Épidémiologie du trouble de la personnalité limite

Épidémiologie du trouble de la personnalité limite

Introduction

  Le trouble de la personnalité limite retient beaucoup l’ attention, tant des cliniciens que des chercheurs œuvrant en santé mentale. L’ importance que revêt ce trouble de la personnalité tire son origine à plusieurs niveaux. On note tout d’ abord une prévalence contributive dans la population générale, qui varie de 1,6 à 5,9 %. Les estimations surpassent celles d’ autres pathologies importantes en santé mentale telle la schizophrénie dont la prévalence est estimée entre 0,3 et 0,7 % (APA, 2013). Les souffrances et les impacts sur la vie des individus qui en sont atteints sont nombreux. Une perte de fonctionnement global est fréquemment observée, entrainant une dégradation de leur vie sociale et professionnelle. L’ âge moyen lors du décès est nettement inférieur à la population générale (Paris & Zweig-Frank, 2001).

  De plus, une stigmatisation survient également souvent lorsque ceux-ci ont recours à des services de santé. La compréhension de cette condition demeure un enjeu capital dans les gains qui restent à effectuer au niveau de la définition du ou des traitements les plus efficaces possibles.Le trouble de la personnalité limite représente toutefois un objet d’ étude qui offre  d’ importants défis. Plusieurs modèles ont été élaborés afin de mieux circonscrire cette problématique. À ce jour, la définition la plus largement utilisée est tirée du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) publié par l’ association américaine de psychiatrie. Une des caractéristiques centrales de ce diagnostic est la stabilité à long terme de la symptomatologie. Toutefois, le caractère stable de cette condition fait l’objet d’ une importante remise en question.

  Certaines études tendent à démontrer une importante variation de la symptomatologie sur des périodes de temps plus courtes que ce qui avait été anticipé (Lenzenweger, 2006; Paris & Zweig-Frank, 2001 ; Zanarini et al. , 2003). L’ incidence d’ une telle démonstration est notoire en termes d’ influence sur l’ évolution de la nosologie de ce trouble de santé mentale puisqu’ elle remet en question un élément pilier dans la définition des troubles de la personnalité en général et du trouble limite en particulier.

  Des efforts ont été déployés afin de trouver des indicateurs qui seraient davantage fiables afin de caractériser cette condition. Un dérivé du modèle des cinq facteurs est d’ ailleurs à l’ étude dans la plus récente version du DSM (DSM-5, version originale anglaise, APA, 2013) et est pressenti pour se juxtaposer au modèle catégoriel déjà existant ou pour s’y substituer. Ce modèle est dimensionnel, plaçant les divers traits sur un continuum. Cependant, très peu d’ études se sont penchées sur la stabilité, soit la persistance dans le temps, de ce modèle. Le présent essai, de nature exploratoire, comparera donc la stabilité dans le temps de ces deux modèles auprès de personnes qui ont été identifiées comme présentant un trouble de la personnalité limite.

Conceptualisation du trouble de la personnalité limite

  Le développement de concepts en psychologie, comme dans d’ autres domaines scientifiques, a fréquemment été un terrain fertile en termes de nouvelles idées et d’hypothèses, mais générant des visions parfois particulièrement divergentes. Le domaine de la santé mentale n’échappe certainement pas à ce constat. La nosologie appliquée à la psychopathologie a grandement muté au cours des dernièresdécennies.
Les points de vue émergeant se sont développés et affinés à partir de prémisses de base diverses. Ainsi, certains ont articulé une vision de la psychopathologie prenant sa source dans le développement de l’ appareil psychique, dans sa construction, en lien avec son environnement. Les divers courants d’inspiration psychanalytique en sont un exemple.

Courant psychanalytique

  La perspective psychanalytique a majoritairement été élaborée au cours du dernier siècle. Plusieurs prémisses ont été introduites dans l’ élaboration de cette vision. Le concept d’ inconscient en est un élément incontournable. La construction et la division subséquente de l’appareil psychique en trois instances représente également un élément constitutif particulièrement important. Le rendu de cet appareil psychique chez un individu sera donc, en bonne partie, la signature de l’ intégration progressive du Ça (qui représente l’ univers pulsionnel de l’ individu), du Moi (instance qui gère les fonctions conscientes et est l’ intermédiaire entre le monde des pulsions et le monde extérieur) et du Surmoi (qui représente l’internalisation des interdits).

  L’ élaboration de ces instances,qui constituent la genèse de la personnalité d’ un individu, culmine dans un processus de maturation qui sera plus ou moins achevé selon le dénouement des différents enjeux franchis en cours d’ évolution. La résultante finale en est une organisation ou structure spécifique de la personnalité (Tavris & Wade, 1999).Le modèle psychanalytique propose trois structures de la personnalité. Elles sont divisées comme suit: structure névrotique, structure limite et structure psychotique (Tavris & Wade, 1999). Ces organisations de la personnalité sont placées sur un continuum, partant des structures ayant atteint un meilleur niveau de maturation, aux structures portant les marques d’ une évolution difficile dans leur genèse. La structure dite névrotique se retrouve au pôle présentant le meilleur niveau de développement. La structure dite psychotique se positionne à l’ autre pôle. La structure limite de la personnalité occupe le centre du continuum. Cette dernière catégorie de structures (limite) est la plus récente dans l’ histoire du développement du modèle psychanalytique.

  L’ élaboration du concept de structure limite de la personnalité a été étayée à partir d’ observations cliniques. Des patients qui présentaient, en apparence, une structure névrotique produisaient des caractéristiques semblant appartenir au registre psychotique. L’ appellation limite (ou borderline) lui a d’ ailleurs été conférée puisqu’ à prime abord, la structure de la personnalité de ces individus semblait vaciller entre les deux précédentes structures (névrotique et psychotique). La structure de la personnalité limite a par la suite été identifiée comme étant une structure propre par la majorité des auteurs, n’ appartenant pas aux deux autres, mais se situant plutôt dans une position mitoyenne entre elles (Tavris & Wade, 1999)

Aspects longitudinaux: DSM

  La rubrique diagnostique des troubles de la personnalité est apparue récemment dans 1′ histoire du développement de la nosologie en santé mentale. Elle a été intégrée à la troisième version du DSM, soit en 1979. Le consensus, à cette époque, dépeignait  les troubles de la personnalité comme une pathologie à long cours. Plusieurs études par la suite devaient s’ adresser à cette question. Les premières ont servi à tester les nouveaux critères du DSM-III, plus précisément à fournir une idée de l’ évolution de cette nouvelle pathologie. Les premiers résultats tendaient à démontrer que cette condition évoluait de façon moins sévère que la schizophrénie, mais demeurait tout aussi chronique.L’une des études notables à ce sujet est celle conduite par McGlashan (1986). Elle porte sur une cohorte de 81 personnes ayant été re-diagnostiquées (diagnostic rétrospectif) afin de déterminer si un trouble de la personnalité limite aurait été identifié à partir des nouveaux critères du DSM-III.

  Toutes ces personnes ont été admises et traitées en psychiatrie dans un programme interne pour au moins 90 jours. Les entrevues d’ évaluation effectuées dans le cadre de cette étude ont été complétées quinze ans en moyenne après le congé psychiatrique de ces patients. L’ étendue de la période entre la sortie du centre psychiatrique et l’évaluation varie de 2 à 32 ans. Trente-huit dimensions concernant l’ évolution de la condition de ces personnes ont été analysées telles que l’abus d’ une substance, les antécédents familiaux d’ abus de substances ou l’ âge de la première hospitalisation. La conclusion de l’ auteur abonde dans la direction de la persistance du syndrome à long cours. Il dépeint donc le trouble de la personnalité limite  comme une condition chronique et relativement stable dans le temps. Une nuance est toutefois apportée en ce qui a trait à la sévérité de l’ impact de la pathologie sur les individus en fonction de l’ âge. Le graphique qui en découle présente la forme d’ un « U » inversé. Une amélioration moyenne de la condition des individus de la cohorte est rapportée débutant dans la troisième décennie de vie de ceux-ci. Puis, une certaine détérioration est notée, toujours en moyenne, vers la cinquième décennie. L’ expérience clinique suggère toutefois une plus grande variabilité dans la persistance ou non des éléments cliniques.

  Certains patients tendent à s’améliorer,considérablement et d’ autres demeureront stables au niveau de la manifestation de leur symptomatologie. Des études subséquentes tendent à démontrer cette variabilité. Ainsi, une étude de Paris et al. (1987) a examiné l’ évolution de la symptomatologie d’ un échantillon de patients présentant un trouble de la personnalité limite selon les critères du DSM. L’ auteur a conduit une étude rétrospective sur un échantillon de patients recevant des services externes de psychiatrie (patients vivant dans la communauté). Les conclusions révèlent que 75 % des patients qUI avaient été diagnostiqués initialement comme présentant un trouble de la personnalité limite ne présentaient plus l’ensemble des critères nécessaires au diagnostic quinze ans en moyenne après cette évaluation initiale.

Aspects longitudinaux: théorie des cinq facteurs

  Peu d’ études s’ adressent aux aspects longitudinaux du modèle des cinq facteurs et ces études présentent des conclusions qui ne convergent pas toujours. Ainsi, bien que les auteurs s’ entendent sur la présence du facteur N (névrose) comme indicateur de la présence d’ un trouble de la personnalité limite, certains de ces auteurs divergent quant à l’ évolution de la présence de ce facteur. Hopwood et al. (2009) prétendent que le facteur N (névrose) devrait effectivement se retrouver chez les individus présentant un trouble de la personnalité limite mais que ce facteur devrait décroitre avec les années, ce qui survient dans l’ étude qu’ il présente. Toutefois, ces résultats ne peuvent être répliqués dans une étude subséquente du même auteur (Hopwood & Zanarini, 2010). Deux autres études longitudinales tentent d’ éclaircir l’ évolution de la présence des traits chez une population non clinique.

  Soto et John (2012) ont utilisé deux échantillons de participants afin de démontrer l’ évolution des différents facteurs avec l’ âge. Leur premier échantillon est composé de 125 femmes. Elles ont été recrutées alors qu’ elles participaient à un parcours académique (Mills College, Oakland, Californie). La première évaluation est survenue alors qu’ elles étaient âgées entre 20 et 23 ans, puis ,entre 25 et 29 ans, entre 42 et 47 ans, entre 50 et 55 ans et finalement entre 60 et 64 ans.Le second échantillon était composé de 601 participants, âgés entre 20 et 64 ans. Ce second échantillon est composé de femmes à 58 %. Le modèle statistique utilisé englobe les deux échantillons. Une première analyse a démontré que les changements sur le plan des traits ont été similaires dans les deux groupes. Ainsi, les traits de conscience (C) et d’ agréabilité (A) augmentent de façon significative avec l’âge. En revanche, les traits d’ extraversion (E), d’ ouverture à l’expérience (0) et de névrose (N) n’ ont pas démontré de changements significatifs avec l’ âge.

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Table des matières

Sommaire
Liste des tableaux
Remerciements
Introduction 
Contexte théorique
Conceptualisation du trouble de la personnalité limite
Courant psychanalytique
Approche catégorielle
Épidémiologie du trouble de la personnalité limite et problématiques associées
Mortalité précoce
Traits de caractère et tempéraments
Le modèle des cinq facteurs
Le modèle de traits et tempéraments de Cloninger
Aspects longitudinaux
Aspects longitudinaux: DSM
Aspects longitudinaux: théorie des cinq facteurs
Pertinence et objectif de l’essai
Méthode
Participantes
Instruments de mesure
PDQ-4
NEO-PI-R
Déroulement
Résultats
Présentation des résultats
Résultats au PDQ-4
Résultats au NEO-PI-R
Discussion
Synthèse des résultats par participante
Participante 1
Participante 2
Participante 3
Participante 4
Stabilité des deux modèles
Modèle catégoriel du DSM
Modèle des cinq facteurs
Implications en clinique et en recherche
Forces et limites du présent essai
Conclusion
Référence

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