [Chen+2009 ; Ma+2011]. La relaxation de ces fractions rigides restera difficile même à haute température. La cristallisation réduit la mobilité de la phase amorphe et entraine une augmentation de Tg [Atkinson+2001 ; Cheng+1986 ; Mano+2005].

Les renforts et les semi-produits 

Les renforts et leurs architectures 

Les principaux renforts sont constitués de fibres de verre, de carbone ou de polymères. Pour des applications structurales, ce sont les renforts à base de fibres de carbone qui le plus souvent sont utilisées. Vis-à-vis de l’acier, ces fibres présentent des performances mécaniques comparables ou supérieures pour une densité bien plus faible. Les fibres de carbone sont obtenues à partir de précurseurs organiques (PolyAcryloNitrile : PAN, bai, Rayonne). C’est le PAN qui est utilisé pour la fabrication de fibres de carbone à vocation de renfort. Le précurseur est oxydé sous air puis subit une carbonisation sous azote, les fibres ainsi obtenues sont dites « HR », à haute résistance. Une étape peut suivre la carbonisation, appelée graphitisation, permettant l’obtention d’une fibre dite de haut module « HM ». Les fibres obtenues sont généralement des filaments microscopiques d’un diamètre de 5 à 10 µm. Plusieurs dispositions des fibres sont possibles pour composer le renfort, elles définissent l’architecture de ce dernier. Deux grandes familles d’architectures existent pour les composites à renfort continu :
— Les fibres peuvent être juxtaposées parallèlement pour constituer un monopli unidirectionnel ou une nappe.
— Les fibres peuvent être aussi regroupées sous forme de mèches pour être tissées générant ainsi une surface définie par deux orientations : chaine et trame. Les renforts ainsi formés sont dis « tissés ».

Les semi-produits existants

Les matrices thermoplastiques sont caractérisées par une viscosité élevée à l’état fondu, jusqu’à 1000 fois supérieure à celle des résines pour thermodurcissables. La technologie historiquement développée pour mettre en œuvre les composites thermoplastiques est le « film stacking » ou empilement de films. Le laminé qui en découle est la succession d’une couche de fibres et d’un film de polymère. Le contrôle du taux matrice/fibres se fait par modification des séquences d’empilement. Pour ce semi-produit, le mouillage des fibres est difficile, notamment parce que l’obtention d’une imprégnation acceptable nécessite une importante distance de parcours de la résine. L’application d’une pression élevée est à même de favoriser l’imprégnation. Cependant une pression trop importante a pour conséquence d’écraser les fibres et d’entraver l’imprégnation.

Le poudré
Le semi-produit poudré est obtenu après dépôt de fines particules de polymère sur les deux surfaces d’un renfort. Pour réaliser ce dépôt, la poudre de polymère est projetée à la surface du renfort après avoir été chargée électriquement. La couche de poudre ainsi formée est ensuite fondue dans un four infrarouge. Le semi-produit obtenu présente une bonne flexibilité favorisant ainsi sa drapabilité.

Le comélé
Ce semi-produit permet, comme le poudré, de réduire la distance de parcours de la matrice lors de l’imprégnation tout en gardant une bonne drapabilité. Pour ce faire, le semi-produit est constitué de mèches particulières, dites « comélées », formées par l’association de filaments de thermoplastique et de carbone. Le tissage de ces mèches aboutit au semi-produit tissé comélé.

Le pré-imprégné
Une couche de ce semi-produit est constituée d’une matrice thermoplastique imprégnée dans un renfort fibreux, ainsi le pré-imprégné est dit pré-consolidé. Trois procédés principaux sont utilisés pour élaborer les pre-imprégnés thermoplastiques :
— le procédé de colaminage qui consiste à laminer à chaud un film thermoplastique sur un renfort unidirectionnel (procédé utilisé pour élaborer le prepreg APC2 étudié dans cette thèse).
— le procédé hotmelt qui consiste à venir extruder de la matrice thermoplastique dans une filière dans laquelle passe le renfort unidirectionnel.
— le procédé d’imprégnation du renfort fibreux par des poudres en suspension aqueuse, suivi d’une évaporation de l’eau et fusion/imprégnation en four infrarouge.

La consolidation du composite en est grandement facilitée, mais au détriment cependant de la drapabilité du semi-produit. De ce fait, les géométries réalisables et les moyens de mise en œuvre sont limités.

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Table des matières

Introduction
1 État de l’art de la mise en forme de composites à matrice PEEK
1.1 Introduction
1.2 Généralités sur la constitution d’un composite à matrice thermoplastique et à fibres continues
1.2.1 Les matrices thermoplastiques
1.2.1.1 Les matrices thermoplastiques amorphes
1.2.1.2 Les matrices thermoplastiques semi-cristallines
1.2.2 Les renforts et les semi-produits
1.2.2.1 Les renforts et leurs architectures
1.2.2.2 Les semi-produits existants
1.2.3 Le matériau de l’étude : un pré-imprégné unidirectionnel carbone/PEEK
1.3 Le PEEK : une matrice thermoplastique pour des applications structurales
1.3.1 Présentation de sa microstructure
1.3.1.1 Synthèse
1.3.1.2 Structure cristalline
1.3.2 La cristallisation du PEEK
1.3.2.1 Mécanismes de cristallisation
1.3.2.2 Conditions de cristallisation
1.3.2.3 Fusion particulière du PEEK
1.3.3 Comportement thermomécanique du PEEK
1.3.3.1 Propriétés générales
1.3.3.2 Influence de la cristallinité
1.3.3.3 Influence de la masse molaire
1.4 Procédés de thermoformage pour composite carbone/PEEK
1.4.1 Les différents procédés de thermoformage
1.4.2 Présentation de deux étapes clés : la pré-consolidation et la mise en forme
1.4.2.1 L’étape de pré-consolidation
1.4.2.2 L’étape de mise en forme
1.4.3 Mise en place d’alternatives aux procédés conventionnels
1.5 Conclusion
2 Étude de la matrice PEEK pour une mise en forme sous la température de fusion
2.1 Introduction
2.2 Fenêtre de processabilité du PEEK sous la température de fusion
2.2.1 Définition du comportement mécanique approprié
2.2.1.1 Influence de la microstructure
2.2.1.2 Influence de la température
2.2.2 Détermination de la fenêtre de processabilité
2.2.2.1 Comportement mécanique du PEEK amorphe dans l’état caoutchoutique
2.2.2.2 Étude de la cristallisation froide
2.3 Propriété d’auto-adhésion du PEEK amorphe dans l’état caoutchoutique
2.3.1 Caractérisation de l’adhésion
2.3.1.1 Méthodologie
2.3.1.2 Influence de la pression
2.3.1.3 Influence de la température
2.3.2 Influence du réseau cristallin sur l’adhésion
2.3.2.1 Analyse de la zone de contact
2.3.2.2 Effet du recuit sur la cristallisation
2.4 Conclusion
3 Procédé innovant de mise en œuvre de composites thermoplastiques dans le domaine caoutchoutique
3.1 Introduction
3.2 Une mise en forme dans l’état caoutchoutique de la matrice
3.2.1 Thermoformage de prepregs et de laminés thermoplastiques
3.2.2 Présentation du procédé de mise en forme proposé : le thermo-pliage
3.2.3 Description des mécanismes de déformation
3.3 Validation du procédé par réalisation d’éprouvettes technologiques
3.3.1 Description des deux méthodes de mise en œuvre
3.3.1.1 Géométrie et empilement des éprouvettes composites
3.3.1.2 Mise en oeuvre par thermo-estampage
3.3.1.3 Mise en oeuvre par thermo-pliage
3.3.2 Caractérisation des éprouvettes technologiques
3.3.2.1 Contrôle dimensionnel
3.3.2.2 Analyse du désalignement de fibres
3.3.2.3 Essai de flexion quatre points sur cornière
3.4 Conclusion
4 Modélisation et simulation du comportement du laminé lors du thermopliage
4.1 Introduction
4.2 Stratégie de la modélisation
4.2.1 Présentation de l’essai expérimental de référence
4.2.2 Description de la modélisation éléments finis
4.3 Modélisation du comportement mécanique du PEEK amorphe dans l’état caoutchoutique
4.3.1 Protocole des essais expérimentaux
4.3.2 Choix d’une loi de comportement
4.3.3 Identification des coefficients du modèle
4.3.3.1 Coefficients de la partie élastique
4.3.3.2 Coefficients de la partie plastique
4.3.4 Validation de la loi de comportement
4.4 Modélisation du mécanisme de micro-flambement
4.4.1 Présentation de la loi de comportement associée
4.4.2 Identification des coefficients du modèle
4.4.3 Validation de la loi de comportement
4.5 Simulation de la mise en forme par le procédé de thermo-pliage
4.6 Conclusion
Conclusions

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