ES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES

ES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES

L’évolution administrative de la France pendant la Révolution française

Sous l’Ancien Régime, les institutions sont d’une « extrême diversité » et leur champ d’action est compliqué. Albert Soboul liste ces institutions qu’il classe selon leur fonction1 : il existe d’abord les « institutions administratives ou financières (intendances, généralités, élections) » ; les « institutions militaires (gouvernement, commandements en chef) » ; puis « judiciaires (parlements, présidiaux, bailliages, sénéchaussées) » ; et enfin, les « institutions ecclésiastiques (provinces, diocèses) ». Le déséquilibre des pouvoirs entre ces institutions est réel. En effet, le Parlement de Paris, par exemple, recouvrait « plus d’un tiers du sol de la France », tandis que celui de Pau « ne dépassait guère 1 % ». La complexité administrative de la France persuade donc les révolutionnaires qu’il faut pratiquer un redécoupage du territoire. Cela permet d’une part d’arriver à une administration du territoire plus rationnelle et, d’autre part, d’établir une ligne de démarcation entre ce qui fait la France d’Ancien Régime et la France révolutionnaire.

En outre, il s’agit de contrebalancer l’organisation provinciale du Royaume, défendue par les « provincialistes » qui peinent à abandonner l’idée d’un Royaume découpé en « grands départements » qui « auraient pu alors coïncider avec les anciennes provinces »2. L’appel à projets est alors lancé ; il amène au fameux « rapport Thouret » le 29 septembre 1789, au sujet d’un découpage géométrique de la France. Les départements sont fixés au nombre de 81, tous scindés en carrés, mesurant « 18 lieues de côté »3, soit « 324 lieues carrées »4. Chaque département est à son tour divisé en 9 communes mesurant « 36 lieues carrées ». Celles-ci sont par la suite appelées les « districts ». Enfin, le dernier échelon administratif est le canton, également fixé au nombre de 9, faisant quant à lui « 4 lieues carrées ». Le calcul des distances est effectué en respectant la capacité de déplacement de l’époque : chaque chef-lieu de département peut être atteint « en une journée de voyage » tandis que le chef-lieu d’un district peut-être gagné en une demi-journée. Ce premier projet présente donc un partage hiérarchique aménagé en plusieurs échelons : le canton est le « dernier degré de la division » et le département en est le premier, ainsi que l’élément ayant le plus de pouvoirs administratifs. Ce découpage est fait de façon à ce que chaque circonscription ait « un nombre égal d’élus » afin de veiller à l’équilibre dans la représentation électorale.

Le principe du projet est validé par les députés, mais les critères de la formation des départements évoluent. L’idée d’un plan géométrique de la France est abandonnée au profit de frontières tracées en fonction des coutumes et des « intérêts locaux ». Dans l’Atlas de la Révolution française, il est expliqué que les nouvelles limites sont fixées selon deux normes: soit les provinces sont divisées à l’intérieur de leurs frontières – comme c’est le cas en Bretagne ou en Languedoc –, soit elles sont démantelées puis rassemblées pour former les départements – par exemple avec l’Anjou, le Maine et la Touraine. Ensuite, ce sont les députés qui « effectuent la division en districts puis en cantons ». Les municipalités sont, elles, formées ultérieurement après l’examen d’un Comité chargé « d’examiner les revendications et prendre les décisions avant qu’elles ne soient soumises au vote de l’Assemblée ». De plus, le nombre de départements n’est plus fixé à 81 : il varie « entre soixante-quinze et quatre-vingt- cinq, et les districts entre trois et neuf ».

Ces changements ne se font pas sans réactions hostiles – dans certains départements, les élus sont contraints d’instaurer un alternat entre les chefs-lieux tant la rivalité entre les villes est forte, comme il est décrété dans le Maine-et- Loire entre Saumur et Angers –, mais le découpage officiel du Royaume est tout de même accepté par les députés de la Constituante le 26 février 1790. L’architecture administrative de la France change pour former 544 districts, 4 600 localités qui possèdent « une assemblée primaire et une justice de paix ». Les administrations supérieures sont désormais mieux réparties pour ne plus être aux mains de seulement quelques capitales provinciales. Par ailleurs, les gouvernements et régimes qui se succèdent pendant 10 ans poursuivent cette révolution administrative. En 1795, les cantons sont remaniés et les districts supprimés par la nouvelle Constitution du 5 fructidor an III et son application en vendémiaire an IV5. Ils reviennent en l’an VIII sous la forme d’arrondissements. Tous ces bouleversements, même éphémères, constituent une étape essentielle à la naissance des archives départementales, puisque la législation qui crée cette nouvelle administration s’appuie sur ce nouveau découpage administratif.

La création d’une administration au sein des préfectures

Durant la décennie révolutionnaire se met en place ce qui, pendant près de 200 ans, reste le cadre légal de l’organisation hiérarchique des archives en France. Ces lois, entre autres, sont nommées par Michel Duchein les « trois lois défuntes »6, dans un article qu’il publie pour La Gazette des archives, à l’occasion de la promulgation de la loi du 3 janvier 1979, et qui abroge les anciennes.

Le premier pas qui va dans le sens de la création d’une nouvelle administration est effectué le 29 juillet 1789. À cette date, l’Assemblée Constituante décide de nommer un archiviste pour organiser ses documents, dans l’objectif d’une meilleure gestion du Royaume, car les papiers sont la mémoire du fonctionnement d’un État. L’homme qui est chargé de cette mission par les députés est Armand-Gaston Camus7. Un an plus tard, les archives de l’Assemblée deviennent les Archives nationales par le décret du 7 septembre 1790. Le texte définit cette institution de la manière suivante : « les Archives nationales sont le dépôt de tous les actes qui établissent la constitution du Royaume, son droit public, ses lois, et sa distribution en départements »8. Ces deux textes participent donc à la création d’une administration qui se veut centralisatrice, mais ils tombent rapidement en désuétude. Le texte du 7 messidor an II est considéré comme fondateur des Archives nationales. Il fait tout d’abord des Archives nationales un « dépôt central pour toute la République »9. Autrement dit, tous les dépôts éparpillés sur le territoire de la République dépendront des Archives nationales. Parallèlement à cette oeuvre centralisatrice, la loi du 7 messidor an II met en place un second grand principe : la publicité des archives.

Ces dernières sont consultables librement, selon l’article XXXVII de la loi : « Tout citoyen pourra demander dans tous les dépôts, aux jours et aux heures qui seront fixés, communication des pièces qu’ils renferment : elle leur sera donnée sans frais et sans déplacement, et avec les précautions convenables de surveillance. » Par ailleurs, des directives fortes quant au traitement des documents sont envoyées. Le « triage des titres » est ordonné : les documents comme les « titres purement féodaux »10 sont détruits ; les titres qui présentent un intérêt historique sont conservés et confiés à la Bibliothèque nationale11.

Archives et destructions

La Révolution française est une période qui a permis de grandes avancées (Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, réformes administratives…), mais elle n’existe pas non plus sans ses déboires, parmi lesquels la violence est un attribut. Celle-ci touche avant tout les hommes, pour ensuite s’attaquer à des biens matériels, portant ainsi atteinte au patrimoine. Elle passe par la destruction d’oeuvres d’art, de livres et de papiers… Par ailleurs, il faut faire la distinction entre les destructions opérées dans le cadre légal, et les celles qui sont les conséquences d’actes volontaires. Pourtant, le point commun qui rapproche ces deux phénomènes est bien la violence. Dans le premier cas, nous sommes en pleine Terreur, période durant laquelle elle fait partie intégrante du système politique ; en 1867, le marquis de Laborde parle de « saccage révolutionnaire de toutes les anciennes archives organisé législativement et continué jusqu’en 1804 »20. Cependant, soulignons que ce genre de témoignage résulte bien souvent d’une hostilité envers la Révolution. Dans le deuxième cas, les destructions sont considérées comme du « vandalisme » révolutionnaire, un néologisme qui apparaît pendant la Révolution.

Destructions et législation : retour sur la loi du 7 messidor an II La loi du 7 messidor an II est ambiguë car d’une part, elle est considérée comme fondatrice des Archives nationales. D’autre part, elle amorce un processus de destructions. Dans un premier temps, le texte définit toutes les typologies documentaires conservées aux Archives nationales, qui sont des documents administratifs permettant le bon fonctionnement du rouage de l’État comme : « […] les sceaux de la République ; les procèsverbaux des assemblées des corps législatif et exécutif ; les traités avec les autres nations […] »21. Puis, dans un second temps, après avoir ordonné le « triage des titres » par l’intermédiaire de l’article VIII, la loi produit une liste des documents qui « seront dès-àprésent anéantis »22. Les « titres purement féodaux »23 sont d’abord détruits pour effacer toute trace de l’Ancien Régime et ainsi marquer un renouveau. Une distinction est faite entre d’un côté « les chartes et manuscrits qui appartiennent à l’histoire, aux sciences et aux arts, ou qui peuvent servir à l’instruction »24 qui sont déposés à la Bibliothèque nationale et ceux remis au chef-lieu de chaque département ou district. Finalement, ce triage représente le travail essentiel de la loi.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : LES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES EN FRANCE DE 1789 JUSQU’À L’ARRIVÉE DES CHARTISTES
1 Les archives pendant la Révolution française : entre violences et mise en place d’une administration
2 La monarchie de Juillet
3 L’École des chartes et les chartistes
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ÉTAT DES SOURCES
DEUXIÈME PARTIE : LA NAISSANCE DES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DE MAINE-ET-LOIRE
INTRODUCTION
1 La constitution du dépôt d’Angers
2 Des premières lois à l’installation des archives départementales de Maine-et-Loire
3 Les premiers archivistes
CONCLUSION
CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXES
TABLE DES ANNEXES

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